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LA GESTION DES DÉCHETS URBAINS

Ottawa * Le Caire * Dakar * Montevideo * Nairobi * New Delhi * Singapour

Le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) croit en un monde durable et équitable. Le CRDI finance les chercheurs des pays en développement qui aident les peuples du Sud à trouver des solutions adaptées à leurs problèmes. Il maintient des réseaux d'information et d'échange qui permettent aux Canadiens et à leurs partenaires du monde entier de partager leurs connaissances et d' améliorer ainsi leur destin.

Les Éditions du CRDI publient les résultats de travaux de recherche et d'études sur des questions mondiales et régionales intéressant le développement durable et équitable. Les Éditions du CRDI enrichissent les connaissances sur l' environnement et favorisent ainsi une plus grande compréhension et une plus grande équité dans le monde. Les publications du CROI sont vendues au siège de l'organisation à Ottawa (Canada) et par des agents et des distributeurs en divers points du globe. Le catalogue est accessible à :

http://www.idrc.ca/books/findex.html.

KARTHALA sur Internet : http://www.karthala.com
Paiement sécurisé

Couverture : « La vie moderne », Tableau de Blaise Bang, dans Les
peintres de l'estuaire
, Nicolas Bissek, Karthala, 1999.

© Éditions KARTHALA, et CRDI, 2001
(KARTHALA) : ISBN : 2-84586-147-8
(CRDI) : ISBN : 0-88936-927-5

SOUS LA DIRECTION DE
Adepoju G. Onibokun

La gestion des déchets urbains

Des solutions pour l'Afrique

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Données de catalogue
avant publication de la Bibliothèque nationale du Canada

Avant-propos

Cet ouvrage propose les résultats de la composante africaine d'un projet mondial sur les villes durables. En 1993, il a reçu l' aide d'un fonds limité établi dans le cadre du programme d' activités spéciales du Centre de recherches pour le développement international (CRDI) du Canada. A l'époque, les spécialistes de programme étaient d'avis que ce projet permettrait à un réseau étendu et bien coordonné de chercheurs d'obtenir un financement modeste pour mener, sous la direction de spécialistes d'établissements renommés, des recherches de haute qualité sur des questions sociales, environnementales et économiques prioritaires en milieu urbain en vue d'assurer la gestion plus durable des villes du Sud. Le lecteur constatera sans doute que cet objectif a été atteint. Surtout, il conviendra, nous l'espérons, que La gestion des déchets urbains représente une contribution remarquable aux connaissances sur la gouvernance et la gestion des déchets dans les grands centres urbains d'Afrique.

Les auteurs sont des experts provenant d'organismes qui s'occupent de gestion des déchets. Ils ont été conseillers ou directeurs de bureaux d'organismes de l'Organisation des Nations unies, d'organisations non gouvernementales de recherche, de services municipaux, d'établissements universitaires et d'instituts en Afrique. La proposition et le projet ont été élaborés à la suite de discussions entre les membres de l'équipe et un groupe élargi d'experts du monde entier rassemblés sous l'égide de la Global Urban Research Initiative, coordonnée par Richard Stren de l'Université de Toronto.

Coordonnée de main de maître par Adepoju G. Onibokun, directeur général du Centre for African Settlement Studies and Development du Nigeria, cette équipe s'est donné la tâche ardue d'étudier en profondeur un service urbain souvent négligé et mal géré : la gestion des déchets. La documentation en la matière était pauvre, et les chercheurs ont dû consulter beaucoup de documents inédits ou à faible tirage. L'équipe avait pour objectif d'étudier la gestion des déchets sous l'angle de la gouvernance, ce qui compliquait encore plus leur travail. A l'époque, cette démarche était tout à fait nouvelle ; aujourd'hui, elle demeure très exigeante et novatrice en raison du genre de données qu'elle nécessite, des liens qu'elle doit étudier et des recommandations auxquelles elle est censée aboutir.

La gestion des déchets en Afrique met en lumière de nouvelles orientations en matière de politiques et de technologie qui s'insèrent parfaitement dans les activités de recherche sur le développement urbain dans le Sud auxquelles le CRDI s'intéresse actuellement. Dans un certain nombre de secteurs urbains (eau, logement, services publics, gestion des espaces libres, etc.), il est vital d'améliorer la gouvernance pour assurer une prestation plus efficace des services. Comme le montre cet ouvrage, on peut parvenir à une meilleure gouvernance en assurant l'accès équitable aux ressources et aux services, en éliminant la confusion et les différends relatifs au partage des responsabilités de même que les structures décisionnelles descendantes, et en améliorant l'obligation de rendre compte et la transparence. Pour être durable, l'utilisation des ressources en milieu urbain doit s'accompagner d'une récupération accrue des déchets et sous-produits. Ce faisant, les villes seront moins tributaires des régions rurales, et la vie urbaine sera plus tolérable. L'utilisation plus équitable, viable et durable des ressources urbaines passe nécessairement par une meilleure gouvernance.

Par ailleurs, les expériences positives et les atouts des villes étudiées témoignent de la possibilité bien réelle d'intensifier les échanges et la coopération entre les pays africains. Une participation accrue de la société, la décentralisation de l'administration, l'adoption d'une réglementation et de technologies adaptées à la conjoncture locale et une gestion plus intégrée des ressources urbaines permettraient de réduire les coûts et d'augmenter le revenu des populations urbaines, qui s'appauvrissent constamment, et des administrations urbaines accablées par les déficits.

Luc J.A. MOUGEOT

Spécialiste de programme principal
Centre de recherches pour le développement international

Ottawa, Canada

Préface

Cet ouvrage est le fruit d'une étude comparative de la gouvernance et de la gestion des déchets en Afrique menée par quatre équipes de chercheurs dans quatre grandes villes africaines : Abidjan, en Côte d'Ivoire, pays francophone d'Afrique occidentale ; Ibadan, au Nigeria, pays anglophone d'Afrique occidentale ; Dar es-Salaam, en Tanzanie, pays d'Afrique orientale et Johannesburg, en Afrique du Sud. Cette étude a été rendue possible grâce à une subvention du Centre de recherches pour le développement international (CRDI) du Canada. Les coordonnateurs sont membres de l'African Research Network for Urban Management, qui regroupe depuis plus de dix ans la plupart des principaux chercheurs et établissements spécialisés en recherche urbaine du continent africain.

Cet ouvrage tente d'insérer les systèmes de gestion des déchets d'Afrique dans le contexte de la gouvernance. Il fait avancer le débat sur la gouvernance en vue d'approfondir notre compréhension des problèmes urbains en Afrique. Il compte six chapitres. Le chapitre 1 propose une vue d'ensemble du débat sur la gouvernance en Afrique, en traitant de différents concepts qui entourent cette notion. Il soutient que, pour faire progresser le débat, il faut rendre ces concepts opérationnels en les appliquant à un aspect précis de la gestion urbaine en Afrique, en l'occurrence les déchets urbains. Ce chapitre traite également de la portée et des objectifs des études menées dans les villes africaines choisies et de la méthodologie que les équipes de recherche ont adoptée. Les chapitres 2 à 5 analysent les systèmes et démarches de gestion des déchets dans les quatre villes africaines en question. Le chapitre 6 propose une synthèse analytique des principaux thèmes liés à la gouvernance qui sont soulevés dans le chapitre 1. Il évalue l'efficacité de différents modes de gestion (par exemple, publique, privée et communautaire) des déchets urbains relevés dans les villes étudiées, d'un point de vue politique, sociologique, économique et environnemental. Ce chapitre propose également des recommandations relatives à la gestion des déchets urbains en Afrique en s'appuyant sur l'expérience des quatre villes.

Il serait impossible de mentionner toutes les personnes qui ont contribué à notre étude. Je remercie infiniment MM. Koffi Attahi, Mark Swilling et Lusugga Kironde, qui ont collaboré avec moi à sa coordination et se sont montrés toujours disposés à participer à des réunions, à mettre à jour les données et à réviser les ébauches. Merci également au CROI, éditeur de cet ouvrage, pour son aide financière. Le CRDI contribue considérablement au développement des ressources humaines et à la création de capacités en Afrique en appuyant la tenue de recherches. Qu'il suffise à cet égard de mentionner le Centre for African Settlement Studies and Development. Le CRDI accorde au Centre et à d'autres initiatives un appui très apprécié. Je tiens également à remercier Richard Stren de l'Université de Toronto, coordonnateur de la Global Urban Research Initiative. M. Stren a formulé des commentaires utiles sur la méthodologie de l'étude et a organisé la présentation de la première ébauche à Mexico et à Istanbul à de nombreux chercheurs, décideurs et organismes donateurs.

Nous espérons que cette publication donnera lieu à des mesures concertées en vue de régler le grave problème de la gestion des déchets urbains en Afrique, et qu'elle nous permettra d'approfondir notre compréhension des enjeux et d'améliorer la qualité de vie de l'environnement urbain sur le continent africain.

A.G. Onibokun

1
La gouvernance et la gestion
des déchets en Afrique

A.G. ONIBOKUN ET A.J KUMUYI

Le processus d'urbanisation en Afrique

Toutes les sociétés cherchent à accroître leur savoir, leur population et leur richesse. Cependant, la croissance finit toujours par atteindre un plafond où elle devient impossible à gérer, voire improductive. Il arrive que la richesse et la production diminuent avant même d'atteindre ce plafond. Ce phénomène peut découler d'une mauvaise gestion, de programmes mal conçus, d'installations inadéquates, etc. Les effets positifs et négatifs du processus d'urbanisation en Afrique en témoignent de façon éloquente.

L'urbanisation apporte à la société un nouveau mode de vie moderne, lui ouvre de nouveaux horizons, lui procure de nouvelles compétences et l'engage dans un processus d'apprentissage. Cependant, une urbanisation galopante pose de graves problèmes de gouvernance : les facteurs d'optimisation s'affaiblissent et les capacités institutionnelles deviennent insuffisantes, ce qui ne fait qu'exacerber les problèmes de l'urbanisation.

Sur le continent africain, l'urbanisation n'est pas un phénomène entièrement nouveau, comme en témoigne l'existence de centres tels Addis-Abeba, Le Caire, Kano et Tombouctou. Elle s'y déroule toutefois à un rythme accéléré. L'une des régions les moins urbanisées du monde, l'Afrique, enregistre pourtant les taux d'urbanisation les plus élevés. Par exemple, entre 1990 et 1992, l'Afrique et l'Asie ont affiché un taux de 4,9 % et de 4,2 % respectivement, alors que l'Europe et l'Amérique du Nord ne se sont urbanisées qu' àun taux de 0,7 % et 1 % respectivement (Nations unies, 1995). En outre, alors que seules deux villes d'Afrique (Le Caire et Lagos) avaient franchi le cap d'un million d'habitants en 1950, ce nombre était passé à huit en 1970, puis à 24 en 1990. On prévoit qu' àla fin du siècle, deux de ces villes compteront plus de 10 millions d'habitants.

L'observation de certaines villes africaines révèle un taux de croissance de 33 % au Swaziland, dont la population urbaine n'était que de 1 % en 1950. Ce taux devrait passer à 63 % d' ici 2025. De même, le taux de croissance de la population urbaine de Mauritanie, qui s'élevait à 3 % en 1950, pourrait passer à 70 % en 2025, et la population de la plupart des grandes villes a quadruplé entre 1950 et le milieu des années 80. Dans certaines villes, notamment Abidjan, Dar es-Salaam, Khartoum, Lagos et Nairobi, la population a plus que sextuplé en 40 ans.

Le problème de la gestion des déchets

L'urbanisation rapide et sauvage des pays d'Afrique a causé la détérioration de l'environnement. L'une de ses conséquences les plus inquiétantes dans le monde en développement, et particulièrement en Afrique, réside d'ailleurs dans les problèmes de gestion des déchets solides, liquides et toxiques. Des incidents qui ont eu lieu récemment dans les grands centres urbains d'Afrique montrent que le problème de la gestion des déchets a atteint des proportions telles que les mesures prises par les différents niveaux d'administration et les spécialistes se sont révélées infructueuses. Il suffit de traverser n'importe quelle ville africaine pour constater les manifestations de ce problème : amoncellements de déchets, détritus le long des routes, ruisseaux bloqués, sites d'enfouissement menaçant la santé dans les secteurs résidentiels, et élimination inadéquate des déchets toxiques.

Le taux élevé d'urbanisation dans les pays africains entraîne une accumulation rapide de déchets. Les changements sociaux et économiques qu'ont subis la plupart des pays africains depuis les années 60 ont également entraîné une hausse de la production de déchets par personne. Par exemple, la Nigerian Environmental Study/Action Team estime que le Nigeria produit 20 kilos de déchets solides par personne par an (NEST, 1991). Avec une population estimée à plus de 100 millions d'habitants, cela donne 2,2 millions de tonnes par an. Dans certaines villes nigérianes, on relève une hausse en flèche de la production de déchets. A Lagos, celle-ci s'établissait à environ 625 000 tonnes en 1982. Ce chiffre, selon le ministère fédéral du Logement et de l'Environnement, devrait passer à998 000 tonnes d'ici l'an 2000. A Kaduna, la production de déchets devrait passer de 258 000 à 431 000 tonnes au cours de la même période. Ces données témoignent de l'urgence d'assurer des services de gestion adéquats, que généralement l'on ne trouve pas dans les villes africaines.

Ce n'est pas la quantité de déchets qui pose problème, mais plutôt l'incapacité des gouvernements et des sociétés d'élimination des déchets de s'en débarrasser. La situation qui prévaut à Nairobi en témoigne. Malgré une hausse annuelle d'au moins 6 % de la population entre 1977 et 1983, la quantité de déchets enlevés a chuté, passant de 202 229 tonnes en 1977 à 159 974 en 1983, une baisse de 21 % sur six ans. Ainsi, à la fin des années 70 et au début des années 80, l'organisme municipal responsable de l'enlèvement des ordures a enlevé en moyenne près de 10% d'ordures de moins par personne par an (Stren et White, 1989). On a observé une situation semblable à Malindi (une agglomération secondaire du Kenya), où la croissance de la population représente une importante contrainte. En 1991, environ 36 000 tonnes de déchets solides y ont été produits, mais le service municipal d'enlèvement n'en a pas transporté plus de 7 300 tonnes vers les décharges.

Le service d'enlèvement des déchets assuré par le conseil municipal de Dar es-Salaam éprouve des difficultés semblables (Stren et White, 1989). Dans cette ville, pas plus de 24 % des déchets produits tous les jours sont enlevés. A Kinshasa, l'enlèvement des déchets ménagers n'est assuré que dans quelques zones résidentielles. Dans le reste de la ville, les déchets sont déposés sur la route ou dans des sites illégaux, ou sont déversés dans les égouts ou enterrés dans des décharges à ciel ouvert (Hardoy et Satterwaite, 1992).

L'incidence des problèmes d'urbanisation sur la gouvernance

Les problèmes qui découlent de l'urbanisation rapide en Afrique menacent la gouvernance des centres urbains. Les difficultés variées et complexes que connaissent les villes et villages d'Afrique, et particulièrement les problèmes liés aux déchets urbains et à l'insuffisance de l'infrastructure et des services sociaux, remettent en question la capacité de gouvernance des pays africains.

Qu'entend-on par gouvernance? Il existe un nombre croissant de publications et de documents inédits sur les « problèmes de gouvernance ». La gouvernance a trait au rôle de l'État dans la société, à la gestion, bonne ou mauvaise, des activités socio-économiques dans les secteurs public, privé et communautaire, ainsi qu'au degréde participation de la société civile à la gestion de la société dans son ensemble. Pour la Banque mondiale, la gouvernance représente la manière dont le pouvoir s'exerce dans la gestion des ressources économiques et sociales d'un pays en vue de son développement (Banque mondiale, 1992). Elle peut être bonne ou mauvaise, selon la façon dont ce pouvoir est exercé. La bonne gouvernance peut être définie comme la présence d'un bon gouvernement dont la direction est compétente et légitime, dont le pouvoir et l'autorité ont un fondement légal (un mandat issu de la volonté de la population), qui a une vision d'avenir et un programme sociopolitique progressiste que la population juge acceptable et qui est mis en œuvre avec honnêteté, transparence et responsabilité. Pour exercer une bonne gouvernance, le gouvernement doit tirer sa légitimité des citoyens, envers qui il a des comptes à rendre.

Le discernement, la transparence, la responsabilité, la légitimité, la crédibilité, la prévisibilité et la fiabilité, combinées à la confiance et à la stabilité de la société, représentent les aspects marquants d'une bonne gouvernance. Celle-ci nécessite également des institutions efficaces et responsables, le respect de principes démocratiques, un processus électoral fiable, un gouvernement représentatif et responsable et des rapports ouverts et légitimes entre la société civile et l'état Une bonne gouvernance donne lieu à l'institutionnalisation des politiques, programmes et stratégies de gestion urbaine qui permettent d'éliminer ou d'atténuer les problèmes qu'entraîne l'urbanisation rapide. Dans le contexte africain, il faut donc déterminer dans quelle mesure la gouvernance est adaptée aux phénomènes d'urbanisation et de croissance des villes. Le débat sur la gouvernance se limite souvent à des généralités (souvent abstraites). Il est temps d'opérationnaliser certains des nouveaux concepts établis en s'appuyant sur un ensemble de repères concrets.

La documentation et les connaissances pratiques sur les aspects techniques, administratives et institutionnelles de la gestion des déchets en Afrique ne cessent de s'approfondir. Cependant, les cadres d'action et les stratégies de mise en œuvre doivent aller de pair avec de nouvelles formes de gouvernance en vue d'améliorer l'efficacité et l'efficience et de favoriser la participation de la population à la prestation des services. On relève un intérêt croissant à l'égard des partenariats entre le secteur public, le secteur privé et la collectivité, mais cet intérêt procède surtout de questions techniques ou financières, plutôt que des aspects politiques, sociologiques et environnementaux en cause. Les démarches technofinancières n'ont pas débouché sur les méthodes organisationnelles et institutionnelles nécessaires pour permettre aux citoyens de comprendre le service et d'y participer pleinement, car elles sont dénuées de cadre conceptuel et stratégique clair.

Nous sommes d'avis que le débat sur la gouvernance ne s'intéresse pas suffisamment aux problèmes concrets touchant la prestation des services, et que les discussions sur l'amélioration de la gouvernance dans le secteur de la gestion des déchets (et même dans l'ensemble du secteur des services) sont dépourvues du cadre conceptuel et stratégique nécessaire pour habiliter la population aux plans organisationnel et institutionnel.

Le cadre conceptuel

Une étude de la gouvernance et des déchets urbains doit porter non seulement sur les structures officielles du gouvernement mais également sur les structures informelles créées par la société comme les institutions, associations et autres organismes communautaires, les rapports entre eux ainsi que la collaboration entre les structures officielles et informelles pour la collecte, le transport et l'élimination des déchets. Une telle étude comporterait quatre volets :

– relations intergouvernementales ;

– dotations financières ;

– activités de planification ;

– participation de la population.

Une prestation efficiente et efficace des services repose sur plusieurs facteurs, particulièrement l'efficience de la gestion et de l'organisation, la responsabilité, la légitimité, l'adaptation aux besoins du public, la transparence du processus décisionnel et la multiplicité des choix relatifs aux politiques.

De nombreux facteurs ont été invoqués comme causes de la situation actuelle dans les villes africaines, mais il reste aux chercheurs à découvrir la véritable source des problèmes et comment y faire face. L'observation des villes et pays d'Afrique révèle l'hétérogénéité de ce continent, où de nombreux systèmes ont été mis en place pour composer avec les problèmes relatifs aux déchets. Seuls quelques-uns de ces systèmes ont connu un certain succès. Une analyse montre également que les villes des pays francophones sont plus propres que celles des pays anglophones, et que parmi ces dernières, certaines réussissent mieux que d'autres à gérer leurs déchets. La compréhension des facteurs qui influent sur l'efficacité des divers systèmes africains de gestion des déchets pourrait se révéler utile pour ces pays.

L'étude

Les chercheurs de l'African Research Network for Urban Management (ARNUM) ont jugé bon d'examiner les problèmes et les défis relatifs à la gestion des déchets solides en Afrique, en vue de distinguer les initiatives fructueuses des mesures qui ont connu l'échec et de formuler des recommandations concernant la création de systèmes de gestion qui permettraient de régler le problème de la gestion des déchets urbains en Afrique. A notre avis, toutefois, il serait irréaliste d'examiner ce problème sans nous pencher sur la question de la gouvernance.

Notre définition de la gouvernance comprend la transparence, la responsabilité, la crédibilité et la stabilité du gouvernement ; elle souligne également la nécessité de former des partenariats entre les secteurs public, privé et communautaire aux fins de la gestion urbaine. Il s'agit de savoir dans quelle mesure ces aspects sont pris en compte dans la gestion des déchets urbains en Afrique. Pour le déterminer, il faut parvenir àune meilleure compréhension des liens entre la gouvernance et la gestion des déchets dans les villes africaines. Ainsi, en 1994, le Centre de recherches pour le développement international a décidé de financer une recherche comparative sur les systèmes de gestion des déchets en Afrique. Ce projet devait être mis en place par différents chercheurs de l'ARNUM, dans le cadre de la contribution de cet organisme au projet GURI (Global Urban Research Initiative). Quatre villes ont été sélectionnées pour l'étude (Abidjan, Dar es-Salaam, Ibadan et Johannesburg) et un document a été rédigé sur la gouvernance de chaque région.

Cette étude avait pour objectif de décrire, de comparer et d'évaluer les principales formes de gouvernance que les grandes villes africaines emploient dans la gestion de leurs déchets (liquides, solides, organiques, inorganiques, toxiques et non toxiques), en vue de recommander des politiques, de mieux comprendre la prestation des services en Afrique urbaine et de jeter les bases de programmes concrets. Plus précisément, ses buts étaient les suivants :

– décrire et analyser la nature et le fonctionnement des dispositions institutionnelles de gestion des déchets dans quatre villes, afin d'établir des profils de pays ;

– évaluer et comparer l'efficience et l'efficacité de divers types de partenariats entre les secteurs public, privé et communautaire aux fins de la gestion des déchets urbains dans les villes choisies d'après des critères politiques, sociologiques, économiques et environnementaux ;

– recommander des politiques au besoin pour améliorer la gestion des déchets dans certains contextes urbains ;

– approfondir la connaissance des stratégies de gouvernance visant la gestion des déchets urbains en Afrique.

Les quatre villes sélectionnées représentent des pays anglophones et franco-phones ; elles sont de différentes tailles et présentent divers types de gouvernance (tableau 1). Elles ont des antécédents coloniaux différents et représentent des sous-régions différentes du continent. Dans chaque pays, les chercheurs ont relevé le contexte institutionnel (dispositions administratives et réglementaires, exécution et prestation, financement). Ils ont caractérisé et évalué le rôle des secteurs privé et public et celui des organismes communautaires aux différentes étapes de la gestion des déchets (collecte, transport, élimination, réutilisation, etc.).

Les chercheurs ont adopté des mesures et des indicateurs de rendement pour évaluer l'efficience du système. Pour commencer, ils ont répertorié et sélectionné des indicateurs de rendement. Ensuite, ils ont interrogé des gestionnaires, certains dirigeants communautaires et des responsables des secteurs public et privé pour documenter leur point de vue sur l'efficience des modes de gouvernance actuels. Cette démarche avait pour but de déterminer les systèmes de gestion des déchets qui sont efficaces et les facteurs responsables de cette efficacité, et de recommander les systèmes qu'il serait souhaitable d'imiter, d'adapter ou d'adopter dans d'autres villes.

L'équipe de recherche s'est appuyée sur les constatations de cette étude pour recommander des politiques en vue d'améliorer la gestion des déchets dans certains contextes urbains. Elle a avant tout déterminé les systèmes ou les modes de gouvernance qui se sont révélés efficaces ou inefficaces et les raisons de cette efficacité ou inefficacité.

L'équipe de recherche a également mené ces tâches particulières :

1. Dans chaque pays, elle a examiné des rapports contenant des renseignements généraux sur le pays et des données plus précises sur la ville sélectionnée, notamment sur son emplacement, son histoire récente, l'économie, les conditions démographiques et les services publics et autres.

2. Elle a conçu et mis à l'épreuve une méthode de collecte de données auprès des institutions responsables de la gestion des déchets, et notamment de leur organigramme et de données sur le personnel, l'équipement, les lois environnementales et le financement.

3. Dans chaque ville, l'équipe de recherche a recueilli des données tirées d'études déjà effectuées sur les taux de production de déchets, leur composition, leur densité et leur volume, ainsi que sur les modes actuels de stockage, de collecte et de transport des déchets, notamment la fréquence d'enlèvement, l'efficacité de la collecte et du transport, l'acheminement et la participation des citoyens au système dans son ensemble. L'étude comprenait une évaluation des installations de traitement des déchets précisant l'emplacement et la capacité des sites d'enfouissement et abordant d'autres questions environnementales.

4. L'équipe a évalué le degré de réussite des tâches 1 à 3 et les facteurs qui y ont contribué.

5. L'équipe a formulé des recommandations de base en matière de gestion concernant les éléments nécessaires pour améliorer le modèle de chaque ville, et a précisé en quoi chaque modèle pourrait être utile dans d'autres villes, le . cas échéant.

6. Les chercheurs des quatre pays se sont réunis lors de séminaires pour déterminer leurs progrès et exposer leurs résultats. Deux réunions ont eu lieu pendant l'étude : la première à Dar es-Salaam au début des travaux pour définir et adopter la méthodologie, les formulaires, le format et les grandes lignes, et la seconde à Ibadan à la fin de l'étude pour discuter des expériences vécues sur le terrain, rédiger les rapports finaux et envisager la rédaction d'une synthèse.

La réunion régionale de GURI tenue à Mexico en 1995 et la réunion finale qui a eu lieu à Istanbul en 1996 ont également permis à l'équipe de comparer les progrès de leurs recherches dans chaque ville.

En 1996, l'ARNUM a organisé à Nairobi un séminaire international où des chercheurs, des praticiens, des organismes donateurs et des organismes de développement se sont réunis pour trois jours de débat sur la recherche urbaine en Afrique. Parmi les documents présentés à ce séminaire ont figuré les rapports de l'étude sur la gouvernance et les déchets dans quatre pays africains. Après les séminaires et les réunions, les auteurs ont modifié leurs rapports nationaux, qui sont publiés dans cet ouvrage.

Tableau 1. Gestion des déchets dans quatre villes africaines

Pays

Ville

Mode de gestion des déchets

Anglophones

Nigeria

Ibadan

État et secteur privé

Tanzanie

Dar es-Salaam

État et niveau communautaire

Afrique du Sud

Johannesburg

Niveau communautaire et secteur privé

Francophone

Côte d'Ivoire

Abidjan

État et secteur privé

2
Abidjan, Côte d'Ivoire

KOFFI ATTAHI

Le problème et ses fondements théoriques

De nos jours, les questions touchant la gestion des déchets urbains et, par extension, la planification et la gestion de l'environnement urbain comptent parmi les plus complexes auxquelles doivent répondre les gestionnaires urbains en raison de leurs effets sur la santé humaine, le développement durable et la situation financière des villes. Si la gestion des déchets dans les villes africaines apparaissait autrefois comme une activité de nature purement technique, organisationnelle et financière, on se rend compte aujourd'hui qu'elle comporte une dimension culturelle marquée et qu'elle constitue un très important levier du pouvoir.

En 1994, dans la région métropolitaine d'Abidjan, la collecte d'environ 500 000 tonnes d'ordures ménagères, sur un total d'environ 920 530 tonnes, a coûté un peu plus de 5 milliards de francs CFA, soit 61 % du budget total de la ville (tableau 1) (en 1998, 610,65 francs CFA = 1 dollar américain). A cause de l'incompétence du fournisseur de services, des crises fréquentes en matière de gestion des déchets et de la volonté flagrante ou voilée de certains de participer à la gestion des importantes ressources financières en cause, un certain nombre de nouveaux concurrents cherchent à exercer de l'influence sur la gestion des déchets à Abidjan. Ce processus s'est donc considérablement politisé, allant même jusqu'à l'instauration d'un régime de gestion paternaliste qui supervise à la fois les réseaux visibles et cachés au détriment de la qualité des services. Au fil des ans, l'arrivée de nouveaux acteurs a compliqué l'organisation de la gestion des déchets. Il existe aujourd'hui un régime de gestion hybride ; on le dit fondé sur la privatisation, la décentralisation et la recentralisation, mais il confère à des acteurs des sociétés civile et politique des responsabilités vagues et souvent controversées, et repose dans bien des cas sur des rapports non officiels et non contractuels.

Dans ce contexte, il serait peine perdue d'analyser le problème de la gestion des déchets de la manière classique, en se concentrant sur la description des structures, des moyens et des résultats. La démarche fondée sur la gouvernance semble appropriée car elle s'appuie sur une analyse politique des enjeux, des rapports et des stratégies des différents acteurs du régime de gestion, et applique à l'évaluation du rendement des critères tels que la transparence, l'efficience, l'efficacité, la faisabilité et la participation responsable.

Précisons que cette étude ne porte que sur trois types de déchets urbains : les déchets liquides, solides et industriels. La gestion des déchets liquides représente l'évacuation et l'épuration des eaux usées d'origine domestique : les eaux grises et les eaux-vannes (fèces et urine) ainsi que les eaux usées industrielles (tableau 2). Le contrat relatif à l'enlèvement des ordures ménagères divise les déchets urbains solides en trois catégories :

– tous les types d'ordures ménagères, les cendres, les morceaux de verre ou de vaisselle et les balayures et résidus déposés dans les poubelles individuelles ou collectives installées devant les résidences ou le long des voies publiques ;

– les déchets provenant des écoles, des casernes, des hôpitaux, des prisons et des édifices publics, rassemblés à des endroits désignés dans les contenants prescrits ;

– les objets jetés dans les endroits publics et les carcasses de petits animaux.

Selon le Service d'inspection des installations classées du ministère de l'Environnement, qui est responsable de la politique de gestion des déchets industriels, il existe deux types de déchets industriels :

– les déchets industriels équivalents aux ordures ménagères : papier, plastique, déchets de cantine, tombées de sciage, etc. ;

– les déchets dangereux ou toxiques, y compris les hydrocarbures, les produits phytosanitaires, les catalyseurs utilisés dans l'industrie du pétrole, les biphényles polychlorés, les oxydes de chlore, le plomb et l'arsenic employés dans le traitement des métaux, et le cyanure.

Une bonne étude de référence de la gestion des déchets urbains relève quatre niveaux d'intervention : planification, budgétisation, exécution et contrôle. Notre analyse de chacune des trois principales catégories de déchets portera à tour de rôle sur les sujets suivants :

– un bref historique de la gestion des déchets liquides, solides et industriels ;

– les éléments des politiques sectorielles et des mécanismes de gestion ;

– les acteurs et leurs responsabilités, la perception et l'exercice de ces responsabilités, les luttes d'influence, les aspects qui causent des frictions et leur incidence sur les services, les ressources et les résultats ;

– une évaluation du système de gestion en place et des recommandations.

Avant de traiter de l'étude en tant que telle, il serait bon de la placer dans son contexte.

La ville d'Abidjan

Données et contraintes physiques

Abidjan, capitale économique de la Côte d'Ivoire, est située au sud du pays sur l'océan Atlantique et surplombe la lagune Ébrié. L'emplacement de la ville présente quatre éléments morphologiques distincts : la zone côtière, la péninsule du Petit-Bassam, la lagune Ébrié et les plateaux qui s'enchaînent du sud au nord sur environ 30 kilomètres.

La zone côtière est un secteur bas et sablonneux séparé de la mer par une plage arrosée de temps à autre par d'énormes et dangereuses vagues. Très marécageuse, elle se compose de dépôts de sable de la mer. Aujourd'hui, elle dessert Vridi et Port-Bouët, villes de banlieue, de même que l'aéroport. Son aménagement a nécessité de grands travaux d'assainissement et de drainage. La péninsule Petit-Bassam se compose de sols alluviaux très marécageux. Dans cette zone basse, où il y a souvent de l'eau à moins d'un mètre sous le sol, se trouvent les localités de banlieue de Treichville, Marcory et Koumassi. Comme il s'y produit souvent des inondations par temps pluvieux, d'importants travaux d'aménagement et de drainage y ont été effectués. Malgré ces efforts, le risque de propagation de maladies d'origine hydrique demeure très élevé.

La lagune divise la ville en deux zones (nord et sud), reliées par deux ponts. C'est un vaste plan d'eau saumâtre au fond sablonneux et boueux de profondeur variable, relié à la mer par le canal de Vridi depuis 1951. Destination naturelle de la plus grande partie des déchets liquides de la ville, la lagune est très polluée. Ses deux baies, situées dans les zones industrielles de Brietry et Koumassi, reçoivent la plus forte proportion d'effluents et sont relativement isolées du reste du réseau lagunaire. Elles présentent un degré très élevé de pollution et dégagent des odeurs nauséabondes.

La zone du plateau, qui se démarque par sa hauteur, comporte deux caractéristiques : le bas plateau qui borde la lagune, où l'on trouve les localités de banlieue Cocody, Yopougon et Riviera, et le haut plateau, qui s'élève à 110 mètres, et où ont été aménagés Adjamé et Abobo. La zone du plateau, mieux aérée, procure un environnement plus sain.

Le climat d'Abidjan comporte quatre saisons : deux saisons sèches (de décembre à mars, puis en août et septembre) et deux saisons des pluies (d'avril à juillet puis en octobre et novembre). Les températures varient très peu, oscillant entre un maximum de 32°C en avril et un minimum de 28°C en juillet. Abidjan se trouve dans la zone la plus humide de la Côte d'Ivoire, qui reçoit en moyenne 2 800 mm de pluie par an. L'humidité relative, très élevée, dépasse en moyenne 80%.

Territoire, population et données socio-économiques

La ville d'Abidjan, fondée vers 1912 sur la voie ferrée menant au Niger, a connu une croissance spectaculaire que l'on peut diviser en trois étapes :

– pendant la première étape, qui s'est échelonnée de 1912 à 1960, Abidjan était une ville coloniale et un port desservant le vieux centre (comprenant Treichville, Marcory, Adjamé et le Plateau). Elle affichait un taux moyen de croissance de 12% ;

– pendant la deuxième étape, lors de laquelle elle est devenue la capitale politique et économique du nouvel État de la Côte d'Ivoire, Abidjan a consolidé et modernisé son infrastructure, entrepris son expansion et connu un taux moyen de croissance de Il % entre 1960 et 1980 ;

– la troisième étape, celle de la crise économique qui a commencé à la fin des années 70, a vu l'arrêt soudain de l'expansion d'Abidjan tant au plan de la superficie que de la population. Le taux moyen de croissance annuelle s'établissait à 4 %.

La métropole s'étend en demi-cercle sur un rayon de 30 kilomètres à partir de la zone riveraine, sur une superficie de 57 735 hectares.

L'atelier d'urbanisme d'Abidjan, dans son atlas sur l'occupation du territoire (DCGTx et AUVA, 1990), distingue cinq types d'utilisation du sol : espaces naturels, terres urbaines, peuplements humaines, zones d'activité humaine et installations.

– Les espaces naturels occupent 36 003 hectares, soit 62 % de la superficie de la métropole, et englobe 8 981 hectares de la lagune et 22 302 hectares d'espace non aménagé (buissons, terrains boisés, forêts, plantations, berges et autres espaces naturels). Les terres réservées à des fins agricoles (agriculture extensive) représentent plus de la moitié des espaces naturels, soit 56,99 %.

– Les terres urbaines occupent 3 396 hectares ou 5,88 % de la métropole et se divisent en trois catégories distinctes : terrains divisés mais non aménagés, terrains aménagés pour l'établissement humain et terrains aménagés pour l'activité économique, notamment dans les zones industrielles.

– Les peuplements humains occupent 5 652 hectares, soit environ le dixième de la superficie de la ville, et se divisent en quatre catégories :

• La plupart des citoyens d'Abidjan (53,7 %) habitent dans des complexes domiciliaires qui occupent 40 % des terres habitées ; 90 % de ces logements se trouvent dans les quartiers densément peuplés d'Abobo, Adjamé, Koumassi et Treichville.

• Les ménages individuels occupent également 40 % des terres habitées, dans des maisons individuelles éparses (19,7 %) et regroupées (20,3 %).

• Les immeubles à logements occupent 6,3 % des terres habitées ; 4 % de ces logements ont été construits par des sociétés immobilières et 2 % par des particuliers.

• Les logements non autorisés occupent 13 % des terres habitées ; ils abritent 16,4 % de la population urbaine.

Au total, 15,2 % du secteur résidentiel, qui s'est développé sur des terres non aménagées, est difficile d'accès en automobile et est desservi par les réseaux existants.

– Les activités humaines occupent 1 778 hectares, soit 4,9 % de la superficie de la ville ; 67 % de cet espace est réservé à des activités artisanales et commerciales de nature précaire.

– Les installations, à l'exclusion des réseaux routiers, occupent 2825 hectares ; les routes, qui représentent environ le cinquième de la superficie d'Abidjan, forment un réseau de 2 042 kilomètres, dont 272 kilomètres de routes principales bitumées, 940 kilomètres de routes secondaires bitumées et 830 kilomètres de chemins de terre.

Abidjan compte actuellement 2,5 millions d'habitants qui demeurent dans environ 375 000 logements. La population urbaine est très jeune ; 51 % est âgée de moins de 20 ans et 43 % de 20 à 45 ans. Selon le dernier recensement de la population et des peuplements humains (GOCI, 1980), 3,2 % de la population habitait dans des maisons individuelles (en groupes ou en quartiers), 26,7 % dans des immeubles d'habitation, 53,7 % dans des complexes domiciliaires et 16,4 % dans des peuplements non autorisés ; 72 % des enfants fréquentaient l'école à plein temps, et la population se composait surtout de personnes récemment urbanisées. Le revenu mensuel moyen des ménages s'élevait à 76 920 francs CFA.

Structures de gestion de la ville

Depuis 1980, dans le cadre des initiatives de décentralisation, Abidjan est gérée par dix districts de base, qui sont divisés en quartiers et en 112 secteurs. Les maires et les conseillers municipaux élus dans les différents districts doivent gérer leurs localités et exercer leur autorité conformément à la loi sur la décentralisation. Cette même loi, qui établit également la ville d'Abidjan, a conféré à la structure supramunicipale la responsabilité de certains services considérés comme « urbains » ou « régionaux » qui relevaient de ces districts. Parmi ces services, relevons l'éclairage public ; l'enlèvement des ordures ménagères, l'hygiène publique et le drainage ; la voirie ; les parcs et jardins ; les abattoirs ; les foires et marchés ; les cimetières ; les routes de district ; l'application des règlements de zonage, l'urbanisme et le développement urbain ; la sélection des noms de routes, de places publiques et d'immeubles.

Bien qu'en théorie ces services urbains relèvent de la ville d'Abidjan, l'exercice de cette autorité de même que la réglementation des marchés incombent depuis toujours aux districts ; il en va de même de l'enlèvement des ordures ménagères, dont la gestion est dévolue à plusieurs acteurs institutionnels, au point où Abidjan s'en retrouve marginalisée.

Abidjan jouit du statut de communauté urbaine et est assujettie aux règles qui s'appliquent aux districts. Elle est administrée par un conseil municipal de 50 membres élus pour une période de cinq ans, à raison de cinq conseillers par district. Le maire est élu par les dix maires de district, qui sont tenus par la loi de choisir l'un de leurs collègues élus dans la métropole. Le gagnant démissionne immédiatement de son poste de maire de district pour assumer le poste de maire d'Abidjan. Les dix maires de district sont des adjoints d'office du maire de la ville. Comme la ville d'Abidjan est la capitale économique et le symbole de la Côte d'Ivoire moderne, son développement et sa gestion sont assurés par quatre niveaux institutionnels : les ministères, la ville, les districts et les intervenants de la société civile, bien qu'officiellement l'autorité appartienne à la ville. Aux prises avec des ressources insuffisantes qui ne cessent de s'amenuiser et avec de nouveaux problèmes, les autorités municipales semblent s'être quelque peu résignées à cette situation. Elles continuent d'espérer qu'Abidjan deviendra une ville puissante et un chef de file du développement, sans croire pour autant que leur rôle changera.

Contexte de la gestion des déchets liquides, solides et industriels à Abidjan

L'organisation de la gestion des déchets urbains à Abidjan a connu de nombreux changements au cours des dernières décennies, notamment en raison de l'instabilité du gouvernement et de la volatilité des organismes d'exécution. En effet, chaque réduction ou élargissement de l'équipe gouvernementale a entraîné une redéfinition des compétences et des organigrammes ministériels, et très souvent la nomination de nouveaux responsables. En outre, le contexte institutionnel de la gestion des déchets solides et liquides a été fortement influencé par la concentration des études sur le développement et du contrôle des grands projets nationaux au sein d'un seul organisme, la Direction et contrôle des grands travaux (DCGTx), qui relevait du bureau du président avant d'être du ressort du Premier ministre.

La gestion des déchets liquides a contribué à l'instauration de changements semblables à ceux qu'ont causés les projets de la Banque mondiale dans les années 70 et 80. A la fin des années 80, au moment où la gestion des déchets liquides était en voie de surmonter ses difficultés grâce à des structures de gestion efficaces, la gestion des déchets solides connaissait, à son tour, une crise qui persiste aujourd'hui.

Déchets liquides

Pendant les premières années qui ont suivi l'indépendance, la ville d'Abidjan, alors d'importance modeste, avait très peu d'équipement d'hygiène publique et de drainage à sa disposition. Les eaux ménagères, les eaux de drainage et les déchets industriels étaient généralement déversés dans la lagune. Pendant cette période, les habitants redoutaient les saisons des pluies, qui provoquaient de nombreuses inondations dans les secteurs bas et marécageux de la péninsule de Petit-Bassam et de la zone côtière. Sa capacité d'auto-curage ayant été surestimée, la lagune Ébrié présentait des signes de pollution avancée. Cependant, ce n'est qu'après la grave flambée de choléra de 1969 que les autorités ont été contraintes d'élaborer une politique d'hygiène publique et de drainage. Cette politique a entraîné la création de la Société d'équipement des terrains urbains (SETU) et du Fonds national pour l'assainissement (FNA).

La SETU, créée en vertu du décret 71–672 du 29 décembre 1971, est une société d'État relevant à la fois du ministère de l'Économie et des Finances et du ministère des Travaux publics, de la Construction et de la Planification (qui est devenu récemment le ministère de l'Environnement). Elle avait pour rôle de desservir des secteurs de la ville en offrant des services d'arpentage, de drainage et de voirie ainsi que des services publics (eau, électricité, gaz). Le décret 75–95 du 31 décembre 1975 a confié à la SETU l'entretien du réseau de drainage et d'autres installations. A la même époque, le FNA, alimenté par un impôt de 10% sur le revenu net tiré des propriétés foncières, a été créé pour répondre aux besoins financiers de ce secteur. Suivant ces initiatives, un programme d'urgence (1975–1978) puis un programme extraordinaire (1977–1982) dotés d'un budget total de 12,5 milliards de francs CFA ont été instaurés pour compléter les installations et créer de nouvelles infrastructures.

L'aide du Programme des Nations unies pour le développement et de l'Organisation mondiale de la santé a permis à la ville d'élaborer un plan-cadre de drainage en vue d'adopter une démarche cohérente. Ce plan prévoyait la construction d'un réseau de collecteurs primaires et secondaires afin de centraliser la collecte des eaux usées et leur évacuation dans la mer après un traitement préliminaire. A la suite de la réorganisation du secteur des eaux usées, un projet central de drainage et le FNA ont pris en charge le financement partiel de l'infrastructure et le remboursement de la dette. Plus tard, le FNA a remplacé le Fonds national de l'eau (FNE). Ce dernier était alimenté par une redevance de 38,4 % sur le prix de vente de l'eau, les taxes sur le drainage imposées sur les propriétés foncières, des subventions nationales et des prêts.

Au début des années 80, des problèmes de gestion ont commencé à entraver le bon fonctionnement du système. En fait, la SETU croulait sous le poids d'une dette de 9 milliards de francs CF A, dont 2 milliards étaient dus à des acheteurs privés de terrains et 7 milliards à des organismes nationaux. En 1986, la SETU a été dissoute malgré les réserves de la Banque mondiale, et la DCGTx a pris en charge ses fonctions.

En 1987, à l'initiative de la DCGTx, un nouveau contrat liant le service d'aqueduc de la ville (c'est-à-dire le nouvel organisme créé pour remplacer le service central d'hygiène publique) à la Société de distribution d'eau de la Côte d'Ivoire (SODECI) cédait à celle-ci le pouvoir de percevoir les taxes sur la vente et la prestation des services de drainage.

La mise en œuvre du plan-cadre de drainage est maintenant terminée ; elle a occasionné des investissements de 115 milliards de francs CFA à Abidjan. Celle-ci est maintenant dotée d'un réseau de drainage de 2000 kilomètres, dont 640 kilomètres pour les déchets liquides et 955 kilomètres pour l'eau de pluie, y compris 390 kilomètres de fossés ouverts, d'un réseau'de drains de 140 kilomètres et de 45 installations spéciales (postes de pompage, postes de prétraitement, dépôts). Au collecteur principal, qui mesure 22,6 kilomètres, a été ajoutée une sortie de vidange de 1,5 kilomètre vers la mer, équipée d'une cheminée. Aujourd'hui, 40 % de la population a accès au réseau d'égouts ; 20 % utilisent des fosses septiques et 26 % se servent de latrines traditionnelles.

Déchets solides

L'historique de la gestion des déchets solides à Abidjan comporte trois étapes distinctes :

– la période de 1953 à 1990, pendant laquelle la gestion relevait d'une société privée, la Société industrielle des transports automobiles africains (SITAF) ;

– la période de 1991 à septembre 1992, pendant laquelle le service des déchets de la ville d'Abidjan, avec l'appui de l'État, s'est occupé de la gestion ;

– la période depuis septembre 1992, moment où la gestion a été cédée à une société privée locale, ASH International.

L'époque de la SITAF (1953–1990)

Vers la fin de la période coloniale, alors qu'elle n'était qu'une ville naissante, Abidjan a fait une première expérience de la privatisation du service de collecte des ordures ménagères. Elle a signé un contrat de privilège avec la SITAF, filiale de la Société industrielle des transports automobiles (SITA), compagnie française spécialisée dans la production de matériel pour l'enlèvement, le transport et le traitement des ordures ménagères. Cette compagnie a conclu plus tard des contrats de gestion des ordures ménagères dans d'autres grandes villes d'Afrique. En vertu du contrat, la SITAF devait prendre en charge l'enlèvement des ordures ménagères et le balayage des grandes rues d'Abidjan. Cependant, le contrat avec la SITAF, établi à tort comme contrat de concession, représentait en quelque sorte une entente avec une entreprise appartenant à l'État, car la ville a aidé la SITAF à s'établir en plus de lui payer des fiais pour les services rendus. En cas de déficit, la ville aidait la compagnie à équilibrer son budget. Il s'agissait en outre d'un contrat à long terme renégociable tous les cinq ans. Le calcul des fiais mensuels reposait sur une formule basée sur le nombre de tonnes d'ordures transportées et la distance parcourue, déclarés par la SITAF. Abidjan n'avait pas envisagé de contrôler les activités de son fournisseur. L'entente s'appuyait donc entièrement sur la confiance mutuelle, jusqu'au début des années 80, année où le maire nouvellement élu de la ville, un homme d'affaires sagace et chevronné, a commencé à exprimer des inquiétudes et des doutes concernant la hausse en flèche du coût des services.

En effet, à la fin de l'exercice 1984, l'enlèvement des ordures ménagères comptait pour 39 % du budget global et 58 % du budget de fonctionnement de la ville. A la demande du maire, le gouvernement a chargé la DCGTx de vérifier les activités de la SITAF. L'équipe de vérificateurs de la DCGTx, après un examen méticuleux de l'itinéraire de collecte et la pesée systématique des ordures enlevées pendant l'année, a conclu que le poids et le kilométrage déclarés par la SITAF pour le calcul des fiais avaient été gonflés pendant une longue période. En d'autres mots, il y avait eu surfacturation. Sur la foi de ces constatations, Abidjan, avec l'appui des experts de la DCGTx, a entrepris des négociations avec la SITAF afin d'abaisser le coût des services. Le nouveau contrat signé à l'issue de ces négociations prévoyait toujours que les fuis seraient fondés sur le nombre de tonnes d'ordures enlevées et déversées. Il faisait intervenir également un tiers, la DCGTx, à titre de superviseur délégué chargé de vérifier l'exécution de contrats au nom de la ville. La DCGTx a créé une unité des ordures ménagères et décidé de poster en permanence (jour et nuit) une équipe de pesage au pont bascule du dépotoir. A titre d'organisme de service public, elle fournissait ce service sans fiais à la ville d'Abidjan. Ces nouvelles mesures ont eu une incidence immédiate : alors qu'ils représentaient 47 % en 1985, les coûts ont chuté à 40 % en 1986 puis à 33 % en 1987, avant de remonter pour s'établir à 34 % en 1988 (tableau 3).

La SITAF, après avoir été ainsi tenue en échec, a accepté à contrecœur le nouveau contrat sans pour autant abandonner la partie. Prétextant que ses commissions étaient insuffisantes pour fournir un service de bonne qualité, elle a décidé de mettre à pied près du tiers de son personnel d'entretien, politisant ainsi La question. En signe de solidarité envers leurs collègues licenciés, les employés de la SITAF ont fait une grève du zèle de trois jours, pendant laquelle ils ont enlevé les ordures ménagères uniquement sur les voies principales. La ville, forcée de reprendre les négociations, est demeurée intraitable concernant les nouvelles modalités du contrat mais, dans un but de conciliation, a convenu d'entreprendre le nettoyage des rues.

Par la suite, la SITAF, qui se sentait sous surveillance, s'est désintéressée de ce domaine d'activité. Pendant cette période (c'est-à-dire la fin des années 80), la crise économique s'est aggravée à tel point que l'État, qui risquait de devoir suspendre ses paiements, a décidé, dans un accès d'arrogance, de payer uniquement le salaire des fonctionnaires. Le Trésor a refusé d'acquitter les factures des entreprises nationales. Ainsi, au début de 1988, la SITAF, qui devait composer de temps à autre avec des arriérés de quatre à six mois, se trouvait incapable de renouveler son parc de véhicules. Au lieu de tolérer une détérioration de ses services, ce qui aurait terni son image, l'entreprise a décidé de se retirer et a refusé de renégocier son contrat qui a expiré à la fin de 1989. Prise au dépourvu, la ville a exhorté la SITAF à maintenir ses services pendant un an de plus, le temps de trouver une solution de rechange.

La ville a conclu un partenariat tripartite avec la SITA et la société Chagnon de Montréal (Canada) qui, à terme, a permis à la ville de se familiariser avec les activités de l'entreprise avant d'acheter les actions des deux autres partenaires et d'en assumer la gestion comme agence autonome, dotée d'organes de gestion et de son propre budget Le gouvernement de la Côte d'Ivoire, qui croyait que la ville tentait d'imiter les machinations de la SITAF, a rejeté cette proposition de partenariat. A la fin de 1990, il était devenu évident que la ville ne pouvait se passer de la SITAF. Le maire s'est donc rendu à Paris pour renégocier le contrat, mais la société mère, la SITA, a refusé de le rencontrer. Il est donc rentré aussitôt en Côte d'Ivoire pour mettre un terme à l'ère de la SITAF.

L'époque de la gestion par une société d'État (1991–1992)

Après avoir résilié leur contrat avec la SITAF, les autorités d'Abidjan ont décidé de prendre en charge les services de nettoyage pendant une période de transition qui devait être de 21 mois. Afin d'éviter toute interruption de service, ville a acheté l'équipement d'enlèvement des ordures de la SITAF. Cependant, comme cet équipement datait en moyenne de 12 ans, les pannes se sont multipliées et, dès novembre 1991, Abidjan a dû en remplacer une partie. Les autorités ont décidé de remplacer les camions à benne basculante (modèle 6000), qui étaient employés pour enlever la moitié des ordures. Des contrats d'achat ont été conclus avec des fabricants européens. Cependant, en raison des délais de livraison (six à huit mois) et des coûts très élevés, la ville a décidé de s'adresser à des fournisseurs canadiens. Ces fournisseurs ont proposé de l'équipement plus efficace à des prix très compétitifs, assortis de modalités de paiement avantageuses. La ville a commandé à la société Chagnon, au prix de 822,49 millions de francs CFA, six camions compacteurs (24 m3), trois chariots élévateurs à fourche pour le transport de bennes de 3 à 6 m3 et 360 bennes de 3 m3. Tout de suite après, la ville a décidé d'acheter de l'équipement français. Elle a commandé dix camions à benne basculante SITA 6000 remis à neuf pour augmenter sa capacité de ramassage. Lorsqu'elle fonctionnait au sommet de son efficacité, en juin 1986, la SITAF exploitait 84 véhicules et machines d'une capacité de ramassage d'environ 1 700 t/jour. Après avoir pris le service en charge, en janvier 1992, le conseil municipal ne disposait que de 55 véhicules et machines capables de ramasser 1 090 tonnes d'ordures par jour. Les nouvelles acquisitions ont permis de faire passer la capacité quotidienne d'enlèvement à 1 763 tonnes, soit 1 050 t/jour de plus que ce que permettait l'équipement alors exploité (tableau 4).

Soulignons que c'est à cette époque que la crise des ordures ménagères a atteint son paroxysme. Vers la fin de 1991, le taux élevé de pannes causé par l'âge avancé du parc de véhicules a fait tomber la capacité de collecte à environ 700 t/jour. Confronté à la multiplication des décharges non autorisées et à l'indignation de la population, l'État a mobilisé des ressources supplémentaires en approuvant une subvention spéciale gérée par le ministère de l'Environnement et en réquisitionnant de l'équipement et des machines du ministère responsable des travaux publics afin de mener des opérations périodiques de collecte des ordures. Pendant cette période, l'État a également permis l'intervention de partenaires pour la collecte des ordures.

Devant l'ampleur de cette crise, le président de la Côte d'Ivoire a d'abord demandé au Premier ministre de prendre en charge le dossier des déchets solides à Abidjan. Le Premier ministre a constitué une petite unité de gestion de crise rassemblant des représentants de la ville d'Abidjan et de la DCGTx, le ministre de l'Environnement et le ministre de l'Infrastructure, et dirigée par un conseiller du Premier ministre responsable des projets et des politiques. Cette unité avait le mandat d'évaluer la situation et de recommander une solution appropriée. De plus, en 1992, l'État a décidé de créer une commission nationale sur la santé publique pour entamer une réflexion sur cette crise et assurer la participation des autres acteurs. Cependant, contre toute attente, la présidence de cette commission n'a pas été confiée au ministère de l'Environnement, qui présidait déjà la commission nationale sur les établissements humains, mais plutôt au ministère de l'Intérieur, qui avait de toute évidence l'intention de jouer un rôle marquant dans le système de gestion des déchets. Comme le conseiller du Premier ministre responsable de la coordination et des activités de l'unité des ordures ménagères occupait également le poste de directeur général adjoint de la DCGTx, cette structure a progressivement consolidé son influence au sein du système de gestion des déchets.

Enfin, c'est également au cours de cette période que les jeunes décrocheurs des quartiers d'Abidjan ont commencé à entreprendre la précollecte et la collecte des ordures. Ces jeunes ont fondé de petites entreprises privées ou communautaires de précollecte, ravivant ainsi ce maillon oublié de la chaîne de collecte. Ils ont été formés par l'équipe des ordures ménagères du Département d'assainissement et d'infrastructure (DAI) du ministère de l'Environnement, qui cherchait justement à réactiver ce maillon.

Dès le début de la crise, l'État avait demandé au DAI, à la ville d'Abidjan et à la DCGTx de mener une analyse technofinancière du système de gestion des ordures ménagères et de proposer différentes options aux décideurs. Cette analyse est décrite dans le document Étude de la gestion des ordures ménagères de la ville d'Abidjan (DAI et al., 1991), qui s'appuie principalement sur les données tirées d'une étude antérieure plus complète intitulée Plan directeur de récupération et d'élimination des déchets de la ville d'Abidjan préparée par le cabinet-conseil canadien Roche International (CRI, 1987), avec l'appui de l'Agence canadienne de développement international. L'étude du DAI exposait les résultats d'une analyse coût-efficacité de trois types de gestion :

– gestion fondée sur la collecte des ordures au moyen de camions compacteurs (28 m3) ;

– gestion fondée sur la collecte au moyen de chariots élévateurs à fourches (32 m3) et de bennes de 6 m3 ou 4 m3, avec ou sans précollecte ;

– gestion fondée sur l'usage combiné des deux types de véhicules.

Les données et les options proposées dans l'étude du ministère, qui a été achevée en juillet 1991, ont servi à l'élaboration d'une stratégie de collecte des déchets à Abidjan et à la préparation d'un appel d'offres pour la signature d'un contrat de collecte.

Ayant tiré la leçon du monopole de la SITAF, les autorités ivoiriennes ont décidé de mettre un terme à toutes les formes de monopole et de favoriser la concurrence entre diverses entreprises. Ainsi, le nouveau mécanisme de collecte des ordures proposé par le ministère de l'Environnement et la DCGTx divisait le système de gestion en huit sections :

– cinq sections correspondant aux cinq zones géographiques pour la précollecte, la collecte et le transport dans la ville d'Abidjan ;

– une section pour le balayage mécanique de la ville ;

– une section pour la gestion des stations de transfert et du transport à la décharge ;

– une section pour la gestion de la décharge.

Les autorités ivoiriennes ont également décidé que chacune de ces sections serait confiée à une petite ou moyenne entreprise précise, de préférence d'envergure nationale, afin de créer une compétence nationale dans le domaine et de lutter contre le chômage.

A la clôture de l'appel d'offres international, cinq entreprises avaient déposé un devis. L'une d'entre elles était une multinationale nigériane, Waste Management Ltd, qui avait des bureaux à Lagos et à Abuja. Lors du dépouillement, on a constaté que seules deux des cinq entreprises soumissionnaires répondaient aux critères de solvabilité et de garantie bancaire :

– Waste Management Ltd, à qui le conseil d'évaluation des soumissions a recommandé de confier cinq des huit sections ;

– une entreprise de transport, construction, bâtiments et électricité, ivoirienne dépourvue d'expérience en gestion des déchets, mais à qui les trois autres sections ont été confiées.

Selon certains membres du conseil d'évaluation des soumissions, il s'agissait là d'une distribution équitable, car Waste Management Ltd, qui a obtenu la plus grande part du contrat, avait trois importantes qualités à son actif : l'expérience, un partenariat avec une entreprise américaine chevronnée dans le domaine de la gestion des déchets et la garantie financière exigée.

Contre toute attente, alors que les membres du conseil d'évaluation des soumissions étaient sur le point de publier les résultats de l'appel d'offres, le bureau du président de la Côte d'Ivoire a demandé que soit interrompu le processus, que l'appel d'offres soit déclaré infructueux et que le contrat soit accordé à ASH International, une société ivoirienne soumissionnaire qui avait été rejetée au stade de la présélection. Cette directive a été appliquée, et c'est ainsi qu'a commencé l'époque d'ASH.

L'époque d'ASH International (depuis septembre 1992)

L'attribution du contrat à ASH International n'a étonné ni les Ivoiriens ni les observateurs étrangers de la scène politique ivoirienne, car elle était conforme à la politique de soutien « mercenaire » chère au défunt président Houphouët Boigny, qui n'oubliait jamais ses amis pendant les périodes difficiles. En fait, il faut rappeler que, lors des troubles de 1990 en faveur de la démocratie, le régime du président Houphouët Boigny avait été gravement ébranlé par des manifestations sans précédent. Au moment où cette crise a atteint son paroxysme et où il envisageait d'abandonner le pouvoir et de se réfugier en France, il a reçu un appui politique inattendu de la part de certains mouvements opportunistes, dont l'un était dirigé par Ahmed Bassam, le futur directeur d'ASH International. Tous ces mouvements, qui s'appuyaient sur l'absence de solution de rechange crédible au plan politique, l'inexpérience des chefs de l'opposition et l'anarchie dans laquelle les protestations avaient plongé le pays, ont osé donner un appui public au président tout en lui demandant d'entreprendre les changements politiques nécessaires dans l'ordre et la discipline. Le mouvement d'Ahmed Bassam, baptisé « J'aime le POCI » (Parti démocratique de Côte d'Ivoire), avait pour particularité de regrouper des jeunes citadins marginalisés, surtout des décrocheurs et des chômeurs qui n'avaient pas reçu de faveurs du régime mais avaient choisi de se porter à son aide. Ce mouvement a ouvertement dénoncé l'hypocrisie et les préjugés de leurs aînés militant au sein du parti du président Houphouët Boigny, qui, pour des raisons évidentes, tentaient d'obscurcir les enjeux aux fins de leur lutte de pouvoir dans leur région ou circonscription. Le mouvement des jeunes a convaincu le vieux président de confier l'organisation des élections à une nouvelle aile du parti composée d'innovateurs et de jeunes constitués en groupes de soutien. Ces premiers mouvements ont donné naissance à d'autres qui ont progressivement rétabli le poids politique du président Houphouët Boigny, qui a remporté l'élection de 1990 même s'il disposait de ressources bien moindres que pour ses campagnes précédentes.

La DCGTx, le ministère de l'Environnement et la ville d'Abidjan ont préparé un nouvel accord de partenariat pour la gestion du balayage des principales voies routières et la précollecte, le transfert, le contrôle et le déversement d'ordures ménagères qu'ASH International et la ville d'Abidjan ont signé en juillet 1992.

ASH International a entrepris ses activités le 2 septembre 1992. Tout de suite après la signature du contrat et pour des raisons nébuleuses, le président d'ASH International a décidé de résilier l'entente qui le liait à l'entreprise américaine du groupe ASH qui lui avait fourni la garantie internationale exigée.

Persuadé qu'il était inutile d'avoir des connaissances techniques approfondies pour gérer la collecte des ordures ménagères, Ahmed Bassam a créé une entreprise familiale de près de 2 000 employés sur laquelle il exerce un certain contrôle. Aux prises avec une détérioration soudaine des services de collecte des ordures résultant de pannes à répétition et de l'utilisation incorrecte de l'équipement, la ville a traversé sa plus grave crise des ordures.

Certains ont alors commencé à dénoncer le contrat et à inviter la ville d'Abidjan et le ministère de l'Environnement à le résilier parce que l'entreprise ne s'y conformait pas et faisait preuve d'incompétence. Les principaux acteurs institutionnels se sont portés au secours d'ASH International, qui a suivi leurs conseils en réduisant son personnel, en recrutant des spécialistes et en signant un accord de partenariat avec la société canadienne Chagnon, qui a affecté un expert financier et un ingénieur municipal à l'établissement de son système comptable et de son service opérationnel.

A cause de cette situation, ASH International a été incapable d'organiser la précollecte et a rejeté la faute sur les précollecteurs établis, qu'elle a accusés de lui avoir occasionné des pertes en déversant une partie des ordures dans des ravins. Cette confrontation entre les responsables de la collecte d'ASH international et les précollecteurs a entraîné le retrait de nombreuses entreprises de précollecte. Devant une baisse de sa capacité de collecte, ASH International a décidé unilatéralement de fermer la station de transfert et d'acheminer les ordures directement à la décharge d'Akouedo.

Le versage incontrôlé d'ordures a entraîné la saturation de la décharge et pollué le village d'Akouedo, où le terrain de football est devenu une zone de manœuvres pour les camions d'ASH International. Les autorités du village ont demandé à la ville d'Abidjan de fermer la décharge. Les habitants avaient déjà dû subir diverses épidémies, la pollution des eaux souterraines et une multiplication des rats, des mouches, des moustiques et des blattes après qu'ASH International eut cessé d'assainir la décharge, comme la loi l'exigeait.

Pour démontrer le sérieux de leurs revendications, les villageois ont occupé l'entrée de la décharge les 4,5 et 6 novembre 1994 et en ont bloqué l'accès aux camions d'ASH International. Le maire de la ville a désamorcé la crise en promettant de donner suite aux principales demandes, notamment en ce qui concerne l'utilisation rationnelle de la décharge, la reprise des opérations d'assainissement et l'enterrement des déchets biomédicaux. Le gouvernement national a envoyé de l'équipement à la décharge pour la remettre temporairement en état. A la demande pressante des autorités municipales, ASH International a confié la gestion de la décharge à Y.P. Bejani. ASH International n'ayant pas été à la hauteur de la tâche, la ville d'Abidjan lui a suggéré de faire appel aux services de Motoragri, une société d'État spécialisée dans la motorisation de l'agriculture et les travaux d'excavation. Depuis février 1995, Motoragri est le dernier venu dans la gestion des ordures ménagères.

Au début de 1995, au moment où Abidjan devenait de plus en plus insalubre à cause de la collecte et de l'élimination inadéquates des ordures ménagères, le Premier ministre a ordonné au maire de mener une analyse financière et technique d'ASH International et de formuler des recommandations visant à améliorer son rendement. Une commission technique constituée des différents partenaires s'est appuyée sur les travaux et les recommandations d'un comité technique et d'un comité financier et a présenté des rapports et des recommandations à la fin de février. La mise en œuvre de ces recommandations a permis d'améliorer la gestion des ordures ménagères.

Déchets industriels

A la fin des années 60, les odeurs nauséabondes émanant de la lagune et le dépérissement de la flore et de la faune environnantes ont été les premiers signes alarmants des déversements sauvages d'effluents industriels.

A l'époque, le ministère des Travaux publics, de la Construction et de l'Urbanisme a chargé le service responsable de l'inspection des installations dangereuses de trouver des moyens de limiter et en bout de ligne de neutraliser l'incidence de la pollution industrielle. Pour lutter contre les polluants à la source, il a commencé à mettre à jour ses listes d'établissements industriels polluants. Cependant, le ministère, qui avait également pour tâche de promouvoir l'industrie, était d'avis que la pollution industrielle était le prix que les jeunes pays du Tiers monde devaient payer pour soutenir la concurrence féroce en vue d'attirer les investisseurs étrangers. Il s'est donc contenté de décrire le problème et de proposer des directives et des recommandations. Cette attitude laxiste a persisté jusqu'en 1972, année où a eu lieu la première conférence de Stockholm sur l'environnement.

L'évaluation de l'état de l'environnement effectuée aux fins de la contribution de la Côte d'Ivoire à la conférence de Stockholm ainsi que les discussions qui ont eu lieu pendant cette conférence ont permis une prise de conscience en matière environnementale. L'apparition périodique depuis 1973 de jacinthes d'eau dans la lagune, un problème qu'il est difficile. de combattre, a également favorisé cette sensibilisation et créé une volonté politique de préserver la lagune et l'environnement marin.

En 1973, le Service d'inspection des installations classées, relevant du nouveau secrétariat d'État à l'Environnement, était préparé à jouer un rôle efficace en collaboration avec les laboratoires et centres de recherches de l'époque. En 1974, afin d'obtenir les ressources nécessaires pour assumer le coût de la surveillance environnementale, il a signé deux décrets (74–525 et 74–526 du 9 octobre 1974) prévoyant respectivement l'imposition de taxes d'inspection aux sociétés pétrolières et aux établissements dangereux. La métropole d'Abidjan comptait plus de 60 industries qui produisaient des déchets dangereux ou toxiques, soit 22 dans les textiles et les secteurs connexes, 14 dans le secteur des produits chimiques, 11 dans le secteur des cosmétiques et détergents, six dans le secteur des peintures, colles et vernis, six dans le secteur des produits pétroliers et cinq dans le secteur des produits phytosanitaires.

Le Service d'inspection des installations classées évolue actuellement en conformité avec les règlements français de 1926 régissant les établissements malsains, dérangeants ou dangereux. En effet, la loi ivoirienne, adoptée à la hâte en 1988 pendant la crise du transport des déchets radioactifs en provenance des pays du Nord vers les pays du Sud, n'a pas été accompagnée par une ordonnance d'exécution. Par conséquent, le gouvernement n'a pu abroger la loi de 1926 ; les décrets et règlements en vigueur en France dans le cadre de la législation de 1926 s'appliquent donc toujours en Côte d'Ivoire. Un comités'emploie à adapter ces textes de loi au contexte ivoirien.

La collecte et le transport de déchets dangereux ou toxiques ne nécessite pas de permis officiel. Cependant, l'enlèvement et l'acheminement vers une décharge de tels déchets, qui, en principe, devraient être prétraités, nécessite l'approbation du Service d'inspection des installations classées (SUC). Cet organisme autorise l'acheminement des déchets vers une section appropriée de la décharge après avoir déterminé le niveau tolérable de toxicité. Quatre entreprises privées spécialisées, c'est-à-dire ASH International, SATD, Lassire et CI Maintenance ainsi que d'autres petites entreprises de transport contribuent à la collecte et au transport des déchets industriels. Les huiles usagées et les déchets de l'industrie phytosanitaire sont traités localement.

Depuis octobre 1991, le Centre ivoirien antipollution (CIAPOL) fournit un soutien technique au SIIC. Son laboratoire environnemental central se charge de l'analyse systématique d'échantillons d'eau naturelle et de l'évaluation du niveau de pollution et d'autres nuisances. Une filiale interventionniste contrôle la pollution en mer et dans la lagune en vue de composer avec les déversements accidentels grâce à une stratégie d'intervention rapide, le plan Polumar (pollution maritime).

Politiques, méthodes de financement et de gestion, mesures adoptées et ressources

S'il existe une stratégie relativement cohérente de gestion des déchets liquides qui s'appuie sur quelques mécanismes fiables, on ne peut pas en dire autant des déchets solides, dont la gestion politisée à outrance a plongé la ville dans une grave crise dont elle vient à peine de sortir. Cette section expose les politiques, les outils financiers, la méthode de recouvrement des coûts et les moyens techniques et juridiques relativement à trois types de déchets : liquides, solides et industriels.

Déchets liquides

Politiques

Après avoir pris les mesures nécessaires pour contenir l'épidémie de choléra et assurer la cohérence de ses investissements dans l'infrastructure, la ville a adopté un plan-cadre de drainage dont la mise en œuvre se poursuit. Elle a terminé d'importants travaux de construction visant l'installation du collecteur principal et de l'exutoire vers la mer.

Méthodes de financement

En 1987, le gouvernement a décidé de regrouper tous les mécanismes financiers du secteur de l'eau au sein du Fonds national de l'eau (FNE). Ce fonds alimenté par la taxe de drainage, la surtaxe sur la vente d'eau, des subventions gouvernementales et des prêts est géré par un bureau autonome d'amortissement de la dette, un organisme financier du secteur public responsable de la gestion des prêts publics et de la dette de l'État. Ces ressources l'aident à financer l'installation et l'entretien de l'infrastructure du secteur de l'eau (y compris l'approvisionnement et le drainage urbains et ruraux).

Méthodes de gestion

Le ministère de l'Environnement, qui est responsable du drainage, a confié l'entretien des installations de drainage (exploitation des postes de traitement et de pompage, etc., et nettoyage de certaines catégories de bouches d'égout) à une société privée, la SODECI. En 1995, les frais d'exploitation ont atteint 1,5 million de francs CF A, que le FNE'devait payer sur présentation des factures. Des négociations sont en cours pour convertir le contrat d'exploitation actuel en contrat de location.

Le fonctionnement des six sites de déversement des boues est assuré par la ville d'Abidjan. Les recettes totales provenant des droits mensuels de 3 000 francs CF A imposés pour chaque camion vidangeur qui utilise les décharges ne suffit pas pour couvrir les dépenses opérationnelles ; pour cette raison, le ministère de l'Environnement compte intégrer leur fonctionnement dans le cadre du nouveau contrat de location avec la SODECI. En même temps, il redouble ses efforts afin de reprendre en charge la gestion des sites.

Cadre législatif et réglementaire

Il n'existe pas de code d'hygiène ; la gestion des déchets liquides est régie par une dizaine de décrets et d'ordonnances, notamment les suivants :

– le décret 62–528 du 7 novembre 1968, qui détermine les modalités d'approvisionnement, de stockage et d'utilisation de l'eau à Abidjan ;

– le règlement 6616/CAB du 13 mai 1968, qui établit les modalités de transfert de l'approvisionnement et de la distribution de l'eau, des installations de drainage situées sur le territoire d'une commune et d'un organisme de distribution de l'eau au district d'Abidjan ;

– le règlement 4/SEM/DE du 29 janvier 1974, qui régit l'évacuation de l'eau provenant des abris pour lavage de voitures ;

– l'ordonnance interministérielle 4605/mtp du 31 août 1978, qui établit les modalités des services de drainage pour la région métropolitaine d'Abidjan ;

– le règlement 573/SP/CAB du 23 octobre 1985, qui prévoit la création et l'organisation d'un comité national d'hygiène publique et sociale ;

– le décret 87–1472 du 17 décembre 1987, qui établit un comité national de santé publique.

Ressources humaines et techniques

La SODECI utilise actuellement 15 camions pour le nettoyage des bouches d'égout. Le fonctionnement de ces camions munis de pompes à vide est assuré par environ 30 conducteurs-mécaniciens.

Déchets solides

Politiques

Un plan d'ensemble pour la collecte et l'élimination des déchets solides à Abidjan (CRI, 1987) existe, mais il n'a pas été adopté. Cependant, ce document et l'étude de la gestion des ordures ménagères à Abidjan (DAI et al., 1991) contiennent des renseignements qui ont servi à l'élaboration de la stratégie de gestion contenue dans le dossier d'appel d'offres pour le contrat de gestion des déchets solides à Abidjan. Cette stratégie n'a pas été mise en œuvre parce qu'il y a eu de l'ingérence politique et de l'incompétence, et parce que l'entreprise n'avait pas assez de ressources.

Méthodes de financement

Il existe une taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) de 2,5 francs CFA par kWh vendu par le service d'électricité d'Abidjan. Cette taxe, instaurée dans les années 60, n'a jamais été examinée, et elle rapporte de nos jours jusqu'à 1,5 milliard de francs CFA, alors que les fiais liés à la gestion des déchets solides s'élèvent à 5 milliards de francs CF A. Le reste provient des contributions des dix districts de la ville, qui s'établissent à environ 3 milliards de francs CFA par an, ainsi que de la subvention d'exploitation versée par l'État, qui oscille entre 500 millions et 600 millions de francs CFA par an ..

Le gouvernement a rejeté les propositions prévoyant un changement du taux et une réforme de la TEOM sous prétexte que les coûts sont très élevés, bien qu'il ait autorisé l'instauration d'une taxe sur les appareils de télévision fondée sur les mêmes reçus d'électricité pour la même période.

Méthodes de gestion

La prestation des services relatifs aux déchets solides à Abidjan est assurée par une entreprise du secteur privé, ASH International, qui a conclu un contrat avec la ville d'Abidjan. Conformément à une note du Premier ministre datée du 30 octobre 1992, le ministère de l'Environnement, de concert avec la DCGTx, surveille l'exécution du contrat. Pour 1994, ce contrat prévoyait le paiement de 5 186 643 034 francs CFA pour la collecte de 508 847 tonnes de déchets.

Sur le conseil de la ville d'Abidjan, ASH International a confié la gestion de la décharge d'Akouedo à un sous-traitant, la société Motoragri. Ce contrat comporte deux volets : le premier porte sur l'aménagement de terrains au moyen de bulldozers, qui génère 20 millions de francs CFA par mois, et le second vise le transport des déchets dans les vallées, l'épandage de terre sur les amoncellements de déchets et la compaction, rémunérés au taux de 1·419 francs CFA par tonne.

Cadre législatif et réglementaire

La gestion des déchets solides est régie par un règlement municipal et deux contrats :

– le règlement municipal 46/CAB-2 du 22 mars 1954, relatif à la collecte des ordures ménagères à Abidjan ;

– le contrat du 24 juillet 1992 entre la ville et la société ASH International visant la gestion et la prestation du service, qui comprend le balayage des principales artères ainsi que la collecte, le transfert et le versage surveillé des ordures ménagères à Abidjan ;

– le contrat liant ASH International et Motoragri pour la gestion de la décharge d'Akouedo.

Ressources humaines et techniques

ASH International compte 644 personnes à son service, dont un administrateur délégué, un directeur général, deux directeurs adjoints, deux conseillers spéciaux, quatre chefs de service, 17 chefs d'équipe, 16 chefs des secteurs de nettoyage, 106 chauffeurs, 231 éboueurs, 58 surveillants de bennes, 25 mécaniciens, huit inspecteurs, 14 représentants commerciaux, etc. En outre, 577 agents, qui composent 89,59 % du personnel, ont très peu de qualifications et sont affectés au balayage, à l'enlèvement et au transport des déchets. En février 1995, ASH International comptait au total 93 appareils et véhicules, dont au plus 30 étaient en bon état de fonctionnement, ce qui représente un taux de panne de 67,74 % et une capacité théorique de collecte de 1 710 t/jour. ASH International a beaucoup augmenté cette capacité en réparant 11 véhicules en avril 1995 et en achetant de nouveaux camions en juillet. L'équipement en bon état est surutilisé car il n'yen a pas assez. Ainsi, l'entreprise assure un service à trois équipes 24 heures sur 24 pour recueillir le plus d'ordures ménagères possible. Elle a établi 50 itinéraires pour ses véhicules équipés de 60 conteneurs de 14 m3, de 30 conteneurs de 7 m3 et de 300 conteneurs de 3 m3 (tableaux 5, 6 et 7).

L'entreprise exploite un site de 153 hectares, ouvert en 1965, comme décharge libre. Pour gérer la décharge, Motoragri s'est vu confier trois bulldozers, deux chargeurs, deux niveleuses, deux compacteurs, quatre remorques à benne basculante, deux pelles hydrauliques et un pont à bascule.

Déchets industriels

Politiques

Le prétraitement des polluants à la source fait l'objet d'une politique cohérente ainsi que de deux importants mécanismes de mise en œuvre : le SIIC et le CIAPOL. Le SIIC contrôle les activités des industries polluantes, et le CIAPOL surveille systématiquement la lagune et la mer, en, analysant des échantillons d'eau, en luttant contre la pollution et en veillant à l'exécution des lois, décrets et accords nationaux, régionaux et internationaux conclus avec des entreprises, et notamment des transporteurs maritimes.

Méthode de financement

Le SIIC est financé au moyen de la taxe d'inspection des établissements dangereux. Cette taxe, qui varie selon la catégorie et la superficie de l'établissement, a rapporté 380 millions de francs CF A en 1995, compte tenu d'un taux de perception de 60 à 70 %. D'après l'inspecteur en chef, cette taxe pourrait rapporter plus d'un milliard de francs CFA si tous les établissements dangereux étaient classifiés et si le taux de perception était amélioré. En théorie, les trois principaux intervenants se partagent le produit de cette taxe selon la formule suivante :

– 70 % de la taxe est affectée au budget national ;

– 25 % de la taxe est versée dans le fonds commun d'aide technique et matérielle pour le SIIC et le CIAPOL ;

– 5 % de la taxe est versée en guise de prime aux membres du personnel du SIIC et du CIAPOL.

Méthodes de gestion

Le Service d'inspection des installations classées relève du bureau du ministre de l'Environnement et du Tourisme et est chargé d'élaborer et d'appliquer des politiques dans ce secteur. Le CIAPOL, quant à lui, est un organisme du secteur public créé en vertu du décret 94–662 du 9 octobre 1991, et qui a la qualité de laboratoire national. Outre ASH International, le secteur privé est très présent dans la gestion des déchets industriels. Il existe notamment trois petits transporteurs autorisés qui transportent des déchets industriels vers la décharge, et cinq entreprises titulaires d'un permis de traitement des déchets dangereux et toxiques. Certains déchets qui ne peuvent être traités localement sont envoyés en France afin qu'ils y subissent un traitement approprié.

Cadre législatif et réglementaire

Le cadre réglementaire est d'origine essentiellement française, et il n'est pas bien adapté au contexte ivoirien. Les documents les plus importants sont les suivants :

– le décret du 20 décembre 1926 régit les établissements dangereux, malsains ou dérangeants ;

– le règlement général du 28 avril 1927 annonce la mise en œuvre de l'ordonnance du 20 décembre 1926 ;

– le règlement local 3270 du 20 décembre 1932 organise l'inspection des établissements dangereux, malsains ou dérangeants ;

– le décret 85–949 du 12 septembre 1985 porte sur l'élaboration d'un plan d'urgence en vue de prévenir et de contenir la pollution accidentelle en mer, dans la lagune ou dans les zones côtières (le plan Polumar) ;

– le règlement 0819 TP/MM du 3 mai 1968 vise la pollution des plans d'eau, notamment par les hydrocarbures ;

– la loi 88–651 est conçue pour protéger la santé publique et l'environnement contre les effets des déchets industriels et nucléaires toxiques et d'autres substances dangereuses ;

– le règlement 38/MIP/DENT du 28 juin 1990 modifie la nomenclature du décret du 20 décembre 1926 concernant les établissements dangereux, malsains ou dérangeants ;

– le décret 91–662 du 9 octobre 1991 annonce la création d'une institution publique de nature administrative, le CIAPOL, et en énonce les attributions, l'organisation et le mode de fonctionnement.

Ressources humaines et techniques

Le SIIC de la ville d'Abidjan ne compte actuellement que 20 inspecteurs, dont 13 travaillent à Abidjan, trois à Bouaké, trois à Daloa et un à San-Pedro. Un secrétariat est affecté à tous les inspecteurs. Au total, le SIIC dispose de trois ordinateurs personnels et de quatre véhicules. Pour appliquer certaines décisions, il recourt habituellement à la police.

Le contexte institutionnel et politique de la gestion

Cette section porte sur les intervenants et leurs responsabilités, la perception et l'exercice des responsabilités, les rapports de force et leurs effets sur la prestation des services.

Intervenants, responsabilités et rapports de force dans la gestion des déchets liquides

Le ministère de l'Environnement

A Abidjan, la gestion des déchets liquides fait intervenir six acteurs principaux aux responsabilités bien établies. L'un des plus importants est l'État de Côte d'Ivoire lui-même, par l'entremise du ministère de l'Environnement. Ce ministère, à qui ont été confiées certaines responsabilités du département des ressources en eau, formule et met en œuvre des politiques. Il gère le contrat de rendement de la SODECI et surveille ses activités au nom de l'État. A ce titre, le département vérifie les factures de la SODECI avant de les acheminer au FNE, où le bureau des comptes les autorise et les acquitte.

En outre, le département est propriétaire, au nom de l'État, de tout l'équipement et de toutes les installations de drainage, dont le fonctionnement est cependant assuré par la SODECI.

La SODECI

La SODECI est une entreprise privée, filiale du géant français Bouygues. Elle assure par contrat l'approvisionnement en eau et l'entretien du réseau de drainage à Abidjan. Les services de la SODECI ne comprennent pas le nettoyage des caniveaux en béton des routes de district, qui relève des districts et des ménages. Il ne gère pas non plus les six dépôts d'eaux usées, qui relèvent de la ville d'Abidjan .

Les autorités des districts

Les autorités des districts, représentées par la ville d'Abidjan, s'occupent des urinoirs, des toilettes publiques et des dépôts d'eaux usées. A la suite de certains problèmes relatifs aux toilettes publiques dans les parcs municipaux et aux petites toilettes aménagées dans certains secteurs, les districts mettent à l'essai des partenariats de gestion ou la privatisation de ces services. Le laxisme de la gestion des dépôts d'eaux usées, relevé par le ministère de l'Environnement, les a incités à envisager l'intégration du fonctionnement des installations de drainage et d'hygiène dans le cadre d'un nouveau contrat de location, qui fait l'objet de négociations avec la SODECI.

Le FNE

Depuis 1987, le FNE est l'organisme financier responsable de la gestion des ressources affectées au secteur de l'eau. Ces ressources servent en partie à financer l'infrastructure de drainage et à rembourser la dette accumulée.

Les exploitants privés de camions vidangeurs

Les exploitants de camions vidangeurs constituent un secteur peu connu qui commence à s'organiser. Ils n'ont pas vraiment d'influence sur la scène politique, et leur manque de cohésion nuit à la surveillance de leurs activités.

Les ménages

Les citadins, mal sensibilisés et aux prises avec des installations insuffisantes, urinent et défèquent dans les parcs publics et le long des murs d'édifices isolés ; ils déversent des eaux usées dans la rue plutôt que dans les égouts. Les propriétaires négligent très souvent d'entretenir les caniveaux et les fosses septiques communautaires mis à la disposition de leurs locataires.

Conclusion

La gestion des déchets liquides est un secteur moderne et bien structuré, doté de mécanismes de gestion efficaces, où les intervenants ont des responsabilités bien définies. Cependant, le secteur parallèle, sous le contrôle des exploitants de camions de vidange, doit être mieux organisé. Les rapports de force entre les propriétaires et les locataires favorisent les premiers, qui refusent de remplir leurs obligations. Malheureusement, les responsables de l'hygiène, en raison d'une pénurie de véhicules, n'effectuent plus d'inspections. La gestion directe des installations par les districts présente des lacunes, et des formes de gestion indirecte sont envisagées.

Intervenants, responsabilités et rapports de force dans la gestion des déchets solides

La gestion des déchets solides fait intervenir une dizaine d'acteurs. L'État est représenté par quatre intervenants institutionnels, dont seulement deux ont des responsabilités précises aux termes de textes de loi. Ces quatre institutions sont le ministère de l'Environnement, le ministère de l'Intérieur, la DCGTx et le ministère de l'Économie et des Finances.

Lé ministère de l'Environnement

A la suite de la crise des ordures, le ministère de l'Environnement, qui est responsable des politiques de santé publique, a réussi grâce à son activisme et à son esprit d'initiative à se tailler une place dans la chaîne de la gestion des déchets solides. Chargé par le gouvernement d'obtenir les ressources nécessaires pour organiser des activités ciblées à l'appui des mesures d'Abidjan dans ce secteur, puis de proposer une stratégie de collecte, le ministère est devenu le principal administrateur du contrat entre ASH International et la ville d'Abidjan. Il a également pris en charge la formation du personnel des entreprises de précollecte. A l'heure actuelle, il s'agit du principal intervenant.

Le ministère de l'Intérieur

Le ministère de l'Intérieur ne joue aucun rôle officiel dans la gestion des déchets. Cependant, il intervient dans ce secteur en raison de la supervision à laquelle il assujettit les administrations locales. A ce titre, il autorise et contresigne les principaux contrats entre les districts et les fournisseurs ou entreprises. Sa qualité de président de la commission nationale de l'hygiène publique a consolidé son rôle, même si cette commission n'a jamais fonctionné.

La DCGTx

Elle fournit un soutien technique au ministère de l'Environnement aux fins de la surveillance des contrats avec ASH International. Son influence politique s'est considérablement amenuisée au fil des ans, depuis que son puissant directeur général adjoint a quitté le bureau du Premier ministre. Cela explique pourquoi la ville d'Abidjan ne s'empresse pas de répondre à la nouvelle demande de la DCGTx, qui veut être rémunérée pour ses services. Celle-ci, en effet, a moins d'influence politique qu'auparavant.

Le ministère de l'Économie et des Finances

Par ses services du Trésor, il doit s'assurer que les obligations financières de la ville à l'égard d'ASH International sont respectées. Il exerce beaucoup d'influence sur la prestation des services, car seul le Trésor peut décider du montant et des délais de paiement, en raison du principe de l'unité des comptes, selon lequel les ressources de l'État, des administrations municipales et des institutions publiques y sont consignées.

Une deuxième catégorie d'acteurs, les autorités locales, se compose de la ville d'Abidjan et de ses districts :

La ville d'Abidjan

Après avoir créé les services supplémentaires requis pour gérer (par l'entremise d'une société d'État) la collecte des ordures ménagères, la ville est insatisfaite de son rôle de financier. Bien qu'il ne contribue pas à surveiller l'exécution du contrat, le sous-département des ordures ménagères du département de l'environnement, de même que la DCGTx, fournissent des services de pesage et de surveillance. La ville juge maintenant qu'elle est en mesure de surveiller l'exécution du contrat sans faire appel à un organisme externe ou à la DCGTx.

Les districts

Ils sont d'avis que leur contribution obligatoire aux coûts à Abidjan est trop élevée. Étant donné que, dans les secteurs intérieurs, la collecte des ordures ménagères relève des municipalités, les districts d'Abidjan veulent conserver cette contribution et prendre la collecte en charge sur leur propre territoire.

Les autres intervenants dans la gestion des déchets solides sont ASH International, les précollecteurs, les ménages, les récupérateurs et recycleurs, la commune d'Akouedo (adjacente à la décharge d'Akouedo) et le bureau du Premier ministre :

ASH International

Après la mort du président Houphouët, certaines personnalités influentes du bureau du président ont continué, à la mémoire du président défunt, à accorder un soutien caché à ASH International ; l'entreprise à qui a été confiée la collecte des ordures ménagères. Par la suite, à cause de la gravité de la crise et de menaces de suspension du contrat, l'entreprise a créé un réseau d'informateurs et de sympathisants, tant au sein des acteurs officiels du régime que dans les hautes sphères du pouvoir, afin d'éliminer, unilatéralement et sans égard aux conséquences, deux maillons importants de la chaîne de collecte : les précollecteurs et les stations de transfert. Malgré les lacunes de la gestion et la persistance de la crise des ordures à Abidjan, ASH International est en lice pour l'obtention du contrat de gestion des ordures ménagères à Yamoussoukro. La plupart des intervenants de la chaîne de collecte des ordures ménagères jugent que la situation s'est améliorée depuis leur mobilisation en vue de contribuer à la collecte sur la recommandation du Premier ministre. Cependant, personne à Abidjan ni au ministère de l'Environnement ne s'attend à ce que le contrat avec ASH International soit examiné ou renégocié parce que celle-ci a manqué à ses obligations.

Les précollecteurs

Des précollecteurs sont entrés en scène en raison des lacunes d'ASH International. Ils reçoivent une formation du ministère de l'Environnement et du soutien technique de districts tels Yopougon, Abobo et Koumassi qui ont la responsabilité d'accorder des autorisations pour cette occupation sur leur territoire. Devant l'hostilité d'ASH International, les précollecteurs s'associent afin de renforcer leur pouvoir de négociation. Ces associations éprouvent toutefois de nombreuses difficultés.

A l'heure actuelle, l'association générale des précollecteurs d'ordures ménagères d'Abobo, qui comptait 15 membres à sa fondation en 1993, n'en a plus que neuf. Le syndicat des précollecteurs du district de Yopougon, créé le 20 mars 1991, est devenu le 26 juin 1994 l'organisation ivoirienne de propreté publique, qui est dirigée non plus par un président mais par un directeur général. Elle rassemble 15 entreprises qui comptent au total 70 personnes à leur emploi. Malgré ces tentatives d'organisation, les précollecteurs n'ont pas encore assez de crédibilité pour mériter la confiance des banques. Ils souhaitent par-dessus tout être reconnus comme partenaires d'ASH International et se voir offrir des contrats par cette société. Des négociations sont en cours.

Les ménages

Ils n'ont pas d'influence sur le régime. En effet, malgré leur appui à l'égard des initiatives des précollecteurs et leurs contributions financières, les autorités centrales persistent à ne pas les consulter. Celles-ci sont d'avis qu'elles doivent sensibiliser les ménages, mais ne les considèrent pas comme des participants éventuels au régime d'administration publique. Il semble que l'État, ASH International et les districts hésitent à intervenir dans les secteurs où les précollecteurs ont connu du succès. Ainsi, la distribution de sacs à ordures, qu'ASH International avait unilatéralement entreprise en juillet 1995, a été mal reçue par les ménages, malgré le fait que ces derniers voulaient vraiment contribuer à régler le problème des déchets et même s'il s'agissait en soi d'une bonne idée.

Les récupérateurs et recycleurs

Le réseau de récupération n'est ni reconnu ni structuré. Une étude financée par un fonds de développement fiançais, qui a été menée récemment (CFD, 1995), a permis d'estimer le nombre de récupérateurs à 800, dont 280 œuvrent dans la seule décharge d'Akouedo. Ils sont mal équipés et mettent souvent leur vie en danger. Les accidents ne suscitent d'ailleurs plus l'intérêt du public. (Les récupérateurs sont enterrés sous les ordures ou écrasés par les bulldozers et les camions.) L'étude souligne également l'importance économique de la récupération et du recyclage dans l'industrie des métaux et des plastiques. Par contre, elle n'insiste pas assez sur les graves risques posés par la revente non réglementée de produits récupérés aux consommateurs. A la suite de cette étude, on envisage de légiférer pour réglementer la gestion des décharges.

La commune d'Akouedo

La commune d'Akouedo, adjacente à la décharge, s'est fait entendre à deux reprises en bloquant l'accès à la décharge. Après la dernière crise, un comité spécial a été constitué, composé de représentants de la ville d'Abidjan, du ministère de la Santé, du ministère de l'Environnement, d'ASH International et de Motoragri. Les travaux d'excavation et d'aménagement de nouvelles voies, qui sont maintenant terminés, ont permis d'atténuer les tensions. Le nouveau projet d'expansion de la décharge proposé par le comité est en cours d'examen. Il aboutira à la spécialisation des quais et, en bout de ligne, au versage contrôlé.

Le bureau du Premier ministre

Il n'intervient qu'en cas de crise et pour coordonner des idées et régler des différends concernant le partage et l'exercice des responsabilités.

Intervenants, responsabilités et rapports de force dans la gestion des déchets industriels

La gestion des déchets industriels fait intervenir trois acteurs aux responsabilités bien définies :

– le ministère de l'Environnement, représenté par le SIIC, est chargé d'élaborer et de mettre en œuvre des politiques. Sa tâche principale consiste à surveiller tous les établissements dangereux exploités au pays et à vérifier s'ils se conforment à la loi. Enfin, il doit établir et percevoir la taxe d'inspection imposée aux établissements dangereux ;

– -le CIAPOL, qui joue le rôle de laboratoire central pour le département de l'inspection et le secteur privé ;

– -le ministère des Finances est responsable de la perception de la taxe d'inspection et de l'affectation des sommes ainsi perçues. Aux prises avec des compressions budgétaires, il refuse de respecter les dispositions de la formule de partage. Mal équipé, le SIIC ne peut donc pas exercer ses fonctions convenablement. Selon l'inspecteur en chef, plus du tiers des établissements dangereux ne sont toujours pas classés.

Évaluation de la gestion des déchets à Abidjan

La gestion des déchets est évaluée selon le type de déchets : liquides, solides et industriels. En tenant compte des quatre niveaux d'intervention (planification, budgétisation, exécution et contrôle), j'évalue systématiquement les principaux aspects, notamment les politiques, les modes de financement et de gestion, le cadre législatif et réglementaire ainsi que les ressources humaines et techniques. Cette évaluation s'appuie sur les critères de bonne gouvernance, notamment la transparence, l'efficacité, l'efficience, la faisabilité ainsi que la participation des citadins et le respect de leurs droits.

Déchets liquides

Dans le secteur responsable de la gestion des déchets liquides, une politique cohérente a été établie dans le contexte d'un plan-cadre de drainage pour la ville. Afin d'accélérer l'installation de raccords privés au réseau, la SETU a lancé une campagne d'installation de raccords sociaux et a permis à 1 550 propriétaires fonciers à faible revenu des zones résidentielles de se relier au réseau de drainage. Malheureusement, malgré sa réussite, cette campagne n'a pas été renouvelée en raison de problèmes de gestion et de l'abolition prématurée de la SETU. Le régime de financement et de récupération des coûts de l'infrastructure, fondé sur les recettes provenant de la vente d'eau consignées au Trésor, représente un arrangement souple et adéquat.

La chaîne de gestion se compose de très peu d'intervenants aux responsabilités bien définies. Le principal exploitant, la SODECI, est très motivé et dispose d'un matériel adéquat et d'un personnel qualifié. Cependant, ce régime comporte toujours quelques lacunes :

– le secteur des exploitants de camions vidangeurs n'est pas encore tout à fait structuré ; par conséquent, il est peu connu et difficile à surveiller ;

– les visites à domicile des inspecteurs d'hygiène se faisant de plus en plus rares, bien des propriétaires de complexes domiciliaires ne vident plus leur fosse septique, ce qui incommode les locataires ;

– le nombre insuffisant de toilettes et d'urinoirs en bon état de fonctionnement et ouverts au public, combiné à l'absence de culture urbaine et au caractère inadéquat des campagnes de sensibilisation, ont pour conséquence que bien des citadins n'ont d'autre choix que de déféquer et d'uriner à des endroits inconvenants dans la ville ;

– le régime de gestion des stations de déversement des boues n'est pas réalisable ;

– la plupart des exploitants publics ou privés de toilettes publiques éprouvent des difficultés au plan technique et de la gestion financière.

Déchets solides

S'appuyant sur l'expérience acquise en gestion des déchets pendant la période de la SITAF, les autorités ivoiriennes se sont dotées d'éléments de politique de gestion des déchets pour la ville d'Abidjan pendant la période provisoire de gestion par une société d'État. Malheureusement, l'intervention téméraire de la classe politique a empêché la mise en œuvre de certains principes et composantes de cette politique.

Il y a trop d'intervenants dans la chaîne de la gestion des ordures ménagères. Les responsabilités sont mal définies et, parfois, contestées. A l'heure actuelle, la ville d'Abidjan, qui est censée être le maillon le plus important de cette chaîne, semble marginalisée. Elle remet en question le rôle actif du ministère de l'Environnement et de la DCGTx. Les rapports entre les intervenants sont empreints d'un malaise général.

Grâce à sa position monopolistique, qui s'écarte de la nouvelle politique, ASH International s'est donné des assises financières solides qui lui ont permis d'organiser sa survie politique. Cette entreprise, le principal exploitant, a très peu d'expérience dans le secteur et utilise trop intensivement une quantité insuffisante d'équipement périmé. A cause de l'absence de culture de l'entretien (tenue de stocks de pièces de rechange, entretien régulier), le parc de véhicules présente un taux de pannes élevé (voir le tableau 7). Malgré les dispositions de la politique en vigueur, l'entreprise n'a rien fait pour intégrer les précollecteurs ainsi que les récupérateurs et recycleurs dans la chaîne de collecte. La décharge proposée n'a pas encore été aménagée. Les ménages, qui sont très peu consultés dans le cadre du processus décisionnel, sont devenus apathiques, ce qui explique l'échec de l'initiative récente de distribution de sacs à ordures. Le cadre législatif et réglementaire est devenu périmé, et le régime de financement est dépassé et ne permet pas de couvrir les coûts des activités.

Déchets industriels

Bien que le cadre législatif et réglementaire en vigueur en France et adopté en Côte d'Ivoire soit irréprochable quant aux normes, il doit être adapté au contexte ivoirien. Une politique en matière de déchets industriels a été partiellement adoptée ; elle comporte des responsabilités bien définies pour les intervenants et un mécanisme de financement adéquat, mais elle n'a pas été complètement mise en œuvre et ne tient pas compte de la quantité de déchets que produit le secteur parallèle (tanneries, orfèvrerie, teinture artisanale) ou le secteur des produits industriels non récupérables (parcs à ferrailles, garages abandonnés, etc.). L'absence d'incinérateurs et la fermeture des postes d'épuration des eaux usées dans les hôpitaux ainsi que l'inobservation de la politique de versage représentent de graves problèmes de gestion des déchets médicaux. L'absence de règlements régissant les déchets industriels semblables à ceux qui sont en vigueur pour les déchets solides (décombres, sciure, cartonnages, papier, etc.) et le contrôle inadéquat favorisent l'aménagement de décharges non autorisées. Les deux principaux organismes d'exécution sont sous-financés et n'ont pas assez de matériel. Le produit de la taxe d'inspection n'est pas distribué équitablement.

Recommandations

Des mesures positives ont été prises pour élaborer des politiques de gestion des trois catégories de déchets à Abidjan. Cependant, les faiblesses de ces politiques, notamment en ce qui a trait aux déchets industriels, doivent être rectifiées. Les solutions retenues doivent être appliquées sans ingérence de la part de la classe politique, et des mécanismes de financement ainsi que des mesures de récupération des coûts réalisables doivent être élaborées en s'inspirant du modèle du FNE pour les déchets solides.

La formule de partage du produit de la taxe d'inspection doit être modifiée en vue d'affecter plus de ressources au SIIC et au CIAPOL. Les autorités nationales et locales devraient se retirer de la prestation des services et se concentrer sur la planification et le contrôle. Le cadre législatif et réglementaire dépassé qui régit les trois catégories de déchets urbains doit être modifié pour tenir compte de tous les types de déchets générés et de la conjoncture ivoirienne. Le cadre institutionnel, particulièrement pour la gestion des déchets solides, doit être révisé afin de réduire le nombre d'intervenants institutionnels et de préciser leurs responsabilités. Ces intervenants ainsi que les exploitations et gestionnaires devraient tenir compte du point de vue des citadins en ce qui concerne la gestion des déchets, notamment en adoptant une approche participative. Enfin, les petits exploitants d'équipements et les fournisseurs de services d'hygiène devraient avoir accès à des mécanismes simples de gestion technique et financière.

Tableau 1
Indicateurs financiers de la gestion des déchets solides à Abidjan, 1990–1994

Année

A
Population

B
Déchets
recueillis (t)

C
Coût de la collecte et
du balayage
(CFA)

Dépenses par
personne (CI A)
(CFA)

Dépenses par t
(CIB)
(CFA)

1990

2 050 858

452 440

3 999 537 268

1 950,17

8 839,92

1991

2 143 240

          —

4 142 777 642

1 932,95

1992

2 228 970

441 970

3 368 038 460

1 511,02

7 620,51

1993

2 318 129

436 234

4 286 626 676

1 849,17

9 826,43

1994

2 410 354

508 847

5 186 643 034

2 151,81

10 192,93

Source : Direction générale de la coordination technique, Abidjan, Côte d'Ivoire.
Rem. : En 1998, 610,65 francs CF A = 1 dollar américain.

Tableau 2
Composition des déchets solides à Abidjan, 1987 et 1994

Nature des éléments

1994 (%)

1987 (%)

Éléments fins

25,70

     37,60

Fermentescibles

52,80

     44,20

Bois

  9,50

       4,60

Verre, pierres

  1,20

       1,10

Minéraux

  0,90

       1,14

Textiles

  1,30

       1,00

Papier, carton

  4,18

       5,30

Caoutchouc

  4,70

       1,00

Source : Ministère de l'Environnement, Abidjan, Côte d'Ivoire ; CRI (1987).

Tableau 3
Indicateurs économiques de la gestion des déchets solides à Abidjan, 1984–1994

Année

A

Déchets solides

recueillis

(kg)

B

Coût de la collecte

et du balayage

(CFA)

C

Budget d'Abidjan

(CFA)

Rapport

B/C

Rapport

(x 10-7)

AIB

1984

344 054

3 238 103 944

8 300 000 000

0,39

106

1985

408 243

4 475 077 416

9 600 000 000

0,47

91

1986

423 921

3 407 378 357

8 517 000 000

0,40

124

1987

430 234

3 515 945 391

10 614 269 000

0,33

122

1988

480 517

3 526 344 080

10 507 269 000

0,34

136

1989

482 279

3 424 538 885

8 674 460 000

0,39

140

1990

452 440

3 999 537 268

9 239 340 000

0,43

113

1991

4 142 777 642

9 415 700 000

0,44

1992

441 970

3 368 038 460

9 256 530 000

0,36

131

1993

436 234

4 286 626 676

8 507 483 000

0,50

101

1994

508 847

5 186 643 034

8 451 603 000

0,61

98

Source : Direction générale de la coordination technique, Abidjan, Côte d'Ivoire.

Rem. : En 1998, 610,65 francs CFA = 1 dollar américain.

Tableau 4
Indicateurs de rendement de la gestion des déchets solides à Abidjan, 1990–1995

Année

A

Population

B

Déchets générés

(t)

C

Déchets recueillis

(t)

Rapport

B/A

(%)

Déchets générés

par personne par

jour (kg)

1990

2 050 858

786 575

452 440

57,50

1,050

1991

2 143 240

818 330

1,046

1992

2 228 970

850 815

441 970

51,94

1,045

1993

2 318 129

885 125

436 234

49,28

1,046

1994

2 410 354

920 530

508 847

55,27

1,046

1995

2 507 288

920 895

1,006

Source : Direction générale de la coordination technique, Abidjan, Côte d'Ivoire.

Tableau 5
Itinéraires et conteneurs selon le district, 1993

District

Itinéraires

14 m3

Conteneurs

7 m3

3 m3

Port-Bouët

3

5

0

57

Koumassi

5

3

0

25

Marcory

5

2

1

28

Treichville

5

6

0

20

Plateau

2

2

6

25

Cocody

7

7

6

35

Adjamé

6

12

5

17

Attecoube

1

3

3

33

Abobo

6

7

4

27

Yopougon

8

13

5

33

Source : Direction générale de la coordination technique, Abidjan, Côte d'Ivoire.

Tableau 6
Composition du parc de véhicules d'ASH International, février 1995

Type de véhicule

Nbre de

véhicules

Nbre de véhicules en

bon état de

fonctionnement

Déchets recueillis

selon le type de

véhicule (t)

Camions écraseurs

28

16

960

Chariots élévateurs à fourche

8

3

300

Bennes Ampliroll

7

3

300 + 120

Camions à benne basculante

16

0

0

Véhicules porte-conteneurs

5

1

30

Camions élévateurs

4

0

0

Camions compacteurs

9

0

Tracteurs

7

3

Chargeurs

4

3

Niveleuses

5

1

Source : Direction générale de la coordination technique, Abidjan, Côte d'Ivoire.

Tableau 7
Caractéristiques du parc de véhicules d'ASH International, 1994

 

En panne

Taux de

En état de marche

En réparation

En attente de pièces

disponibilité

(%)

Camions à benne basculante

 

 

56

      119

BI06

122

      BSIO

BSI8

123

      118

120

124

      114

103

Camions à benne basculante

100

      106

      102

      115

      121

      BS09

Camions écraseurs

100

      604

      603

      605

      T06

      TOI

      602

Chariots élévateurs à fourche

33

      FOI

F02

FOJ

Bennes Ampliroll

40

      501

505

503

      504

502

Véhicules porte-conteneurs

67

      405

403

      402

Camions compacteurs

50

      305

312

      316

315

Camions élévateurs

100

      BP07

      307

      309

      304

Tracteurs

43

      207

201

      TR03

206

      204

Chargeurs

50

      214

211

      209

240

      212

213

Source : Direction générale de la coordination technique, Abidjan, Côte d'Ivoire.

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3
Ibadan, Nigeria

A.G. ONIBOKUN ET A.J. KUMUYI

La gouvernance a été décrite comme une approche ou une perspective axée sur l' État et les institutions sociales, les liens qui les unissent et les règles qu'une société se donne et qui sont jugées légitimes et considérées comme un moyen de promouvoir les valeurs que partagent les particuliers et groupes de cette société (Olowu et Akinola, 1995, p. 23). La gouvernance a également été assimilée aux valeurs fondamentales et métapolitiques constitutionnelles qui représentent la nature des institutions gouvernantes, orientent leurs activités et forgent les rapports complexes entre elles et la société (Swilling et al., 1995, p. 78). Selon Stren et al.(1992, p. 541), l' administration publique fondée sur les principes de la gouvernance vise à améliorer le régime politique, à favoriser l'efficacité et la responsabilité au sein de toutes les institutions, à promouvoir les principes démocratiques et le régime électoral et à établir de nouveaux rapports organiques entre le gouvernement et la société civile.

D'après Swilling et al. (1995), les réflexions de plus en plus nombreuses sur le thème de la gouvernance cherchent à décrire un virage mondial sur la nature de l' État et des liens entre celui-ci et la société:

Le passage de « gouvernement » à « gouvernance », de la structure aux interrelations, de la dépendance à l' interdépendance, de la linéarité à la rétroaction, des processus rationnels au chaos est influencé par le désenchantement universel à l'égard de la nature de l'État combiné à la pensée postmoderne, qui a abandonné le mythe de l'unification de l'humanité et sa vision d'un monde utopique.

Ce débat a commencé par la publication du rapport de la Banque mondiale (1992) sur l'Afrique subsaharienne, qui souligne que le problème fondamental en Afrique résidait dans la mauvaise gouvernance : culte de la personnalité, violation des droits de la personne, corruption, gouvernement non démocratique, faible taux de participation, etc.

Comme l'ont fait remarquer Onibokun et Faniran (1995), la gouvernance comporte deux acteurs : les gouvernants, dont les responsabilités s'appuient sur les principes d'une organisation gouvernementale efficace, et les gouvernés, c'est-à-dire les citoyens, qui ont la responsabilité d' apporter une contribution pertinente aux activités socio-économiques et politiques de leur société. En d'autres mots, la gouvernance représente les rapports entre les gouvernants et les gouvernés, entre l' État et la société. Il est important de rapprocher ces deux acteurs le plus possible pour assurer la légitimité, l'obligation de rendre compte, la crédibilité et la sensibilité des gouvernants ainsi que la participation, la coopération et la sensibilité des gouvernés ..

Selon Hyden (1992), la qualité de ces interactions repose sur quatre grands principes :

– la confiance au sein des groupes et entre ceux-ci au sujet de la nature, de l'objet et des règles des interactions sociopolitiques ;

– la réciprocité, qui peut exister uniquement si les associations et partis peuvent s'organiser en vue 'de défendre et de promouvoir les intérêts de leurs membres par la concurrence politique, les pressions, la négociation et le règlement des différends ;

– la responsabilité, les gouvernants étant comptables envers les gouvernés par l'entremise de divers procédés (élections, référendums, etc.) ;

– la capacité des gouvernants de gouverner, c'est-à-dire d'élaborer des politiques et de les mettre en œuvre afin de résoudre les problèmes des citoyens et de sanctionner la sphère publique.

Tant les gouvernants que les gouvernés se divisent en plusieurs catégories. Il existe un gouvernement national, des gouvernements d' État et des administrations locales et municipales. Ces différents niveaux de gouvernement interagissent conformément à des textes de loi ou à des instruments juridiques de pouvoir et de gouvernance : constitutions, lois fédérales, décrets militaires. Ces niveaux se disputent également le pouvoir, que remportent dans bien des cas les niveaux supérieurs, engendrant des dissensions, de la méfiance et de la jalousie, qui non seulement minent les rapports entre les différents niveaux mais entravent également leurs activités. Les types d' interaction varient entre ceux que l'on retrouve au sein de gouvernements très centralisés et ceux qui caractérisent les États démocratiques et décentralisés. Les ressources dont disposent les dirigeants de chaque niveau reposent sur l'étendue des pouvoirs dont jouissent les niveaux supérieurs, mais les niveaux inférieurs sont généralement les plus pauvres. Par exemple, ces derniers dépendent presque totalement du gouvernement fédéral en raison du pouvoir que celui-ci exerce au Nigeria en matière de production et de financement. Il sont donc privés d'une partie de l'autonomie dont ils ont besoin et de la chance de participer activement à la gouvernance. Ces niveaux, et notamment les administrations municipales et locales, sont les plus touchés car ils n'ont presque aucun revenu propre.

En outre, les gouvernés présentent des différences socio-économiques et des antécédents variés au plan du revenu, de la richesse, de l'éducation, de l' information et de la conscience politique. Ces différences influent non seulement sur leurs interactions mais également sur la façon dont ils perçoivent les problèmes, proposent des solutions et réagissent aux questions.

Un important aspect des liens entre les deux éléments de la gouvernance réside dans les changements qui se produisent généralement. Par exemple, les lois régissant certains comportements et activités évoluent après un certain temps. Lorsque ces changements deviennent trop fréquents, et qu'ils sont apportés de façon irréfléchie, il en résulte de l' instabilité qui peut avoir un effet paralysant. Les gouvernements successifs, à tous les niveaux, blâment souvent leurs prédécesseurs et abandonnent les programmes que ceux-ci avaient adoptés (sans tenir compte de leur pertinence ou de leur utilité), ce qui perturbe les services.

Dans le cadre de la gestion des déchets, la gouvernance comprend non seulement les organes officiels du gouvernement mais également les structures informelles créées dans la société, comme les organismes communautaires, les institutions et les associations, ainsi que les interactions de ces organes et structures aux fins de la collecte, du transport et de l'élimination des déchets. Elle fait intervenir des relations intergouvernementales, l'affectation de ressources, la planification et la participation des citoyens. L'efficacité et l' efficience de la prestation reposent surtout sur l'efficacité de la gestion et de l' organisation, l'obligation de rendre compte, la légitimité, la volonté de servir le public, la transparence du processus décisionnel et la multiplicité des choix et des options au plan des politiques.

Il faut s' interroger sur l'existence de ces éléments dans le contexte de la gestion des déchets urbains au Nigeria. Pour ce faire et pour comprendre le problème que pose cette gestion, une étude a été menée à Ibadan. Ce chapitre rend compte de cette étude, qui porte notamment sur les facteurs politiques, économiques et sociologiques relatifs à la gestion des déchets.

Urbanisation et problèmes urbains au Nigeria

Les données dont on dispose révèlent que la population urbaine du Nigeria augmente à un rythme alarmant. Les villes nigérianes connaissent une expansion effrénée. Il Y a un peu plus de 50 ans, moins de 7 % de la population du pays habitait dans les centres urbains (de plus de 20 000 habitants). Cette proportion est passée à 10% en 1952 et à 19,2 % en 1963. On l'estime aujourd' hui à environ 40 %, et on s' attend à ce qu'elle atteigne 45 % en 2000. En fait, les villes nigérianes comptent parmi les villes du monde qui connaissent la croissance la plus rapide. Le pays compte maintenant sept villes de plus d'un million d' habitants, 18 villes de plus de 500 000 habitants, 36 villes de plus de 200 000 habitants et 78 villes de plus de 100 000 habitants. En outre, on compte 5 050 villes de plus de 20 000 habitants (Onibokun et Kumuyi, 1996).

La croissance rapide de la population urbaine au Nigeria découle surtout de facteurs politiques et économiques. L'époque coloniale a influencé de différentes façons la croissance et les modes d'urbanisation, notamment par la fondation de nouvelles villes, surtout le long des routes ainsi que dans les zones portuaires et les camps miniers ; la modernisation de l' infrastructure des villes existantes, l' implantation de services publics modernes et des changements dans l' assise économique qui ont entraîné l'implantation de centres commerciaux et industriels modernes hors des centres. C'est peut-être la création récente d' États qui a eu l'incidence la plus importante en instaurant de nouveaux pôles d'activité politique et de croissance économique. A cause de ces facteurs d'attraction, la migration des régions rurales aux agglomérations urbaines a commencé à s' accélérer considérablement. La Banque mondiale a estimé que les villes nigérianes ont connu un taux de croissance annuelle moyen de 7 % de 1970 à 1975, et que la migration comptait pour 84 % de ce taux (Banque mondiale, 1993).

Cette croissance urbaine soulève des problèmes et des défis de taille. Les plus visibles sont la pauvreté humaine et environnementale, la baisse de la qualité de vie et le gaspillage de ressources humaines, phénomènes très préoccupants. Le logement et les services publics connexes (eau, électricité, etc.) sont insuffisants, de sorte que des millions de personnes vivent dans des conditions sordides et sont dépourvues d'installations sociales adéquates comme les écoles et les établissements de santé et de loisirs. Le déclin progressif des valeurs sociales, l'éclatement de la famille et l'érosion de la solidarité sociale favorisent la délinquance juvénile et la criminalité. L'infrastructure s'est détériorée et la mobilité interurbaine est gravement entravée par une utilisation mal planifiée et inefficacement gérée du territoire et un rétrécissement rapide du réseau routier.

Ce sont la collecte et l'élimination des déchets qui semblent connaître les problèmes les plus épineux. Ce service municipal est souvent insuffisant, la plupart des déchets n'étant pas ramassés. Une bonne partie des villes'sont totalement ou partiellement privées de ce service, surtout les zones à faible revenu. Dans la plupart des municipalités, le service est peu fiable, irrégulier et inefficace. Il revient souvent aux administrations locales d'assurer la gestion des déchets solides ; cependant, ces administrations commettent l'erreur fondamentale de négliger d'obtenir un financement suffisant pour fournir un service acceptable

(Olowu, 1981 ; Koehn, 1992 ; Stren et al., 1994). Souvent, les administrations locales agissent seules, sans consulter le public, ce qui nuit à la gouvernance.

Gestion des déchets et gouvernance à Ibadan

Caractéristiques géographiques

Ibadan, qui s'étend de la longitude 7° 2'à 7° 40'est et de la latitude 3° 35' à 4° 10'nord, a été fondée en 1829. D'abord occupée par des immigrants qui fuyaient les guerres tribales, elle représente aujourd' hui la plus grande ville indigène d'Afrique tropicale, et elle est la capitale de l'État d'Oyo, l'un des 30 États du Nigeria. A vol d'oiseau, Ibadan se trouve à 128 kilomètres au nord-est de Lagos et à 345 kilomètres au sud-ouest d'Abuja, la capitale fédérale.

La croissance urbaine a été particulièrement stimulée par l'établissement d'institutions et la construction de routes et de la voie ferrée. La convergence des deux grandes routes de commerce (qui traversent Ijebu et Abeokuta) à Ibadan, jumelée à l'arrivée du chemin de fer, a accéléré la croissance de la ville. Cet essor a attiré l' attention des commerçants européens, qui se sont vu accorder des terres à bail en 1903. De nos jours, cinq routes principales et une autoroute menant à Lagos convergent sur Ibadan à partir de différentes directions. La plus grande partie du sud-ouest (à l'exclusion de la région de Lagos) représente la zone fonctionnelle du Nigeria pour l' approvisionnement en biens et services.

Depuis sa fondation, la ville a connu une croissance rapide, tant de sa superficie que de sa population. La superficie bâtie est passée de seulement 100 hectares en 1830 à 12,5 km2 en 1931, 30 km2 en 1963, 112 km2 en 1973, 136 km2 en 1981 et 214 km2 en 1988. De même, en 1856, la population était estimée à 60 000 ; en 1890, elle avait atteint environ 200 000 ; en 1963, elle s'élevait à 625 000, et aujourd' hui, elle est de près de deux millions d'habitants (NISER, 1988). Mesurée à partir du bureau de poste principal dans le quartier des affaires, la ville s'étend sur un rayon de 12 à 15 kilomètres le long des grandes artères. La région métropolitaine d'Ibadan occupe une superficie d'environ 4 200 km2 ; ses limites vont de 17 kilomètres au sud-ouest à 44 kilomètres au nord-est. Elle comprend Il administrations locales : cinq au centre et six en banlieue.

Ibadan se divise en sept régions morphologiques, qui varient selon la densité d' habitations et de population, les types et niveaux d'infrastructure ainsi que les caractéristiques environnementales et sanitaires : la région du centre, la vieille banlieue, la nouvelle banlieue est, la nouvelle banlieue ouest, la banlieue d'après 1952, les zones réservées par le gouvernement (government-reserved areas, GRA) et les domaines résidentiels aménagés par le gouvernement (à Bodija et Oluyole).

Les principales sources d'emploi sont, en ordre décroissant d'importance, le commerce de détail, l' administration publique, le secteur des services et des réparations et l' éducation. Les questions les plus importantes et urgentes, qui sont également pertinentes dans le cadre de notre exposé, sont les suivantes :

– la croissance sauvage de la ville depuis sa fondation en 1829 ;

– -la mauvaise gestion des systèmes d'élimination des déchets solides et de drainage ;

– la médiocrité des installations de transport ;

– le caractère tout à fait inadéquat des services publics et de l'infrastructure sociale ;

– des logements médiocres et inadéquats ainsi que la pollution de l'environnement ;

– la mauvaise gestion.

Ces problèmes sont tous aggravés par l'instabilité politique et l'absence d'acteurs politiques éclairés et efficaces (CASSAD, 1994).

Production de déchets à Ibadan

Déchets solides

On reconnaît généralement que d'énormes quantités de déchets solides sont produites à Ibadan tous les jours, mais on ne dispose pas de chiffres exacts, probablement parce que différentes méthodes de calcul sont employées. Selon Maclaren International Ltd (1970), de 0,37 à 0,5 kilo de déchets solides sont produits par personne par jour dans les vieux secteurs de la ville et 0,53 kilo par personne par jour dans les secteurs plus récents. Oluwande (1983) a estimé la quantité moyenne de déchets solides produits et le taux moyen de production par personne dans trois secteurs d' Ibadan : 0,420 kg/jour dans les GRA, 0,377 kg/jour en banlieue et 0,35 kg/jour dans la vieille ville.

Selon Egunjobi (1986), 38 millions de kilogrammes de déchets solides ont été ramassés dans la banlieue d'Ibadan en 1986. La banlieue représente environ 21 % de la ville. On peut ainsi estimer à 181 millions de kilogrammes la quantité de déchets solides produits dans l'ensemble de la ville en 1986. La production de déchets par personne s'élève donc à 0,31 kg/jour, si l' on se fonde sur une population estimative de 1,6 million d' habitants en 1986.

En 1982, PAI Associates a pris note du volume et du poids des déchets solides produits par ménage par jour à Ibadan. Leur étude a révélé que la production de déchets variait selon l' utilisation du sol, et que c' était dans les secteurs résidentiels qu' elle était la plus élevée. La production était de 3,4 kilos par ménage par jour dans les vieux secteurs, 3,2 kilos par ménage par jour dans les nouveaux secteurset 3,3 kilos par ménage par jour dans l'ensemble de la ville (ce qui donne une production quotidienne de 0,33 kilo par personne).

Plusieurs chercheurs ont étudié le volume de déchets produits à Ibadan. Par exemple, Maclaren International Ltd (1970) l' a estimé à 182900 tonnes. La dernière étude, menée par Haskoning and Konsadem Associates (1994), a évalué la moyenne par personne à 0,6 kg/jour, selon une densité de 300 kg/m3. Ces projections sont fondées sur un taux annuel de croissance de la population (tableau 1).

Les déchets solides produits à Ibadan se composent de feuilles d'arbres, de papier, de déchets de cuisine, de boîtes de conserve, de verre et de tissu (Maclaren International Ltd, 1970), car Ibadan se trouve au cœur d'un riche territoire agricole et comporte un grand secteur ancien et non aménagé. En 1970, selon une analyse comparative de la composition des déchets solides provenant de terrains de deux acres menée par PAI Associates (1983), 70,1 % des déchets provenaient des zones résidentielles, 18,8 % des zones commerciales et 9,7 % des zones industrielles. Les zones institutionnelles et autres comptaient chacune pour 0,7 % de la production.

Le tableau 2 résume la composition des déchets solides dans différentes parties d'Ibadan, en pourcentage, en 1982. Ce tableau montre que, dans les nouveaux quartiers (GRA, Bodija, Mokola et Sango), les déchets solides se composent surtout de déchets de cuisine, de boîtes de conserve et de métaux, alors que, dans les vieux quartiers (Agugu, Ojaba), on trouve surtout des feuilles d'arbres, des os, des cendres et des pierres. La composition des déchets solides selon le poids a également changé, la quantité de feuilles baissant progressivement contrairement à celle de boîtes de conserve, de métal, de papier, d'os, de cendres et de pierres (tableau 3).

Déchets liquides

La métropole d'Ibadan est confrontée à de nombreux problèmes de gestion des déchets liquides. PAI Associates (1983) a estimé la production de déchets liquides à Ibadan à 22 650 millions de litres (6,2 litres par ménage en moyenne) ; selon les projections d'Akintola et Agbola (1989), 113,7 millions de litres de déchets de liquides devaient être produits en 1990 et 126,5 millions de litres en 1995.

A Ibadan, les déchets liquides contiennent également des boîtes de conserve, des morceaux de bois, des excreta, de l' huile, des morceaux de fer et des déchets solides. Sauf pour les grandes institutions comme l' hôpital de l' Université d'Ibadan et l'Institut international d' agriculture tropicale, Ibadan est dépourvue de réseau d'égout. Les matières de vidange de la ville aboutissent dans des fosses septiques, des latrines et des seaux.

L'élimination non réglementée des déchets liquides dans les caniveaux, les espaces libres, le long des routes, etc. représente un . grave danger pour la santé. Les plans d'eau stagnante dégagent de mauvaises odeurs,. favorisent la prolifération des moustiques et nuisent parfois au déplacement des personnes et des biens. Par exemple, l'étude menée en 1983 par PAI Associates a révélé que 50 % des plans d'eau stagnante dégageaient des mauvaises odeurs, 70 % favorisaient la prolifération de moustiques, 24 % entravaient le déplacement des personnes et 12 % étaient un lieu de prédilection pour les vers et autres animaux nuisibles porteurs de germes.

Les mauvaises pratiques d'élimination des déchets liquides sont responsables des maladies d'origine hydrique courantes à Ibadan, particulièrement au centre. Ce milieu malsain contraint la population à consacrer une forte proportion de son revenu déjà faible et de son temps à sa santé, avec les conséquences que cela comporte pour le bien-être économique général.

Déchets industriels

Les industries d'Ibadan produisent beaucoup de déchets, particulièrement de nature chimique et toxique, des explosifs et des cendres, en quantités qui n'ont pas été établies précisément. Ces industries se débarrassent de leurs déchets à leur gré, et les contrôles sont minimes ou inexistants. Les eaux souterraines peuvent être contaminées, car les entreprises ne veillent pas à superviser les décharges et à assurer de bonnes conditions d' hygiène.

Contexte de la gestion des déchets

Depuis longtemps, la collecte des déchets compte parmi les problèmes les plus pressants dans les villes nigérianes. Comme l' a observé Onibokun (1989), l'histoire de la gestion urbaine (et de la gestion des déchets) y est étroitement liée à celle des administrations locales, qui ont traversé quatre périodes distinctes.

La période précoloniale \

Pendant la période précoloniale, les régions du Nord et de l' Est présentaient d' importantes populations urbaines gouvernées par une hiérarchie composée d'émirs ou d'oba, de chefs communautaires, de secteur et de voisinage, dotés d' un champ de compétence précis pour l' administration de chaque collectivité. Les habitants de ces collectivités avaient un mode de vie régi par des règles bien précises, chacun ayant son rôle à remplir. Dans l' Est, où les peuplements étaient plus dispersés, les différents groupes familiaux étaient dirigés de façon informelle par les chefs héréditaires. Comme les communautés urbaines étaient relativement simples, ce régime indigène d'administration était adapté à la gestion sommaire de ces localités semi-urbaines. Le balayage des places publiques était effectué par des groupes de femmes qui se relayaient ; les ordures ménagères et autres étaient déposées dans les buissons environnants, où elles se décomposaient. Cependant, les méthodes d'aménagement du territoire des indigènes étaient inadaptées à l'envergure et au rythme du développement futur, et ont donc contribué au chaos qui s'est produit plus tard.

La période coloniale

Pendant la période coloniale, les autorités coloniales ont adopté une politique de gouvernement indirect. Elles ont promulgué des textes de loi visant à renforcer l'administration des villes :

– la loi sur la santé publique (Public Health Act) de 1909 posait les bases d'une meilleure gestion de la santé. C'est à cette époque qu'ont été désignés des inspecteurs sanitaires, qui allaient de porte en porte s'assurer de la propreté des maisons et des environs et imposaient des sanctions aux résidents récalcitrants ;

– -l'ordonnance sur les cantons (Township Ordinance) de 1917 divisait les cantons en trois catégories et établissait de nouvelles structures municipales pour les grandes villes ;

-la loi sur l'aménagement urbain et rural (Town and Country Planning Act) de 1947 reconnaissait la nécessité d'un niveau distinct de gouvernement afin de compléter les conseils d'administration locale au Sud et les administrations indigènes au Nord, pour s'occuper de l'aménagement des villes et des régions rurales. Cette mesure a mené à l'établissement d'organismes d'aménagement urbain dans tous les grands centres ; ces organismes avaient le pouvoir de réglementer l'utilisation du territoire, de préparer des plans et des projets d'aménagement, d'approuver les projets de construction et de mettre en œuvre des mesures de contrôle de l'aménagement.

Malgré ces mesures et la création des GRA, qui sont demeurés les éléments les plus positifs des villes nigérianes, la principale lacune des politiques de l'époque coloniale découlait du fait que les autorités britanniques considéraient le Nigeria comme un pays essentiellement agricole, et que ses centres urbains représentaient le résultat fortuit du développement régional. Elles n'ont donc rien fait pour résoudre les problèmes urbains qui commençaient à surgir, notamment en matière d'hygiène. Wraith (1964, p. 68) a observé que, dans l'ouest du pays, qui comptait six villes de plus de 100 000 habitants, le chaos des communautés urbaines suscitait des problèmes qui auraient dû être réglés. A l'heure actuelle, les problèmes causés par l'aménagement, les égouts et la quasi-absence d'installations propres à un pays civilisé semblent presque insolubles.

L'inefficacité de l'administration municipale pendant l'époque coloniale tenait au fait que les villes administrées par des conseils étaient subordonnées aux autorités indigènes, constituées et contrôlées par des oba et des chefs qui, pour la plupart, étaient des vieillards qui s'intéressaient à une époque révolue (Wraith, 1964, p. 94). Ils cherchaient surtout à appliquer les « lois et coutumes anciennes », et il revenait au ministère de la Santé et des Travaux publics du gouvernement de régler les problèmes municipaux les plus importants et les plus urgents (Wraith, 1964, p. 95).

La période de transition vers l'indépendance

La troisième étape de l'évolution des administrations locales a été la période qui a précédé et suivi immédiatement l' accession à l' indépendance. L'un des faits marquants de cette période a été le dépôt des ordonnances concernant les administrations locales (Local Government Ordinances) de 1950–1954, qui ont été modifiées par la suite en 1955, 1957, 1958, 1967 et 1973. Ces ordonnances instauraient un régime d' administration à trois niveaux : conseils de comté, conseils de district urbains et ruraux et conseils locaux. En outre, dans les trois régions, les ordonnances reconnaissaient les besoins particuliers des régions métropolitaines et des centres urbains et ont créé des types précis d' administration locale, c'est-à-dire les conseils municipaux pour les grandes villes et les conseils urbains pour les villes plus petites. Il s'agissait d' administrations locales à un seul niveau, dont les fonctions et la composition s'écartaient de celles des autres administrations locales. On a confié à ces conseils des fonctions précises, notamment la collecte des matières de vidange et la prestation d' autres services d' hygiène et de santé personnelle.

Un organe chargé de l'aménagement urbain (appelé conseil d'aménagement à Lagos) a été établi dans chacune des régions relevant d' un conseil urbain. Ces organes étaient indépendants des administrations municipales (bien que des représentants de ces dernières y siégeassent) et redevables aux États. En outre, chaque État a constitué des organismes parapublics à qui il a confié certaines fonctions, qui faisaient dans certains cas double emploi avec les conseils urbains et les organes chargés de l'aménagement urbain. Parmi ces organismes se trouvaient les conseils de gestion des déchets des États. Les ministères des États avaient également pour responsabilité d'entretenir certains tronçons de routes municipales et de fournir des services municipaux tels que la gestion des déchets solides.

Ces arrangements ont causé des chevauchements, des conflits, de l' inefficacité et du gaspillage. Un certain nombre de facteurs nuisaient à l' exécution des activités urbaines à l'époque :

– la structure des administrations locales était instable car leur organisation, leur financement, leur appareil administratif, leur composition, leur direction et d'autres facteurs changeaient selon les caprices des autorités supérieures ;

– le roulement des intervenants dans les administrations locales favorisait la cupidité, la corruption et l'irresponsabilité ;

– les ressources, notamment le financement, le savoir-faire et les matériaux, étaient insuffisantes1 ;

– les administrations locales devaient subir une ingérence exagérée, surtout de la part des États, avec des luttes de pouvoir entre les conseillers et d' autres membres de la classe politique et avec un nombre trop élevé de conseillers et de comités. Ces problèmes coûtaient cher et nuisaient au progrès.

Les réformes des administrations locales de 1976

La quatrième et dernière étape de l'évolution des administrations locales a débuté avec l'instauration des réformes de ce secteur en 1976. Le décret sur les administrations locales (Local Government Edict) de 1976 a établi un régime commun d'administration locale ; 301 conseils d'administration locale de niveau unique ont été créés (ce nombre est passé depuis à 589), et chacun devait constituer en quelque sorte un troisième niveau de gouvernement. Les conseils d'administration locale ont reçu le pouvoir d'exercer un fort contrôle sur les affaires locales, et ont obtenu du personnel et des moyens financiers. Le décret sur les administrations locales de 1976 a été intégré plus tard dans la constitution de la République fédérale du Nigeria, adoptée en 1979.

Le rôle du gouvernement fédéral

En vertu du nouveau régime, la constitution de 1979 limite les responsabilités du gouvernement fédéral en matière de gestion urbaine à l' établissement de lignes directrices générales et de politiques nationales touchant la structure, le nombre, le fonctionnement et la gestion des administrations locales. Ces politiques générales peuvent également comprendre, par convention, l'établissement de normes nationales (codes du bâtiment, règlements de lotissement, protection de l'environnement, etc.) pour orienter l'aménagement et la gestion des secteurs urbains.

En 1988, le gouvernement fédéral du Nigeria, préoccupé par la détérioration continue de l' environnement, a établi la Federal Environmental Protection Agency (agence fédérale de protection environnementale — FEPA) et, en 1989, a lancé officiellement la politique nationale de l'environnement (National Policy on the Environment). La FEP A et cette politique étaient axées sur l ‘ hygiène et la gestion des déchets dans le cadre d'une perspective intégrée, globale et systématique des questions environnementales (FEP A, 1990, p. 6). La politique nationale de l'environnement prévoyait les tâches suivantes en matière d'hygiène et de gestion des déchets :

1. Faute d'argent et de personnel spécialisé, bon nombre de conseils urbains et d'organismes d'aménagement municipal sont devenus des organes superflus représentant un fardeau pour les gouvernements des États. Ils étaient gérés par des personnes dépourvues de la formation et de l'expérience nécessaires.

– mener une étude des systèmes les plus fiables pour la gestion des ordures ménagères et des déchets industriels ;

– répertorier les systèmes d'élimination et de traitement des déchets adaptés au contexte géologique et environnemental et favorisant le recyclage ;

– répertorier les décharges où les eaux de surface et souterraines sont protégées ;

– établir et appliquer des normes prévoyant l' aménagement d' installations d'hygiène adéquates pour l'élimination des eaux-vannes et des autres déchets solides dans les logements, les domaines et les établissements publics, dans les régions urbaines et rurales ;

– établir des programmes de contrôle prévoyant la surveillance régulière des décharges approuvées, des environs et de leurs systèmes d'épuration des eaux résiduaires ;

– aménager des stations de contrôle de l'élimination des produits de lixiviation provenant des décharges dans les eaux de surface et les eaux souterraines.

Le gouvernement fédéral a également pris d' autres mesures positives en vue d'améliorer la gestion de l'environnement :

– la politique nationale de développement urbain (National UrbanDevelopment Policy) de 1989, qui visait à créer un système dynamique et durable de peuplements urbains, à favoriser la croissance économique, à promouvoir un développement régional efficace et à améliorer le niveau de vie et le bien-être de la population nigériane ;

– le décret sur l'évaluation des incidences environnementales n° 86 (Environmental Impact Assessment Decree No. 86) de 1992, qui donne une assise légale aux diverses politiques prévoyant la tenue d'évaluation des incidences environnementales (EIE) lors de la planification de projets publics et privés ;

– le décret sur l' aménagement urbain et régional n° 88 (Urban and Regional Planning Decree No. 88) de 1992, qui contient des lignes directrices générales et spécifiques concernant l' aménagement et qui favorise la protection de l'environnement en exigeant la tenue d'HE pour certains types d'aménagement.

En outre, depuis son établissement, la FEPA a piloté l'adoption d'importants textes de loi en matière de gestion de l'environnement :

– le règlement national sur les effluents S.I. 8 (National Effluents Limitation Regulation S.18) de 1991, qui oblige les industries à installer du matériel antipollution et à effectuer le traitement primaire des effluents chimiques et autres ;

– le décret sur les sanctions criminelles relatives aux déchets dangereux 42 (Hazardous Wastes Criminal Provision Decree 42) de 1988 ;

– le règlement sur la réduction de la pollution dans les industries et les établissements producteurs de déchets S.I. (Pollution Abatement in Industries and Facilities Generating Waste Regulation S.I.) de 1991 ;

– le règlement sur la gestion des déchets solides et dangereux S.I. 15 (Management of Solid and Hazardous Wastes Regulation S.I 15) de 1991. Pour compléter les efforts de la FEPA, une commission de protection de l' environnement (Environmental Protection Commission, EPC) a été créée dans chaque État en 1989. Le décret n° 17 décrit les tâches et responsabilités des EPC. Les plus importantes en matière de gestion des déchets solides sont les suivantes :

– conseiller le gouvernement de l'État sur les politiques et priorités en matière d'environnement ;

– formuler et appliquer des politiques, règles et règlements concernant la collecte et l'élimination des déchets ;

– fournir des services consultatifs et un soutien à toutes les administrations locales ;

– élaborer des plans-cadres de collecte et d'élimination des déchets solides ;

– surveiller les déversements et leurs incidences environnementales ;

– appliquer les lois pertinentes dans le cadre des activités liées à l'environnement ;

– établir des critères, lignes directrices, cahiers des charges ou normes pour la protection de l'environnement.

Le gouvernement fédéral a donc pris des mesures législatives adéquates pour composer avec les problèmes environnementaux, et notamment la gestion des déchets solides. Cependant, ces mesures n'ont pas encore été très fructueuses, surtout en raison de la faiblesse de la loi habilitante et de l' incapacité des organismes concernés d' appliquer certaines lois. Les stratégies de mise en œuvre de ces lois laissent beaucoup à désirer. Comme l' a déjà souligné Maxime Ferrari du bureau régional du Kenya du Programme des Nations unies pour l'environnement, la triste réalité, c'est que les gouvernements de nombreux pays d'Afrique prétendent se préoccuper des questions environnementales, mais que leurs résolutions et déclarations ne sont pas suivies de gestes concrets (Ferrari, 1988, p. 12). Le public néglige également d'observer les lois, ce qui n' arrange rien. Comme l'aremarqué Ola (1984, p. 74), il est à la fois nécessaire et utile d' adopter une bonne loi, mais il faudra bien du temps avant qu'on l'observe ; les innovations contenues dans la loi devront se révéler durables. Les citoyens les plus puissants du pays, que la population devrait généralement prendre pour modèles, sont les premiers à violer les lois, et les autres citoyens ne font que les imiter.

Le rôle des États et des administrations locales

Le ministère des administrations locales (qui s'appelle actuellement le Department of Local Government Affairs relevant du bureau du gouverneur de chaque État) surveille les activités des administrations locales et leur communique des directives et des instructions conformément aux lois de l'État. Cependant, en vertu de la constitution, les administrations locales demeurent responsables de la gestion des égouts et de l'élimination des déchets solides, comme l' indique le tableau 4, qui énumère les fonctions qui relèvent exclusivement des administrations locales et celles qui sont partagées avec les gouvernements des États en vertu des réformes des administrations locales de 1976 et de la constitution de 1979 de la République fédérale du Nigeria.

Soulignons qu'en 1989, pour diverses raisons, les administrations municipales et locales ne pouvaient exécuter bon nombre des fonctions que leur confiait la constitution. En outre, la gestion des déchets ne figurait pas parmi les quelques fonctions qu'assumaient ces niveaux de gouvernement (Onibokun [1989] explique en détailles causes de cette situation.) C'est pourquoi, dans plusieurs régions du pays, les États ont dû intervenir de temps à autre dans la gestion des déchets solides. Cependant, ces interventions étaient purement ponctuelles, de sorte que la responsabilité de la gestion des déchets est passée à plusieurs reprises des administrations municipales et locales aux États et vice versa.

Dispositions institutionnelles actuelles pour la gestion des déchets à Ibadan

Nulle part ailleurs qu' à Ibadan, où vit la plus importante population d'Afrique, les problèmes de la gestion des déchets ne sont mieux illustrés. L'échec spectaculaire de nombreux programmes et mécanismes d'élimination des déchets dans cette ville a entraîné un transfert constant de responsabilités entre les organismes et les divers niveaux d'administration ainsi qu' un certain degré de privatisation. Par exemple, en 1988 et 1989, la gestion des déchets solides incombait à l'Environmental Sanitation Board (conseil d' hygiène environnementale). Cependant, en vertu d' une directive institutionnelle de 1989, cette responsabilité a été de nouveau confiée aux administrations locales. Les cinq administrations qui occupent le centre de la ville, c' est-à-dire les administrations du nord, du nord-est, du nordouest, du sud-est et du sud-ouest, se sont partagé les installations de collecte et le matériel.

En 1991, cependant, ces cinq administrations locales ont confié la collecte et l' élimination des déchets solides à l'Ibadan Urban Sanitation Committee (comité d'hygiène urbaine d'Ibadan, IUSC). L'IUSC est dirigé par un conseil, l'Ibadan Urban Sanitation Board (conseil d'hygiène urbaine d' Ibadan, IUSB), où siègent des représentants des cinq administrations locales et de l'EPC de l'État. Au Nigeria, il y a donc le comitéd'hygiène au niveau local, l'EPC au niveau de l'État et la FEP A au niveau fédéral. Les membres de l'IUSB sont les agents de santé des cinq administrations locales, des représentants du ministère de la Santé et de l'EPC ainsi que le chef de projet de l'IUSC. Il y a deux sous-comités : le souscomité de l'exploitation et le sous-comité technique. En plus de s'occuper de la collecte, du transport et de l'élimination des déchets solides, le comité entretient les véhicules.

L'IUSC est financé par les cinq administrations locales, à parts égales, indépendamment de la population ou de la quantité de déchets produits. Par exemple, en 1993, chaque administration locale a versé un million de nairas, de sorte que le budget s'est établi à cinq millions de nairas (en 1998, 86,8 nairas nigérians = 1 dollar américain). En 1994, les administrations locales ont affecté 6,5 millions de nairas provenant de leur allocation fédérale, et trois millions de nairas tirés de leurs propres fonds, pour un total de 10 millions de nairas. Cette somme était bien inférieure au montant estimatif de 70 millions de nairas dont l'IUSC avait besoin pour exercer efficacement ses fonctions. La même année, les recettes internes ont atteint la maigre somme de 200 000 nairas. Le tableau 5 montre l'affectation des fonds à l'IUSC pour 1992 et 1993. Ce régime a pour principal avantage d'éliminer les problèmes d'hygiène dans les zones limitrophes entre les diverses administrations. Celles-ci demeurent responsables du nettoyage des marchés et des caniveaux et du balayage des rues.

Toutes les semaines, le chef de projet de l'IUSC et les cinq principaux agents de santé des administrations locales discutent du calendrier de collecte. Chaque administration locale dispose d'un camion à benne basculante pour la collecte des bennes. Ces cinq camions ont été donnés par l'EPC. On ignore pourquoi ils sont situés dans les installations des administrations locales, alors qu'il existe un parc principal à Agodi. Cet arrangement pourrait donner lieu à des différends et à de la confusion entre les administrations locales et l'IUSC. Celui-ci compte à l'heure actuelle cinq divisions, sections et unités, chacune étant dirigée par un chef qui supervise d'autres agents subalternes. La structure administrative est représentée à la figure 1.

L'EPC est l'organe de la FEPA dans les États. Elle est administrée par un conseil d'administration et dirigée par un directeur général, qui porte le titre de secrétaire général et dont relèvent trois directeurs (recherche et planification ; personnel, finances et approvisionnement ; gestion environnementale et travaux publics). L'EPC emploie actuellement 200 personnes. Outre les fonctions dont nous avons déjà parlé, l'EPC est responsable des tâches suivantes, qui sont essentielles à la gestion des déchets solides :

– octroyer des subventions à des autorités et organismes dotés de fonctions semblables afin d'améliorer leurs capacités en matière de gestion environnementale (par exemple, l'EPC a fait don d'un camion à benne basculante à chacune des cinq administrations locales) ;

– recueillir des données scientifiques de base et d'autres renseignements et les diffuser dans des publications et par d'autres moyens, en collaboration avec des organismes publics ou privés ;

– faire appel à des sous-traitants du secteur public ou privé pour exercer ses fonctions et assumer ses responsabilités.

L'EPC est présente dans l'ensemble de l'État et s'occupe de toutes les questions relatives aux déchets dans les zones urbaines. Elle a répertorié toutes les questions environnementales à régler dans les administrations locales et a établi un bureau dans chacune. Elle a également lancé un programme d'éducation sur l'environnement.

A Ibadan, l'EPC participe à titre d'organisme de mise en œuvre au projet de lutte contre les inondations et d'évacuation des eaux pluviales et au projet de gestion des déchets d'Ibadan, dans le cadre du projet urbain de l'État d'Oyo (Oyo State Urban Project) financé par la Banque mondiale. Elle a accordé des contrats pour les projets suivants :

– le projet de lutte contre les inondations et d'évacuation des eaux pluviales d'Ibadan ;

–la remise en état de la décharge de la vieille route de ceinture ; — la remise en état des secteurs érodés de la haute Ogunpa ;

– la rénovation des ateliers de l'IUSC-EPC à Agodi.

On a également proposé d'améliorer le système de collecte, notamment en favorisant et en rationalisant la participation d'entrepreneurs privés. L'EPC a également commencé à répertorier de nouveaux terrains à utiliser comme décharges en périphérie d'Ibadan. Huit sites ont été relevés, et les études de même que la conception devraient être entreprises sous peu. Ces sites se trouvent le long des grands axes routiers qui relient Ibadan à Oyo, Iwo, Akufo, Abeokuta, Old Lagos, Olojuoro, Akanran et Ife. L'EPC s'occupe également de la fabrication locale de bennes, qui coûtent moitié moins que celles qui étaient utilisées auparavant.

Mécanisme actuel de collecte et d'élimination des déchets de l'IUSC

Les déchets solides déposés dans les 50 bennes placées près de grandes voies routières et de marchés un peu partout dans la ville sont recueillis par camion et transportés vers la décharge de la route de ceinture. L'emplacement de ces bennes laisse parfois à désirer :

– les bennes sont trop peu nombreuses et mal réparties. Il n'yen a pas assez à chaque dépôt, et lorsqu'elles sont pleines, les gens déposent leurs déchets à côté ;

– bon nombre des décharges sont éloignées des utilisateurs cibles ; c'est pourquoi les résidents se voient contraints de jeter leurs déchets n'importe où, par exemple sur des terrains vagues ;

– les bennes placées le long des voies routières sont laides.

L'EPC ne dispose pas de mécanisme structuré de collecte des ordures ménagères de porte à porte et de transport vers les bennes. Les résidents doivent s'occuper eux-mêmes de leurs ordures, et lorsque les bennes se trouvent loin de chez eux, notamment dans les zones centrales inaccessibles de la ville, ils sont tentés de s'en débarrasser ailleurs. A chaque benne, deux préposés sont affectés à l'entretien des environs. Les bennes sont situées dans les secteurs résidentiels. Le vent souffle une partie des déchets solides dans ces quartiers, de même que le long de la rue entre les bennes et la décharge. Il s'agit là d'une cause de pollution importante dans la ville.

Les bennes sont recueillies au cours de deux quarts de travail, le jour et le soir. Cependant, la collecte est fortement entravée par le fait que ces périodes coïncident avec les heures de pointe sur les routes. Chaque camion recueille de six à 12 bennes par jour, c'est-à-dire de trois à six bennes par quart de travail, selon la saison. Ainsi, le rythme est beaucoup plus lent pendant les saisons des pluies.

Les déchets sont déversés dans la décharge de la route de ceinture. Autrefois, il y avait trois décharges à Ibadan : la décharge de la route de ceinture à Ibadan Southwest, Oniyere à Ibadan Southeast et Ijokodo à Ibadan North. Cependant, les décharges d'Oniyere et d'Ijokodo ont été fermées, de sorte que la première, qui est entourée de quartiers résidentiels, est devenue un dépotoir à ciel ouvert qui favorise la prolifération des mouches, attire les rongeurs et comporte de graves risques pour la santé qui peuvent nuire à la productivité humaine. Cette décharge est tout à fait inadéquate, et elle occasionne des trais d'exploitation croissants en raison de la distance qui la sépare de plusieurs secteurs de la ville.

Au début de 1995, le Nigeria se préparait pour la Coupe du monde junior de football. La décharge de la Toute de ceinture a été abandonnée parce qu'elle est très proche du Liberty Stadium, l'un des quatre sites de la compétition ; deux nouvelles décharges ont donc été aménagées hors de la ville, à Ajakagan et à Aba-Eku, avec l'aide de la Banque mondiale. Bien que le Nigeria se soit vu retirer plus tard le rôle d'hôte de la Coupe du monde, la décharge de la route de ceinture n'a pas rouvert, et les deux nouvelles décharges sont toujours exploitées.

En outre, lorsque le gouvernement de l'État a constaté que ces deux décharges seraient insuffisantes, il a retenu quatre sites le long de grandes routes reliant Ibadan à d'autres villes :

– le site du village de Bode-Igbo, un terrain de 21,6 hectares situé le long de la route entre Ibadan et Abeokuta ;

– le site du village de Lapite, un terrain de 23,6 hectares situé le long de la route entre Ibadan et Oyo ;

– le site du village d'Elesingodogbo, un terrain de 21,4 hectares situé le long de la route entre Ibadan et Iwo ;

– le site du village d'Alomaja, un terrain de 22,5 hectares se trouvant le long de la route entre Ibadan, Ijebu et Ode.

D'autres sites ont été identifiés le long de routes situées hors du cœur de la ville, où l'IUSC exerce ses activités. Il reste à déterminer les dispositions de gestion qui seront prises avec les six administrations locales de banlieue où ces sites se trouvent.

A la décharge de la route de ceinture, les déchets sont déplacés de la route d'accès à la décharge elle-même au moyen de deux bulldozers. Lorsque l'un ou l'autre des bulldozers tombe en panne, ce qui arrive souvent, et lorsque la route d'accès est impraticable, les camions doivent déverser les déchets loin de la décharge, et obstruent ainsi la route.

Les installations de l'atelier central, où les véhicules et l'équipement sont entreposés et entretenus, sont limitées. On trouve à l'atelier une foule de véhicules en état de marche et en panne. En effet, pour un certain nombre de raisons financières, techniques et autres, les véhicules sont parfois en panne. Cela explique pourquoi l'IUSC contribue si peu à la collecte des déchets à Ibadan (pas plus de 10 % environ).

Le tableau 6 énumère les installations de collecte de déchets à Ibadan en 1994. Peu de véhicules et d' autres appareils étaient toujours en état de marche. Par exemple, un seul des deux bulldozers à la décharge de la route de ceinture fonctionnait. Seulement deux des sept camions à benne basculante et aucun des 18 compacteurs étaient en bon état de marche. Au total, pas plus de 57 des 93 appareils disponibles fonctionnaient correctement.

Le tableau 7 indique le nombre total de travailleurs du système de gestion des déchets d'Ibadan en 1993. Comme nous l' avons déjà mentionné, l'IUSC compte 200 travailleurs, qui proviennent des cinq administrations locales participantes. Les 144 autres travailleurs sont affectés directement par ces administrations locales à des activités de collecte et d'hygiène telles que le balayage des rues. Il est toutefois évident que le système de gestion des déchets d'Ibadan ne compte pas assez de personnel. On estime qu'il faudrait de 400 à 500 travailleurs pour assurer l'exécution efficace des fonctions de l'IUSC. L'insuffisance du financement explique en bonne partie cette pénurie de personnel. En outre, les emplois du domaine de la collecte et de l'élimination des déchets sont mal considérés, et les salaires ne sont pas adaptés en conséquence.

En 1993, l'IUSC a consacré deux millions de nairas au carburant et à l'huile et trois millions de nairas à l'entretien, aux pièces de rechange et à l' administration, pour un total de cinq millions de nairas (ce qui équivaut à la contribution des administrations locales). Cette année-là, le coût d'une gestion efficace des déchets solides (au moyen-d'un à 15 camions, sans nouvel équipement) a été estimé à six millions de nairas pour l'administration et à cinq millions de nairas pour l'entretien, soit un total de Il millions de nairas. En d' autres mots, l'IUSC disposait en 1993 de moins de la moitié des ressources dont elle avait besoin pour enregistrer un rendement optimal. Depuis, les coûts ont monté en flèche à la suite de la hausse du prix du carburant (qui est passé de 0,70 naira par litre à 3,25 nairas par litre, puis à II nairas par litre) et de la déréglementation du marché des changes. Cependant, la contribution de chacune des cinq administrations locales est demeurée à un million de nairas. Elle a augmenté un peu récemment, mais elle est toujours insuffisante.

La collecte de déchets par le secteur privé

Les entreprises privées de collecte de déchets d'Ibadan sont toutes membres de l' Association of Environmental Contractors (association des entrepreneurs de l' environnement). En 1994, elles desservaient environ 10 000 ménages dans la région urbaine d'Ibadan. A l' heure actuelle, 28 de ces entreprises sont inscrites auprès de l'IUSC, mais seulement dix d'entre elles sont en exploitation. Pour s'inscrire, l'entreprise doit respecter certains critères relatifs aux bureaux, à l' équipement, à la taille du personnel et aux capacités financières. L'inscription est gratuite, mais l'entreprise doit payer des mis de 5000 nairas par an pour utiliser les décharges de l'IUSC. Les entrepreneurs ne se voient pas attribuer de zone particulière et sont libres de conclure leurs propres arrangements. De nombreuses compagnies et institutions de la ville font appel à ces entreprises privées de collecte.

Certains petits exploitants se servent de brouettes pour la collecte sur de petites distances. Ils évoluent dans la région de Sabo et dans certains marchés et parcs de roulottes, moyennant des sommes convenues avec leurs clients. Cependant, ils jettent les déchets recueillis dans les dépôts d'ordures du voisinage. Il arrive souvent que ceux-ci ne soient pas vidés régulièrement, et ils représentent donc un danger pour l'environnement et une entrave à la circulation.

Un rapport du Nigerian Institute of Social and Economic Research (NISER), intitulé Socio-Economic Survey of Ibadan City (1988), traitant des 15 zones de la ville, a révélé que 35,9 % des ménages interrogés faisaient appel aux entreprises privées de collecte, qui étaient particulièrement populaires dans les nouveaux quartiers mieux aménagés et plus accessibles de la ville : le domaine Oluyole (79,1 % des ménages), Felele-Challenge (89,5 %) ; GRA d'Agodi (67 %) et Mokola (79,8 %). En revanche, ce sont les ménages des vieux quartiers indigènes de la ville qui y recouraient le moins, comme Agugu (3,8 % des ménages), Oranyan (3,6 %), Kobomoje (9,1 %) et Gege (l,1 %). La plupart des entrepreneurs privés louent des camions à benne basculante ; l'un d'entre eux est propriétaire d' un camion compacteur et certains autres possèdent leurs propres camions à benne basculante. Les ménages paient de 20 à 50 nairas par mois pour leurs services.

Fréquence de collecte des ordures par les organismes gouvernementaux

L'enquête que le NISER a menée en 1988 a révélé que, chez les ménages qui faisaient appel aux organismes gouvernementaux, 31,9 % des répondants ont mentionné que la collecte des déchets solides se faisait plus d'une fois par semaine. La collecte était hebdomadaire pour 5,2 % des répondants et se faisait à la quinzaine selon 2 % d'entre eux. Peu de ménages recevaient un service de collecte tous les jours ou toutes les trois semaines. Les sous-traitants du secteur privé employés par le gouvernement faisaient la collecte à des intervalles semblables. Ainsi, le plus souvent, ces entreprises passaient plus d' une fois par semaine (32,7 %). La collecte se faisait toutes les semaines chez 5,8 % des répondants et à la quinzaine chez 2,8 % d'entre eux. Un seul répondant (Sawmill-Onipepeye) recevait un service quotidien, et 0,4 % voyaient leurs ordures ramassées toutes les trois semaines (tableau 8).

Il en allait tout autrement des entrepreneurs engagés par les résidents, qui effectuaient le plus souvent une collecte hebdomadaire (29,2 % des répondants). La collecte à la quinzaine et toutes les trois semaines était également plus courante que chez les organismes gouvernementaux ou les sous-traitants du secteur privé (tableau 9).

La population

Les gens doivent apporter eux-mêmes leurs ordures ménagères aux bennes (lorsqu'ils n'ont pas de boîtes à ordures). C'est le cas notamment dans plusieurs quartiers d'Ibadan, et surtout au centre, inaccessible aux camions, où les bennes doivent donc être déposées en périphérie, près des voies principales. Les citadins doivent donc faire preuve de beaucoup de coopération, car les problèmes de pollution persisteront s'ils décident de jeter leurs ordures ailleurs. Or, pour des raisons que nous décrirons plus loin, cette coopération est difficile à obtenir.

Frais exigés des résidents pour la collecte des ordures

Selon le tableau 10, en 1988, à part les 9,5 % de répondants qui ne savaient pas combien ils payaient pour la collecte des ordures, une proportion considérable de résidents ne payaient rien (41,3 %). C'est donc dire que, dans plusieurs secteurs, la collecte des ordures est une activité communautaire volontaire, ce dont témoigne le fait que la proportion la plus élevée de personnes qui ne payaient rien pour la collecte a été relevée dans les secteurs indigènes, tels Agugu (89,8 %), Oranyan (91,2 %), Ayeye (64,7 %) et Gege (89,3 %).

Parmi les répondants qui payaient pour la collecte des ordures, la plupart (37,9 %) versaient entre 5,01 et 10 nairas/mois. Les secteurs de la ville où l'on a relevé la plus forte proportion de résidents qui payaient des frais étaient Mokola (72,8 %), Felele-Challenge (70,5 %), Oke Ado-Oke Bola (89,6 %) et le domaine Oluyole (72,1 %). Dans l'ensemble de la ville, 5,3 % des résidents payaient 5 nairas/mois ou moins, 5,6 % payaient de 10,01 à 15 nairas/mois et 0,3 % payaient plus de 15 nairas/mois. Dans l'ensemble, la proportion de résidents dont le paiement se trouvait dans les tranches supérieures (plus de 10 nairas par mois) était la plus élevée à Alamu-Apata (22,7 %), dans la GRA d'Agodi (19,3 %), à Agbowo-Orogun (14,3 %) et dans le domaine d'Oluyole (14 %), et elle s'établissait en moyenne à 5,9 % pour l'ensemble de la ville.

Malgré l'inflation des prix au Nigeria, les frais de collecte des ordures ont à peine augmenté. Ainsi, ils oscillent actuellement entre 20 et 50 nairas par mois. Cependant, de nombreux résidents de la ville se disent prêts à payer plus cher pour un service amélioré.

Les degrés de satisfaction à l' égard des services de collecte des ordures

Au moment de l'enquête (NISER, 1988), la plupart des résidents d' Ibadan étaient satisfaits des services de collecte : 26,6 % étaient assez satisfaits, et 41,7 % étaient satisfaits. Cependant, 8,1 % étaient plutôt insatisfaits, 15 % insatisfaits et 0,8 % très insatisfaits. On a relevé plus de résidents satisfaits dans les secteurs où l' on faisait particulièrement appel à des entrepreneurs privés, comme Felele-Challenge (89,1 %), Oke Ado-Oke Bola (87,60/0), Agbowo-Orogun (88 %), Alamu-Apata (81 %) et la GRA d'Agodi (84,1 %). Par contre, plus de gens étaient plutôt insatisfaits, insatisfaits ou très insatisfaits à Oranyan (50,2 %), Agugu (44,7 %) et Gege (44,9 %).

Les résidents insatisfaits ont attribué différents motifs à leur insatisfaction : 6,9 % ont dit qu' il y avait une grande distance entre leur résidence et les dépôts d'ordures ; 4,1 % ont affirmé que les agents ne passaient pas régulièrement chez eux ; 1,6 % ont déploré les frais élevés ; 3,1 % ont dit que la collecte et les installations d'élimination étaient inadéquates (particulièrement dans les secteurs indigènes). Certains résidents (1,2 %) étaient insatisfaits parce que les entrepreneurs se débarrassaient des ordures de façon irréfléchie. Par exemple, dans les cas où les entrepreneurs recouraient à l' incinération, certaines personnes ont déploré le caractère peu hygiénique et répugnant des dépôts d'ordures. De nombreux résidents hésitaient à collaborer avec leurs voisins en matière d' hygiène.

Les autres méthodes d'élimination des déchets employées par la population

Faute d'installations structurées d'élimination des déchets ou à cause du refus des gens de les utiliser, la population recourt à un éventail d' autres méthodes d'élimination qui sont gravement nuisibles à l'environnement. Par exemple, le déversement illégal de déchets sur les terrains vagues, le long des routes, dans les caniveaux, etc., obstrue les drains et les bouches d'égout, perturbe les activités commerciales, encombre les voies publiques et freine la circulation automobile. En outre, les services d'élimination des déchets solides sont débordés par la quantité de déchets à traiter, de sorte que ceux-ci sont généralement incinérés dans les foyers, les zones, les dépôts d'ordures et les décharges, ce qui pollue l' air et l' environnement en général. Ainsi, l'étude menée par la NISER en 1988 révèle que 26,8 % des habitants d' Ibadan qui ont été interrogés incinèrent leurs déchets et déversent les cendres dans les caniveaux. Par ailleurs, 35,8 % des personnes interrogées incinèrent leurs déchets et jettent les cendres dans des décharges à ciel ouvert, qui sont souvent non autorisées et qui risquent de ne jamais être dégagées.

Il existe environ 40 marchés à Ibadan, et il s'y fait beaucoup de vente ambulante. L'intensification incontrôlée des activités du secteur parallèle dans la ville a entraîné l'occupation de tout l'espace disponible, sans égard envers le type d'utilisation du territoire. Ainsi, les petits commerçants bloquent les voies d'accès et enfreignent les règlements de retrait. Outre qu'elle augmente la production de déchets, cette situation entrave les mécanismes de collecte. On peut en bonne partie l'attribuer au peu de respect de ces personnes à l'égard des administrations locales et des dirigeants.

Par contre, la même étude a permis de constater que la population est tout à fait disposée à payer pour la collecte et l'élimination des déchets solides, dans la mesure où le service est amélioré. Il faut donc mobiliser la population et lui demander de contribuer à l' assainissement de l'environnement, notamment au plan financier.

Après avoir pris le pouvoir, le 31 décembre 1983, le régime militaire a organisé des journées de l'environnement, tous les deux samedis. Cette initiative a permis d' accroître la participation des résidents à la gestion des déchets. Les résidents recueillent les déchets domestiques solides, qui sont transportés à la décharge par camion. Des particuliers et des organismes tels que la National Association of Road Transport Workers et la National Association of Road Transport Owners ont fait don de quelques camions. Cependant, il reste beaucoup à faire pour que les citoyens intègrent l' hygiène environnementale dans leur vie quotidienne et cessent de la considérer comme une corvée à faire deux fois par mois.

Les organisations non gouvernementales, les organismes communautaires, les établissements d'enseignement et les instituts de recherche

Les organisations non gouvernementales (ONG), les organismes communautaires, les établissements d'enseignement et les instituts de recherche s'occupent surtout de l'information du public et de la recherche. La Nigerian Society of Engineers a organisé récemment des débats communautaires sur la gestion des déchets au sein des administrations locales d' Ibadan. Le Centre for African Settlement Studies and Development (CASSAD) s'emploie toujours à promouvoir la gestion des déchets au moyen de recherches, de discussions, d'exposés et de séminaires sur les politiques. Les universités et les instituts de recherche mènent également de nombreuses recherches, mais le service de gestion des déchets d' Ibadan n' a pas toujours accès aux résultats.

Évaluation de la gouvernance dans le contexte de la gestion des déchets

Le sommaire qui précède révèle que le système de gestion des déchets d'Ibadan présente des lacunes en matière de gouvernance dans ce domaine. Ces lacunes, décrites ci-dessous, empêchent la gestion efficace des déchets.

Problèmes relatifs au cadre institutionnel

Au Nigeria, il existe à tous les niveaux d' administration des institutions et organismes responsables de la gestion des déchets. L' accumulation de déchets dans les villes nigérianes peut donc être attribuée non pas à l' absence d' institutions mais à des lacunes au plan de leur fonctionnement. Par exemple, les divers organismes et institutions agissent de façon autonome et fragmentée, et quand ils collaborent, ils se mettent généralement des bâtons dans les roues. Les Nigérians qui dirigent une institution ont tendance à vouloir créer leur petit empire, et préfèrent procéder comme bon leur semble au lieu de tenir compte des conseils d' institutions semblables ou de collaborer avec elles. C'est pourquoi il est toujours difficile de déterminer les responsabilités des différents organismes gouvernementaux en matière de gestion des déchets, et leur niveau d'administration. Les institutions de gestion des déchets ont des rapports encore plus tendus avec les autres organismes de développement, surtout ceux qui s'intéressent à l' aménagement du territoire, au logement, au transport et à d' autres infrastructures.

Chaque institution a tendance à agir seule, sans tenir compte des besoins des autres.

Comme nous l' avons déjà observé, la plupart des administrations municipales et locales du Nigeria sont incapables d' assumer bon nombre des fonctions que leur impose la constitution. Surtout, la gestion des déchets ne représente pas une priorité pour la plupart de ces administrations, comme en témoigne une étude menée par Koehn (1992) sur les administrations locales du Nord du Nigeria. Les résultats de cette étude sont exposés aux tableau 11 et 12. Comme l'indique le tableau II, les administrations se concentrent sur l'éducation, la collecte des taxes et impôts, les services agricoles et l' approvisionnement rural et semi-rural en eau. En outre, les cinq tâches auxquelles les administrations locales accordent le plus d' importance sont, en ordre décroissant, l'éducation, les services agricoles, la perception des taxes et impôts locaux, les services de santé et l' approvisionnement rural et semi-rural en eau. Parmi les autres services, relevons le développement communautaire, la construction de routes, la voirie, le maintien de l'ordre public, les marchés et les parcs de stationnement (tableau 12). Il va sans dire que l' hygiène et la gestion des déchets ne se trouvent nulle part dans ces tableaux.

D' autres études confirment que les constatations de Koehn sur les administrations locales du Nord du Nigeria s' appliquent à la plupart des administrations locales du pays (Onibokun, 1989). Bien que le rôle des divers niveaux d' administration soit précisé dans la constitution, les dirigeants du niveau local, qui ne se considèrent pas comme redevables envers la population, négligent de toute évidence de consulter celle-ci avant d'établir leurs priorités. C'est même cette attitude qui est à l'origine de la plupart des problèmes administratifs à ce niveau d' administration, et notamment l' incapacité des administrations de mobiliser la population et d'obtenir leur confiance.

Les institutions locales sont très instables. Des organismes sont créés et abolis sans raison apparente. Les organismes en place ne reçoivent pas assez de soutien technique ou financier pour exercer leurs fonctions, et pour cette raison, ils sont remplacés sans que soient corrigés les problèmes qui ont entravé leurs activités. Le tableau 13 illustre bien cette situation. Avant 1972, la collecte des ordures ménagères relevait de l'administration municipale d'Ibadan. De 1973 à 1978, elle a été confiée à un conseil d'élimination des déchets (Ibadan Waste Disposal Board) créé par le gouvernement de l' État d' Oyo. Par la suite, l' administration municipale d'Ibadan a repris cette tâche en charge, avec la collaboration du ministère du Logement et de l'Environnement. La prise du pouvoir par l' armée, le 31 décembre 1983, a abouti au transfert de la gestion des déchets au département des égouts et des ordures du ministère des Travaux publics, et plus tard à la création du State Environmental Sanitation Task Force (groupe de travail sur l' hygiène environnementale) de l'État d'Oyo, qui œuvrait en collaboration avec l'administration municipale d'Ibadan. Les transferts subséquents de responsabilité sont exposés plus haut.

La situation des dirigeants et des fonctionnaires est très instable. Les dirigeants des administrations locales, qui sont les principaux responsables de la gestion des déchets, sont nommés et destitués au gré des niveaux supérieurs d' administration. Cette incertitude les pousse à consacrer beaucoup de temps à rechercher l' appui des dirigeants des niveaux supérieurs, et à tenter de leur plaire. Ils ne sont donc pas tellement intéressés à mettre en œuvre des programmes à long terme ou à défendre les intérêts de la population. Bon nombre d' entre eux profitent de leur poste pour s'enrichir. Il y a donc beaucoup de corruption et une absence totale de transparence. De 1976 à 1994, les dirigeants du niveau local (y compris de l' administration municipale) ont été remplacés plus de six fois. Par exemple, l' administration locale de l' île de Lagos a évolué sous quatre administrations fédérales de janvier 1990 à mai 1991. Les nouveaux gouvernements ont l' habitude de discréditer les administrations précédentes et d' abandonner les politiques et programmes auxquels celles-ci ont consacré beaucoup d' argent. Les administrations cherchent à réaliser les petits projets qui les intéressent de façon plutôt cavalière et inconsidérée, sans se soucier de laisser un témoignage durable de leur passage au pouvoir. Des institutions sont créées, fusionnées avec d' autres institutions, puis séparées et fusionnées à nouveau plus tard. Les fonctionnaires sont nommés au hasard et destitués avec encore plus de désinvolture.

A cause de cette situation, les règles, règlements et liens hiérarchiques au sein de l'État et des institutions sociales sont violés, et aucune valeur n' apparaît légitime et défendable pour la société.

A cause des divergences politiques entre les divers niveaux d'administration, surtout pendant les périodes où le pays était gouverné par un régime civil, lorsque l' État et les administrations locales et municipales étaient dirigés par des partis politiques différents, les différents niveaux s' appropriaient les fonctions des autres sans tenir compte de leur capacité de les remplir.

La gouvernance est également fragmentée. Au lieu de l'envisager de façon globale, les gouvernants autorisent ou forcent les organismes de développement, tels que ceux qui s' intéressent à l' aménagement du territoire, au transport, au logement et à la gestion des déchets, à mettre en œuvre leurs propres programmes et à exécuter leurs propres projets sans s'occuper de ceux des autres. Pourtant, il ne peut y avoir de bonne gouvernance à moins d'établir et de coordonner des rapports, interactions et liens de communication entre les différents exécutants et intervenants. Sans de tels rapports, la population ne peut faire confiance aux gouvernants, qui sont dès lors moins en mesure de gouverner.

Cette gouvernance fragmentée suscite de la confusion, surtout en ce qui concerne la gestion des déchets. Par exemple, dans les secteurs densément peuplés, le réseau routier est insuffisant, ce qui entrave la collecte. Autrefois, l' Ibadan Metropolitan Planning Authority (agence d' aménagement de la région métropolitaine d' Ibadan), qui avait pour mandat d' assurer l' assainissement ainsi que de réglementer et contrôler tous les aspects de l' aménagement à Ibadan, était parvenu à mettre un peu d'ordre dans ce domaine. Mais elle a été dissoute, et aucune autre institution ne lui a succédé, ce qui a donné libre cours à l' aménagement fragmenté. Les conflits intergouvernementaux ont poussé plusieurs observateurs à réclamer la création d'un organisme de réglementation qui lancerait et coordonnerait des programmes aux niveaux fédéral, régional et local. Selon ces observateurs, ces organismes devraient également assurer la participation du public à la gestion des problèmes urbains, qui demeure impossible à cause de la fragmentation de la gouvernance (Uyanga, 1982 ; Gboyega, 1983 ; Olowu, 1994).

La gestion des déchets à Ibadan comporte une lacune importante du fait qu'elle ne fait intervenir que cinq des 11 administrations locales de la région. Bien que ces cinq administrations représentent environ 67 % de la population de la région d'Ibadan (tableau 14), les autres administrations gèrent d' importants secteurs de la ville. Il s' agit à nouveau d' un cas d'exclusion qui décourage une bonne gouvernance. Les six administrations locales exclues sont contraintes de créer leurs propres systèmes, sans les conseils ni la collaboration de l'IUSC. Aucune d'entre elle ne dispose des ressources techniques, financières et administratives nécessaires pour assurer la gestion des déchets dans son territoire de compétence, et c'est pourquoi I~ collecte et l'élimination des déchets y laissent à désirer. En outre, les sites retenus récemment pour l' aménagement de décharges, et dont l' IUSC et l' EPC assurent l'étude et l' aménagement, sont situés dans ces administrations exclues. Faute de consultations et d'entente équitable, des différends ne manqueront pas de surgir.

Problèmes d'administration et de gestion

Les problèmes d'administration et de gestion vont de pair avec les problèmes relatifs au cadre institutionnel. Comme nous l'avons déjà souligné, les institutions responsables de la gestion des déchets connaissent une grave pénurie de personnel et de compétence. Par exemple, seulement 200 personnes travaillent sur le terrain, alors qu'il en faudrait de 400 à 500 pour obtenir un bon rendement. C'est le manque d'argent qui est en bonne partie responsable de cette situation. Cependant, même pendant les périodes les plus favorables, on n' a pu recruter de personnes suffisamment qualifiées (particulièrement au plan technique), notamment parce que les administrations locales n'ont pas très bonne réputation. Comme il s'agit du niveau d' administration le plus proche de la population, celle-ci a tendance à la juger responsable de l'incurie des administrations en général. De fait, les administrations locales négligent souvent de consulter la population et de tenir compte de ses besoins. C'est ainsi que persiste leur réputation d' inefficacité, de corruption et d'irresponsabilité. Dans une bonne partie du pays, c'est souvent en dernier recours que les gens acceptent un poste dans une administration locale.

Les mauvaises conditions de travail aggravent cette situation. Depuis toujours, le personnel des administrations locales est moins bien payé que les fonctionnaires des niveaux régional et fédéral, et dans les administrations locales, ce sont les fonctionnaires de la gestion des déchets qui sont les moins bien rémunérés. Par conséquent, bien que les fonctionnaires locaux (malgré l' harmonisation des salaires) se sentent inférieurs à leurs collègues des États et du gouvernement fédéral, ils traitent avec condescendance les travailleurs de la section de la gestion des déchets. Cette situation est démotivante et favorise la paresse.

Comme l'a observé Obadina (1995), c'est de 1973 à 1978, alors que l' Ibadan Wastes Disposal Board était chargé de la gestion des déchets à Ibadan, que la situation était la meilleure, car beaucoup de personnel technique était alors disponible. Ce personnel se composait du directeur général (un ingénieur), d'un ingénieur responsable de la conception et de la construction et de six autres ingénieurs chargés de l'exploitation, de la planification, de la conception et de la construction. Avant et après cette période, l'organisme responsable n'avait à son service que deux ingénieurs tout au plus, et parfois même aucun, ce qui le rendait très inefficace.

Par ailleurs, la gestion de l'IUSB est dominée par les administrations locales, alors que la responsabilité fonctionnelle revient à l'IUSC. Cependant, il est évident que ces deux organismes ne se consultent presque jamais et ne demandent pas l' avis de la population quand vient le temps de départager les responsabilités en matière de gestion des déchets ou de déterminer les allocations financières à l' IUSC. Cette situation entrave considérablement la gouvernance en matière de gestion des déchets. Donc, dans la plupart des cas, on ne sait trop qui est responsable de quoi. Par exemple, tant les administrations locales que l' IUSC disposent de véhicules de collecte, et les camions que l' EPC a donnés aux administrations locales y sont stationnés. On peut se demander pourquoi ces administrations devraient conserver les véhicules de collecte du fait que c'est l' IUSC qui est chargée de la collecte des ordures. Les administrations locales ont des divergences d'opinion, notamment en ce qui concerne les allocations budgétaires versées à l'IUSC et le rendement de cet organisme. Certaines préféreraient même s'occuper de la collecte des déchets elles-mêmes. Soulignons que les dispositions actuelles n'ont pas d' assises légales. Il n'existe pas de rapports de confiance, d'interdépendance et de réciprocité entre les deux institutions et entre celles-ci et la population. On peut donc conclure que les dispositions de gestion des déchets sont tout aussi instables que les administrations locales elles-mêmes.

Problèmes financiers

Les lacunes de la gouvernance urbaine (et notamment l' absence de liens étroits et de confiance entre les gouvernants et les gouvernés) et des relations intergouvernementales ainsi que l' incompétence des gouvernants nuisent à la capacité de la plupart des'administrations urbaines de mobiliser les ressources financières, humaines et matérielles nécessaires pour assurer une bonne administration.

Comme l' a démontré Onibokun (1997), le manque d' argent et de personnel compétent a transformé de nombreux conseils urbains et organismes municipaux d' aménagement en organes superflus qui représentent un fardeau pour les gouvernements régionaux. Depuis les réformes de 1976, les administrations locales ont tendance à s'en remettre au gouvernement fédéral pour leur financement au lieu d' accepter les difficultés et les avantages de l' autonomie financière, c'est-à-dire la non-ingérence des niveaux supérieurs de gouvernement dans leurs activités. Citant diverses sources, Onibokun a relevé les caractéristiques suivantes dans la plupart des administrations locales nigérianes :

– les administrations sont déficitaires ;

– elles sont sous-financées ;

– le fardeau fiscal n'est pas équitablement réparti (par exemple, des sources de recettes fiscales importantes comme l' impôt foncier sont négligées) ;

– les dépenses ne sont pas fondées sur un ensemble de priorités défendables2;

– les administrations locales se soucient peu d'être efficaces et d'éviter le gaspillage ;

– leurs contrôles financiers sont inefficaces ;

– l'information financière est souvent obtenue trop tard, ou est trop obscure pour être utile.

Ainsi, les cinq administrations locales participantes sont incapables d' appuyer efficacement les activités de l' IUSC, qui n'est donc pas en mesure de produire des recettes internes. Comme nous l' avons souligné, le gouvernement fédéral demeure le principal bailleur de fonds des administrations locales, qui ne perçoivent ellesmêmes qu'une petite partie de leurs recettes. Le budget de l' IUSC est établi à partir des contributions des cinq administrations participantes. A l' heure actuelle, ces contributions (1 million de nairas par administration locale en 1993) sont retenues à la source et versées directement à l'IUSC qui, par le fait même, est vulnérable à l' instabilité politique. En outre, ces contributions n'ont aucun fondement économique, car l'IUSC n' intervient pas dans l'établissement de son propre budget. Elles ne sont fondées ni sur la population des diverses administrations ni sur la quantité de déchets produits sur leur territoire.

Plusieurs facteurs empêchent l'IUSC de produire des recettes internes. A l' heure actuelle, sa seule source de revenus d'exploitation provient de ses clients institutionnels, comme les écoles et les hôpitaux, et de certaines institutions privées, et il n'apas établi de mécanisme structuré de perception des fiais. Dans la plupart des cas, les personnes qui veulent payer leur facture doivent passer à un bureau de perception. Habituellement, le client ne paie que s'il a besoin d'un service permanent ou à la condition de recevoir un autre service quelconque. En d'autres mots, pour produire des recettes, il faudrait établir un mécanisme de renforcement mutuel axé sur la participation et la coopération des citoyens.

2 Par exemple, les dépenses générales civiles et administratives sont assumées essentiellement au détriment des services à la population. On estime que plus de 80 % des recettes sont consacrées aux dépenses courantes, ce qui fait augmenter les dépenses et ne laisse que de 5 à 15 % des recettes totales pour les dépenses en immobilisations.

Aucune pénalité ni sanction n'est actuellement imposée pour défaut de paiement. Les marchés, qui devraient représenter une source importante de revenus pour l'IUSC, demeurent une ressource inexploitée en raison de l' absence de mécanisme pour calculer et percevoir les &ais. Ainsi, les recettes tirées de la collecte des ordures sont très faibles ; on estime que, dans les cinq administrations locales, elles se sont établies à seulement 80 000 nairas en 1993, par rapport à des dépenses totales de Il millions de naira au titre de la gestion des déchets solides. Ces recettes sont passées à 0,2 million de nairas en 1994, mais ce n'est rien par rapport aux dépenses actuelles, qui sont estimées à 70 millions de nairas par an.

Les dépenses en immobilisations augmentent sans cesse et ont atteint un niveau excessif. Les investissements dans les installations et l'équipement en 1988, selon Haskoning and Kosandem Associates (1994), s'élevaient à environ 20,8 millions de dollars américains (ou 94 millions de nairas au taux de change de 1988 de 4,50 nairas pour 1 dollar US). Au taux de change de 1995 (de 82 nairas pour un dollar), si l'on ne tient pas compte des besoins croissants en services de collecte d'ordures résultant de la croissance de la ville, ces dépenses seraient d'environ 1,7 milliard de nairas. Obadina (1995) estime en fait que les dépenses en immobilisations devraient s'élever à 5 milliards de nairas, bien plus que ce que peuvent se permettre les organismes de gestion.

Problèmes de technologie et d'infrastructure

L'absence de bonne gouvernance se reflète également dans les différents problèmes techniques et d'infrastructure, qui sont exacerbés par le fait qu'il n'ya pas assez d'équipement et que les appareils dont on dispose sont difficiles à entretenir. Comme nous l'avons déjà souligné, en 1994, seulement 57 des 93 appareils disponibles étaient en état de marche. Au moment de l'étude, pas plus du tiers des 43 appareils fonctionnaient. Bien que l'IUSC dispose d' un atelier central pour l' entretien des véhicules, ses installations sont très limitées. On trouve àl'atelier une foule de véhicules en état de marche et en panne, ce qui laisse une impression de désordre et nuit considérablement aux activités. Les principaux problèmes d'entretien sont les suivants :

– ressources financières insuffisantes pour l'entretien en général mais surtout pour l'achat de pièces de rechange essentielles, dont certaines sont introuvables localement ;

– installations insuffisantes à l'atelier ;

– mauvais état des voies d'accès à l'atelier (et à la décharge) ; -lacunes au plan de la gestion des procédés d'entretien ;

– problèmes d'entretien et d'approvisionnement en pièces de rechange découlant du fait que l'équipement provient de plusieurs fabricants différents.

Cependant, les responsables de l'IUSC et de l'EPC étaient persuadés qu'il serait possible de régler ces problèmes d'entretien s'ils avaient plus d'argent. Quoi qu'il en soit, ces problèmes demeurent paralysants, surtout à cause du fait que la gestion des déchets est envisagée selon une approche inadéquate. Comme l'a souligné le Centre des Nations unies pour les établissements humains (Habitat) (CNUEH, 1989, p.14), de nombreuses municipalités considèrent que les problèmes de gestion des déchets solides sont attribuables à l'équipement, et se demandent comment obtenir et entretenir du matériel perfectionné lorsque « des systèmes de gestion des déchets qui comprennent la participation de la collectivité et ne nécessitent pas de haute technologie ni d'appareils inadéquats pourraient se révéler durables au niveau communautaire, étant donné que les collectivités à faible revenu peuvent entretenir des systèmes de gestion des déchets générateurs de revenus ».

Participation et coopération insuffisantes de la population

La coopération de la population, qui est essentielle à une bonne gouvernance, ne peut toujours être tenue pour acquise. D'une part, la population en général juge qu'elle ne devrait assumer aucune responsabilité en matière de collecte et d'élimination des déchets, car il s'agit pour elle d'un service public qui devrait incomber aux administrations locales. D'autre part, elle a généralement tendance à ne pas prendre au sérieux ces administrations et leurs membres. Cette situation est due en bonne partie au fait qu'en raison des interventions fréquentes et prolongées de l'armée dans la gouvernance, les conseillers et présidents des administrations locales sont nommés par l'État et non élus ; ainsi, ils ne représentent pas vraiment la population. En fait, les résidents de presque tous les secteurs de la ville ignorent qui les représente à l'administration locale.

Dans une étude récente du CASSAD (1994) menée dans l'une des administrations locales, 80 % des personnes interrogées (qui faisaient surtout partie des élites urbaines) ne savaient pas dans quelle administration locale elles vivaient ; 76 % ignoraient le nom du président de leur administration locale et des conseillers qui représentaient leur quartier au conseil. Elles ont donné les raisons suivantes pour justifier leur manque d'intérêt :

– l'administration locale n'avait pas contribué à leur survie ;

– les membres de l'administration locale ne les représentaient pas (ils représentaient plutôt le gouvernement militaire qui les avait nommés) ;

– l'administration locale ne jouait aucun rôle visible (la population devait puiser elle-même son eau dans des puits et des trous de sonde, aménager ses propres chemins et organiser ses propres services de sécurité).

Pour ces raisons, les citoyens jugeaient les fonctionnaires inaptes, inefficaces, corrompus et insuffisamment intéressés à leur bien-être. La population était donc peu disposée à collaborer avec eux. Le fait que les rues demeuraient jonchées de détritus malgré les mesures prises par les institutions représentait pour elle une preuve de l'incompétence des fonctionnaires, qui ne méritaient dès lors ni leur coopération ni leur aide.

Outre les retenues à la source, la population ne paie essentiellement aucune autre taxe, ni même d'impôts fonciers. Cette situation aggrave considérablement les problèmes financiers des administrations locales et les rend encore plus dépendantes du financement des niveaux supérieurs de gouvernement, et notamment du gouvernement fédéral.

Par contre, les administrations locales n'ont pas vraiment cherché à mobiliser ou à informer la population. En fait, étant donné qu'ils dépendent du financement fédéral, les conseillers ne jugent pas avoir à rendre des comptes à la population ni avoir besoin de son soutien ou de sa collaboration. Conscients de l'instabilité de leur poste, ils ne cherchent à plaire à personne, et ne se soucient que de leurs propres intérêts et de ceux qui les ont nommés. Ainsi, même les associations communautaires comme les associations de propriétaires et de locataires sont tout à fait exclues, bien qu'elles jouent un rôle crucial dans d'autres aspects du développement, comme l'aménagement d'infrastructures et le financement de services de sécurité. Ces associations pourraient assumer des responsabilités bien plus importantes en matière de gestion des déchets. Un bon nombre d'entre elles ont donné des véhicules à la police pour la prévention du crime. Elles pourraient faire de même pour la gestion des déchets, moyennant une information, une éducation, une consultation et une mobilisation adéquates.

En résumé, la non-participation des organismes populaires à la gestion des déchets à Ibadan a eu les conséquences suivantes :

– manque de confiance envers les activités du gouvernement ;

– indifférence et désinvolture à l'égard des programmes gouvernementaux ;

– instabilité des activités gouvernementales et responsabilité insuffisante des fonctionnaires ;

– insensibilité du gouvernement aux besoins et aspirations de la population ;

– absence de sentiment d'appartenance des citoyens par rapport au gouvernement ;

– absence d'interventions utiles qui permettraient d'améliorer la gouvernance.

Vers l'amélioration de la gouvernance en matière de gestion des déchets

Notre exposé a révélé jusqu'à maintenant que la plupart des problèmes de gestion urbaine, surtout en matière de gestion des déchets, sont attribuables à une mauvaise gouvernance. Le régime actuel de gouvernance en matière de gestion des déchets à Ibadan présente les lacunes suivantes :

– il n'est ni représentatif ni démocratique : les dirigeants actuels ont été nommés ou choisis par la dictature militaire, et non élus par la population. Ils ne peuvent donc être tenus responsables de leurs actes par l'entremise de procédures et de procédés institutionnalisés, tels que des élections ;

– il entraîne l'exclusion et la discrimination. Comme les dirigeants ne sont pas élus, ils ne sont pas disposés à promouvoir les intérêts d'autres intervenants par la concurrence, des moyens de pression, des négociations et la résolution des conflits. Comme l'armée qui leur a donné le pouvoir, ils cherchent à consolider les pouvoirs restreints dont ils disposent au détriment des autres intervenants, qui réagissent en refusant de collaborer avec eux ou de leur accorder leur confiance. Les rapports organiques et symbiotiques qu'il devrait y avoir entre gouvernants et gouvernés sont absents ;

– la plupart des gouvernants n'ont pas la capacité de gouverner, c'est-à-dire qu'ils ne peuvent trouver des moyens de résoudre les problèmes de la population. Par conséquent, ils sont dépourvus de légitimité et de pertinence ;

– souvent, rien ne régit les rapports entre les institutions ; les règles, quand il y en a, sont vagues et violées impunément. Cette situation entraîne des conflits ou encore une apathie qui favorise l'inefficacité et la corruption.

Il est donc nécessaire de rectifier cette situation et d'assurer une bonne gouvernance. Le meilleur moyen de le faire consiste à accélérer le processus actuel de démocratisation. On peut donc espérer que les pressions qu'exercent la communauté internationale et les groupes démocratiques, entre autres, accéléreront le retour à la démocratie au Nigeria. Cependant, étant donné que l'armée intervient depuis longtemps dans la gouvernance, il y a un besoin urgent de raviver l' intérêt de la population à l'égard de la démocratie, notamment par les moyens suivants :

– promouvoir une nouvelle culture politique axée sur le dévouement, l'honnêteté, le souci du devoir et le service à la population ;

– sensibiliser la population à la nécessité de participer pleinement au processus électoral et de s'intéresser à la façon dont les représentants élus gouvernent ;

– établir des mécanismes appropriés pour assurer l'élection de dirigeants qualifiés et résolus à bien gouverner.

Pour améliorer encore plus la qualité de la gouvernance, il y a lieu d'envisager les moyens suivants de produire des revenus :

– l'autonomie gouvernementale et financière des centres urbains pourrait être accrue. Dans bien des pays, une bonne partie des recettes des administrations urbaines provient des impôts fonciers, mais le Nigeria exploite à peine cette source de revenus. Il est souhaitable de revoir les pratiques et réalisations actuelles et de constituer un mécanisme approprié d'imposition foncière ;

– dans certains pays développés, une taxe permet de recouvrer environ 90 % des coûts de la gestion des déchets. A l'heure actuelle, au Nigeria, le recouvrement des dépenses est presque nul ; il faudrait donc imiter cette technique pour améliorer la production de recettes. La loi habilitante devrait également comprendre des sanctions en cas de défaut de paiement. Heureusement, des enquêtes ont révélé que la population d'Ibadan serait disposée à payer si le service était amélioré ;

– les méthodes actuelles dont se servent les services de gestion des déchets pour percevoir les fiais de service, même auprès des clients institutionnels, sont généralement inefficaces. Un système axé sur la bonne volonté des clients est voué à l'échec au Nigeria, où les gens ont tendance à aller au plus pressé. Il faut donc réformer le mécanisme de perception. En outre, un mécanisme devrait être mis en place pour imposer des taxes aux marchés et les percevoir, car ces derniers produisent une bonne partie des déchets solides ;

– il ne fait aucun doute que les contributions (en partie financières) des administrations locales à la gestion des déchets augmenteraient si l'on parvenait à une efficacité acceptable. Pour ce faire, les administrations locales doivent consolider leur assiette fiscale, surtout en stimulant leur capacité de production de recettes, notamment au plan des mécanismes de perception. En outre, soulignons à nouveau que dans les secteurs urbains, il existe une gestion essentiellement intergouvernementale, qui fait intervenir différents rapports latéraux et verticaux entre divers niveaux d'administration. Le système de perception des coûts de collecte devrait être établi après des consultations et des négociations entre ces niveaux d' administration et entre les gouvernants et les gouvernés.

Un autre moyen important d'améliorer la gouvernance au plan de la gestion des déchets consisterait à intéresser la majeure partie de la population à l'élimination des déchets. Une meilleure coopération et une plus grande participation des citoyens, particulièrement au niveau communautaire, aurait des effets positifs, notamment les suivants :

– réduction des &ais d'immobilisations et d'exploitation ;

– adoption de technologies appropriées (à petite échelle) ;

– réduction du chômage dans les collectivités ;

– réduction de la quantité de déchets à transporter et à éliminer grâce à un système de tri et de recyclage ;

– augmentation des revenus grâce à la surveillance des biens ;

– protection de l'environnement par la prévention des inondations et de la pollution de l'air ;

– augmentation de la valeur des propriétés ;

– amélioration de la propreté et du niveau général d'hygiène et de santé dans la ville.

Il serait possible d'accroître la participation de la population et des collectivités par les moyens suivants :

– des campagnes d'éducation à l'hygiène et à la gestion des déchets solides pourraient être élaborées et mises en œuvre par les États et les administrations locales. Elles seraient financées généreusement sur le budget bonifié de l'institution chargée de la collecte et de l'élimination des déchets. La population doit être informée concernant les modes de collecte, la façon d'entreposer les déchets et de les acheminer aux points de collecte, leurs autres responsabilités et les avantages du service. En outre, il faut sensibiliser les gens aux dangers qui les guettent s'ils ne se soucient pas suffisamment de l' enlèvement et de l'élimi-nation des déchets : environnement malpropre, prolifération des mouches, pollution de l'air, maladies, etc. ;

– l'opinion de la population devrait être sollicitée concernant les divers projets de gestion environnementale. Des personnalités connues et des dirigeants communautaires devraient siéger au conseil des institutions responsables de la gestion des déchets ;

– les ONG devraient jouer un rôle plus actif dans la planification et l'exécution de l'élimination des déchets solides.

Notre étude a révélé que l'un des problèmes de gouvernance du système de gestion des déchets d'Ibadan réside dans l'aversion et la méfiance des gouvernés à l'égard des gouvernants, particulièrement au niveau local. Il faut donc établir une structure plus responsable et plus sensible aux besoins de la population dans les administrations locales, avec les ressources, le personnel et le contrôle du rendement nécessaires. Une telle structure administrative devrait viser à :

– assurer un bon contrôle budgétaire et l'obligation de .rendre des comptes ;

– décourager la dépendance actuelle à l'égard des financements externes, qui est presque totale ;

– mettre l'accent sur la création de compétences au sein du personnel ;

– recruter du personnel technique très compétent et dont l'intégrité est manifeste, qui aura la responsabilité de répondre aux besoins des gouvernés.

Nous avons également observé que la fragmentation de la gouvernance, c'est·à-dire le fait que divers niveaux et organismes administratifs mettent en œuvre des programmes et des projets en vase clos, représente un obstacle majeur à la bonne gouvernance au Nigeria. Cette situation a entraîné la confusion, les conflits et les incohérences que l'on constate en matière de gestion des déchets. Pour rectifier cette situation, il faut envisager la planification, et notamment celle de la gestion des déchets, de façon globale. Tous les types d'utilisation du territoire (logement, transport, commercialisation, approvisionnement en eau, production et élimination de déchets, etc.) devraient être considérés comme des sous-ensembles d'un grand système de planification, chacun ayant une influence sur les autres. Il serait donc souhaitable d'établir un organisme central de planification pour coordonner et contrôler le développement de ces diverses utilisations.

L'intervention du secteur privé dans la gestion des déchets est insuffisante et inégale ; elle diminue même depuis quelque temps. Elle se limite aux nouveaux secteurs de la ville, qui sont bien aménagés, et elle est entravée par de nombreux facteurs tels que le manque d'équipement, un financement insuffisant, l'absence de coopération, l'incohérence des politiques gouvernementales et l'absence de dispositions législatives et opérationnelles pour encadrer les activités du secteur privé.

Pourtant, étant donné l'importance accordée à la privatisation dans le cadre du programme d'ajustement structurel, on pourrait s'attendre à une participation plus active du secteur privé. En outre, des études ont révélé que les organismes privés sont plus efficaces que les organismes gouvernementaux dans les sphères d'activité qu' ils se partagent. Il faudrait donc veiller à accroître la participation du secteur privé. Un cadre opérationnel et législatif, comprenant des règlements de zonage, devrait être élaboré. Des mesures devraient être instaurées pour encourager le secteur privé à couvrir les secteurs anciens de la ville. Des mécanismes de formation régulière et de création de compétences devraient être implantés, et les entreprises devraient collaborer pour échanger leur expertise, leur expérience et leurs installations afin d'améliorer leurs capacités opérationnelles respectives.

Le recyclage est un aspect négligé de la gestion des déchets. Pourtant, on sait que les déchets contiennent une forte proportion de matériaux recyclables, comme du papier, du verre, du tissu, du plastique et du métal. Cette proportion oscille entre 35,6 % à Mokola, 41,3 % dans les GRA, 46,4 % au centre de la ville et 48 % à Bodija. Il serait souhaitable de récupérer une bonne partie de ces matériaux dans les ménages. Cependant, comme les déchets ne sont pas triés à la source, une bonne partie est perdue parce qu'ils sont tellement détériorés à leur arrivée à la décharge que les récupérateurs ont de la difficulté à les récupérer. Pour favoriser le recyclage, il faudrait prendre les mesures suivantes :

– promouvoir la séparation des déchets à la source (c'est-à-dire dans les ménages) ;

– rationaliser les activités des récupérateurs, en les formant, en perfectionnant leurs techniques et en mettant en place des mécanismes de protection de la santé ;

– favoriser le recyclage structuré des déchets par des moyens modernes tels que le compostage et la production de méthane par décomposition anaérobie. Pour ce faire, il faudrait obtenir la collaboration de chercheurs, du secteur privé et des différents niveaux d'administration.

Le gouvernement fédéral a instauré plusieurs politiques et programmes en vue de surveiller et de protéger l'environnement, et des lois régissent l'élimination des déchets. industriels. Cependant, on sait que, comme pour de nombreux autres gouvernements africains, l'application de ces politiques et programmes laisse à désirer. Il faut renverser cette tendance. Le gouvernement fédéral devrait renforcer ses organismes, et notamment la FEPA, pour leur permettre de remplir leurs tâches plus efficacement, particulièrement l'exécution des lois sur la gestion des déchets industriels.

Enfin, la gestion des déchets solides devrait être assujettie à un nouveau cadre institutionnel plus réaliste. A l'heure actuelle, les rapports entre les administrations locales et l'IUSC sont instables, à l'image de l'ensemble de la situation politique du Nigeria ; l'IUSC est donc mal placé, tant au point de vue législatif que des ressources dont il dispose, pour relever les défis de l'avenir. En outre, le conseil d'administration de l'IUSC n'est pas assez représentatif et déterminé pour atteindre ses objectifs. Un organe central chargé de la gestion des déchets devrait être créé sous peu, mais il faudrait s'assurer qu'il répond aux critères d'une bonne gouvernance :

– une participation accrue de la population devrait être obtenue, surtout au niveau communautaire, au moyen d'activités d'éducation et de mobilisation. Les organismes communautaires existants pourraient se consacrer à la gestion des déchets, ou de nouveaux organismes spécialisés pourraient être créés. Ces organismes devraient participer à toutes les délibérations et activités relatives à la gestion des déchets dans les collectivités ;

– il importe de garantir la durabilité économique de la gestion des déchets, surtout en ce qui concerne les aspects gestionnaires, techniques et financiers, en assurant le recouvrement des dépenses et en implantant des technologies abordables et bien adaptées. Par exemple, pour le transport sur de courtes distances, il faudrait accroître l'utilisation des charrettes et brouettes au lieu de véhicules à moteur ; pour le transport à l'échelle de la ville, des camions à porte à rideau, des véhicules à benne basculante ou des camions compacteurs devraient être utilisés ;

– il faut améliorer l'efficacité des opérations pour parvenir à une hausse considérable du niveau actuel de collecte des déchets, que l'on estime à moins de 10 % ;

– un niveau élevé de récupération et de réutilisation est souhaitable. La poursuite de cet objectif devrait se faire avant tout dans les ménages ;

– une plus grande partie des activités liées à la gestion des déchets devrait être privatisée ;

– il importe d'obtenir les services d'un personnel bien formé et motivé à tous les échelons ;

– toutes les personnes qui participent à la gestion des déchets solides devraient être tenues de rendre compte de leurs actes ;

– bien qu'il faille chercher à accroître les recettes tirées de la gestion des déchets, il faut s'assurer que les frais sont abordables pour les utilisateurs ;

– l'organe responsable devrait agir non pas en vase clos, mais de concert avec les autres agents de développement.

Ces changements structurels sont fondés sur une bonne gouvernance. L'institutionnalisation d'une bonne gouvernance repose quant à elle sur la démocratisation et la participation populaire, qui comblent le fossé entre les gouvernants et les gouvernés afin d'établir entre eux des rapports de confiance, d'interdépendance, de réciprocité, de sensibilité et de responsabilité. Ainsi, alors même que des pressions s'exercent sur la scène nationale et internationale pour assurer le retour rapide à la démocratie et l'arrivée au pouvoir de personnes compétentes, il faut rappeler à la population qu'elle devra exiger et obtenir le droit de regard sur la vie sociale en y participant activement.

Tableau 1
Population et production de déchets solidesà Ibadan, 1992–2000

Année

Population (x 103)

Déchets produits par an (t x 103)

1992

3 430

751

1994

3 620

754

1996

3 638

797

1998

3 748

821

2000

3 860

845

Source : Haskoning and Konsadem Associates (1994).

Tableau 2 Composition des déchets solides à Ibadan, 1983

Composition moyenne selon le poids (%)

 

GRA

Bodija

Mokola et Sango

Oke Ado

Agugu traditionnel

Centre (Ojaba)

Feuilles d'arbres

7,5

4,3

33,2

23,5

32,6

26,5

Restes d'aliments

35,5

19,2

9,1

3,6

5,4

6,9

Papier

15,1

26,2

10,7

19,4

15,2

16,6

Cartonnages et tissus

1,3

1,5

4,8

6,8

4,5

10,9

Plastiques

4,1

8,9

3,7

11,6

4,8

6,1

Boîtes de conserve et métaux

20,8

11,4

16,4

16,4

7,7

12,8

Os, cendres et pierres

5,9

16,7

19,1

18,1

28,8

21,0

Divers

0,8

11,8

3,0

0,5

1,0

2,2

Source : Tiré de PAI Associates (1983) et Sridhar (1996). Rem. : GRA = zone réservée par le gouvernement.

Tableau 3
Évolution de la composition des déchets solides à Ibadan, 1969–1982

Composition moyenne selon le poids (%)

 

1969

1982

 

 

Vieille ville (GRA)

Nouvelle ville (Bodija)

Vieille ville (Oke Ado)

Nouvelle ville (Agugu)

Feuilles d'arbres

80,7

9,7

34,4

5,6

Restes d'aliments

9,0

70,3

6,7

27,4

Papier

3,4

10,0

15,9

20,7

Cartonnages et tissus

4,1

1,6

7,7

1,4

Plastiques

__

__

5,5

6,5

Boîtes de conserve et métaux

2,3

5,9

10,3

16,1

Os, cendres et pierres

0,5

2,5

6,1

10,9

Divers

__

__

18,4

11,1

Source : PAI Associates (1983).
Rem. : GRA = zone réservée par le gouvernement.

Tableau 4
Fonctions des administrations locales selon les réformes de 1976 et la
constitution de 1979

Catégorie A —Fonctions exclusives

Marchés et véhicules à moteur

Inspections sanitaires

Abattoirs et plaques d'abattage

Réglementation des établissements alimentaires

Enregistrement des naissances, décès et mariages

Perception des taxes et impôts locaux

Cimetières

Contrôle des animaux

Égouts ou élimination des ordures (ou les deux)

Toilettes publiques

Pâturages

Centres communautaires et récréatifs

Contrôle des domaines forestiers privés

Parcs, jardins et espaces libres

Réglementation des véhicules automoteurs

Catégorie B — Fonctions partagées avec l'État

Services médicaux

Services agricoles Information du public

Éducation primaire et éducation des adultes

Aide aux arts et à la culture

Construction et entretien des routes

Éducation sur l'hygiène publique

Approvisionnement rural et semi-urbain en eau

Aménagement urbain et rural

Protection incendie Logement public

Exploitation d'entreprises commerciales

Source : FGON (1978, 1979).

Tableau 5
Budget de l'unité d'élimination des déchets
de l'Ibadan Urban Sanitation Committee, 1992 et 1993

Classification et expérience

Dépenses estimatives 1993 (x 103 nairas)

Dépenses approuvées 1992 (x 103 nairas)

1

Entretien des véhicules de collecte ; achat de matériel, d'outils et de pièces de rechange ; fonctionnement de l'unité du chargement des batteries et de vulcanisation

1200

500

2

Entretien des usines et des machines lourdes

1200

400

3

Achat de lubrifiants et d'huiles

500

200

4

Achat de fournitures et d'équipement sanitaires

250

50

5

Entretien des meubles et de l'équipement de bureau ; frais d'électricité et d'eau potable

160

10

6

Papeterie et impression

40

6

7

Formation du personnel ; atelier

150

5

8

Journées de l'environnement

720

150

9

Obtention de nouveaux véhicules

600

_

10

Dépenses diverses

300

25

Source : Oyo State Environmental Protection Commission, Ibadan. Rem. : Les estimations pour 1992 ne portent que sur six mois. (En 1998,86,8 nairas = 1 dollar américain.)

Image

Figure 1 Organigramme de l'Ibadan Urban Sanitation Committee

Source : Oyo State Environmental Protection Commission, Ibadan, 1996.

Tableau 6
Équipement actuel de collecte des déchets, Ibadan, 1993

Type

Modèle

Disponibles

En état de marche

Bulldozers

2

1

Chouleurs

Kamatsu

1

0

Remorques basculantes

Bedford

7

2

Camions à benne basculante

Leyland

15

9

Bennes

50

45

Compacteurs

Ford

18

0

Source : Haskoning and Konsadem Associates (1994).

Tableau 7
Ressources humaines affectées à la collecte des déchets, Ibadan, 1993

Poste

Nombre

Chef de projet, Urban Sanitation Committee ..................................................

1

Superviseurs .................................................................................................

4

Régisseur ......................................................................................................

12

Contremaître .................................................................................................

6

Chauffeurs ....................................................................................................

17

Éboueurs (utilisant des camions) ...................................................................

50

Balayeurs (de rues) .......................................................................................

60

Ouvriers (superviseurs) .................................................................................

70

Mécaniciens (à l'atelier) ................................................................................

14

Autres (nettoyage des toilettes publiques ; autres activités d' assainissement) ..

110

Source : Haskoning and Konsadem Associates (1994).

Tableau 8
Fréquence de collecte des ordures par des entreprises privées
engagées par le gouvernement à Ibadan, 1988

 

Pas de réponse

Tous les jours

Toutes les semaines

À la quinzaine

Toutes les trois semaines

Irrégulièrement

Sans objet

Zone

n

%

n

%

n

%

n

%

n

%

n

%

n

%

1. Agugu

25

9,5

0

0,0

3

1,1

0

0,0

0

0,0

90

34,1

146

55,3

2. Mokola

86

35,4

0

0,0

19

7,8

13

5,3

0

0,0

52

21,4

73

30,0

3. Yemetu

105

43,2

0

0,0

14

5,8

7

2,9

1

0,4

17

7,0

99

40,7

4. Oranyan

13

6,7

0

0,0

3

1,6

1

0,5

0

0,0

92

47,7

84

43,5

5. Kobomoje

41

22,0

0

0,0

8

4,3

0

0,0

1

0,5

32

17,2

104

55,9

6. Ayeye

47

25,1

0

0,0

5

2,7

3

1,6

3

1,6

43

23,0

86

46,0

7. Gege

8

4,3

0

0,0

0

0,0

0

0,0

0

0,6

155

82,9

24

12,8

8. Felele-Challenge

26

10,1

0

0,0

1

0,4

2

0,8

0

0,0

85

32,9

144

55,8

9. Monatan-Iwo Road

4

2,6

0

0,0

3

2,0

3

2,0

0

0,0

111

72,5

32

20,9

10. Oke Ado-Oke Bola

44

17,5

0

0,0

54

21,5

25

10,0

6

2,4

22

8,8

100

39,8

11. Agbowo-Orogun

14

7,7

0

0,0

16

8,8

28

15,4

0

0,0

28

15,4

96

52,7

12. Sawmill-Onipepeye

66

22,1

1

0,3

5

1,7

10

3,3

0

0,0

133

44,5

84

28,1

13. Alamu-Apata

3

1,3

0

0,0

39

17,0

0

0,0

0

0,0

57

24,9

130

56,8

14. Domaine d'Oluyole

6

4,7

0

0,0

3

2,3

0

0,0

0

0,0

66

51,2

54

41,9

15. GRA d'Agodi

6

4,1

0

0,0

10

6,9

6

4,1

0

0,0

48

33,1

75

51,7

Source : NISER (1988).

Rem. : GRA = zone réservée par le gouvernement.

Tableau 9
Fréquence de collecte des ordures par des entreprises engagées par les résidents, Ibadan, 1988

 

Pas de réponse

Tous les jours

Toutes les semaines

À la quinzaine

Toutes les trois semaines

Irrégulièrement

Sans objet

Zone

n

%

n

%

n

%

n

%

n

%

n

%

n

%

1. Agugu

25

9,5

1

0,4

6

2,3

2

0,8

2

0,8

91

34,5

137

51,9

2. Mokola

20

8,2

a

0,0

183

75,3

13

5,3

3

1,2

10

4,1

14

5,8

3. Yemetu

98

40,3

1

0,4

36

14,8

5

2,1

3

1,2

11

4,5

89

36,6

4. Oranyan

14

7,3

1

0,5

1

0,5

4

2,1

1

0,5

90

46,6

82

42,5

5. Kobomoje

42

22,6

a

0,0

16

8,6

a

0,0

1

0,5

27

14,5

100

53,8

6. Ayeye

45

24,1

a

0,0

18

9,6

5

2,7

5

2,7

44

23,5

70

37,4

7. Gege

7

3,7

2

1,1

1

0,5

0

0,0

a

0,0

154

82,4

23

12,3

8. Felele-Challenge

2

0,8

a

0,0

152

58,0

76

29,5

2

0,8

6

2,3

20

7,8

9. Monatan-Iwo Road

4

2,6

1

0,7

47

30,7

12

7,8

a

0,0

66

43,1

23

15,0

10. Oke Ado-Oke Bola

23

9,2

a

0,0

124

49,4

8

3,2

1

0,4

24

9,6

71

28,3

11. Agbowo-Orogun

22

12,1

a

0,0

64

35,2

8

4,4

a

0,0

30

16,5

58

31,9

12. Sawmill-Onipepeye

56

18,7

1

0,3

51

37,1

14

4,7

1

0,3

108

36,1

68

23,7

13. Alamu-Apata

a

0,0

a

0,0

96

41,9

7

3,1

5

2,2

37

16,2

84

36,7

14. Domaine d'Oluyole

a

0,0

a

0,0

93

72,1

9

7,0

a

0,0

18

14,0

9

7,0

15. GRA d'Agodi

3

2,1

a

0,0

74

51,0

18

12,4

a

0,0

23

15,9

27

18,6

Source : NISER (1988).

Rem. : GRA = zone réservée par le gouvernement.

Tableau 10
Montant payé par mois pour la collecte des ordures, Ibadan, 1988

NGN

 

Pas de réponse

Collecte gratuite

=5

5,01–10

10,01–15

15,01–20

=20

Zone

n

%

n

%

n

%

n

%

n

%

n

%

n

%

1. Agugu

14

5,3

237

89,8

0

0,0

7

2,7

5

1,9

0

0,0

1

0,4

2. Mokola

5

2,1

2

0,8

39

16,0

177

72,8

18

7,4

1

0,4

1

0,4

3. Yemetu

82

33,7

75

30,9

12

4,9

68

28,0

6

2,5

0

0,0

0

0,0

4. Oranyan

4

2,1

176

91,2

2

1,0

8

4,1

1

0,5

1

0,5

1

0,5

5. Kobomoje

93

50,0

68

36,5

4

2,2

20

10,8

0

0,0

0

0,0

1

0,5

6. Ayeye

18

9,6

121

64,7

13

7,0

34

18,2

1

0,5

0

0,0

0

0,0

7. Gege

15

8,0

167

89,3

1

0,5

2

1,1

1

0,5

1

0,5

1

0,0

8. Felele-Challenge

7

2,2

18

7,0

39

15,1

182

70,5

11

4,3

]

0,4

0

0,0

9. Monatan-Iwo Road

9

5,9

64

41,8

15

9,8

51

9,8

13

8,5

1

0,7

0

0,0

10. Oke Ado-Oke Bola

8

3,2

10

4,0

7

2,8

225

89,60

1

0,4

0

0,0

0

0,0

11. Agbowo-Orogun

4

2,2

32

17,6

20

11,0

100

54,94

26

14,3

0

0,0

0

0,0

12. Sawmill-Onipepeye

19

6,4

173

59,5

10

3,3

81

27,1

10

3,3

1

0,3

0

0,0

13. Alamu-Apata

6

2,6

62

27,1

1

0,4

108

47,2

52

22,7

0

0,0

0

0,0

14. Domaine d'Oluyole

0

0,0

18

14,0

0

0,0

93

72,1

18

14,0

0

0,0

0

0,0

15. GRA d'Agodi

0

0,0

27

18,8

6

4,1

83

57,2

28

19,3

1

0,7

0

0,0

Source : NISER (1988).

Rem. : GRA = zone réservée par le gouvernement ; NGN = naira nigérians (en 1998, 86,8 nairas = 1 dollar américain).

Tableau 11
Fonctions auxquelles les administrations locales accordent le plus d'importance, nord du Nigeria, 1979

Fonction

% de répondants des administrations locales pour qui cette fonction est la plus importantea

Éducation ............................................................

43

Perception des taxes et impôts ..............................

33

Services agricoles ................................................

9

Approvisionnement rural et semi-urbain en eau ....

7

Toutes les autres ..................................................

8

Source : Koehn (1992).

a n = 138

Tableau 12
Fonctions comptant parmi les cinq auxquelles les administrations locales
accordent le plus d'importance, nord du Nigeria, 1979

Fonction

% de répondants des administrations locales pour qui cette fonction se classe parmi les cinq fonctions les plus importantesa

éducation ............................................................

88

Services agricoles ................................................

74

Perception des taxes et impôts locaux ...................

61

Services médicaux ...............................................

48

Approvisionnement rural et semi-urbain en eau ....

46

Développement communautaire ...........................

33

Construction et entretien des routes ......................

31

Maintien de l'ordre public ....................................

............................................................................

28

Marchés et parcs de stationnement .......................

21

Source : Koehn (1992).

a n = 138

Tableau 13
Évolution de l'organisation de la gestion des déchets solides, Ibadan, Kaduna et Enugu, 1940–1985

Ville

Période

Organisme de gestion

Ibadan

Avant 1972

Administration municipale d'Ibadan

 

1973–1978

Ibadan Wastes Disposal Board

 

1978–1983

Administration municipale d'Ibadan ; ministère du Logement et de l'Environnement

 

1984-déc. 1985

Sewerage and RefuseMatters Department ; Oyo State Environmental Sanitation Task Force ; administration municipale d'Ibadan

Kaduna

1940–1967

Kaduna Native Authority

 

1967–1971

Administration locale de Kaduna

 

1971–1985

Kaduna Capital Development Authority

 

1985-déc. 1985

Kaduna State Urban and Development Board

Enugu

Avant 1977

Conseil urbain d'Enugu

 

1977–1984

Administration locale d'Enugu

 

1984–1985

Groupe de travail de l'état d'Anambra

 

1985-déc.1985

Anambra State Environmental Sanitation Authority

Tableau 14
Statistiques provisoires sur la population des secteurs relevant d'une
administration locale, région d'Ibadan, 1991

Secteur relevant d'une administration locale

Hommes

Femmes

Ibadan Northwest

72 489

74 270

Ibadan North

151 838

149 101

Ibadan Northeast

133 370

139 370

Ibadan Southeast

112 144

115 721

Ibadan Southwest

137 084

136 944

Akinyele

69 576

70 010

Lagelu

32 895

35 837

Egbeda

64 110

64 888

Ona-Ara

59 789

62 598

Oluyole

45 418

45 602

Iddo

27 918

27 975

Pourcentage de la population totale

49,57

50,43

Source : NPC (1992).

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4
Dar es-Salaam, Tanzanie

J.M. LUSUGOA KIRONDE

L'Afrique vit actuellement de grands bouleversements. La plupart de ses pays connaissent une importante redistribution de la population attribuable à l'urbanisation rapide, alors que la performance économique est généralement médiocre. Confrontées à de nombreuses difficultés, les autorités urbaines sont généralement jugées incapables de s'attaquer aux problèmes inhérents à l'urbanisation rapide et semblent notamment avoir manqué à leurs obligations dans le domaine de la gestion des déchets. Tous les pays d'Afrique ont adopté des lois qui exigent que les autorités urbaines grent les déchets. Or, dans la plupart des centres urbains, les autorités collectent et éliminent de façon sû re une fraction seulement des déchets produits quotidiennement. La collecte des déchets solides se limite habituellement aux centres-villes et aux quartiers riches, où le service demeure généralement irrégulier. La plupart des secteurs de la ville ne reç oivent aucun service public d' élimination des déchets solides. Seulement une petite partie des entreprises et des ménages urbains sont reliés à un réseau d' égouts ou à des fosses septiques locales, et même pour ces entreprises et ces ménages, le service de vidange ou de traitement est quasi inexistant. On élimine habituellement les déchets industriels, sans les traiter, en les déversant dans l' environnement.

Par conséquent, la plupart des exploitants et des résidents urbains doivent enfouir ou brûler leurs déchets, ou se débrouiller pour s'en débarrasser. Dans les centres urbains d' Afrique, il n'est pas rare de voir s' empiler des déchets nauséabonds, jetés au hasard le long des routes, dans les espaces libres, les vallées ou les drains, et de voir des eaux usées se répandre dans les terres publiques. Cette situation a été signalée en 1985 dans des articles de journaux d'Afrique orientale qui qualifiaient Dar es-Salaam de ville poubelle (« garbage city ») (Sunday News [Tanzanie], 2 nov. 1985, p. 5) et de dépotoir à ciel ouvert (« litter city ») (African Events, nov. 1985, pp. 3–5) et Nairobi de cité de l'incurie (« city in a mess ») (Weekly Review [Kenya], 25 janv. 1985, pp. 2–3).

Ce chapitre analyse le problème de la gestion des déchets à Dar es-Salaam, la plus grande ville de Tanzanie. Il repose sur une étude de différents documents traitant des déchets dans la ville ainsi que sur des discussions et des entrevues menées auprès de citoyens, de représentants du gouvernement central et des administrations locales, de personnalités politiques, de commerçants, de responsables communautaires, de représentants de petites entreprises et d'entreprises structurées de collecte des déchets, d'éboueurs et d' autres particuliers, groupes de particuliers et établissements associés à la gestion des déchets. Des observations ont également été faites dans toute la ville.

La gestion inefficace ou inexistante des déchets menace la santé et l'environnement, cause une nuisance, contribue à l'érosion du sens civique et risque de donner lieu à un grave problème social. La gestion des déchets représente donc un aspect important de la gouvernance urbaine. Elle traduit la capacité ou l'incapacité des autorités locales à s'occuper de ces déchets et la réaction de la société face à cette capacité ou à cette incapacité.

Ce chapitre comprend quatre sections. La première présente le cadre théorique. La deuxiè me analyse le cadre institutionnel de la gestion des déchets urbains. La troisième est une évaluation de l' efficacité des différents partenariats établis pour la gestion des déchets à Dar es-Salaam. La quatriè me présente des politiques possibles et des recommandations.

Cadre théorique : la notion de gouvernance et sa pertinence pour la gestion des déchets urbains

La notion de gouvernance

La gouvernance désigne en gros la façon dont un gouvernement ou un État gouverne le territoire et la population qui relèvent de lui. Cependant, la notion actuelle de gouvernance transcende cette vision traditionnelle et désigne l'administration non seulement du gouvernement, mais également de toute autre entité publique. Landell-Mills et Serageldin (1991, p. 14) définissent ainsi la gouvernance :

La gouvernance désigne l'exercice du pouvoir politique pour gérer les affaires de la nation. Elle comprend les mesures institutionnelles et structurelles, les processus décisionnels et la capacité de mise en œuvre de l'État ainsi que les relations entre les représentants du gouvernement et le public.

Bien qu'une définition aussi globale touche de toute évidence l' ensemble des relations complexes entre le gouvernement et la population, elle néglige un élément de la gouvernance : le rôle de la société civile. Selon la conception moderne de la gouvernance, celle-ci englobe la totalité des cadres et processus dont les États ont besoin pour exercer leurs pouvoirs par l'entremise des institutions et procédures officielles, les liens entre l'exercice de ces pouvoirs et la société en général et les organismes dont se dote une société pour servir les intérêts de l'État et ceux de la société. Ce texte se fonde sur la notion de gouvernance de Bratton et Rothchild (1992), un concept relationnel qui met l'accent sur la nature des interactions entre l'État et les intervenants sociaux et parmi les intervenants.

Bratton et van de Walle (1992) soutiennent que l'importance qu' a prise la question de la gouvernance au cours des dernières années s' explique par une multitude de facteurs, notamment le malaise économique ; l'indignation qu' ont soulevée la répression interne, la corruption et l'austérité ; le ressentiment suscité par l' indifférence de l' État aux demandes populaires ; la chute des régimes communistes en Europe ; les pressions exercées par les pays donateurs pour la mise en œuvre de réformes politiques (voir aussi Bratton et Rothchild, 1992). La volonté d'ouverture et de responsabilisation est en partie renforcée par une nouvelle sensibilisation aux liens entre le développement économique et les processus démocratiques (Mbembe, 1989). Cela pourrait être crucial pour la gouvernance urbaine dans les cités d'Afrique, étant donné la multiplicité des exploitants en milieu urbain, notamment les intervenants de la société civile qui sont les moteurs de la vie urbaine mais dont l'apport et les efforts sont souvent négligés, voire entravés, par l' État.

Au risque de trop simplifier, on peut dire que la gouvernance urbaine désigne, au niveau international, une relation à trois entre le gouvernement central, notamment les institutions nationales, les administrations locales et la société civile. Celle-ci comprend le secteur privé, les organisations non gouvernementales (ONG) et les organismes communautaires.

Les notions d' État et de société civile

On a beaucoup écrit et discuté sur les notions d' État et de société civile, sur les liens entre les deux et la façon d' évaluer les rôles que jouent les groupes qui constituent la société civile dans la démocratisation. Même s' il est reconnu que le pouvoir de l' État s' exerce à l' extérieur du gouvernement, dans ce chapitre, l' État désigne le gouvernement central, les administrations locales et les institutions publiques, notamment les partis politiques.

Chazan (1992) définit la société civile comme la partie de la société qui interagit avec l'État. Cependant, ce point de vue est jugé trop restrictif, puisque beaucoup de groupes et d'associations du secteur non structuré ne s' emploient pas directement à influencer l'État, mais ont un rôle important à jouer dans toute la question de la gouvernance. Pour Barkan et al. (1991), la société civile englobe les organismes intermédiaires et autonomes qui œuvrent et, parfois, prospè rent, dans l'espace qui se situe entre l' État et les ménages. Dans le même ordre d'idées, Starr (1990) soutient que la société civile désigne un espace social distinct du gouvernement et que le gouvernement ne représente qu'une des multiples institutions qui coexistent dans une structure sociale pluraliste. Pour ce chapitre, nous avons adopté la définition de Weigle et Butterfield (1992, p. 1) :

Organisation autonome de la société, dont les composantes s'engagent volontairement dans des activités publiques afin de poursuivre des intérêts individuels, collectifs ou nationaux dans le contexte de relations légalement définies entre l'État et la société.

Cependant, nous émettons la réserve suivante : le statut de la société civile et ses liens avec l' État n' ont pas à être légalement définis, ni même reconnus par l' État.

Les observateurs de la gouvernance urbaine (c'est-à-dire des relations entre le gouvernement central, les administrations locales et la société civile) en Afrique s'inquiè tent de la prépondérance des autorités centrales par rapport aux administrations locales. Cette prépondérance fait en sorte que les administrations locales dépendent dans une grande mesure des gouvernements centraux et sont contrôlées par eux (Stren, 1992), particulièrement au regard de l' accè s aux ressources et de la marge de manœuvre politique.

En outre, les relations entre l' État et la société civile sont difficiles, la société civile ayant pris une certaine importance en raison de l'incapacité des États à jouer leur rôle. En partie à cause de cette incapacité, des systèmes parallè les de gestion urbaine, enchâssés dans la société civile, ont émergé ou pris de l'importance, sans toutefois recevoir l'encouragement des autorités. Le fonctionnement des gouvernements centraux et des administrations locales et leurs relations avec la société civile se caractérisent par un manque flagrant de démocratie, de transparence, de responsabilité et de collaboration avec le public. L' échec des autorités, particulièrement en ce qui concerne l' investissement dans l' infrastructure et son entretien, la prestation des services, le logement et la fourniture de terres pour le développement, la gestion de l'économie urbaine et la gestion de l'environnement (Stren et White, 1989), est évident dans le problème de la gestion des déchets solides, liquides et industriels.

La gestion des déchets urbains du point de vue de la gouvernance

Ce chapitre porte principalement sur les déchets solides, liquides et industriels. La gestion des déchets désigne le stockage, la collecte, le transfert, le recyclage et l'élimination finale des déchets. Les déchets solides comprennent les ordures ménagères, les déchets solides non dangereux (à l' exclusion des boues et des déchets semi-solides) provenant d'établissements industriels et commerciaux, les déchets provenant d'établissements publics (notamment les déchets non pathogènes des hôpitaux), les déchets des marchés, les résidus de jardin et les balayures de rue. Les déchets liquides comprennent les eaux grises et les eaux d'égout non dangereuses produites par les ménages et les établissements commerciaux et industriels urbains. Les déchets industriels comprennent les déchets liquides et solides dangereux produits par les établissements commerciaux et industriels, y compris les déchets pathogènes des hôpitaux.

La gestion des déchets est importante du point de vue de la gouvernance. Les densités élevées de population et la concentration d'activités économiques en milieu urbain signifient que les déchets produits ne peuvent pas être éliminés efficacement de façon individuelle. Les déchets constituent un enjeu d'intérêt public puisqu' on peut s' en débarrasser sur les terres privées ou publiques, créant du coup une nuisance ou un danger environnemental ou sanitaire possible qui touche la société, même si les ménages et les entreprises qui produisent les déchets jugent avoir fait leur devoir en s'en débarrassant. La gestion des déchets bénéficie à l'ensemble de la collectivité et chaque résident peut profiter du service sans que cela soit au détriment des autres. Ainsi, la gestion des déchets est de toute évidence du domaine public et constitue une question d'intérêt public ; les citoyens s' attendent donc à ce que les administrations responsables de la gestion des déchets prennent les mesures nécessaires pour garder l'environnement propre.

A cet égard, le partage des pouvoirs, des responsabilités et des ressources et les relations entre chaque niveau d'administration et les relations entre les administrations et la société civile deviennent importants. La réussite des autorités dans le domaine de la gestion des déchets, comme, au demeurant, dans d'autres secteurs, est tributaire de la disponibilité des ressources et d'une bonne gouvernance, et rend l' État crédible aux yeux du public. En contrepartie, leur échec suscite l'hostilité et crée un fossé entre le public et l' État, ce qui a d' importantes répercussions pour la production de ressources, la démocratie, la transparence et la responsabilité.

La gouvernance urbaine en Tanzanie

Étroitement liée à l'évolution des administrations locales en Tanzanie, la question de la gestion des déchets façonne la relation à trois entre le gouvernement central, les administrations locales et la société civile. On peut dire que l'évolution des administrations locales en Tanzanie s'est faite en quatre étapes : l' époque préalable aux administrations locales (avant 1949), l'époque qui précè de la décentralisation (de 1949 à 1971), l'époque de la décentralisation (de 1971 à 1982) et l' époque post-décentralisation (depuis 1982).

L'époque préalable aux administrations locales (avant 1949)

Jusqu'en 1946, on ne retrouvait pas en Tanzanie d'administrations locales au sens où on l' entend aujourd' hui. Le pouvoir était concentré au sein du gouvernement central et vaguement partagé avec les autorités indigènes. Les grands centres urbains comme Dar es-Salaam étaient administrés par les autorités cantonales, nommées par le gouverneur en vertu de l'ordonnance sur les cantons (Township Ordinance) de 1920 et financées directement par le gouvernement central. L'ordonnance sur les cantons conférait au gouverneur le pouvoir de proclamer un secteur « canton » et de prendre des règlements régissant la santé, l' ordre public et la bonne administration des cantons. Peu aprè s l'adoption de l' ordonnance sur les cantons, Dar es-Salaam et 29 autres collectivités du Tanganyika ont été proclamées « cantons » .

En 1920 toujours, les rè gles sanitaires pour le canton de Dar es-Salaam (Sanitary Rules for the Township of Dar es Salaam) étaient publiées et sont entrées en vigueur le 1er septembre. Cesrè gles accordaient au médecin hygiéniste les pouvoirs nécessaires pour contrôler la prolifération des mouches et s'occuper des nuisances sanitaires et des lieux insalubres (Government Notice No. 39 du 5/8/1920). Elles furent par la suite intégrées dans les règles cantonales (Township Rules) établies aux termes de la l'ordonnance sur les cantons de 1920 et sont encore utilisées par les autorités urbaines pour s'occuper de la gestion des déchets malgré l' abrogation de l' ordonnance sur les cantons.

Le système colonial de gestion urbaine était fondé sur la ségrégation raciale. Les principaux services publics urbains étaient concentrés dans les secteurs réservés aux Européens, tandis que les secteurs réservés aux Africains comportaient moins de services (Kironde, 1995). Le gouvernement colonial contrôlait strictement l'organisation des centres urbains, ce qui lui permettait d'exercer un certain contrôle sur le développement urbain, notamment sur la prestation des services.

Jusqu'à la fin des années 50, la gestion urbaine était tributaire de la santé publique. Les médecins hygiénistes jouaient un rôle prépondérant dans la gestion urbaine. Le premier directeur général de l'autorité cantonale de Dar es-Salaam, par exemple, de 1923 à 1930, était un médecin qui était un membre éminent du comité central d'urbanisme. Ce comité consultatif étudiait la plupart des propositions d'aménagement de la ville et les questions relatives à la gestion urbaine, et ses recommandations étaient généralement acceptées. Les aspects médicaux servaient habituellement à justifier les politiques de ségrégation raciale, les modifications aux limites du canton, les plans de drainage et de mise en valeur des terres, la viabilisation des terres, les plans d' urbanisme différenciés, les règlements de construction, etc.

L'époque qui précè de la décentralisation (1949–1971)

En 1946, la campagne visant à obtenir le statut d'autorité . locale pour Dar es-Salaam, amorcée dans les années 30, a finalement donné lieu à l'ordonnance sur les municipalités (Municipalities Ordinance). Le gouvernement central avait promulgué cette loi pour Dar es-Salaam, et l'a utilisée pour faire passer bon nombre de ses pouvoirs et responsabilités touchant la gestion urbaine au conseil municipal de Dar es-Salaam, qui a vu le jour en 1949. Ces pouvoirs comprenaient la gestion des déchets solides, la prestation des services d'égout et d' autres services sanitaires ainsi que la facturation connexe.

Des niveaux inférieurs d'administration locale, à savoir les conseils de ville, de comté et de district, pouvaient être formés en vertu de l'ordonnance sur les administrations locales (Local Government Ordinance) de 1953, qui a été remplacée par la loi sur les administrations locales (autorités de district) (Local Government [District Authorities] Act) de 1982 pour les autorités rurales et la loi sur les administrations locales (autorités urbaines) (Local Government [Urban Authorities] Act) de 1982 pour les autorités urbaines. A l'instar des conseils municipaux, ces autorités avaient le pouvoir de produire des recettes, de prendre des règlements et de s' occuper de nombreuses questions qui ressortissaient à la gouvernance locale, notamment la gestion des déchets. Au moment de son indépendance, en 1961, la Tanzanie comptait 11 conseils urbains, mais ce nombre était passé à 15 au moment de la décentralisation en 1971.

Dans les années 60, les autorités urbaines ont connu trois grands problèmes :

– en général, les conseillers élus étaient mal placés pour s'acquitter de leurs responsabilités (ils étaient habituellement peu instruits, connaissaient mal l'objet et le fonctionnement des administrations locales et comprenaient mal leur rôle de conseillers au sein du système) ;

– la compétence des employés des autorités locales laissait généralement à désirer ;

– les autorités locales de disposaient pas de ressources financières suffisantes pour améliorer les services dont elles étaient chargées.

En outre, la corruption et l'abus de fonds étaient évidents dans bien des conseils.

En 1965, la Tanzanie adoptait un régime politique à parti unique. Devenu très puissant, le parti exerçait son influence dans tous les aspects de la vie. Les autorités locales furent intégrées dans l'appareil du parti national. Tous les conseillers des administrations urbaines devaient être membres du parti. Les postes de maires élus, dans le cas des conseils municipaux, et de présidents, dans le cas des conseils de villes, furent abolis et le président du parti du district a pris leurs pouvoirs. Avec ces changements, les conseils urbains ont continué de fonctionner sous la direction et la supervision générales du gouvernement central par l'entremise du ministère des Affaires municipales.

Même si les administrations locales avaient de toute évidence des problèmes, le gouvernement central a pris peu de mesures pour les renforcer et ce qu'il a fait a plutôt contribué à les miner. Par exemple, en 1969, par opportunisme politique, le gouvernement central a aboli le cens électoral, qui avait été une importante source de recettes pour les administrations locales. Celles-ci présentaient des lacunes persistantes, et c'est avec satisfaction que le gouvernement central les a abolies en 1971.

L'époque de la décentralisation (1971–1982)

Les administrations locales ont connu d'importants changements en 1971 avec l' adoption d' une politique de décentralisation qui s'est traduite, dans les faits, par leur abolition entre 1972 et 1974 et leur remplacement par une autorité centrale.

Essentiellement, la décentralisation avait pour objet de faire passer une partie des pouvoirs administratifs et financiers du gouvernement central aux régions et aux districts. Bien que les buts déclarés de la décentralisation fussent de donner plus de pouvoirs à la population, d'accélérer la prise de décisions et de favoriser le développement rapide en stimulant la participation de la population au processus décisionnel et à la planification, tous les observateurs s'entendent pour dire que la principale conséquence de la décentralisation a été de priver la population de pouvoir pour concentrer celui-ci au sein du gouvernement central. On considère que la politique de décentralisation a échoué pour deux misons principales :

– les bureaucrates du gouvernement central ont usurpé le pouvoir aux districts et aux régions (contrairement aux autorités locales, ces bureaucrates devaient rendre des comptes non pas au peuple, mais au gouvernement central ; qui plus est, les secteurs locaux ne contrôlaient ni le personnel, ni les fonds qui leur étaient alloués) ;

– même si à l'origine l' un des buts de la décentralisation était de favoriser le développement économique par une gestion plus efficace, il n'a pas été atteint puisque les gens ne se sentaient pas partie intégrante du système.

Pendant la période de la décentralisation, le Trésor finançait le budget total des conseils urbains. Pourtant, l'infrastructure et les services urbains ont subi une grave détérioration. Ainsi, les réseaux d'aqueduc, l' alimentation en électricité, l' élimination des eaux d' égout, la collecte des déchets, la construction et l' entretien des drains et des routes, la réglementation sur l' utilisation du sol, la protection contre l'incendie et la lutte contre la malaria se sont grandement détériorés, soulevant dans le public un tollé contre la dégradation des conditions de vie urbaines. Cette détérioration était le résultat de l'élimination des mesures administratives existantes, du remplacement d' employés chevronnés dans les services locaux par des personnes sans expérience du gouvernement central et d'un préjugé fort défavorable envers les secteurs urbains dans les montants alloués par le gouvernement (Mbago, 1985 ; Kulaba, 1989).

Certes, on insiste peut-être trop sur les effets néfastes de la politique de décentralisation sur la gestion urbaine (puisque des facteurs comme la conjoncture économique défavorable du pays étaient également en cause), mais la décentralisation a sans doute aggravé la situation. En 1976, le gouvernement central était déjà préoccupé par la détérioration des conditions urbaines et a mis sur pied un comité chargé d'examiner la situation et de formuler des recommandations. A la suite de ces recommandations, les autorités locales ont été rétablies, à commencer par Dar es-Salaam, en vertu d'une loi provisoire adoptée en 1978. Une loi permanente a rétabli le conseil de Dar es-Salaam et le reste des conseils en 1982.

Cependant, le rétablissement des administrations locales s'est fait à la hâ te, sans que l' on sache clairement ce qui n'avait pas fonctionné avec les autorités locales antérieures et sans qu'il n' y ait de débat public à ce sujet. En outre, ce rétablissement ne s'est pas accompagné de politiques pour renforcer les administrations urbaines en leur donnant, par exemple, plus d'autonomie pour qu' elles soient plus en mesure de produire des recettes.

La politique de décentralisation favorisait la propension du gouvernement central à centraliser son pouvoir, et ses effets se font encore sentir, malgré le rétablissement des autorités locales.

L'époque post-décentralisation (depuis 1982)

La constitution de Tanzanie prévoit que le gouvernement national doit établir des autorités locales à tous les niveaux, conformément aux lois adoptées par le Parlement. Elle dispose également que les administrations locales doivent déléguer des pouvoirs à la population. Elle exige que toutes les autorités locales fassent participer la population aux activités d'aménagement, qu' elles offrent des services d' administration locale, qu'elles maintiennent la loi et l' ordre public et qu' elles renforcent la démocratie.

La loi actuelle régissant la formation des administrations urbaines et leur fonctionnement est la loi sur les administrations locales (autorités urbaines) de 1982. Aux termes de cette loi, chaque autorité urbaine est dirigée par un conseil composé de conseillers élus, de membres locaux du Parlement et de cinq ou six membres nommés par le ministre des Affaires municipales. Les autorités urbaines sont des conseils municipaux ou des conseils de ville dirigés respectivement par un maire ou un président. Les maires et les présidents sont élus parmi les conseillers. Les autorités urbaines gouvernent par l'entremise de comités permanents qui sont composés de conseillers et d'un certain nombre de fonctionnaires. Les comités établissent les politiques et les sanctions et évaluent la mise en œuvre. Outre les comités, les conseils comptent des départements, ou services, qui sont généralement de nature technique et font partie de la structure administrative du conseil. Ils se composent d'employés techniques et administratifs. La plupart des conseils urbains en Tanzanie comptent au moins sept comités, à savoir, administration et finances ; santé et bien-être social ; éducation et culture ; travaux publics et communication ; urbanisme ; planification économique et commerciale ; ressources humaines.

Sur le plan opérationnel, le travail du conseil s'effectue sous la direction d' un directeur municipal nommé par le président du pays. Le directeur municipal est le premier magistrat du conseil et est personnellement responsable de l'utilisation que fait le conseil des fonds qui lui sont alloués. Les chefs des différents services forment l'équipe de gestion de chaque autorité urbaine, qui est présidée par un directeur. Dans bien des régions urbaines, les relations entre les conseils et les directeurs municipaux sont tendues, surtout lorsque le président ou le maire accapare les pouvoirs du directeur municipal et se proclame premier magistrat du conseil et que les conseillers prennent en charge les pouvoirs des fonctionnaires. A Dar es-Salaam, ces tensions ont abouti à un taux de roulement élevé chez les directeurs ; entre 1978 et 1994, Dar es-Salaam a changé dix fois de directeur municipal, ce qui représente un mandat d'une durée moyenne d' un an et demi, privant la ville de la continuité nécessaire pour bâtir une solide tradition de gestion.

A des fins administratives, chaque secteur urbain est un district urbain (sauf Dar es-Salaam, qui est à la fois une ville et une région et est divisée en trois districts). Un district urbain fait partie d'un district politique plus vaste qui compte habituellement une composante rurale. C'est également une circonscription électorale ayant un député élu. Le commissaire de district est le chef politique du district politique. Le conseil urbain est responsable du secteur urbain comme tel, sauf à Dar es-Salaam encore une fois, où le conseil s' occupe de toute la région (y compris des quartiers ruraux). Le commissaire de district est responsable de l'administration, de la planification et de la mise sur pied des villages et des zones suburbaines des districts. Cette situation donne lieu à de la confusion et il arrive souvent que les rôles des commissaires de district, du commissaire régional et des autorités locales se chevauchent ou parfois s'opposent. C' est le cas particulièrement à Dar es-Salaam.

A l'heure actuelle, la Tanzanie compte 19 secteurs urbains ayant un statut d'autorité locale, neuf conseils de ville, neuf municipalités et un conseil municipal. En outre, 66 autorités de canton sont administrées par des conseils de district. Les municipalités de Mwanza, Mbeya et Arusha tentent actuellement d'obtenir le statut de ville.

Les relations entre le gouvernement central et les administrations locales et leurs répercussions sur la gestion des déchets

Aux termes de la loi actuelle, le gouvernement central exerce un certain contrôle sur les autorités urbaines. Il confère le statut d'autorité locale à n'importe quel secteur urbain. Il nomme les cadres supérieurs qui dirigent les autorités urbaines, et le ministre des Affaires municipales approuve les règlements et les budgets des autorités urbaines ainsi que leurs propositions visant à exploiter de nouvelles sources de recettes ou à augmenter les impôts. En outre, le gouvernement publie parfois des directives qui touchent les autorités urbaines. Le fait que la majeure partie des recettes des autorités urbaines provient du gouvernement central est crucial. Qui plus est, plusieurs ministères du gouvernement central et un certain nombre d' organismes parapublics jouent un rôle essentiel dans des secteurs qui relèvent des conseils urbains, notamment la construction de routes, le drainage, l'alimentation en eau et en électricité, les règlements sur l'utilisation du sol (en particulier pour ce qui concerne l'aménagement du territoire et l'affectation des terres) et la gestion environnementale. Par exemple, selon le statut d'une route, sa construction et son entretien peuvent relever du ministère des Travaux publics, de l'ingénieur régional ou des conseils urbains. Le drainage relève du ministère des Communications et des Travaux publics, du ministère de l'Eau, de l'Énergie et des Minéraux (MWEM) et des conseils. L'alimentation en eau ressortit à un organisme parapublic, la National Urban Water Authority (NUWA), à Dar es-Salaam et à l'ingénieur régional chargé des questions d' eau dans d'autres villes. L'électricité est fournie par un organisme parapublic national tandis que l'aménagement du territoire ainsi que l'affectation et le contrôle des terres sont la responsabilité du ministère des Terres, du Logement et du Développement urbain (MLHUD) et des conseils.

Plusieurs observateurs déplorent cette situation, soulignant qu'elle retire aux autorités urbaines l'autonomie qu'elles sont censées avoir et donne lieu à de la confusion, à des conflits et à des problèmes de coordination, de contrôle et de responsabilité (Kulaba, 1989 ; Tanzanie, 1991).

Les relations entre le gouvernement central et les administrations locales ont d'importantes répercussions sur la gestion des déchets urbains. Par exemple, le gouvernement central est responsable de l'approbation des règlements administratifs relatifs à la gestion urbaine, de l'affectation des terres pour l'élimination des déchets et d'une partie importante de l'investissement dans l'infrastructure, notamment dans les drains, les égouts, les routes et les usines de traitement, mais si le gouvernement central ne remplit pas ses fonctions, le blâme est souvent rejeté sur les autorités locales.

Le problème du financement des autorités urbaines

Deux facteurs principaux influent sur le rendement des autorités urbaines : le genre de recettes qu'elles peuvent produire et la façon dont elles dépensent ces recettes.

La loi sur les finances des administrations locales (Local Government Finances Act) de 1982 confère aux autorités urbaines les pouvoirs de produire des recettes locales, notamment par des redevances pour le développement, des cotisations des marchés, des permis commerciaux, des impôts fonciers, des péages routiers et des trais d'utilisation. Le gouvernement central prévoyait que les autorités urbaines seraient autonomes dans une très grande mesure, sauf en ce qui concerne la prestation des services, pour lesquels elles agissent comme représentants du gouvernement central (par exemple, pour la prestation des services primaires d'éducation et de santé). A quelques exceptions près, les autorités urbaines de la Tanzanie ont continué de compter sur le gouvernement central pour la majeure partie de leurs recettes. Leur capacité de gérer le développement urbain est donc tributaire des sommes que le gouvernement central peut accorder à chaque autorité urbaine, qui sont bien faibles (Tanzanie, 1992).

Entre 1981–1982 et 1989–1990, par exemple, le conseil municipal de Dar es-Salaam (DCC) a demandé 61,350 milliards de shillings tanzaniens au gouvernement central mais n'en a reçus que 554,2 millions, soit seulement 9 % du montant demandé (en 1998, 665,8 shillings tanzaniens = 1 dollar américain). Même les secteurs où le gouvernement central est censé financer la totalité des services sont sous-financés. Par exemple, il en coûtait 1 200 shillings par an pour instruire un élève du niveau primaire en 1991 et le gouvernement central était censé financer la totalité de ce coût. Or, il n'a accordé aux conseils que 200 shillings par an par enfant (Daily News, 1991).

La position du gouvernement central concernant les mesures que les administrations urbaines pourraient prendre pour produire leurs propres recettes est ambiguë:

– le gouvernement central prend beaucoup de temps, parfois plusieurs années, à approuver les règlements administratifs qui visent à donner aux conseils urbains les pouvoirs nécessaires pour avoir des recettes locales ;

– il arrive souvent que le gouvernement central approuve des taux de beaucoup inférieurs à ceux proposés par les administrations urbaines ;

– la volonté politique nécessaire pour encourager la perception d'impôts locaux en général et de redevances pour le développement et d'impôts fonciers en particulier est absente (Chaligha, 1987 ; Mkongola, 1988 ; Kulaba, 1989 ; Bukurura, 1991) ;

– le gouvernement central perçoit parfois des impôts qu'il devrait partager avec les administrations urbaines, mais n'en fait rien (c'est le cas notamment des impôts fonciers et des péages routiers) ;

– d'aucuns soutiennent que le gouvernement central se réserve les impôts qui sont lucratifs et faciles à percevoir, laissant les difficiles aux administrations locales (Kulaba, 1989) ;

– le gouvernement central empiète dans une certaine mesure sur des impôts qui ressortissent habituellement aux administrations locales, tels que les impôts fonciers.

Cependant, on a également observé que les autorités urbaines, notamment celles de Dar es-Salaam, n'ont pas déployé tous les efforts nécessaires pour obtenir des recettes, même lorsqu'elles ont le pouvoir de le faire, préférant se fier aux subventions gouvernementales. Ce faisant, elles sont devenues dépendantes du gouvernement central, mais indépendantes de leurs citoyens. En fait, il est évident que les conseils, comme celui de Dar es-Salaam, préfèrent le genre de recettes qu'elles n'ont pas à percevoir directement des citoyens, tels que les péages routiers sur le carburant.

D'autres exemples de la situation financière du DCC illustrent le problème. En 1993, le DCC a touché des recettes totales de 3,1 milliards de shillings tanzaniens, dont 2,1 milliards, soit 66,8 %, étaient des subventions. En septembre 1994, ses recettes étaient de 2,8 milliards de shillings tanzaniens, dont 2,02 milliards, soit 73,2 %, étaient des subventions. En 1995, le budget du DCC était de 6,62 milliards de shillings tanzaniens, dont 4,6 milliards (69,1 %) étaient des subventions. Comme on peut le constater, le DCC dépend beaucoup des subventions du gouvernement central.

Par ailleurs, beaucoup de données révèlent que le DCC ne perçoit pas sa juste part des recettes. Ainsi, toutes les personnes valides âgées de 18 ans et plus sont censées payer une redevance pour le développement ; or, entre 1990 et 1993, le DCC a perçu un minimum de 90,4 millions de shillings tanzaniens (en 1990) et un maximum de 164,5 millions de shillings tanzaniens (en 1991). Si l'on établit à 2,6 millions la population qui relève du DCC et que l'on suppose que la moitié de ces personnes paient la redevance minimale de 250 shillings par an que le DCC impose, cette redevance devrait rapporter au DCC au moins 325 millions de shillings par an. Quoi qu'il en soit, une redevance de 250 shillings par an par personne représente un montant très faible. La question des impôts fonciers constitue un autre exemple. Entre 1990 et 1993, les impôts fonciers perçus par le DCC se situaient entre un minimum de 38,5 millions de shillings tanzaniens (en 1991) et un maximum de 128 millions de shillings tanzaniens (en 1993). Pourtant, avec plus de 400 000 propriétés sur son territoire, le DCC aurait dû percevoir au moins 400 millions de shillings (en supposant un impôt foncier modéré de 1 000 shillings par propriété). Mentionnons également les droits d'enregistrement des taxis. En 1993, le DCC a perçu seulement 0,34 million de shillings à ce chapitre, alors qu'il en avait perçus 17,3 millions en 1991. A Dar es-Salaam, la majorité des taxis ne sont pas enregistrés et ne détiennent pas de permis. Si l'on analysait d'autres sources de recettes, on s'apercevrait que le DCC ne perç oit qu'une traction des recettes disponibles. Ce laxisme s'explique en partie par l'inefficacité, mais également par l'absence de responsabilité et de transparence du DCC envers les résidents de Dar es-Salaam.

La perception des recettes laisse à désirer, mais on peut également s'interroger sur la façon de dépenser les recettes perçues. Il a été démontré que les fonds du DCC sont affectés aux salaires et aux biens improductifs, comme les véhicules automobiles. Ainsi, sur les 3,1 milliards de shillings dépensés en 1993, 2,2 milliards, soit 72 %, ont été consacrés aux émoluments personnels et sur les 4,42 milliards de shillings dépensés en 1994, 2,7 milliards (60,3 %) ont été consacrés aux salaires seulement. Après les allocations et les émoluments personnels, le poste de dépenses le plus important au sein de chacun des comités du DCC a été celui des usines, véhicules et embarcations. Une analyse de la valeur des actifs du DCC révèle qu'en 1992 et en 1993, ce poste de dépenses représentait 71,5 et 70,9 % respectivement des immobilisations. Comme on le verra cidessous, les usines et les véhicules productifs, comme ceux requis pour l'élimi-nation des déchets, ne représentent qu' une petite partie de ces dépenses. Sur les 133,8 millions de shillings que valaient les immobilisations acquises en 1993, les usines et les véhicules comptaient pour 63,9 %. Les propres fonds du DCC ont servi à acheter deux véhicules Landcruiser3 de ToyotaMD. Les autres véhicules, une niveleuse et une chargeuse, ont été donnés par le Japon.

Mentionnons également que le comité de l'administration et des finances a dépensé 67,3 millions de shillings tanzaniens en 1993 au titre des usines, véhicules et embarcations, mais que la section de prévention du comité de la santé et du bien-être social, qui est responsable de la gestion des déchets, n'a consacré que 38 millions de dollars à ce poste de dépenses. L' inverse aurait été plus logique. En outre, en 1993, les allocations et les trais de transport des conseillers se sont chiffrés à 115,63 millions de shillings tanzaniens. En supposant qu' il y avait 70 conseillers, ce montant représente 137655 shillings par mois par conseiller, un revenu que peu de Tanzaniens gagnent. Le ministre des Affaires municipales a fait remarquer récemment que le budget des allocations versées aux conseillers de Dar es-Salaam était plus élevé que celui des écoles primaires de la ville (Sunday News [Tanzanie], 20 aoû t 1995).

Les relations entre le gouvernement central et les administrations urbaines en Tanzanie ne favorisent pas l'autonomie locale, particulièrement pour la perception des recettes. Cependant, les autorités urbaines, telles que le DCC, ne profitent pas pleinement des sources de recettes qui sont mises à leur disposition. L' utilisation qu'elles font des sources de recettes disponibles ne reflète pas les priorités accordées, à la prestation des services nécessaires. Cette situation entrave la gouvernance urbaine en général et la gestion des déchets en particulier. Le

3. Lu'tilisation de noms de marques commerciales ne constitue pas une promotion des produits par le CRDI ou l'auteur.

gouvernement central ne semble pas pressé de régler le problème et a donc envisagé de privatiser la prestation des services urbains et d'accroître le rôle de la société civile dans de nombreuses fonctions de gestion urbaine.

Autres problèmes que présentent les autorités urbaines en Tanzanie

Outre les problèmes financiers et le contrôle qu'exerce le gouvernement central sur les administrations locales, d'autres problèmes empêchent une saine gouvernance urbaine en Tanzanie, notamment l'incompétence des conseillers, la corruption et l'apathie des citoyens.

Incompétence des conseillers

Bien que cette situation soit en train de changer, plusieurs observateurs ont constaté que beaucoup de conseillers des autorités urbaines ont un revenu faible et sont peu instruits, et que certains sont même au chômage. Il est donc possible qu'ils soient peu éloquents et qu'ils comprennent mal leur rôle de conseillers.

Des personnes soutiennent que certains maires profitent de cette situation pour acheter la loyauté des conseillers, favorisant ainsi l'assiduité aux réunions du conseil, pour laquelle les conseillers reçoivent une allocation. Les conseillers ont donc tendance à se soucier davantage des conseils que de l'électorat. Dans ces circonstances, des questions comme la gestion des déchets ne reçoivent pas toute l' attention qu'elles méritent.

La corruption

La corruption est une caractéristique des gouvernements africains. On dit qu'elle est présente aux échelons supérieurs de la plupart des pays d'Afrique (Harsch, 1993). En Tanzanie, la corruption a été dénoncée aux niveaux du gouvernement national et des administrations locales au cours des dernières années. Selon Mwapachu (I995), la corruption s'enracine en Tanzanie et infiltre le tissu social, impliquant des dirigeants et des particuliers de toutes origines.

Selon une définition souvent citée, la corruption désigne un comportement qui soit s'éloigne des fonctions officielles d'une charge publique à cause de gains personnels, financiers ou autres, soit viole les règles qui empêchent l'exercice de certains types d'influence personnelle (Nye, 1967, p.419). La corruption comprend le vol proprement dit, le détournement de fonds, le fait d'accaparer des biens appartenant à l'État, le népotisme, le favoritisme et l'abus du pouvoir public et de son poste pour obtenir des paiements et des privilèges (Nations unies, 1990). Bien que son ampleur soit peu documentée, on mentionne et déplore souvent la corruption dans les administrations urbaines en Tanzanie. Les manifestations de corruption comprennent le détournement de fonds, la surfacturation, la gestion foncière et l'impartition administrative douteuses ainsi que l'extorsion de paiements pour des services rendus, la délivrance de permis ou l'approbation de pratiques déloyales.

L'apathie des citoyens

Même si le rendement des administrations urbaines laisse à désirer et que celles-ci puissent être accusées d'être corrompues et inefficaces, il est surprenant de constater que les citoyens sont généralement apathiques au sujet des questions d'administration urbaine. Peu de citoyens s'intéressent aux affaires des conseils et assistent aux assemblées, lisent les procès-verbaux de leurs réunions ou les prennent à partie. Mbago (1985) a remarqué que la population urbaine s'intéresse généralement peu aux élections locales. Dans son étude des élections de 1983 à Dar es-Salaam, il a constaté que sur les 634 123 personnes qui pouvaient s'inscrire, seulement 179434 (28 %) l'ont fait et seulement 76319 (12 %) ont effectivement voté.

C'est le même genre d' apathie qui a prévalu lors des élections locales d'octobre 1994, en dépit du retour au multipartisme. A Dar es-Salaam, par exemple, 700 000 personnes (une sous-estimation évidente) pouvaient s'inscrire comme électeurs. Or, seulement 175 638 (25,1 %) (nombre absolu inférieur au nombre de personnes enregistrées lors des élections de 1983) l'ont fait (Maliyamkono, 1995). Dans la majorité des cas (54 %), les citoyens ne se sont pas inscrits parce qu'ils ne croyaient pas que les élections allaient changer quelque chose. Mbago (1985) a également souligné ce point de vue. Le deuxième groupe de répondants (15 %) croyaient que les élections étaient une perte de temps (Maliyamkono, 1995). 11 semble donc que les citoyens font peu confiance aux élections locales. Ce désintérêt peut avoir contribué dans une grande mesure à l'élection de conseillers qui croient devoir une plus grande allégeance à leur conseil qu' à l'électorat et qui, partant, s'attardent peu aux questions que les citoyens jugent urgentes.

Émergence de la société civile

Les organismes civils constituent une caractéristique importante de la vie socio-économique des centres urbains de Tanzanie depuis l'époque coloniale. Beaucoup étaient fondés sur les notions d'identité tribale ou locale et sur la nécessité d'aider les nouveaux citadins à s' adapter. Ces organismes ont été abolis pendant la première décennie qui a suivi l'indépendance. Les problèmes économiques des années 80 ont contribué à la renaissance des associations de développement local, mais un nombre de plus en plus grand de ces organismes civils sont entièrement orientés vers la ville et le quartier. Comme les gens s'identifient de plus en plus avec les centres urbains, des organismes sont constitués pour prendre en charge les questions locales et combler les lacunes laissées par les autorités urbaines.

En ce qui concerne les investissements dans l'infrastructure et l' entretien de celle-ci, des groupes ont vu le jour à Dar es-Salaam qui, par exemple, investissent dans les routes ou d'autres services et les entretiennent Des organismes civils sont créés pour promouvoir et protéger les intérêts des exploitants privés de services d'autobus et les propriétaires d' entreprises du secteur parallèle. D'autres organismes du même genre ont été formés pour s'occuper de l'environnement dans leur secteur, et certains ont profité d'une association avec des organismes subventionnaires et des ONG étrangères (Kyessi et Sheuya, 1993 ; Mbyopyo, 1993 ; Byekwaso, 1994).

Les relations entre les conseils et ces associations civiles ne sont guère harmonieuses. Dans certains cas, le DCC ne collabore pas avec elles. Bien des initiatives d'entraide ne disposent ni du cadre juridique ni du savoir-faire technique nécessaires pour atteindre leurs buts, et une aide des conseils serait fort utile. Cette question sera examinée de nouveau dans le contexte de la gestion des déchets à la section suivante.

Le cadre institutionnel de la gestion des déchets urbains en Tanzanie en général et à Dar es-Salaam en particulier

Rôle du gouvernement central et des institutions nationales

Bien que la gestion des déchets puisse être considérée comme une question d'intérêt local, le gouvernement central et les institutions nationales jouent un rôle important et assument une très grande responsabilité dans l'ensemble du système de gestion des déchets urbains :

– Le cabinet du Premier ministre supervise toutes les autorités locales par l'entremise du ministère des Affaires municipales. Il approuve les budgets des administrations locales et les fait adopter par le Parlement. Il approuve également l'affectation des fonds du Trésor aux administrations locales et s'occupe de toutes les négociations relatives à l'aide externe. De plus, tous les règlements municipaux doivent être approuvés par le cabinet du Premier ministre, notamment les règlements visant à maintenir l'environnement propre ou à imposer des taxes et impôts. L'efficacité des relations entre le cabinet du Premier ministre et les autorités urbaines a un effet important sur la gestion des déchets.

– Le ministère des Terres, du Logement et du Développement urbain (MLHUD) est chargé, outre le développement urbain et le logement, de la politique foncière, de l'aménagement du territoire et de l'administration des terres. Il est responsable de l'élaboration ou de l'approbation des plans d'utilisation des terres, notamment celles requises pour la gestion des déchets. Le MLHUD s'occupe de questions telles que l'acquisition obligatoire de terres et la concession de droits fonciers.

– La National Planning Commission (commission de la planification nationale) est chargée d'élaborer les plans d'aménagement national et de les présenter au Parlement. Elle compte une section d'aménagement urbain et formule des plans qui peuvent faire intervenir d'importants investissements, notamment dans l'infrastructure.

– Le ministère des Communications et des Travaux publics dispose d'importants pouvoirs et responsabilités en matière de construction et d' entretien des routes dans beaucoup de secteurs urbains et s' occupe notamment de la construction et de l' entretien des drains.

– Le ministère des Eaux, de l'Énergie et des Minéraux (MWEM) est responsable de l'approvisionnement en eau ainsi que de la conception et de la construction globales des égouts dans les secteurs urbains. Il est également chargé d'administrer les unités d'assainissement à bon marché. Le service des égouts et de l'assainissement de Dar es-Salaam (OSSO) relève partiellement du MWEM.

– Le ministère de la Santé est chargé de la santé publique en général et de l'analyse des déchets dangereux en particulier, particulièrement ceux produits par les industries, par l'entremise du chimiste du gouvernement.

– Le ministère des Ressources naturelles, du Tourisme et de l'Environnement supervise les questions liées à l'environnement, notamment la prévention de la pollution qui résulte de l' élimination inconsidérée des déchets.

– Le ministère du Commerce et des Industries (MTI) délivre des permis aux entreprises et aux industries et peut poursuivre les pollueurs.

– Le ministère de l'Agriculture et de l' Élevage est notamment responsable de la lutte contre la pollution causée par les pesticides des réseaux d'eau de surface et souterraine et fournit une aide technique à ce chapitre.

– Le National Environmental Management Council (conseil national de la gestion environnementale) (NEMC), dont le principal rôle est de sensibiliser la société aux questions environnementales, établit des règlements et exerce un contrôle au besoin, conseille le gouvernement et coordonne la gestion des questions environnementales. Il s'occupe de tous les aspects de l'environnement, et notamment de la lutte contre la pollution causée par les déchets dangereux.

Il est évident que le gouvernement central a un rôle de premier plan à jouer dans la gestion des déchets urbains, principalement au chapitre de la formulation des politiques, mais également au niveau opérationnel. En outre, compte tenu de la situation insatisfaisante de la gestion des déchets à Dar es-Salaam, le gouvernement central doit parfois intervenir directement pour nettoyer la ville. L'intervention la plus récente fut le nettoyage d'urgence de la ville en 1993–1994, alors que le gouvernement central a fourni les ressources d'urgence pour déplacer des tonnes de déchets accumulés.

Rôle des autorités urbaines dans la gestion des déchets

Les conseils urbains sont responsables de la plupart des fonctions et responsabilités quotidiennes touchant les déchets urbains. Ces fonctions et responsabilités sont énoncées dans différentes lois.

Le cadre juridique

— Déchets solides. La loi sur les administrations locales (autorités urbaines) de 1982 accorde d'importantes responsabilités aux autorités urbaines relativement à la collecte et à l' élimination des déchets. Elle exige notamment que les autorités urbaines enlèvent les déchets et la saleté des lieux publics et privés (alinéa 55 g)). En outre, les autorités urbaines doivent fournir et entretenir des poubelles publiques et d'autres réceptacles pour le dépôt temporaire et le ramassage des rebuts. L'alinéa 55 i) prévoit la prévention et la suppression des nuisances qui peuvent être dangereuses pour la santé publique ou l'ordre public. Les autorités urbaines ont également le pouvoir de veiller à ce que les résidents gardent propres leur logement et les alentours. Cette responsabilité découle des règles cantonales (Township Rules), prises en application de l'ordonnance sur les cantons de 1920. Ces règles ont été maintenues et sont effectives en vertu de la loi sur les administrations locales (autorités urbaines). Pour s'acquitter de ces responsabilités, le DCC a adopté un certain nombre de règlements administratifs ayant trait à la gestion des déchets dont les plus importants sont les Dar es Salaam (Collection and Disposal of Refuse) Bye Laws de 1993. D'autres règlements connexes comprennent les Dar es Salaam City Council (Hawking and Street Trading) Amendment Bye Laws de 1991 et les Dar es Salaam City Council (Animais, City Area) Bye Laws de 1990.

Les règles cantonales prescrivent notamment ce qui suit :

– la règle 23 exige que l'occupant d'un immeuble fournisse des poubelles et les entretienne à la satisfaction des inspecteurs de la ville. Les poubelles doivent être placées le long des routes pour la collecte des déchets ;

– la règle 24 donne au DCC le pouvoir d'exiger qu'une personne enlève les déchets accumulés qu'elle dépose n'importe où ;

– la règle 25 interdit de jeter des ordures dans les rues ou les endroits publics. Les coupables sont passibles d'une amende pouvant atteindre 400 shillings tanzaniens ou de quatre mois de prison ;

– la règle 27 interdit aux occupants d'un terrain ou d'un immeuble d'y accumuler des déchets.

Les Dar es Salaam (Collection and Disposal of Refuse) Bye Laws ont été adoptées pour permettre la privatisation de l' élimination des déchets. Elles exigent que les occupants de locaux aient des poubelles et que le OCC ramasse et élimine les déchets. Ces règlements interdisent notamment aux particuliers de causer des nuisances et de jeter ou de déposer des déchets dans les rues ou dans les espaces libres qui ne sont pas des points de collecte désignés. Le OCC peut exiger des contrevenants qu'ils remédient à la situation.

Cependant, le OCC ne peut pas mettre ces règles et ces règlements en application et ne peut seul remplir ses propres obligations. Qui plus est, on peut soutenir que ces règles sont périmées, ayant été promulguées à l' époque coloniale. Elles ne reflètent pas les conditions actuelles qui existent dans les centres urbains.

— Déchets liquides. En ce qui concerne les déchets liquides, la loi sur les administrations locales (autorités urbaines) impose les exigences suivantes :

– l'alinéa 54 (2) g) exige que les conseils urbains s'occupent d' éliminer les eaux d' égout de tous les locaux et maisons se trouvant sur leur territoire de manière à éliminer les risques pour la santé ;

– l'alinéa 54 (2) i) exige que les conseils urbains empêchent les nuisances qui peuvent présenter des risques pour la santé publique ;

– l'alinéa 54 (2) k) exige que les conseils urbains gardent propres et en bon état toutes les rues et tous les égouts ;

– l'annexe établie en vertu du paragraphe 55 (2) exige que les conseils urbains empêchent la pollution des eaux des fleuves, des rivières, des plans d'eau, etc.

A Dar es-Salaam, conformément aux règlements sur l'assainissement et l'entretien (Sanitation and Service Bye Laws), les responsabilités touchant la gestion des déchets liquides sont déléguées au OSSO, qui est responsable de la construction, de l'entretien, de l'exploitation et de la gestion des égouts collecteurs et des étangs de stabilisation. Ces règlements définissent les frais se rattachant à chaque service, par exemple, pour la vidange des puits et le branchement d'égouts. Le OSSO s'occupe notamment des égouts et de l'assainissement à bon marché.

L'ordonnance sur la santé publique (égouts et drainage) (Public Health [Sewerage and Drainage] Ordinance) de 1955 donne aux autorités locales le pouvoir de s'occuper des égouts, du drainage et des latrines dans les immeubles nouveaux et existants.

La loi sur l'utilisation de l'eau (Water Utilisation Act) de 1974, modifiée en 1981, accorde au Central Water Board (conseil central des eaux) et aux conseils régionaux des eaux, institués en vertu de ses dispositions, le pouvoir de lutter contre la pollution des plans d'eau causée par les effluents urbains. A Dar es-Salaam, ces pouvoirs ont été conférés à la NUW A.

— Déchets industriels. Outre la plupart des lois susmentionnées, d'autres lois s'appliquent aux déchets industriels, à savoir :

– aux termes de la loi nationale sur l'inscription des industries et la délivrance de permis (National Industries Licensing and Registration Act) de 1967, les offices de délivrance des permis peuvent prévenir la pollution environnementale causée par les industries ; .

– la loi nationale sur la gestion de l'environnement (National Environmental Management Act) de 1983 a institué le NEMC et lui confère le pouvoir de lutter contre la pollution environnementale et de prendre les règlements connexes.

Il est donc évident que le fondement législatif régissant la gestion des déchets urbains est adéquat. Néanmoins, la majorité de ces lois ne sont pas appliquées et certaines sont complètement périmées, en particulier pour ce qui est des sanctions prévues. En outre, la mise en œuvre est entravée par les chevauchements des pouvoirs.

Organisation institutionnelle

— Déchets solides. Trois services du DCC sont responsables de la gestion des déchets solides : santé, génie et urbanisme (figure 1). La responsabilité immédiate de la gestion des déchets solides et liquides revient au service de santé qui est divisé en trois unités : traitement, prévention et services sociaux. L'unité de prévention comprend cinq sections : lutte contre la malaria, nettoiement, immeubles, aliments et eau, et inspections. La section du nettoiement est l'organe responsable de la collecte et de l'élimination des déchets, y compris des déchets liquides, du balayage des rues et, avec le concours de l'ingénieur de la ville, du dégorgement des drains. Elle est également chargée de formuler les politiques sur la gestion des déchets solides. Néanmoins, il est évident que l'élimination de~ déchets a peu de poids dans la structure organisationnelle du DCC, étant le fait d'une section d'une unité du service de la santé.

Dans chacun des trois districts de Dar es-Salaam (Kinondoni, Temeke et Hala), la gestion quotidienne des déchets solides relève de l'agent de santé, suivi du contremaître, des chefs de service et des nettoyeurs. Toutes les opérations quotidiennes se font à partir de bureaux situés dans les trois districts. Le nettoyage de la ville est supervisé par le comité permanent de la santé qui planifie, évalue et donne des conseils relativement à toutes les questions concernant la santé, notamment la collecte et l'élimination des déchets. Considérer l'élimination des déchets comme une question de santé peut être limitatif, puisque cette façon de voir néglige d'autres aspects de la production et de l'élimination des déchets. Insister sur le nettoyage revient à négliger d'importants aspects comme la production des déchets et le recyclage. Signalons que le secteur privé, les organismes communautaires et le public ne sont pas inclus dans l'organisation de la gestion des déchets du DCC.

Le service du génie s'occupe de questions touchant les véhicules, les usines et le matériel ainsi que de questions d'ingénierie à proprement parler, notamment des routes qui mènent aux décharges. Le service d'urbanisme est chargé de réserver les terres qui serviront de décharge et entretient à cette fin des rapports avec le MLHUD (figure 2).

Les propositions de la section du nettoiement franchissent différentes étapes avant d'être approuvées. A partir de la section elle-même, une proposition est d'abord soumise au service de santé, puis au comité permanent sur la santé, au comité des finances et de l'administration, au DCC, au comité régional d'aménagement, au ministre des Affaires municipales et enfin au Parlement Cette procédure prend au moins un an. En outre, la section du nettoiement n'est absolument pas autonome, même pour les questions aussi cruciales que l'achat de carburant ou de pièces de rechange. Elle n'apas de budget distinct et l'argent qu'elle perç oit est versé dans les recettes générales du DCC.

Depuis le milieu de 1994, le DCC a privatisé la collecte des déchets au centre de la ville. Cette question est abordée plus loin dans la présente section.

— Déchets liquides. Deux services du DCC s'occupent des déchets liquides : le OSSO, semi-autonome, et le service de santé. On a discuté du service de santé précédemment. A cause du manque de ressources, le OSSO s'occupe maintenant de la gestion quotidienne des déchets liquides.

Le OSSO a été établi avec le concours de la Banque mondiale et relevait à l'origine du MLHUD. Il est ultérieurement passé au MWEM et est maintenant un service semi-autonome du DCC. Il compte cinq divisions (figure 3) :

– la division égouts s'occupe, outre des égouts, de la lutte contre la pollution ;

– la division finances est responsable de l'administration des tarifs et du recouvrement des coûts ;

– la division assainissement s'occupe de la construction des latrines améliorées et ventilées, de la vidange des fosses de décantation, de l'éducation sanitaire et de la promotion de la santé ;

– la division mécanique et électricité est responsable de l'entretien et des pièces mécaniques et électriques du réseau d'égouts ;

– la division administration s'occupe des questions administratives générales.

Comme dans le cas des déchets solides, les déchets liquides relèvent de la section du nettoiement de l'unité de prévention du service de santé. Pour chacun des trois districts de Dar es-Salaam, la gestion des déchets liquides est dirigée par l'agent de santé, de qui relèvent le contremaître ou le chef de service, les chauffeurs et les ouvriers. Les pouvoirs et les fonctions du service de santé et du osso se chevauchent beaucoup, notamment parce que le OSSD relève du MWEM.

— Déchets industriels. L'organisation décrite ci-dessus concernant les déchets solides et liquides s'applique également aux déchets industriels. Néanmoins, beaucoup d'industries ont pris leurs propres dispositions pour s'occuper des déchets, notamment le traitement local, le déversement dans les plans d'eau et le transport vers la décharge municipale.

Le rôle du secteur privé structuré dans la gestion des déchets

Même si, comme il en a été question précédemment, le secteur privé est considéré comme une partie intégrante de la société civile, on le considère pour cette section comme une entité distincte.

Différents établissements, entreprises et industries ont pris leurs propres dispositions pour gérer leurs déchets, notamment la Kariakoo Market Corporation, qui s'occupe des déchets du plus grand marché de Dar es-Salaam, à Kariakoo, l'Université de Dar es-Salaam, la Tanzania Telephone Company, la National Housing Corporation, la National Bank of Commerce. Certaines entreprises privées offrent également des services de collecte des déchets solides ou liquides aux particuliers, aux entreprises et aux établissements, mais leur incidence générale est encore limitée.

La privatisation de la collecte des déchets solides au centre de Dar es-Salaam

Cependant, la décision du OCC de privatiser la collecte des déchets solides dans les dix quartiers qui forment le centre de la ville en 1994 présente un intérêt particulier. La privatisation de la collecte des déchets solides à Dar es-Salaam est étroitement liée aux activités du Sustainable Dar es Salaam Project (projet durable de Dar es-Salaam) (SDP).

Le SOP a débuté à Dar es-Salaam sous les auspices du programme Cités durables du Centre des Nations unies pour les établissements humains (Habitat). Son principal objectif est de regrouper les différents intervenants du milieu urbain, notamment le gouvernement central et les administrations locales, le secteur privé, les différents organismes subventionnaires et les organismes communautaires afin d'élaborer des stratégies pour s'attaquer aux problèmes environnementaux des villes.

En août 1992, le SOP organisait une consultation auprès des résidents de Dar es-Salaam sur les questions environnementales au terme de laquelle il a été déterminé que la gestion des déchets constituait une question prioritaire dont il fallait s'occuper immédiatement. Il fut notamment recommandé que des groupes de travail trans-sectoriels et multi-institutionnels soient établis pour mettre en œuvre une stratégie d'intervention en cinq points, à savoir : nettoyage d'urgence de la ville ; privatisation du système de collecte ; gestion des décharges ; établissement de systèmes de collecte communautaires ; incitation au recyclage. Pour réaliser cette stratégie, cinq groupes de travail ont été mis sur pied : nettoyage d'urgence ; privatisation ; gestion des décharges ; recyclage ; collecte communautaire. Cette stratégie a été révisée et comporte maintenant trois éléments : renfor-cement de la privatisation, renforcement de la gestion des décharges et recyclage.

Dans ce contexte, le SDP a joué un rôle essentiel dans le nettoyage d'urgence de Dar es-Salaam en 1993–1994 (à l'égard duquel le gouvernement central et les organismes subventionnaires ont fourni des ressources considérables) et la privatisation de la collecte des déchets dans le centre de la ville en 1994. A l'heure actuelle, le SDP supervise la gestion des déchets à Dar es-Salaam et formule les politiques connexes. Il témoigne de l'effet important que peut avoir une institution étrangère sur la gouvernance de Dar es-Salaam.

La privatisation a été rendue possible après l'adoption des Dar es-Salaam (Collection and Disposai of Refuse) Bye Laws, en 1993, qui permettent au DCC d'imposer des fiais de collecte des déchets aux occupants des lieux où des déchets sont ramassés. Les personnes qui ne paient pas les frais de collecte peuvent être poursuivies en justice. Les règlements disposent également qu'aucun permis commercial ne peut être délivré tant que les fiais de collecte n'ont pas été acquittés. Un entrepreneur privé, Multinet, est responsable du balayage des rues ainsi que de la collecte et du transport des déchets solides entre le secteur où la gestion des déchets a été privatisée et la décharge.

Relations entre l'entrepreneur privé et le DCC

La gestion des déchets solides dans le centre de Dar es-Salaam est privatisée maintenant depuis plus d'un an, et on peut d'ores et déjà faire quelques observations à son sujet. Il est important de noter que les relations entre le DCC et l'entrepreneur privé sont plus tendues que prévu.

En fait, le DCC ne semblait pas trop favorable à l'idée de la privatisation, mais l'aurait acceptée parce que les organismes externes l'avait proposée et peut-être aussi parce que l'on pouvait s'attendre à ce que les organismes subventionnaires l'appuient en fournissant des ressources. Les observations suivantes tendent à soutenir la thèse selon laquelle le DCC était peu disposé à s'engager dans la privatisation :

– le DCC a tardé à prendre des mesures liant la délivrance des permis commerciaux au paiement des fiais de collecte des déchets, comme le prévoyaient les propositions de privatisation, et instituant, à cet égard, une collaboration avec le ministère du Commerce et des Industries, et n'a pas réussi à établir un autre système qui aurait été efficace ;

– le DCC a négligé d'organiser une campagne d'information concernant tout le processus de privatisation et ses avantages ;

– le DCC n'a rien fait contre les personnes qui n'avaient pas acquitté les trais de collecte des déchets ;

– le DCC n'a pas mis en œuvre la majorité des mesures recommandées par les consultants pour faciliter la privatisation ;

– aux termes du contrat de privatisation, le DCC devait quitter son bureau de service à Temeke, qui devait ensuite être occupé par Multinet, et Multinet devait construire un autre immeuble pour le personnel et les activités déplacés de Temeke. Or, ni le DCC ni Multinet n'ont respecté leurs obligations. La signature du bail a été considérablement retardée ;

– il a fallu beaucoup de temps au DCC pour qu'il signe les différents accords prévus au contrat de privatisation ;

– en vertu du contrat de privatisation, Multinet devait louer les véhicules du DCC, mais il n'a pas payé la location. En janvier 1994, Multinet devait 21,8 millions de shillings tanzaniens au DCC en fuis de location pour la période allant du 1er juillet au 31 décembre. En outre, le DCC devait à Multinet 29,7 millions de shillings tanzaniens pour la collecte des déchets dans les marchés de la ville, les écoles, les dispensaires et à l'hôtel de ville ainsi que pour d'autres services rendus entre le 1er juillet et janvier 1995. Depuis, ces deux montants ont plus que doublé et rien n'a été payé. Récemment, le DCC a retiré ses véhicules de Multinet, laissant l'entrepreneur en plan ;

– au début de 1995, Multinet faisait face à la colère des fonctionnaires du fisc qui menaç aient de saisir ses actifs pour couvrir les taxes de vente, droits de timbre et impôts retenus à la source non payés. En juin, le DCC n'avait rien fait pour obtenir une exemption fiscale pour Multinet ou au moins une entente à l'amiable avec le fisc, même si, dans les faits, Multinet percevait les fuis de collecte des déchets au nom du DCC.

Après avoir scruté le contrat de privatisation à la loupe, les nouveaux conseillers élus en octobre 1994 ont soupç onné qu'il y avait quelque chose de louche et que le DCC avait conclu une entente défavorable. Ce sentiment a été exacerbé par le fait que l'entrepreneur n'avait rien payé au DCC, malgré les dispositions du contrat (Uhuru, 13 mai 1995). Cette situation s'est soldée par la suspension de différents cadres du DCC, dont l'avocat de la ville, l'agent de santé, l'urbaniste et le directeur municipal intérimaire.

La privatisation de la gestion des déchets au centre de la ville devait être rentable et s'étendre au reste de la ville. Cependant, l'expérience n'apas été très encourageante, surtout à cause des mauvaises relations entre le DCC et l'entrepreneur privé.

Le rôle du reste de la société civile en émergence

Tout compte fait, le DCC, l'entrepreneur privé et les établissements du secteur privé structuré ne collectent qu'environ 10 % de tous les déchets solides produits dans la ville. Cette section examine les différentes façons dont la société s'occupe de ses déchets. Soulignons que l'incapacité des autorités à ramasser les déchets n'a pas soulevé de tollé chez les citoyens de Dar es-Salaam. Néanmoins, une étude des journaux révèle que la presse a exprimé de graves inquiétudes à ce sujet. Dans un quotidien local, la question des déchets accumulés à Dar es-Salaam a été soulevée au moins quatre fois en juillet 1995 seulement (Majira, 3, 6, 17 et 24 juillet 1995). Une visite du nouveau maire de Dar es-Salaam dans différents marchés a révélé que ceux-ci, même s'ils sont fréquentés par le public, sont les endroits les plus sales de la ville ; on y trouve des amoncellements de déchets et des toilettes immondes (Nipashe, 28 juillet 1995).

Exception faite de certaines manifestations tenues pour pousser le DCC à quitter la décharge qu'il occupait dans le secteur de Tabata et à abandonner les sites qu'il avait réservés comme décharges à Kunduchi et Mbagala, comme il en est question ci-dessous, la société avait appris à composer avec l'inefficacité du système structuré de collecte des déchets et avait instauré un certain nombre de mécanismes pour y faire face. Certains de ces mécanismes sont décrits cidessous.

Partenariats avec le DCC

Le DCC et les producteurs de déchets ont formé des partenariats pour la collecte et l'élimination des déchets. En voici des exemples :

– un certain nombre de commerçants, particulièrement des hôteliers, paient des droits au DCC ou versent des primes à ses employés pour que leurs déchets soient ramassés selon les besoins ;

– des commerçants de certains marchés perç oivent de l'argent pour louer des camions à ordures. Ainsi, les commerçants du marché de Buguruni ont constitué une coopérative (Wauza Mazao Buguruni Cooperative Society) qui administre un fonds qu'elle utilise pour louer des camions à ordures, notamment ceux du DCC, pour ramasser les déchets du marché. Les frais imputés pour chaque voyage sont de 6 000 shillings tanzaniens ;

– dans certaines parties de la ville, comme dans la zone accessible en véhicule automobile, le DCC a réservé une place où il est possible de jeter ses déchets. Ceux-ci sont ramassés chez les producteurs par différents moyens, notamment les voitures à bras. A la décharge, le DCC a posté une benne et deux employés, qui empilent les déchets et les incinèrent. A l'occasion, le DCC ramasse la benne et les déchets qui se sont accumulés autour.

Le rôle des ONG et des organismes communautaires

Le rôle des ONG dans la gestion des déchets à Dar es-Salaam est encore limité, mais prend de plus en plus d'importance. Un certain nombre d'organismes communautaires se sont établis ou sont en voie de se former dans les communautés de Dar es-Salaam, Buguruni, Kigogo, Kijitonyama, Tabata, Hannah Nassif, Sinza et Changanyikeni. Ces organismes réunissent les ressources locales et étranger :es nécessaires pour s'attaquer aux problèmes environnementaux dans leur secteur. Les domaines d'intérêt comprennent la construction de routes et de drains, le drainage, la plantation d'arbres et la gestion des déchets (Gossi, 1994). Le SDP joue également un rôle dans la formation d'ONG et d'organismes communautaires. Déjà, dans le secteur de Hannah Nassif, de tels organismes ont été mis sur pied pour s'occuper de la gestion des déchets.

L'organisme communautaire Tabata Development Fund (fonds de développement de Tabata) est particulièrement intéressant. Fruit des efforts des résidents de Tabata pour que la décharge de leur secteur soit déplacée, il a été enregistré en tant qu'organisme communautaire en mars 1993. Jusqu' à maintenant, il est parvenu à mobiliser les gens, à réunir des ressources et à favoriser les partenariats pour la construction d'un pont, la remise en état des routes locales, la plantation d'arbres et la construction de collecteurs d'eaux pluviales. Récemment, il a obtenu une allocation de 504 millions de shillings tanzaniens de la Banque mondiale pour la construction d'infrastructures dans le secteur.

Il faut souligner qu'un certain nombre d'organismes communautaires ont clairement été constitués dans le but de tirer profit de fonds externes. En fait, certains des organismes communautaires les mieux connus sont fortement tributaires des organismes externes pour le financement et la motivation, ce qui n'est peut-être pas une bonne chose, puisqu'ils risquent de disparaître si le financement externe s'épuise. Cependant, de plus en plus d'organismes communautaires sont autocentrés et leur principal objectif n'est pas d'obtenir des fonds de l'extérieur, mais bien de réunir des ressources locales.

Les méthodes les plus courantes utilisées pour gérer les déchets solides à Dar es-Salaam

Une enquête statistique réalisée pour les besoins de cette étude révèle que la majorité des résidents urbains ont conç u des mécanismes pour gérer leurs propres ordures. Le tableau 1 montre les méthodes que les personnes interrogées utilisent à cette fin.

Il ressort du tableau 1 que les gens ne jettent pas leurs déchets solides n'importe où sur leur terrain. Ils les enfouissent dans une fosse spéciale ou les déposent quelque part à l'extérieur de leur propriété. L'utilisation de poubelles et de sacs-poubelle est courante uniquement dans les secteurs où la gestion des déchets est privatisée (Upanga et centre de la ville). L'utilisation de sacs-poubelle dans le secteur à faible revenu de Buguruni est peut-être le résultat du travail d'une ONG environnementale (Plan International) dans le secteur. A l'exception du centre, où la collecte des déchets est relativement efficace, les déchets sont généralement considérés comme un problème majeur et les services du DCC sont soit mauvais, soit inexistants. Il ressort nettement des données que le OCC ne sollicite presque jamais la participation des résidents de Dar es-Salaam à la gestion des déchets solides.

Dans bien des secteurs, les déchets solides sont jetés sur des terres publiques ou des terrains privés non utilisés, notamment en bordure de la route ou dans des cimetières, des vallées ou des drains. Dans certains secteurs, un système parallèle de collecte des déchets a vu le jour ; habituellement, les éboueurs utilisent des voitures à bras pour ramasser les déchets dans les foyers ou les commerces. Les fiais par charge varient entre 50 et 200 shillings. Ces éboueurs déposent les déchets solides dans une décharge commune, où ils sont souvent incinérés, habituellement par les éboueurs ou les personnes qui vivent dans les environs. Le tri se fait rarement dans les foyers.

Il existe également un système parallèle de tri et de récupération qui permet de réduire les déchets et de les répandre pour qu'ils se décomposent plus rapidement. Kaseva (1995) souligne que 600 personnes font de la récupération à Dar es-Salaam, mais cette estimation est définitivement inférieure à la réalité. Ces récupérateurs n'ont aucune tribune structurée, pas plus qu'ils n'ont de relations avec le DCC. Ils utilisent le matériel recyclable eux-mêmes ou le vendent.

Déchets liquides

La majeure partie des déchets liquides sont déversés dans les terres communes, comme les routes, les espaces libres et les terrains non utilisés. Cependant, un groupe de personnes, appelé chura, se spécialise dans le drainage des latrines à fosse, dont il vidange le contenu dans un puits situé à proximité qu'il recouvre ensuite de terre. Ce procédé s'appelle kutapisha. Les chura n'ont aucun lien avec le DCC et sont régis par des règles informelles convenues entre eux et leurs clients.

Déchets industriels

Les déchets industriels solides sont habituellement incinérés ou enfouis sur place, mais certains sont transportés à la décharge municipale. Un certain recyclage se fait. Les déchets industriels liquides sont déversés, par des connexions avec le réseau limité de la ville, dans des étangs de stabilisation dont beaucoup ne fonctionnent pas, ou directement dans les cours d'eau ou les drains locaux.

Quelques observations générales

Le problème le plus important que présente la gestion des déchets à Dar es-Salaam semble être le fait que, même si les producteurs de déchets semblent éliminer les déchets de leur entourage immédiat, beaucoup de ces déchets s'accumulent dans les décharges ou sur les terrains communs, sans que des mesures coordonnées ne soient prises pour remédier à la situation.

Les méthodes les plus souvent utilisées pour s'occuper des déchets présentent elles aussi d'importantes failles :

– dans les secteurs très denses, aucun terrain n'est disponible pour creuser des fosses où seraient enfouis les déchets solides, et il n'ya pas d'espaces libres pour recevoir les déchets liquides ;

– les déchets déposés dans les espaces libres, sur les terres communes ou dans les vallées et les drains représentent une cause majeure de pollution (odeurs, par exemple) et de risques sanitaires, et peuvent engorger les drains naturels ou artificiels, éroder le sens civique et avoir des effets désastreux sur le plan esthétique ;

– en contrevenant aux règlements du conseil qui interdisent l'élimination incontrôlée des déchets, les personnes qui se débarrassent de leurs déchets à tort et à travers sont susceptibles de contrevenir à d'autres lois ;

– l'élimination irréfléchie des déchets a parfois donné lieu à des conflits sociaux.

L'aspect politique de la gestion des déchets

Perspective historique

A l'époque coloniale, la gestion des déchets, à l'instar d'autres aspects de la vie urbaine, reposait sur la race. L'infrastructure et les services étaient concentrés dans les secteurs destinés aux personnes de race non africaine. Ces secteurs avaient tendance à se retrouver dans les centres des villes et les quartiers résidentiels peu peuplés, comme Oyterbay à Dar es-Salaam.

Cependant, dans les années 40 et 50, les Afro-Tanzaniens ont fait campagne pour obtenir de meilleures conditions de vie. Associé à la croissance urbaine rapide et à la perspective d'indépendance, ce mouvement a forcé le gouvernement colonial à viabiliser les secteurs de Dar es-Salaam occupés par les Africains. Les nouveaux services, qui se réduisaient au minimum, étaient concentrés dans les secteurs aménagés à ce moment, laissant sans viabilisation ceux qui n'étaient pas aménagés.

Pendant les premiers temps de l'indépendance, il fallait moderniser les villes et consolider le pouvoir politique. On s'est beaucoup concentré sur l'infrastructure urbaine et la viabilisation. Cependant, les années 70 ont été le témoin de la centralisation du pouvoir politique et la Tanzanie a connu des problèmes économiques. Ce faisant, le gouvernement s'est distancié de la population et a commencé à accorder moins d'attention aux services urbains.

Les années 80 ont été marquées par des crises économiques, doublées d'une urbanisation rapide. Dar es-Salaam, pas exemple, croît à un rythme supérieur à 7 % par an depuis les années 40. De même, la proportion urbaine de la population nationale est passée de 13,8 % en 1978 à 27,6 % en 1988. Entre 1991 et 1995, le taux de croissance moyen global a été de 3,4 % seulement, mais le taux de croissance de la population urbaine a été de 20,2 %.

Au moins deux facteurs politiques ont façonné la gestion des déchets :

– la centralisation du pouvoir politique a réduit l'attention portée aux problèmes locaux, même si le gouvernement central et les politiciens clés interviennent de temps à autre, ponctuellement, pour nettoyer la ville, comme dans le cas du nettoyage d'urgence de Dar es-Salaam en 1993–1994. D'autres mesures ont fait intervenir des personnalités importantes, notamment le président du pays et des ministres. Cependant, ils n'ont pas déployé tous les efforts voulus pour s'assurer que les autorités urbaines s'acquittent avec sérieux de leurs responsabilités ;

– la tradition de services gratuits ou peu coûteux et le manque de transparence et de responsabilité a rendu politiquement difficile l'instauration de &ais de service, ce qui, avec le manque de ressources, a entravé la prestation des services.

La gestion des déchets à Dar es-Salaam est façonnée moins par les pressions politiques populaires que par les interventions nationales et internationales et la nécessité d'éviter la confrontation avec la population locale. Elle est également façonnée par la nécessité d'insister, du moins symboliquement, sur les secteurs importants au plan politique en excluant presque totalement les intérêts des personnes qui vivent dans les secteurs à faible revenu, une négligence qui équivaut parfois à de l'oppression pure et simple.

Les aspects internationaux de la gestion des déchets

Différents aspects de la gestion de Dar es-Salaam ont été l'objet d'interventions internationales. Le gouvernement japonais est intervenu dans la gestion des déchets en 1987 en finanç ant des études sur la production et la gestion des déchets à Dar es-Salaam et en donnant par la suite plusieurs véhicules pour la gestion des déchets, notamment des camions à benne basculante et des camions à vidange. Le gouvernement italien est également intervenu en 1991, en faisant le don de six camions compacteurs. Plus importante encore a été l'intervention internationale généreuse qui a eu lieu lors du nettoyage d'urgence de Dar es-Salaam en 1993–1994. Il se peut que cette intervention ait été motivée par le fait que Dar es-Salaam était la capitale et que de nombreux diplomates étrangers y vivaient. Le SDP, qui vise à renforcer la gouvernance de la ville, notamment par la privatisation de la gestion des déchets et la participation de la collectivité, est un projet conç u et financé à l'étranger. En outre, comme il en a déjà été question, nombre d'organismes communautaires sont motivés et financés par des organismes étrangers.

La prépondérance des interventions internationales n'est pas sans conséquence. Elle convainc le DCC qu'il peut toujours compter sur la communauté internationale et qu'il n'est donc pas nécessaire de trouver des solutions locales aux problèmes de gouvernance urbaine, ce qui crée un syndrome de dépendance et transforme le DCC, le faisant passer d'organe décisionnel à organe récepteur de politiques. En outre, la plupart des propositions reç ues des organismes internationaux sont habituellement examinées sans esprit critique, même lorsqu'elles pourraient être jugées inadéquates, comme le démontrent les exemples suivants.

Le fait de demander aux commerçants de payer 80 % des frais de collecte des déchets à l'avance (voir ci-dessous) pour assurer le succès de la privatisation était une erreur évidente, mais cette idée a été acceptée, peut-être parce qu'elle venait de l'extérieur. En outre, peut-être à cause du syndrome de dépendance, le DCC a peu à proposer concernant le choix de la technologie. Peu importe ce que donnent les pays donateurs, on l'accepte. Par exemple, un consultant du SDP a constaté en février 1995 (MCAL, 1995) que les petits camions DCM Toyota (3–7 t) qu'avait achetés Multinet étaient plus efficaces que les camions Isuzu ou Calabresse offerts par les pays donateurs. Leurs coûts de chargement et de conduite étaient plus bas. En fait, les camions Calabresse donnés par le gouvernement italien étaient devenus inutilisables six mois plus tard faute de pièces de rechange. Après que ces camions eurent été remis en état pour le nettoyage d'urgence de Dar es-Salaam, le consultant a constaté qu'ils coûtaient très cher à exploiter et a recommandé de ne plus en commander. Pourtant, le DCC avait accepté, sans analyse critique, la suggestion de les acheter.

Pendant les préparatifs en vue de la privatisation de la collecte des déchets solides, l'acceptation par le DCC des points de collecte, c'est-à-dire les endroits où les ménages devaient aller déposer leurs déchets pour que l'entrepreneur les ramasse, a peut-être été le résultat de l'intervention d'un consultant étranger, puisque ces points de collecte présentaient des inconvénients majeurs qui auraient été évidents pour les résidents locaux.

Les aspects de la politique nationale qui influent sur la gestion des déchets

Étant le siège du gouvernement central, Dar es-Salaam a généralement été plus favorisée par les subventions gouvernementales que les autres centres urbains. Même si le montant total accordé ne représentait qu'une fraction de ce que le DCC demandait, il était suffisant pour que le DCC n'ait pas à taxer ses résidents.

En outre, le gouvernement central n'a pas contraint le DCC à percevoir des recettes localement, ce qui s'est traduit encore une fois par un syndrome de dépendance et des recettes insuffisantes. En fait, aux moments critiques, le gouvernement central s'est porté à la rescousse de Dar es-Salaam en fournissant des ressources ou par l'intervention personnelle de fonctionnaires ou de politiciens clés. Par exemple, pendant le nettoyage d'urgence, des millions de shillings ont été versés sous forme de subventions non remboursables. De plus, il est possible que le gouvernement ait financé le nettoyage d'urgence en pensant aux élections locales de 1994. Le parti au pouvoir avait gagné tous les sièges au DCC. Pendant la campagne électorale, les autobus publics se rendaient dans des endroits éloignés de Dar es-Salaam comme jamais auparavant, et cette pratique a cessé immédiatement après l'élection.

Avec une telle dépendance, le DCC trouve plus pratique de se fier au gouvernement central pour obtenir du financement et de le dénoncer parce qu'il alloue des ressources insuffisantes pour assurer, entre autres choses, une gestion efficace des déchets.

Les aspects de la politique locale qui influent sur la gestion des déchets

Le centre de la ville et les autres secteurs de Dar es-Salaam

Au fil des ans, les efforts du DCC au chapitre de la collecte des déchets ont été de toute évidence concentrés dans le centre de la ville sous prétexte que ce secteur ne disposait pas d'autre mode d'élimination des déchets. Ce n'est pas tout à fait vrai. Dans les secteurs non aménagés très denses, on trouve relativement peu d'espace disponible pour disposer des déchets ; pourtant, les efforts du DCC n'ont jamais été concentrés dans ces secteurs. Hala, où le centre de la ville est situé, est le plus favorisé des trois districts, suivi de Kinondoni, où l'on retrouve les quartiers résidentiels les plus riches de Dar es-Salaam. Temeke, considéré comme le plus pauvre des trois districts de Dar es-Salaam, obtient généralement la plus petite part. Le secteur central est favorisé parce que les déchets solides accumulés ou les déchets liquides non recueillis y sont visibles et créent un problème politique majeur qui inquiète le gouvernement national et les gouvernements étrangers, les grandes entreprises et les ménages à revenu élevés.

Oppression sociale à la décharge

Les déchets solides de Dar es-Salaam sont ramassés dans différentes parties de la ville et déposés dans une décharge située dans le secteur à faible revenu de Vingunguti. L'empressement avec lequel les déchets sont ramassés dans le secteur central n'existe pas à Vingunguti. Les résidents de ce quartier souffrent maintenant des émanations, de l'odeur, du bruit et des vibrations puisque les déchets ramassés partout dans la ville y sont simplement jetés au lieu d'être déposés dans la décharge prévue. Malgré tout, les consultants ont proposé récemment que la route menant à la décharge, route qui se détériore à cause des poids lourds qui l'empruntent, soit améliorée afin de permettre à un plus grand nombre de véhicules d'y circuler et que la décharge soit éclairée pour que l'on puisse y déposer des déchets jour et nuit. On fait peu de cas des résidents de Vingunguti. Même les recettes produites ne servent pas nécessairement à améliorer l'état de la décharge. Le DCC peut donc négliger, voire opprimer, les résidents de Vingunguti, puisque ce secteur est un quartier pauvre et que ses résidents n'ont pas de pouvoir politique, contrairement aux résidents de Tabata, qui ont réussi à empêcher le DCC d'ydéposer des déchets.

Relations tendues entre les conseillers et les fonctionnaires

La gouvernance de Dar es-Salaam a souffert des mauvaises relations entre les conseillers et les fonctionnaires. Des questions d'ethnicité, la corruption et le manque d'éducation ont directement ou indirectement contribué aux tensions. Ce problème est devenu politique. Les rôles des conseillers et ceux des fonctionnaires ont été mal définis ; les conseillers examinent les plans, les suggestions ou les interventions des fonctionnaires avec méfiance ; dans certains cas, il est évident que les conseillers ont des comptes à régler avec les fonctionnaires. Par conséquent, le taux de roulement est élevé chez ces derniers. En outre, en février 1995, on a remarqué que tous les fonctionnaires du DCC exerç aient la contrepartie de leurs véritables fonctions (Kironde, 1995). Par ailleurs, les conseillers servent leurs intérêts personnels au conseil. Les principaux intérêts reposent sur la répartition et l'acquisition des terres, le commerce et les revenus des conseillers. La gestion des déchets n'est pas prioritaire dans l'esprit des conseillers et les tensions entre les conseillers et les fonctionnaires ont empêché la formulation et la mise en œuvre d'une politique de gestion des déchets claire.

Mauvaises relations entre les conseillers et le public

On a remarqué que les conseillers de Dar es-Salaam ont très peu d'interactions avec l'électorat et que beaucoup se considèrent davantage comme des employés du conseil, don(ils obtiennent d'importantes allocations, plutôt que comme les représentants de la population (Kironde, 1994). Les questions qui sont prioritaires pour l'électorat, comme le manque de routes, de drains et d'eau ou le déversement d'eaux usées et les déchets solides non ramassés, ne reç oivent pas l'attention qu'elles méritent. Dans une démocratie multipartite, cette situation pourrait changer, mais par le passé les conseillers se sont peu souciés des besoins de leurs électeurs.

Il y a lieu de conclure que le DCC a peur des gens qu'il sert, ce qui se traduit par un taux d'imposition faible, voire nul et, donc, par des recettes faibles et un sens moins grand de sa responsabilité envers la population.

La politique de la privatisation

La privatisation de la gestion des déchets solides dans le secteur central de Dar es-Salaam montre tous les signes du rôle joué par la politique dans l'établissement des fiais de collecte des déchets et la sélection des secteurs où la collecte sera privatisée. Le secteur du centre a été privatisé en premier, non seulement à cause de son importance politique, mais aussi parce qu'il est occupé surtout par les autochtones et les commerçants. Il est plus probable que les fiais de collecte des déchets seront acceptés dans ce quartier qu'ailleurs. Les fiais ont également été établis de manière que les entreprises versent 80 % des trais prévus, et les résidents des quartiers à prédominance non africaine ont payé jusqu'àsept fois plus que ceux des quartiers à prédominance africaine.

Les relations entre les conseillers et les ONG

Les conseillers ne semblent pas plus enthousiastes envers les ONG en émergence qu'ils ne le sont envers les fonctionnaires. Beaucoup d'ONG ne reç oivent ni la participation ni la collaboration des conseillers. Il est possible que les conseillers jugent que les ONG remettent en cause leur situation et leur statut politique.

Apathie politique

L'électorat semble envisager avec indifférence ce qui se passe au DCC. Nous en voulons pour preuve le faible de taux de participation aux élections locales et l'incapacité de l'électorat à prendre des mesures pour obliger les conseillers à répondre à leurs besoins, à faire preuve de transparence et à répondre de leurs actes. Des observateurs se sont demandé pourquoi des conseillers improductifs sont toujours réélus. Certains ont conclu que les résidents de Dar es-Salaam ne connaissent pas leurs droits civiques ou que les électeurs sont facilement « achetés » par des politiciens sans scrupule. La loi exige que les administrations urbaines fassent un certain nombre de choses, notamment ramasser les déchets, fournir des toilettes publiques et nommer les rues. L'inexécution de ces fonctions contrevient à la loi, pourtant le public ne fait rien contre les autorités qui ne s'acquittent pas de leurs obligations. Peu de citoyens assistent aux assemblées du conseil ou lisent les procès-verbaux des réunions du DCC, même si la loi le permet. Il se peut que cette apathie tire son origine de l'époque du régime politique à parti unique. Qui plus est, on remarque qu'en Tanzanie, les personnes plus instruites de la société ont tendance à fuir la politique locale, mais cela est en train de changer. Une bonne partie de la gestion de l'aménagement de Dar es-Salaam pourrait s'améliorer si les conseillers consultaient les résidents et tentaient de trouver des moyens de résoudre leurs problèmes.

Certes, les déchets non ramassés constituent un enjeu politique important, mais certains des conseillers à qui nous avons parlé se sont contentés de dire que leurs concitoyens se débarrassaient de leurs déchets par leurs propres moyens et que le principal responsable était le gouvernement central qui n'alloue pas suffisamment de ressources au DCC à cette fin.

Les aspects économiques de la gestion des déchets

Perspective historique

La gestion urbaine générale en Tanzanie ne repose pas traditionnellement sur des facteurs économiques. Le gouvernement colonial à Dar es-Salaam a prodigué une infrastructure et des services considérables dans les secteurs à faible densité, c'est-à-dire les quartiers riches, sans égard au coût. Il portait peu d'attention à la viabilisation, peu coûteuse, des secteurs très denses. La plupart des services étaient fournis gratuitement ou à des tarifs subventionnés, ou n'étaient pas fournis du tout. Les sources possibles de recettes, telles que le loyer foncier, étaient délibérément sous-exploitées.

Facteurs économiques sous-jacents à la gestion des déchets

Pour être efficace, un service de gestion des déchets nécessite beaucoup de capital et un financement régulier, notamment pour acheter ou entretenir les véhicules, construire et entretenir l'infrastructure nécessaire, payer la main-d'œuvre et faire respecter les règlements. Par le passé, les autorités ont tenté d'établir des frais d'utilisation relativement à certains aspects de la gestion des déchets. Par exemple, le DCC assure la collecte des déchets solides gratuitement pour la plupart des particuliers, mais des frais de 1 000 shillings tanzaniens par voyage sont imposés aux commerces, aux entreprises et aux industries. De même, le DSSD impose des trais pour le branchement à un égout ou pour la vidange des latrines ou des fosses septiques. Néanmoins, ces trais ne couvrent habituellement pas les coûts nécessaires. Le OCC a dépensé environ 31 millions de shillings au titre de la collecte des déchets solides en 1987–1988, mais n'en a perç u que 222 000 pour ce service.

En 1993, le budget total du OCC pour la gestion des déchets solides s'élevait à 194 millions de shillings, dont 150 millions environ ont été versés dans le cadre d'une intervention spéciale du cabinet du Premier ministre pour le nettoyage d'urgence de Dar es-Salaam. Ce montant ne comprenait pas les fuis de main-d'œuvre, que le DCC avait budgétisés séparément. Cependant, cela signifiait que le DCC n'avait approuvé que 44 millions de shillings pour couvrir les coûts de carburant et d'entretien des véhicules et de la décharge. Ces fonds n'étaient pas suffisants pour exploiter la décharge de Vingunguti et alimenter en carburant le parc de camions du DCC. Ainsi, le DCC ne pouvait faire fonctionner que huit à dix de ses 20 camions à benne basculante et, au mieux, un de ses camions compacteurs pendant un quart de travail, ce qui représentait un sixième seulement du potentiel du DCC et ne répondait qu' à une infime partie des besoins.

En mars 1994, des consultants ont calculé (MCAL, 1994) que le DCC avait besoin de 517 millions de shillings par an pour assurer la collecté des déchets dans le secteur central seulement et plusieurs fois ce montant pour ramasser les déchets à l'échelle de la ville. Dans les circonstances actuelles, il est impossible pour le DCC de disposer d'un tel montant, puisqu'il ne peut pas consacrer plus de 60 millions de shillings par an à la gestion des déchets, fuis de main-d'œuvre compris. Par conséquent, la gestion des déchets n'est pas durable, comme nous le montrerons ci-dessous dans le cas des véhicules.

Les facteurs économiques influent également sur le choix de la décharge. Les décharges éloignées sont peut-être moins coû teuses à exploiter, mais les fuis de transport seront élevés. Les décharges situées à proximité doivent être bien gérées. L'expérience de Dar es-Salaam révè le que la gestion d'une décharge selon les normes prescrites est presque impossible, surtout à cause du manque de ressources, et le DCC a utilisé les sites réservés pour l'élimination des déchets solides comme simples dépotoirs où les déchets sont enfouis sans traitement et non comme décharges contrôlées. A l'heure actuelle, comme le DCC a peine à obtenir les ressources nécessaires pour gérer sa décharge, on se doute bien que l'établissement de nouvelles décharges est impensable.

Même s'il disposait d'un système plus efficace pour obtenir des recettes au niveau local, il est peu probable que le DCC obtienne ou engage suffisamment de ressources pour assurer une gestion conventionnelle des déchets, c'est-à-dire recourir au secteur public pour ramasser, transporter et éliminer tous les déchets. Le recouvrement des coû ts, les fuis d'utilisation ou une exploitation plus efficace des sources de recettes actuelles permettraient au DCC d'établir des partenariats. La privatisation, le soutien d'autres modes de gestion des déchets, notamment la gestion des déchets par les petits exploitants, et la participation du public semblent être d'autres mécanismes possibles pour gérer les déchets à l'avenir.

Souvent, le recouvrement des coû ts et les fuis d'utilisation soulè vent une controverse qui procè de de la capacité de payer des particuliers, en particulier ceux qui vivent dans des foyers à faible revenu. L'équité est un autre problème. Cependant, faute de données fiables sur les revenus et les dépenses, il est difficile de régler la question de la capacité financiè re. Différentes études (Gossi, 1994) ont établi que beaucoup de ménages et d'entreprises paient la collecte de leurs déchets. Nombre de personnes interrogées pour cette étude ont témoigné de leur volonté de payer la collecte des déchets (voir tableau 1) et beaucoup ont dit qu'elles payaient déjà des petits exploitants de voitures à bras pour qu'ils ramassent leurs déchets. Dans une étude du secteur à faible revenu de Hannah Nassif, Rubindamayugi et Kivaisi (1994) ont constaté que 28 % des personnes interrogées payaient les éboueurs 100 shillings par voyage ou 50 shillings par charge de 15 kilos. C'est donc dire que, mensuellement, les personnes à faible revenu de Hannah Nassif paient davantage pour la collecte de leurs déchets que les résidents des quartiers riches du centre de la ville (comme Kariakoo) dans les secteurs 2 et 3 (tableau 2), desservis par l'entrepreneur privé Multinet, qui ne paient que 150 shillings par mois. Il est donc tout à fait possible de gagner plus d'argent grâce à la gestion des déchets.

La privatisation de la gestion des déchets solides à Dar es-Salaam en tant qu'initiative économique réalisable

Eu égard à l'incapacité persistante du DCC à gérer les déchets, le SDP a présenté la notion de privatisation (SDP, 1995). Cette entreprise à Dar es-Salaam illustre la possibilité de la privatisation des déchets solides. Aucun plan majeur n'a été élaboré pour privatiser la gestion des déchets liquides, mais des exploitants privés vidangent les fosses septiques.

Au début des années 90, des consultants externes ont été engagés pour conseiller le DCC sur le processus de privatisation de la gestion des déchets solides. Les consultants ont calculé que la collecte des déchets pouvait devenir une entreprise rentable qui pourrait constituer pour le DCC une importante source de revenus et améliorer le service public de collecte des déchets (MCAL, 1992). Ils ont proposé de commencer la privatisation dans les dix quartiers centraux. Aprè s que ces quartiers auraient été nettoyés, on pourrait étendre le service aux autres parties de la ville. Multinet a alors été choisie pour effectuer la collecte des déchets au centre de la ville.

En octobre 1992, une ébauche de contrat de collecte et d'élimination des déchets a été rédigée. Cependant, on jugeait irréalisable le contrat direct entre l'entrepreneur privé et le DCC en raison du manque de fiabilité financiè re du DCC. Ce dernier a envisagé l'interfinancement entre les secteurs à revenu élevé et ceux à faible revenu. Il a donc élaboré un projet de rè glement administratif et prévoyait à l'origine de demander aux entreprises de payer annuellement à l'avance les trais de collecte des déchets et de lier à ce paiement la délivrance des permis commerciaux. Pour les résidences, le paiement devait être trimestriel et anticipé. Le DCC prévoyait qu'ultérieurement les trais de collecte des déchets seraient fonction de la valeur des propriétés et liés au paiement des impôts fonciers.

Parce que le DCC était incapable d'exploiter tout son parc de véhicules, il a accepté de louer huit camions à benne basculante et six camions compacteurs à l'entrepreneur privé pour compléter son budget. L'entrepreneur a également accepté de louer une partie des locaux du OCC pour ses opérations, de payer des frais d'élimination des déchets pour l'utilisation de la décharge de Vingunguti et d'y installer un pont-bascule pour contrôler la quantité de déchets éliminés. Le DCC prévoyait qu'àmesure qu'il étendrait la privatisation, il pourrait limiter son rôle et se contenter de superviser le travail des entrepreneurs et se retirer de la gestion directe des déchets.

En mars 1994, les consultants ont estimé que les coû ts annuels de la privatisation et les recettes que le processus permettrait de générer seraient de l'ordre de ceux indiqués au tableau 3 et que ces activités permettraient de réaliser un profit de prè s de 37 millions de shillings tanzaniens (MCAL, 1994).

Financement prévu de la collecte des déchets solides par le secteur privé

Les règlements administratifs qui permettaient la privatisation, les Dar es Salaam (Collection and Disposal of Refuse) Bye Laws de 1993, établissaient un calendrier de paiement des frais de collecte des déchets selon le genre de producteurs (par exemple, ménages) et différentes catégories de déchets commerciaux. Les fiais variaient également selon les quartiers. La partie de la ville où la gestion des déchets avait été privatisée a été divisée en trois secteurs, en gros selon le revenu des résidents. Le premier secteur comprenait le centre de la ville et le secteur d'Upanga, occupés en majeure partie par les autochtones et les commerçants de haut niveau. Les deuxiè me et troisième secteurs devaient être les secteurs à faible revenu occupés principalement par les Africains et les petits commerçants. Les frais que le DCC a établis pour le premier secteur étaient supérieurs à ceux des secteurs 2 et 3, semble-t-il pour des raisons politiques. On a probablement supposé que les ménages et les entreprises du premier secteur accepteraient plus volontiers les frais de collecte des déchets que ceux des deux autres secteurs. En outre, le maire de Dar es-Salaam était également le conseiller du quartier Kariakoo dans le secteur 2, ce qui peut expliquer les frais de collecte des déchets trè s bas imposés dans les secteurs 2 et 3.

Le tarif de la collecte des déchets est présenté au tableau 2. Comme les producteurs de déchets étaient censés payer les fiais de collecte à l'avance, le DCC a pensé qu'il pourrait ainsi produire suffisamment de recettes pour permettre à l'entrepreneur de s'occuper de la gestion des déchets solides sans problème. Le DCC devait assurer le paiement des frais en poursuivant en justice ceux qui ne les payaient pas. Or, il néglige de le faire.

On ignore comment le DCC a établi les fiais de collecte des déchets. Ce qu'on sait cependant c'est qu'il ne les fondait pas sur le coû t de la collecte auprè s des producteurs ni sur la quantité de déchets produits. Quoi qu'il en soit, dans les propositions d'origine, les producteurs de déchets devaient déposer leurs déchets à des points de collecte prédéterminés ; ce faisant, l'entrepreneur privé ne serait pas en contact direct avec les producteurs de déchets. Le DCC a plutôt basé les frais de collecte sur le genre de producteur (ménage, entreprise) et leur empla-cement. D'une certaine façon, l'établissement des trais de collecte des déchets devait favoriser l'interfinancement entre les ménages et les entreprises et entre les secteurs à revenu élevé et ceux à faible revenu. Cette approche était apparemment fondée sur des motifs politiques ; elle visait à inciter la majorité des payeurs, c'est-à-dire les ménages, à accepter les trais de collecte. La facilité de perception, notamment auprè s des commerçants, aurait été, semble-t-il, un autre critère.

Même si la privatisation est économiquement réalisable, comme il en est question précédemment dans la section intitulée « Relations entre l'entrepreneur privé et le DCC » , elle se fait dans des conditions difficiles, qui procè dent des relations tendues entre l'entrepreneur et le DCC. Il s'agit là d'un bon exemple de mauvaise gouvernance.

La gestion des déchets du point de vue sociologique

Les observateurs du développement urbain dans les villes d'Afrique soutiennent que beaucoup d'Africains qui migrent dans les villes apportent avec eux leurs habitudes rurales. Ainsi, certaines personnes ne seraient peut-être pas conscientes de la nécessité de garder l'environnement propre. Ce point de vue est douteux. Presque tous les répondants (voir tableau 1) disent que les déchets constituent une nuisance importante. L'enquête n'a donc pas relevé l'existence d'une « culture des déchets ».

Néanmoins, les résidents semblent se désintéresser de la question des déchets. Ils en sont venus à accepter l'idée de vivre avec ces déchets dans leur environ-nement. Il leur suffit de se débarrasser de leurs propres déchets. On se soucie peu des déchets déposés dans les zones communes, même si les personnes interrogées conviennent qu'ils polluent l'environnement. Bien des gens aussi laissent leurs eaux usées s'écouler dans les terres communes, et notamment dans les rues où, dans bon nombre de quartiers résidentiels, les enfants jouent. Cette situation peut s'expliquer par le fait que les gens désespè rent de voir le DCC améliorer les choses.

Nous avons constaté que la majorité des gens comptent encore sur la ville pour résoudre le problème de la collecte des déchets. La plupart ont exprimé le point de vue que le DCC doit simplement avoir plus de véhicules, ramasser les déchets plus souvent et rendre les poubelles, y compris les sacs-poubelle, plus accessibles, comme par le passé. Cette attitude doit changer et les citoyens doivent commencer à évaluer leur propre rôle dans la gestion des déchets. Cependant, tant à Kariakoo qu'au marché de Buguruni, où il existe des systèmes privés de collecte des déchets, les résidents sont d'avis que la collecte des déchets par l'entreprise privée constitue la solution la plus prometteuse.

La gestion des déchets fait intervenir certains facteurs liés aux rôles féminins et masculins. Une enquête menée pour cette étude a révélé que l'enlè vement des ordures ménagères était avant tout une responsabilité féminine, tandis que les hommes s'occupent surtout du ramassage des déchets et de leur tri pour le recyclage. Ces facteurs peuvent être importants au moment de formuler des politiques réalisables de gestion des déchets.

Lorsqu'on envisage d'autres méthodes de collecte des déchets, il faut prendre en compte les aspects culturels. Rubindamayugi et Kivaisi (1994) ont constaté qu'il existe chez les ménages, à Hannah Nassif, leur secteur d'étude, certains obstacles culturels au tri des déchets. Cependant, les résidents trient leurs déchets dans les décharges, et 98 % des personnes interrogées ont démontré leur volonté de travailler dans le domaine de la gestion des déchets.

Production et traitement des déchets à Dar es-Salaam

Production de déchets solides

Différentes études ont été menées au cours des dernières années sur la production, l'entreposage, la collecte, le transport et l'élimination des déchets à Dar es-Salaam (Haskoning et M-Konsult, 1987, 1988 ; MCAL, 1992). Le plan directeur de Dar es-Salaam de 1979 (Tanzanie, 1979) a examiné la question de la production des déchets et conclu que la production domestique moyenne était de 0,17 kilo par jour par personne dans les bidonvilles et de 0,33 kilo par jour par personne dans les quartiers aménagés. Bien que les résultats diffè rent, des études menées récemment concluent généralement que la. production d'ordures ménagères à Dar es-Salaam varie entre 0,34 et 0,39 kilo par jour par personne.

Une enquête menée en 1993 (Ame, 1993) concluait que la production de déchets à Dar es-Salaam varie selon les groupes de revenus : 0,45 kilo par jour par personne dans les ménages à revenu élevé, 0,38 kilo par jour par personne dans les ménages à revenu moyen et 0,34 kilo par jour par personne dans les ménages à faible revenu, pour une moyenne de 0,39 kilo par jour par personne. Par ailleurs, Haskoning et M-Konsult (1988) ont constaté que la production de déchets était la plus faible dans le quartier riche de Mchafukoge (voir tableau 4). Cette constatation contredit les observations habituelles montrant que les personnes pauvres produisent moins de déchets que les riches. Rubindamayugi et Kivaisi (1994) ont constaté que, dans le secteur à faible revenu de Hannah Nassif, la production de déchets était relativement élevée à 0,605 kilo par jour par personne. Ce chiffre trè s élevé s'explique par la teneur élevée en sable des déchets étudiés. Une autre étude menée dans le même secteur, la même année, pendant la saison des pluies a révélé que la production des déchets y était de 0,30 kilo par jour par personne, chiffre qui était également jugé élevé (Gossi, 1994). Ce que laissent entendre ces chiffres, c'est qu'il faut interpréter avec prudence les données sur la production des déchets.

Le mode de calcul de la production totale quotidienne de déchets à Dar es-Salaam a varié au fil des ans, comme le démontre le tableau 5.

Selon une étude menée en 1992 par Manus Coffey Associates Ltd (MCAL, 1992), prè s de 60 % de tous les déchets produits à Dar es-Salaam étaient, comme le montre le tableau 6, dans la catégorie « aliments et végétation ». Bien que d'autres études s'écartent de cette constatation, on peut généralement conclure que les aliments et la végétation représentent la principale source de déchets produits depuis un certain nombre d'années. Le DCC reconnaît actuellement que la quantité totale de déchets produits à Dar es-Salaam s'élè ve à 2 000 tonnes par jour. Cependant, ces chiffres semblent aller à l'encontre de ceux qui concernent le centre de la ville, qui au fil des ans est devenu la principale préoccupation des autorités. Dans un rapport (DCC, 1995b) au comité de la santé et du bien-être social, rédigé en janvier 1995, le directeur municipal intérimaire a souligné que le centre de la ville produisait de 600 à 800 tonnes de déchets par jour. Par ailleurs, Mpinga (1993), supposant une population de 183 859 personnes, a calculé que la quantité d'ordures ménagères produites quotidiennement dans le centre de la ville était de 236 tonnes. Toutefois, un consultant appelé en mars 1995 à donner des conseils sur la privatisation de la gestion des déchets a établi qu'en fait 140 tonnes de déchets par jour étaient produits dans le centre de la ville (MC AL, 1995), comme le montre le tableau 7.

Ce chiffre semble plus réaliste, mais il est évident que les données sur les déchets produits ne sont pas fiables et que les politiques sont donc élaborées sur la base de données imprécises.

Le rendement des autorités de Dar es-Salaam quant à la gestion des déchets est trè s mauvais. Dans le centre de la ville, la gestion des déchets, qui a été privatisée, s'est sensiblement améliorée. Une centaine de tonnes de déchets sont ramassés quotidiennement, laissant toutefois de 35 à 40 tonnes de déchets non ramassés. Le DCC lui-même est censé ramasser les déchets dans le reste de la ville, y compris ceux des marchés et des hôpitaux, mais il ramasse seulement de 30 à 100 tonnes de déchets par jour. Les autres services institutionnels et privés de collecte des déchets en enlè vent environ 32 tonnes par jour. C'est donc dire qu'environ 10% seulement des déchets produits à Dar es-Salaam sont ramassés.

En pratique, il n'existe aucune disposition spéciale pour le stockage des déchets, même si, par le passé, la ville a donné des poubelles. Les gens entreposent leurs déchets en utilisant tous les moyens possibles, notamment des sacs de papier et de plastique, des paniers en bambou, etc. Le DCC avait établi des points de collecte dans la ville, mais ils sont devenus des décharges, et le DCC a en fait dissuadé les gens de les utiliser. Des bennes sont fournies à certains endroits, particulièrement dans les marchés, mais elles ne sont pas régulièrement nettoyées et sont parfois ensevelies sous les déchets. Des camions à benne basculante servent au transport des déchets. Le DCC a pris des dispositions pour fournir et gérer les décharges, mais celles-ci ne sont pas aussi contrôlées qu'elles devraient l'être. Le DCC n'a pas de politique concernant le recyclage, mais le SDP tente d'encourager le recyclage, et on projette d'aménager une installation de biogaz (Takagas). Cependant, des recycleurs se livrent à un recyclage non structuré aux décharges.

Les ressources mises à la disposition du DCC pour la gestion des déchets solides

— Ressources humaines. Le DCC emploie 800 personnes pour nettoyer la ville, dont 500 sont des travailleurs sanitaires. Le tableau 8 montre la structure des ressources humaines de la section du nettoiement. La pénurie de matériel et l'absence de motivation du personnel constituent les deux principaux problèmes qui touchent les opérations d'élimination des déchets du DCC. Les chargeurs, par exemple, ne disposent d'aucun équipement de protection. A la mi-juillet 1995, les travailleurs de la section de nettoiement ont déclenché une grè ve d'une journée pour protester contre les mauvaises conditions de travail (Majira, 13 juillet 1995).

— Ressources techniques. La section du nettoiement compte 30 camions à benne basculante, chacun ayant une charge nominale de sept tonnes et un volume utile de 12 m3. Seuls 20 des camions sont opérationnels. Les camions sont répartis dans les trois districts comme suit : 19 dans Hala ; six dans Kinondoni ; cinq dans Temeke. Dans Hala, les camions roulent pendant deux quarts de travail ; ailleurs ils opè rent pendant un seul quart. Chaque camion fait un ou deux voyages par quart de travail chaque jour. Les camions sont chargés manuellement, au moyen de râteaux et de paniers de bambou. Il faut remarquer la concentration de ressources dans Hala, le district où se trouve le centre de la ville et le quartier d'Upanga, riche et occupé surtout par des autochtones. Depuis 1987, le DCC s'est procuré 30 camions à benne basculante, trois conteneurs, six camions compacteurs et trois bulldozers, mais le nombre de véhicules en fonctionnement a diminué, comme le montre le tableau 9.

Le DCC dispose d'un matériel tout à fait inadéquat, et n'a pas assez d'argent pour acheter du carburant et des pièces de rechange et pour verser des primes d'encouragement aux travailleurs. Certains véhicules ne conviennent pas et le remplacement des pièces est difficile. Ainsi, outre le fait qu'il n'y a pas assez de véhicules, le DCC est incapable de faire fonctionner ceux dont il dispose. Il n'a pas assez de ressources pour garder en état de marche son parc de camions, qui roule à moins de 20 % de sa capacité possible de 1995, en raison des pénuries de fonds pour le carburant, l'entretien et la main-d'œuvre. Par conséquent, le DCC a loué une partie de ces véhicules à l'entrepreneur privé chargé de la collecte des déchets.

— Ressources financières. Le DCC finance la gestion des déchets à partir de ses ressources financières générales qu'il tire directement des subventions du gouvernement central ou de ses propres sources de recettes. L'efficacité de la gestion des déchets dépend de l'argent dont dispose la ville et du montant qu'elle peut affecter à la gestion des déchets. Comme nous l'avons mentionné précédemment, le DCC a connu des difficultés financières à cause de l'insuffisance des fonds du gouvernement central et des recettes locales. La gestion des déchets souffre davantage à cause de l'insuffisance des fonds alloués par le DCC lui-même, puisque le DCC ne considère pas la gestion des déchets comme une priorité.

Les calculs pour 1994 et 1995 donnent à penser que le DCC ne dépense pas plus de 60 millions de shillings tanzaniens par an au titre de la gestion des déchets, comprenant la conduite des véhicules et d'autre matériel, l'exploitation de la décharge et les fiais de main-d'œuvre. Pourtant, en mars 1994, des consultants ont calculé que le DCC avait besoin de 517 millions de shillings par an pour assurer la collecte des déchets dans le centre de la ville seulement (MCAL, 1994).

Comme on l'a déjà vu, depuis le milieu de 1994, la collecte des déchets dans les dix quartiers du centre de Dar es-Salaam a été privatisée, et les résidents et exploitants d'entreprises payent les fiais de collecte des déchets à l'entrepreneur privé. Le DCC s'attendait à en profiter financièrement, puisque l'entrepreneur devait payer au DCC des fiais de location des véhicules et qu'un bureau de service lui était loué. Or, cet arrangement n'a pas fonctionné. Par ailleurs, les trais d'élimination des déchets payés pour l'utilisation de la décharge de Vingunguti produisent quelques recettes. A l'origine, ces trais étaient de 800 shillings par tonne et étaient fondés sur l'hypothè se qu'il y aurait un pont-bascule et que tous les déchets seraient livrés par véhicule motorisé. Cependant, le pont-bascule n'a jamais été installé et les déchets peuvent être livrés par une variété de moyens. Par conséquent, les trais d'élimination des déchets reposent sur les estimations suivantes : voiture de moins d'une tonne, 400 shillings ; camionnettes de 1 à 3 tonnes, 1 600 shillings ; camions de 4 à 6 tonnes, 2 400 shillings ; camions de 7 à 10 tonnes, 4 000 shillings ; camions de plus de 10 tonnes, 8 000 shillings.

Certaines données recueillies pour ce texte révèlent que les trais d'élimination des déchets ne sont pas perçus. Certaines personnes déposent leurs déchets tôt le matin avant que les ouvriers du DCC n'arrivent au travail, tandis que d'autres se rendent à la décharge aprè s les heures de travail, ce qui fait perdre beaucoup de recettes.

On a signalé qu'entre janvier et mai 1995, des trais d'élimination des déchets d'une valeur de 8,83 millions de shillings ont été perçus à la décharge, un chiffre qui, mensualisé, est inférieur au montant perçu l'année précédente, alors que 7 millions de shillings ont été perçus en deux mois et demi à partir d'octobre 1994. Cependant, aucun compte distinct n'a été ouvert pour ces recettes, sauf les comptes habituels du OCC, et l'argent n'a pas nécessairement été consacré à la gestion de la décharge.

— Ressources matérielles. La majeure partie des déchets que le DCC et le secteur privé structuré ramassent sont actuellement déposés à la décharge de Vingunguti. Cette décharge devait être contrôlée, mais elle sert simplement de dépotoir, ce qui représente une nuisance importante pour les résidents.

Avant Vingunguti, le DCC a eu beaucoup de difficulté à trouver une décharge. Du début des années 60 à 1991, il déposait les déchets sur une décharge de Tabata, qui a été détruite par un incendie. Dè s 1979, le plan directeur de Dar es-Salaam (Tanzanie, 1979) suggérait d'ouvrir des décharges contrôlées en périphérie de la ville, à Kimara, Mbezi, Pugu, Mbagala et Kivukoni, pour remplacer la décharge de Tabata que l'on décrivait alors ainsi :

La décharge de Tabata est remplie à capacité depuis quelque temps et les déchets se déversent maintenant dans la rivière Luhanga, causant une pollution excessive en aval. En outre, les déchets ne sont pas recouverts et, à cause du mauvais fonctionnement de la machinerie, il n'ya ni épandage ni compactage.

(Tanzanie, 1979, p. 31).

Un rapport rédigé pour le DCC en 1968 (cité dans Tanzanie, 1979) avait recommandé l'utilisation de décharges contrôlées pour l'élimination des déchets. En 1976, la région de Dar es-Salaam a décidé d'établir une de ces décharges à Kimara. Le gouvernement a acheté et arpenté le terrain, mais le tollé des résidents a incité le DCC à en reporter l'utilisation et, en définitive, à y renoncer totalement Ainsi, Tabata a continué de servir de décharge (Tanzanie, 1979).

Avec l'étalement de la ville, le dépôt de déchets y est devenu une importante nuisance. Finalement, les résidents du quartier ont pris des mesures pour que la décharge soit déplacée. Après une longue lutte, les résidents ont gagné la partie et les tribunaux ont ordonné que le DCC abandonne la décharge. Un nouveau site a été trouvé à Kunduchi, mais encore une fois, les résidents ont porté l'affaire devant les tribunaux et le DCC a été obligé d'abandonner ce projet. Un autre site situé à Mbagala a dû également être abandonné. Ces luttes ont démontré que le peuple a un certain pouvoir, mais elles n'ont pas réglé la question de savoir où déposer les déchets de Dar es-Salaam. Personne, pas même les conseillers, ne veut de décharge dans son quartier.

Au début de 1992, le DCC a conclu une entente avec la population de Vingunguti pour faire d'une grande vallée du secteur une décharge contrôlée afin de lutter contre l'érosion du sol. Les négociations ont été entamées par le président du parti au pouvoir au niveau local et ses partisans qui, comme on l'a découvert ultérieurement, avaient des intérêts personnels dans la décharge. Leurs objectifs étaient de juguler l'érosion du sol, qui menaç ait certaines maisons, d'utiliser les déchets pour alimenter le bétail local et de s'engager dans le recyclage, particulièrement des métaux.

Cependant, environ trois ans et demi plus tard, les résidents n'étaient plus satisfaits et ont empêché de temps à autre l'utilisation de Vingunguti comme décharge à cause de la nuisance qu'elle causait et parce que le DCC n'avait pas respecté ses engagements et n'avait pas amélioré comme convenu l'environ-nement pour les résidents et aménagé une décharge contrôlée (Nipashe, 13 mai 1995). En fait, la décharge a été qualifiée récemment de « nuage de mouches puant » (Daily News [Tanzanie], 15 avril 1995). On craint beaucoup que les résidents de Vingunguti n'empêchent l'utilisation de la décharge. Quoi qu'il en soit, l'ancien président du parti au pouvoir qui avait joué un rôle essentiel dans l'instauration de la décharge à Vingunguti a perdu son poste. A l'heure actuelle, le DCC n'adonc pas de décharge fiable.

Si la décharge de Vingunguti était bien gérée, elle pourrait durer pendant encore de nombreuses années, même si, selon certains experts, Vingunguti ne convient pas du tout à cet usage (Mgana, 1993). L'établissement prévu d'une nouvelle décharge à Kinzudi ne va pas comme prévu. En juin 1995, on signalait que les plans visant à clôturer la décharge pour empêcher les empiétements n'ont pas été mis en œuvre faute de fonds (SWMWG, s. d.). La décharge ne semble pas favorisée par les experts étrangers, bien que les experts locaux la jugent idéale. Un autre quartier dans le secteur de Mtoni a invité le DCC à y déposer les déchets, pour juguler l'érosion. Certains déchets y sont déposés, mais ils ne reç oivent aucun traitement et sont donc devenus une nuisance importante pour les résidents. Néanmoins, le fait demeure que Dar es-Salaam n'a pas de décharge fiable et doit s'en remettre à la bonne volonté de certains quartiers. Le DCC ne semble pas s'en inquiéter ni prendre au sérieux les projets visant à trouver une solution permanente. L'utilisation continue de Vingunguti comme décharge semble liée au fait que « les résidents du secteur de Vingunguti sont des personnes à faible revenu mal desservies par les routes et d'autres éléments de l'infrastructure » (Daily News [Tanzanie], 26 avril 1995), et le DCC peut donc ignorer leurs efforts pour arrêter le dépôt des déchets dans le secteur. En outre, la récupération peut comporter certains avantages pour les résidents du secteur.

Le DCC n'a pas fait de Vingunguti une décharge contrôlée. En novembre 1994, les résidents ont fermé la route d'accè s à la décharge, puisque le DCC ne l'entretenait pas. Comme le bulldozer manquait de carburant et que l'aire de basculement était également bloquée, la gestion des déchets ne pouvait se faire de façon appropriée. Multinet a dû fournir du carburant pendant deux mois pour maintenir la décharge opérationnelle et, de toute évidence, le DCC n'apas pris les mesures nécessaires, ni compris l'urgence de la situation.

La décharge est aux prises avec d'importants problèmes techniques et financiers. Un bulldozer et une niveleuse de route, achetés avec l'aide de la Belgique et du Canada, sont maintenant en opération, mais il est parfois difficile de les alimenter en carburant. Bientôt, le remplacement des pièces posera également des problèmes. En outre, la décharge manque de matiè re de couverture. Au moins 500 tonnes de matériel étaient requis en mars 1994 (MCAL, 1994) pour recouvrir les déchets. Seul un camion était disponible à cette fin pendant que la chargeuse montée sur roues attendait d'être réparée. La chargeuse avait été incendiée par des vendeurs ambulants (appelés localement machingas) évincés du centre de la ville.

Le matériel de remplissage requis équivaut à environ 15 % des déchets. Comme la décharge de Vingunguti reç oit environ 350 tonnes par jour, environ 50 tonnes d'argile sont requises quotidiennement. Il faut trouver des sites qui pourront fournir ce matériel de remplissage. Les collines situées à proximité, qui ont été proposées, sont habitées et les indemnités versées par les autorités dans les cas d'expropriation sont tellement faibles qu'il serait impensable d'utiliser ces collines à cette fin. Outre ces sites, il faut au moins deux camions lourds et une chargeuse montée sur roues. Sans ce matériel, il est impossible d'exploiter une décharge contrôlée.

La décharge de Vingunguti est maintenant utilisée à l'aveuglette. L'eau de surface qui coule derriè re la décharge se répand dans les déchets, augmentant la pollution. Les consultants ont demandé des mesures immédiates pour remédier à la situation (MCAL, 1994, section 5, p. 1) :

A moins que cette décharge ne soit rigoureusement contrôlée, il est inévitable que le DCC s'en fera de nouveau évincer, comme il a 'été évincé d'autres décharges par le passé. A brè ve échéance, Dar es-Salaam connaîtra de nouveau un problème d'élimination des déchets. Le contrôle des produits de lixiviation de la décharge risque de devenir de plus en plus difficile à mesure que les déchets s'étendent sur une large superficie et des problèmes de pollution de la rivière et des eaux souterraines sont à craindre.

Le tableau 10 montre quelques données concernant l'utilisation de la décharge en 1994. Ces renseignements permettent d'analyser le fonctionnement du nettoyage d'urgence du centre de la ville ainsi que les interventions des différents acteurs de la gestion des déchets à Dar es-Salaam. Il est évident à la consultation du tableau 10 que le matériel de couverture a pratiquement cessé d'être livré à la fin du nettoyage d'urgence en août.

La décharge a produit 7 732 240 shillings de recettes en 1994. Cependant, ce montant montre un moins-perçu flagrant. Si l'on tient compte que 55 430,8 tonnes de déchets ont été déposées, à 800 shillings la tonne, plus de 44 millions de shillings auraient dû être perçus. Si l'on exclut les déchets déposés par le DCC, il reste prè s de 17 millions de shillings. A partir de ces renseignements, on constate que le reste du secteur privé a déposé environ 41 tonnes par jour de déchets à la décharge.

Ressources mises à la disposition de l'entrepreneur privé pour la gestion des déchets solides

Les ressources financières qui devraient être mises à la disposition de l'entrepreneur privé ont été décrites ci-dessus. Les points suivants décrivent ses ressources humaines, techniques et matérielles.

— Ressources humaines. En juillet 1995, Multinet employait 313 personnes comme le montre le tableau Il. Cependant, ces employés travaillaient dans des conditions trè s difficiles. Multinet paye les chauffeurs et les superviseurs 1 000 shillings par jour et les chargeurs 600 shillings pour des journées de Il heures, sans congé. Les consultants (MCAL, 1995) qui ont évalué le rendement de Multinet ont remarqué que le taux de rémunération était trè s faible et que les heures de travail étaient excessivement longues. En fait, à la mi-juillet 1995, les travailleurs se sont plaints par l'entremise de la presse que leurs conditions d'emploi étaient trè s mauvaises. Ils étaient tous des employés occasionnels, même après avoir travaillé un an à Multinet Ainsi, ils recevaient un paiement quotidien, mais n'avaient pas d'autres avantages sociaux ; ils n'avaient pas d'heures de travail spécifiques, et beaucoup travaillaient de 7 h 30 à 20 heures sans recevoir de primes pour les heures supplémentaires. Qui plus est, s'ils protestaient, on menaç ait de les congédier (Majira, 13 juillet 1995). A l'instar des ouvriers du DCC, ils n'avaient pas d'équipement de protection et devaient charger les camions manuellement, au moyen de paniers de bambou et de râteaux. L'entrepreneur soutenait que, compte tenu du faible montant des trais de collecte des déchets perçus, dont il a déjà été question, il n'avait pas d'autre choix que de verser de faibles salaires.

Cependant, la productivité de ces travailleurs est de beaucoup supérieure à celle des ouvriers du DCC, puisque ces 313 hommes ramassent environ 100 tonnes de déchets par jour, tandis que les 800 ouvriers du DCC n'en ramassent que 30 à 60 tonnes par jour.

— Ressources technologiques. Le tableau 12 montre l'équipement dont disposait Multinet en janvier 1995. Il faut se rappeler qu'une partie de cet équipement était loué au DCC. Pour les raisons analysées ci-dessus, concernant l'incertitude de la perception des trais de collecte des déchets, Multinet n'a investi que dans quatre camions à benne basculante de trois tonnes (DCM Toyota). A l'heure actuelle, seulement 13 camions sont opérationnels, mais tous ne roulent pas chaque jour. Parfois, seulement sept camions prennent la route, à cause de pannes et du manque de pièces de rechange. Multinet se plaint que les véhicules qui lui sont loués en vertu du contrat sont les pires du parc de véhicules opérationnels du DCC. Elle a consacré beaucoup d'argent aux réparations.

— Ressources matérielles. Pendant le nettoyage d'urgence, six points de collecte ont été établis à Dar es-Salaam : Kidongo Chekundu, Kivukoni, Mkunguni, Shule ya Uhuru, le marché de Buguruni et le marché d'Hala. Cependant, les gens ont eu tôt fait de constater les inconvénients de ces points de collecte (Mpinga, 1993) :

– ils étaient insuffisants et trop éloignés les uns des autres, si bien que des décharges non autorisées ont été établies ;

– une partie seulement des déchets déposés était transportée, de sorte qu'il y avait des déchets en permanence aux points de collecte ;

– les environs des points de collecte étaient pollués par les odeurs, les mouches et des ordures, qui n'avaient pas été ramassées ou que le vent ou les récupérateurs avaient éparpillées ;

– le dépôt des déchets aux points de collecte déresponsabilisait les producteurs de déchets quant à la gestion de ces derniers et, comme beaucoup de déchets demeuraient sur place, le public, convaincu que rien n'était fait pour les ramasser, s'est habitué à la malpropreté ;

– les points de collecte se sont révélés défavorables au plan politique, d'autant plus que 1994 était une année d'élections locales ;

– le recouvrement direct des coû ts est devenu difficile après que les producteurs de déchets ont nettoyé leur terrain.

Cependant, le contrat de privatisation exigeait que l'entrepreneur utilise ces points de collecte qui devaient avoir pour avantages la facilité de collecte et un faible coû t. Il est également possible que la préférence ait été accordée à ces points de collecte parce qu'ils exigeaient moins de contact direct avec les producteurs de déchets, donc moins de transparence et une moins grande obligation de rendre compte.

Compte tenu des inconvénients que présentaient les points de collecte, et notamment des problèmes politiques, le DCC a soutenu qu'il était incapable de trouver des emplacements pour établir les points de collecte sans créer une nuisance et, partant, s'est retiré de cette initiative. L'entrepreneur fait maintenant la collecte de porte à porte.

Comme on l'avu, l'entrepreneur utilise la décharge de Vingunguti et devait payer des mis d'élimination des déchets. A cause des problèmes que présentait la perception des &ais de collecte, l'entrepreneur est en retard dans le paiement des mis d'élimination.

— Collecte des déchets par l'entrepreneur privé. Entre le 1er juillet et le 31 décembre 1994, un total de 12 312 tonnes de déchets solides, soit une moyenne de 90 à 100 tonnes par jour, ont été ramassés. Entre janvier et juin 1995, 121 tonnes par jour ont été ramassées en moyenne. Cependant, il faut examiner ces chiffres avec prudence, puisque Dar es-Salaam n'a pas de pont-bascule pour peser les déchets et que les estimations reposent sur le tonnage des véhicules et le nombre de voyages qu'ils font à la décharge pour y déverser des déchets. Multinet et les consultants soutiennent que de 73 à 78 % (MCAL, 1995) de ces déchets dans le secteur où la gestion des déchets a été privatisée sont ramassés quotidiennement. Même si cette proportion est impressionnante, il n'en demeure pas moins que 35 tonnes de déchets ne sont pas ramassés chaque jour et que le dépôt des déchets dans les espaces libres se pratique encore dans ce secteur.

Au terme du contrat, Multinet devait fournir un service de collecte six jours par semaine à partir des points de collecte dans le centre de la ville et trois fois par semaine à partir des points de collecte dans les secteurs résidentiels. Les résidents et les commerçants devaient aller porter leurs déchets aux points de collecte et Multinet s'en chargeait ensuite. Comme nous l'avons mentionné plus haut, ce n'est pas ce qui s'est passé, et l'entrepreneur fait maintenant la collecte de porte en porte, utilisant un haut-parleur pour demander aux gens d'apporter leurs déchets aux véhicules. Néanmoins, les gens semblent mal informés au sujet des services de Multinet. En outre, la collecte n'est possible que pendant les heures de travail et le travail par quart est impossible.

Le service de collecte est relativement efficace dans les prestigieux quartiers résidentiels et commerciaux de Mchafukoge et de Kisutu, dans les prestigieux quartiers résidentiels d'Upanga East et d'Upanga West et dans le quartier gouvernemental de Kivukoni. Il est relativement inadéquat dans les autres quartiers, de moindre renommée. Cependant, un nombre considérable de résidents se plaignent que l'entrepreneur ne s'acquitte pas de ses obligations.

Production et traitement des déchets liquides

Moins de 5 % de la population de Dar es-Salaam (sur 2,3 millions de personnes) est reliée au réseau d'égouts, qui s'étend sur 130 kilomè tres, compte Il systèmes et est soutenu par 17 postes de pompage. Ce réseau couvre le centre de la ville, certains secteurs industriels et quelques secteurs résidentiels situés en banlieue de la ville. Les effluents se déversent dans un étang de stabilisation et les cours d'eau locaux, puis directement dans l'océan. Les effluents du centre de la ville se déversent directement dans un égout collecteur d'évacuation dont l'extrémité de la conduite de 1 040 mè tres se trouve dans moins de 2 mè tres d'eau ; de nombreuses fissures laissent s'échapper des eaux d'égout brutes dans les vasiè res laissées par la marée descendante. Beaucoup d'étangs de stabilisation ne sont plus opérationnels, à cause d'un manque d'entretien, et les eaux d'égout brutes se déversent donc dans le réseau de drainage superficiel.

Environ 80 % des 2,2 millions de personnes qui vivent à l'extérieur du centre de la ville ont des installations sur place, 70 % utilisant des latrines et 30 % des fosses septiques, et le reste de la population, 20 % ou 440 000 personnes, n'ont pas d'installations sanitaires élémentaires. Même dans les secteurs bénéficiant d'installations sanitaires, certains résidents ont installé des latrines supplémentaires pour les situations d'urgence créées par le manque de fiabilité du système d'approvisionnement en eau (DCC, 1992). En 1988, Dar es-Salaam comptait une population de 1,7 million de personnes. Les résidents, les industries et les établissements produisaient chaque jour 126 tonnes de demande biochimique d'oxygè ne (DBO), 133 tonnes de demande chimique d'oxygè ne (DCO), 212 tonnes de matiè res en suspension, 372 tonnes de matiè res dissoutes, 18,7 tonnes d'azote et 3,77 tonnes de phosphore. On estime que la production de déchets est équivalente à celle d'une population de 2,46 millions d'habitants.

Le DSSD et le service de santé utilisent des camions-citernes pour vidanger les fosses septiques et les latrines, habituellement à la demande des résidents. En outre, un certain nombre d'organismes parapublics et des entreprises privées ont leurs propres vidangeurs. Néanmoins, seuls quelques véhicules publics sont opérationnels. Les gens enlè vent généralement le liquide, laissant les boues de base. La nappe phréatique est élevée dans la majeure partie de Dar es-Salaam, particulièrement en temps de pluie, ce qui aggrave les problèmes liés aux mauvaises conditions sanitaires, puisque de nombreuses fosses septiques et latrines se déversent dans les terres publiques et les réseaux de drainage avoisinants.

Des groupes d'entrepreneurs offrent des services de vidange manuelle, mais les déchets sont déversés dans des tranchées sur place au lieu d'être transportés dans des étangs de stabilisation, ce qui pollue considérablement les réseaux de drainage superficiel, les eaux souterraines et l'océan.

Production et traitement des déchets industriels

Pendant les deux premières décennies qui ont suivi l'indépendance, Dar es-Salaam a implanté de nombreuses industries pour améliorer le développement économique : industries métallurgiques et sidérurgiques, fabrication de produits en coton, en cuir et en sisal, industries chimiques, industries de transformation des aliments et des boissons, industries de fabrication de produits de papier et de bois et de fabrication de produits non métalliques, dont le ciment et l'amiante. Bien que ces industries connaissent de graves problèmes depuis les années 80 et que beaucoup fonctionnent à moins de la moitié de leur capacité, elles produisent beaucoup de déchets. En fait, leurs problèmes économiques aggravent la situation, puisque la machinerie usée ne peut être remplacée et que ces industries n'ont donc plus de ressources pour faire fonctionner un système efficace d'élimination des déchets.

La quantité de déchets produits a été abordée plus haut. Des calculs approximatifs montrent qu'environ 94 % des industries de Dar es-Salaam sont reliées à un réseau d'égouts sous conduite. Environ 6 % utilisent des fosses septiques et des puisards. Le traitement se fait surtout dans des étangs de stabilisation, et les déchets traités sont habituellement déversés dans les fleuves puis dans l'océan. Différentes études (Haskoning et M-Konsult, 1989) donnent à penser que les déchets industriels ne sont pas prétraités avant d'être déposés dans les étangs de stabilisation. Le degré de pollution de l'eau est élevé, comme le prouvent les tests faits dans l'un des principaux fleuves de Dar es-Salaam, le Msimbazi, qui était connu pour ses eaux claires à l'époque coloniale et qui reç oit maintenant de nombreux effluents industriels.

L'indice de coliformes dans le Msimbazi à l'entrée de Dar es-Salaam (à Kiserawe) est de 75 à 100 par 100 ml d'eau, un indice relativement faible qui indique une eau de bonne qualité. Lorsque le Msimbazi quitte Dar es-Salaam (au pont Salander), l'indice de coliformes se situe entre 250 000 et 400 000 par 100 ml d'eau, ce qui témoigne d'une forte contamination. Cet indice est 1 000 fois supérieur à l'indice de coliformes jugé sû r pour la baignade. La partie inférieure du Msimbazi est donc un égout à ciel ouvert. Les causes de cette pollution sont variées, mais elles comprennent le dépendance excessive de la ville envers les méthodes d'assainissement sur place et sa tendance à déverser des effluents ménagers et industriels bruts dans les rivières et les canaux naturels (Yhdegho, 1991). Même les déchets toxiques, notamment les déchets pathogènes des hôpitaux, y sont déversés sans avoir subi de traitement préalable.

Même si 58 lois traitent d'une façon ou d'une autre de l'environnement, la plupart de ces lois sont inconnues, inapplicables ou périmées. Le NEMC, créé en 1986, n'a pas de pouvoir de réglementation et ne peut donc que donner des conseils. La majeure partie de la pollution est en pratique incontrôlée.

Évaluation de l'efficacité des partenariats établis pour la gestion des déchets

La gestion des déchets par le DCC

Le DCC ne ramasse qu'une traction des déchets solides produits à Dar es-Salaam et son efficacité est tout aussi faible en ce qui concerne la collecte des déchets liquides et industriels. La ville n'a pas de politique efficace de stockage et de collecte des déchets, si bien que beaucoup d'anciens points de collecte sont devenus des décharges.

Les déchets des points de collecte sont chargés dans les véhicules à la main, et beaucoup de travailleurs n'ont pas d'équipement de protection. La productivité des travailleurs et des véhicules du DCC est trè s faible. Faute d'un système normalisé de stockage des déchets, le transfert est difficile. A l'heure actuelle, beaucoup de déchets sont laissés aux points de collecte. Comme on l'a vu, le transport connaît une foule de problèmes, qui procè dent du manque de fiabilité des véhicules et d'un sous-financement qui empêche d'acheter du carburant et des pièces de rechange et de bien entretenir les véhicules. A l'heure actuelle, il n'ya pas d'aire d'élimination des déchets à Dar es-Salaam et la décharge de Vingunguti n'est pas utilisée comme décharge contrôlée, mais simplement comme dépotoir, causant de la nuisance, de la pollution et la dégradation de l'environnement. On peut donc dire sans se tromper que le système de gestion des déchets de Dar es-Salaam est tout à fait inadéquat et trè s susceptible de s'effondrer, puisqu'il est exploité au hasard et de maniè re non durable.

La gestion des déchets par le secteur privé

Le secteur privé a un rôle important à jouer dans la collecte des déchets solides au centre-ville de Dar es-Salaam, ce qui a sans doute contribué à améliorer la collecte dans le secteur où la gestion des déchets a été privatisée. Cependant, l'entrepreneur ne perç oit que 10% des &ais de collecte des déchets prévus, même s'il ramasse 70 % des déchets. Il n'adonc pas fait les investissements escomptés dans les immeubles, les véhicules et d'autres biens d'équipement, de sorte que le service de collecte n'est pas aussi efficace que prévu.

Par ailleurs, avec 13 véhicules sur la route et un peu plus de 300 travailleurs, l'entrepreneur recueille environ 100 tonnes de déchets par jour, tandis que le DCC, avec un parc de 22 camions et 800 ouvriers, en ramasse environ 50 tonnes par jour. De toute évidence, il s'agit là d'un indicateur positif d'efficacité. Cependant, il est important de souligner que l'entrepreneur paie des salaires trè s bas et que les travailleurs font de longues journées et ne. bénéficient pas d'avantages sociaux. On craint également que la privatisation ne souffre davantage si les relations entre le DCC et l'entrepreneur ne s'améliorent pas. Les producteurs de déchets qui ont recours aux services d'éboueurs et de vidangeurs privés, y compris les petits exploitants, semblent satisfaits, mais ces exploitants n'ont pas réglé le problème de l'élimination finale des déchets.

Gestion des déchets et gouvernance

La participation du public

Les mesures officielles de gestion des déchets à Dar es-Salaam sont généralement mises en œuvre sans la participation des principaux intervenants ou avec leur apport minimal. Sauf dans le secteur d'Upanga et dans le centre de la ville, où environ 10% des personnes interrogées ont déclaré avoir déjà été consultées par le conseil, les résidents ne sont pas consultés. Même la privatisation a été entreprise sans consultation. Les commerçants notamment, qui devaient payer 80 % des frais de collecte des déchets, n'ont pas participé à l'établissement du montant ni du mode de paiement. Les responsables locaux, qui auraient pu mobiliser le public et l'inciter à adopter des méthodes scientifiques de gestion des déchets et à payer les &ais de collecte, ont été exclus du processus. Bien que cette lacune ait été rectifiée ultérieurement et que les consultants aient recommandé des correctifs, le DCC ne fait pas encore participer les responsables locaux à tout le processus de gestion des déchets.

La structure institutionnelle du DCC ne prévoit pas la participation du public et des responsables locaux. Tout est tributaire du fonctionnement du service de santé. Il est utile de noter également qu'au sein du SDP, le groupe de travail sur la participation communautaire est le moins actif L'entrepreneur privé, le SDP et une forte proportion de la population dénoncent le manque de participation du public. On blâme généralement le DCC, qui devrait assurer cette participation mais ne le fait pas.

Les droits des citoyens

Comme nous l'avons déjà vu, les citoyens de Dar es-Salaam sont indifférents à l'égard du DCC. Le conseil semble en profiter pour agir sans tenir compte de leurs droits. Il ne semble pas concevoir que les citoyens ont le droit de vivre dans un environnement exempt de déchets, et les citoyens ne semblent pas intéressés à lutter pour défendre ce droit. Le DCC évolue donc dans un système où les droits des citoyens ne sont ni revendiqués ni pris en compte.

Obligation de rendre compte et transparence

Le DCC est peu transparent. Certains soupç onnent que c'est la volonté du DCC d'éviter de rendre des comptes qui l'a motivé à demander aux commerçants de payer 80 % des trais de collecte des déchets pour les services de Multinet, même s'ils ne produisent que 33,4 % des déchets du centre de la ville. Les ménages, qui produisent 41,3 % des déchets, devaient payer seulement 20 % des &ais de collecte, ce qui réduisait les problèmes de perception mais se répercutait également sur la transparence et l'obligation de rendre des comptes. La volonté d'éviter celles-ci explique également les choix des points de collecte du DCC (avec leurs nombreux inconvénients) dans le contrat initial de privatisation au détriment de la collecte porte à porte. Le DCC a opté pour les points de collecte en dépit des résultats du sondage d'opinion concernant les déchets et l'environnement dans les secteurs résidentiels de Dar es-Salaam, mené en octobre 1993 (MCAL, 1994), qui indiquait que, dans le district d'Hala, 63,7 % de la population était prête à acheter des sacs-poubelle et que 83,3 % des ménages auraient utilisé des sacs-poubelle s'ils en avaient eus. Ces chiffres donnent à penser que la collecte porte à porte constitue un système acceptable, plus pratique que le système de points de collecte adopté à l'origine. En fait, tout le processus de privatisation semble avoir été conç u et mis en œuvre sans beaucoup de transparence, comme l'aavoué le nouveau directeur municipal de Dar es-Salaam.

Les responsables des quartiers se plaignaient également de ne pas savoir comment les budgets du conseil étaient établis ou quels montants étaient alloués aux différents quartiers, par exemple pour l'enlè vement des déchets solides. Le DCC informe rarement, voire jamais, les citoyens sur les questions touchant les finances ou la prestation des services.

Efficacité financiè re

On a souligné précédemment que le DCC ne réussit pas à percevoir ses recettes et que l'argent qu'il perç oit n'est pas consacré aux questions que les citoyens jugent prioritaires. Le système de gestion des déchets est inefficace et peu productif. Qui plus est, l'entrepreneur privé semble plus efficace que le DCC, ramassant plus de déchets que lui avec moins de la moitié des ressources humaines.

Durabilité

Comme nous l'avons démontré, depuis les années 70, le système de gestion des déchets de Dar es-Salaam n'est pas durable. Les biens d'équipement (les véhicules, par exemple) pourraient bien devenir hors d'usage dans quelques années. Des fonds ne sont pas mis de côté pour couvrir les fiais d'entretien ou la dépréciation. Lorsque les choses semblent vouloir s'enliser, le DCC se tourne habituellement vers le gouvernement central ou les organismes subventionnaires. Il est intéressant de noter qu'en 1994–1995, malgré la privatisation, le DCC a demandé 89 millions de shillings tanzaniens au gouvernement central pour réparer du matériel et des véhicules existants et en acheter de nouveaux. Mis à part les véhicules, le DCC manque habituellement de fonds pour acheter du carburant. Nous avons constaté que, pour les mois de juillet et d'aoû t 1994, le travail à la décharge s'est arrêté pendant six jours parce qu'il n'yavait plus de carburant pour le bulldozer.

Nous avons également constaté que la majeure partie des emplacements devant servir de décharges dans le plan directeur (Tanzanie, 1979) sont occupés par des entrepreneurs en construction, le DCC n'en ayant pas pris possession ou ne les ayant pas protégés. Un processus semblable est en train de se produire au terrain réservé comme décharge dans Kinzudi. Le DCC ne semble pas avoir de plans à long terme pour les décharges.

Le SDP cherche à créer un système durable à Dar es-Salaam. Pourtant, on a observé que les relations entre le DCC et le SDP doivent s'améliorer. A l'heure

actuelle, il semble que le SDP a établi son propre système, parallè le à celui du DCC, et qu'il pourrait ne pas être durable sans aide étrangère.

En principe, la privatisation de la gestion des déchets serait durable si différents obstacles étaient levés, notamment le désintérêt du DCC, ses politiques mal conç ues et l'absence de participation du public.

Possibilités d'action et recommandations

La gestion des déchets ne doit pas être examinée en vase clos. Les recommandations doivent donc viser des questions plus globales touchant les aspects généraux de la gouvernance urbaine en plus des questions propres à la gestion des déchets. Par exemple, la majeure partie du secteur aménagé de Dar es-Salaam manque de routes carrossables. L'absence de système de drainage superficiel signifie que de nombreuses routes sont érodées ou inondées pendant les saisons des pluies. En outre, la trè s grande majorité des résidents de Dar es-Salaam vivent dans des secteurs non aménagés où il y a trè s peu d'espace pour les routes. Les plans visant à améliorer le réseau routier ou les secteurs non aménagés de Dar es-Salaam influent inévitablement sur la collecte et le transport des déchets.

Coordination et rationalisation institutionnelles

Beaucoup d'organismes locaux, nationaux et internationaux ont un rôle important à jouer dans la gestion urbaine. Il est nécessaire de les regrouper et de simplifier leurs pouvoirs et leurs fonctions pour renforcer la position des administrations locales. C'est ce que le SDP tente de faire à Dar es-Salaam, avec plus ou moins de succè s, puisque beaucoup d'organismes préfè rent travailler isolément.

Relations entre le gouvernement central et les administrations locales

L'ambiguïté du traitement qu'accorde le gouvernement central aux administrations locales doit être abordée. Il doit notamment démontrer sa volonté d'établir des administrations locales solides. Pour ce faire, il est essentiel que celles-ci perç oivent des recettes suffisantes au niveau local et gè rent les finances locales de maniè re plus profitable. Dans une certaine mesure, le gouvernement central est conscient des problèmes financiers et des difficultés de gestion du DCC. Il a fait un certain nombre de déclarations par le passé et mis sur pied des comités d'enquête. Cependant, il a rarement donné suite aux recommandations de ces comités, notamment celle de diviser Dar es-Salaam en petites municipalités et de renforcer l'administration locale au niveau des quartiers. Beaucoup de propositions du même genre n'ont pas été mises en œuvre. Les mesures qui sont prises ne doivent pas avoir pour effet de se mettre à dos les conseillers, mais améliorer les relations entre eux et les fonctionnaires.

Ce dont on se plaint en Tanzanie, c'est que les conseillers sont généralement peu instruits, et le gouvernement central a le devoir de rectifier cette situation. Pour cela, il doit notamment informer la population du rôle des conseillers dans les administrations locales et restaurer le sens civique chez les conseillers.

Le gouvernement central doit favoriser la décentralisation du pouvoir vers les administrations locales et au sein de celles-ci. L'idée de diviser Dar es-Salaam en petites municipalités semble plausible. Que cette division soit acceptée ou non, des pouvoirs doivent être délégués aux quartiers.

Outre la décentralisation, le gouvernement central doit améliorer la participation du public à la politique et aux activités locales. Pour cela, il doit sensibiliser la population et l'inciter à participer aux élections locales et à s'intéresser aux plans, aux délibérations, aux décisions et aux finances du conseil. Il doit également encourager les gens à établir des organismes communautaires locaux. Certains ont suggéré que les maires et les présidents soient élus au suffrage universel plutôt que par les conseillers, de maniè re à rendre plus vivante et plus transparente la politique locale.

Le gouvernement central doit faire en sorte que les administrations locales soient plus transparentes et rendent des comptes, envers lui-même mais aussi envers les citoyens. Le gouvernement central et les administrations locales doivent également se voir comme des partenaires du développement, non comme des adversaires.

Relations au sein des administrations locales

Les relations entre les conseillers et les fonctionnaires au sein des administrations locales doivent être améliorées. Les rôles et les pouvoirs sont mal définis et imprécis. En outre, le DCC doit améliorer ses relations avec les citoyens s'il veut parvenir à percevoir plus de recettes auprè s d'eux et leur faire accepter une plus grande part du fardeau de la prestation des services.

En outre, le DCC doit travailler en étroite collaboration avec les ONG locales et les organismes communautaires en émergence qui tentent de s'attaquer aux problèmes locaux. La majeure partie des efforts déployés au niveau local pour s'occuper des problèmes locaux urgents, notamment de la gestion des déchets, sont entravés par des difficultés techniques et juridiques et le manque de coordination entre les différents intervenants et entre ces intervenants et le DCC.

Questions techniques

L'expérience de Dar es-Salaam révèle que la privatisation peut être une solution réalisable, pourvu qu'elle ait l'appui des politiciens et que le public y participe. Il est possible de privatiser lentement la collecte et l'élimination des déchets à Dar es-Salaam, en faisant participer différents types d'intervenants et en utilisant différentes formes de partenariats. Le DCC pourrait commencer à établir les décharges et à élaborer les plans connexes, à superviser le travail des éboueurs et à mettre en application des règlements sur la propreté.

Les partenariats envisagés pourraient viser l'adoption de processus et la mise en application des règlements qui font intervenir des ONG, des organismes communautaires et les petits éboueurs et trieurs pour régler des questions comme les dépotoirs, les décharges à ciel ouvert et le traitement des déchets au niveau local, notamment par l'incinération, l'enfouissement, le compostage, le recyclage et la vidange, manuelle ou autre, des puits. Les règlements doivent être adaptés aux problèmes et aux solutions, être applicables au niveau local et tenir compte du genre de déchets. La question des déchets devrait être abordée au niveau local, un consensus devrait être obtenu et des règlements devraient être adoptés.

De tels partenariats doivent également examiner la technologie appropriée. Le système actuel repose sur du matériel importé. Le rôle des voitures à bras et des vidangeurs manuels, par exemple, doit être examiné. L'exploitation des ressources locales pour la gestion des déchets est importante et doit faire intervenir les responsables locaux, notamment les dirigeants de quartier, les aînés, les présidents de quartiers et les chefs religieux. Comme il est possible que tous les déchets n'aient pas à être ramassés, le rôle de certaines composantes des ménages et d'autres intervenants dans la gestion des déchets devrait être examiné. Il s'agit notamment des femmes, qui enlè vent les déchets des ménages, et des trieurs informels, qui sont surtout des hommes. La gestion des déchets peut sans aucun doute produire des recettes, en particulier grâce au recyclage et, dans une moindre mesure, au compostage et à la production d'énergie.

Enfin, une campagne d'information est nécessaire pour encourager la population à assurer non seulement la propreté des domiciles, où les mesures actuelles produisent un environnement satisfaisant, mais également la salubrité des endroits publics, et notamment des espaces libres.

Conclusion

La collecte et l'élimination des déchets liquides, solides et industriels constituent un problème de taille à Dar es-Salaam. Bien que la mauvaise gestion des déchets témoigne de l'échec en matiè re de gouvernance urbaine, ce problème n'est pas unique. Il y a des problèmes dans d'autres secteurs de la gouvernance urbaine, notamment la fourniture, la gestion et l'entretien de l'infrastructure et d'autres services publics. Ces problèmes sont enracinés dans toute la question de la gestion à Dar es-Salaam. Le chevauchement institutionnel, la perception médiocre des recettes au niveau local, les mauvaises relations entre les conseillers et les fonctionnaires, ainsi qu'entre le OCC, les citoyens, le secteur privé, les ONG et les organismes communautaires, de même que le manque de responsabilité et de transparence ont tous contribué à la mauvaise gouvernance urbaine qui se manifeste dans la gestion inefficace des déchets. La gestion des déchets à Dar es-Salaam est mauvaise, malgré l'amorce de privatisation. Des propositions ont été faites pour améliorer la situation, mais toutes reposent sur l'amélioration globale de la gouvernance à Dar es-Salaam.

Figure 1
Structure du conseil municipal de Dar es-Salaam

Image

Source : Conseil municipal de Dar es-Salaam.
Rem. :DSSD =Dar es Salaam Sewage and Sanitation Department (service des égouts et de l'assainissement de Dar es-Salaam).

Figure 2
Structure de la gestion des déchets du service de santé de Dar es-Salaam

Image

Source : Conseil municipal de Dar es-Salaam.

Figure 3
Structure du service d'égouts et de l'assainissement de Dar es-Salaam (DSSD)

Image

Source : Conseil municipal de Dar es-Salaam.

Tableau 1
Gestion des déchets solides par les résidents dans certains quartiers des trois districts de Dar es-Salaam, 1995

 

% des répondants

 

Kinondoni

 

Ilala

 

 

Temeke

Sujet et choix de réponses

Manzese (n=41)

Mnyamala (n = 40)

Upanga (n = 10)

Centre de la ville (n = 29)

Buguruni (n = 41)

Shauri Moyo (n =)

Mtoni (n = 42)

Tandika (n = 35)

Moyens d'élimination des déchets

 

   Déposés sur le terrain

5

   Déposés dans un puits sur le terrain

34

34

17

26

08

24

   Déposés à l'extérieur du terrain

10

8

3,4

20

   Déposés dans un puits à l'extérieur du terrain

13

8

2,4

33

 

5,4

 

   Déposés dans des poubelles

7

13

80

37,9

17

28

2,4

   Déposés dans des sacs-poubelle

17

13

10

44

8

   Autres (p. ex., jetés dans un espace libre)

22

35

10

58,9

10

10

Les déchets solides sont-ils un problème majeur ?

 

   Oui

100

100

90

55

100

97

100

88,6

   Non

10

45

3

11,4

Classement des services de collecte des déchets du

 

DCC

 

   Bon

40

38

2

 

   Mauvais

60

24

42

85

57

9

   Inexistant

100

100

38

58

13

43

91,4

Le DCC a-t-il déjà demandé au répondant de participer aux questions liées à la gestion des déchets solides ?

 

   Jamais

100

100

90

93

100

100

100

97

   Oui

10

7

3

Volonté de payer pour la collecte des déchets solides

 

   Ne veut pas payer

37,6

17,5

10

20,7

23

15

24

34

   ≤99a

14,6

2,3

3,4

12

8

19

6

   100–299a

26,8

50,0

13,8

22

36

31

40

   300_999a

17,0

20,0

20,0

24,1

24

31

26

17

   1 000–9 999a

4,0

10,0

70,0

10,3

17

10

3

   ≥10 000a

6,9

   Pas de réponsea

20,7

Source : Enquête sur place, juillet 1995.
Rem. : TZS = shillings tanzaniens (en 1998,665,8 TZS = 1 dollar américain).
a Frais (en TZS par mois) qui seraient acceptables.

Tableau 2
Frais mensuels de collecte des déchets, Dar es-Salaam, 1993

Type de déchets et d'endroit

Secteur 1

Secteur 2

Secteur 3

Tous secteurs

Ordures ménagèresa

0,9

0,15

0,15

 

Déchets commerciauxb

 

 

 

 

   Tous les commerces

 

 

 

 

   Permis commercial ordinaire

3,5

1

1

 

   Permis commercial Nguvu Kazi

0,3

0,2

0,15

 

Hôtels

 

 

 

 

   1–10

20

3

2,5

 

   11–15

30

20

10

 

   16–25

 

 

 

55

   26–50

 

 

 

75

   51–75

 

 

 

100

   76–100

 

 

 

150

   >100

 

 

 

200

Restaurants et bars

30

15

2,5

 

Boutiques et bureaux (employés)

 

 

 

 

   1–5

 

 

 

5

   6–10

 

 

 

7,5

   11–15

 

 

 

15

   16–20

 

 

 

20

   21–25

 

 

 

30

   26–50

 

 

 

55

   51–75

 

 

 

75

   76–100

 

 

 

100

   <100

 

 

 

150

Construction

 

 

 

 

   Bennes (conteneurs de 7 m3)

 

 

 

10

Marchés

 

 

 

 

   Conteneurs de 15 m3

 

 

 

19

   Conteneurs de 7 m3

 

 

 

10

Source : Dar es Salaam (Collection and Disposal of Refuse) Bye Laws de 1993, conseil municipal de Dar es-Salaam.
Rem. : Secteur 1 : Upanga East et Upanga West, Kivukoni, Kisutu, Mchafukoge ; secteur 2 : Gerezani, Kariakoo, Jangwani ; secteur 3 : Mchikichini, Ilala. Frais de collecte des déchets en TZS, shillings tanzaniens (en 1998,665,8 TZS = 1 dollar américain).
a Payables chaque trimestre à l'avance.
b Payables annuellement à l'avance.

Tableau 3
Coû ts annuels prévus et recettes de la privatisation de la collecte des déchets solides au centre de Dar es-Salaam, mars 1994

 

Montant (106 TZS)

Coû ts annuels

 

    Collecte et élimination

 

      Frais d'exploitation .......................................................................

188,4

      Salaires .........................................................................................

98,0

      Dépenses en immobilisations .........................................................

73,5

      Location de camions ......................................................................

76,0

      Coû ts d'élimination .......................................................................

56,9

Balayage des rues

 

    220 travailleurs à 36 000 TZS/mois .....................................................

129,6

    Supervision, 15 % ...............................................................................

19,4

    Coû ts totaux ........................................................................................

641,8

Recettes annuelles

 

    Frais de collecte des déchets ................................................................

576,0

    Déchets du marché (18 chargements de conteneurs/jour à 19000 TZS) ..

102,6

    Recettes totales ...................................................................................

678,6

Profits ......................................................................................................

36,8

Source : MCAL (1994).
Rem. : Frais de collecte des déchets en TZS, shillings tanzaniens (en 1998, 665,8 TZS = 1 dollar américain).

Tableau 4
Taux de production d'ordures ménagères, Dar es-Salaam, 1988

 

Secteur

 

Mtoni

Manzese

Kariakoo

Mchafukoge

Nombre de personnes par ménage

8,4

6,7

5,7

5,1

Revenu mensuel par ménage (TZS)

2 600

3 770

2 260

6 080

Taux de production de déchets (kg/jour par personne)

0,37

0,35

0,32

0,30a

Source : Haskoning et M-Konsult (1988).
Rem. : TZS : shillings tanzaniens (en 1998, 665,8 TZS = 1 dollar américain).
aa Le taux de production moyen était de 0,34 kg/jour par personne.

Tableau 5
Calcul de la production quotidienne de déchets selon la source, Dar es-Salaam, 1988–1995

 

Déchets (t/jour)

Catégorie de déchets

Haskoning et
M-Konsult
(1988)

MCAL
(1992)

DCC
(1995)

Ordures ménagères

650

860

935

Commerces

45

50

80

Établissements

60

80

185

Marchés

200

200

375

Industries

225

Nettoyage des rues

 

 

60

Démolitions de voitures

185

230

40

Déchets dangereux

 

 

50

Débris de construction

 

 

15

Déchets d'hôpitaux

 

 

35

Source : DCC (1995a).

Tableau 6
Composants typiques des déchets, Dar es-Salaam, 1993

Composants

% selon poids trais

Aliments et végétation

59,8

Papier

8,7

Métaux

2,8

Plastique

1,9

Verre

0,4

Textiles

0,9

Autres

25,5

Source : MCAL(I993).

Tableau 7
Genre et quantité de déchets, centre de Dar es-Salaam, 1995

Type de déchets

Quantité (t/jour)

Déchets commerciaux

41,7

Déchets des marchés

35,3

Ordures ménagères

51,8

Source :MCAL (1995).

Tableau 8
Structure des ressources humaines à la section de nettoiement du DCC, Dar es-Salaam, 1992

Catégorie

Nombre

Superviseur

1

Agent de santé

1

Agents de santé adjoints

5

Contremaîtres

23

Chefs de service

65

Chargeurs et chauffeurs

232

Nettoyeurs de rues

337

Nettoyeurs de drains

86

Commis

8

Employés occasionnels

42

Source : Dossiers du service de santé du DCC.
Rem. : DCC : Dar es Salaam City Council (conseil municipal de Dar es-Salaam).

Tableau 9
Achat de camions et d'autre matériel pour la gestion des déchets, Dar es-Salaam, 1987–1995

Année

Équipement acheté

Équipement opérationnel

1987

30 camions à benne basculante

30 camions à benne basculante

 

3 camions porte-conteneur

3 camions porte-conteneur

1988

30 camions à benne basculante

 

 

2 camions porte-conteneur

1991

6 camions compacteurs

28 camions à benne basculante

 

 

2 camions porte-conteneur

 

 

6 camions compacteurs

1992

28 camions à benne basculante

 

 

1 camion porte-conteneur

 

 

2 camions compacteurs

1993

26 camions à benne basculante

 

 

1 camion porte-conteneur

 

 

4 camions compacteurs

1994

3 bulldozers

24 camions à benne basculante

 

 

1 camion porte-conteneur

 

 

1 camion compacteur

 

 

3 bulldozers

1995

20 camions à benne basculante

 

 

1 camion porte-conteneur

 

 

1 camion compacteur

 

 

1 bulldozer

Source : Dossiers du service de santé et du service de génie du conseil municipal de Dar es-Salaam.

Tableau 10
Déchets déposés à la décharge de Vingunguti, Dar es-Salaam, 1994
Quantité (t)

 

Déchets apportés par Multinet

Déchets apportés par des particuliers

Déchets apportés par des camions du DCC

Couverture de sol livrée à la décharge

Janv.

897

3 540

430

Févr.

1 107

3 123

930

Mars

786

3 006

900

Avrila

1 122

3 333

770

Mai

720

2 142

640

Juin

1 395

4 857

320

Juill.

1 209

5 832

550

Aoûtb

1 392

2 685

20

Sept.c

1 307

1 086

1 677

10

Oct.

1 670

2 940

1 419

Nov.

1 893

1 008

1 167

Déc.

1 393

11 970

1 527

Source : Annual Report on Sanitary Landfill.
a Début de la privatisation.
b Multinet commence à ramasser les déchets dans le centre de la ville à la fin du nettoyage d'urgence.
c Un bulldozer arrive de Belgique.

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5
Johannesburg, Afrique du Sud

MARK SWILLING ET DAVID HUIT

L'avènement en Afrique du Sud d'un régime démocratique non ségrégationniste a eu d'importantes répercussions ‘sur ses villes et son système de gouvernance urbaine. Comme cette transition se fait dans un contexte mondial où les anciennes conceptions de gouvernance sont rejetées ou sévèrement critiquées, les Sud-Africains doivent trouver de nouvelles solutions à de vieux problèmes qui sont propres à leur situation socio-économique et politicoculturelle. Il n'existe pas de solution toute faite. La tendance vers l'innovation et l'expérimentation permet de rechercher des processus qui pourraient avoir des répercussions à l'échelle continentale, voire mondiale.

Ce document traite de la nature changeante de la gouvernance locale à Johannesburg, en Afrique du Sud, d'abord en examinant d'un point de vue général le concept de gouvernance pour comprendre comment il peut être opérationnalisé le plus utilement possible. Suit un examen général du processus de transition des administrations locales en Afrique du Sud, nécessaire pour établir le contexte dans lequel s'insèrent les mesures institutionnelles spécifiques qui sont au cœur de ce texte. Puis est présentée une étude détaillée du système de gestion des déchets solides dans le grand Johannesburg. Étant donné la vari été des questions à aborder et l'espace limité dont nous disposons, nous ne parlerons pas des déchets liquides et industriels ; d'après le cadre de référence de l'étude, nous devions nous concentrer sur les déchets solides. Ensuite sont évaluées les solutions institutionnelles permettant de gérer les déchets solides compte tenu des changements que connaît la gouvernance locale. Enfin différentes possibilités d'action et des recommandations sont présentées.

Nouveaux modes de gouvernance locale en Afrique du Sud

La question de la gouvernance urbaine peut être abordée de différentes façs. Halfani et al. traitent de ce sujet en intégrant la notion de gouvernance dans le développement urbain (1998, p. 2). A cette fin, ils examinent les débats conceptuels concernant la gouvernance en général puis appliquent leur propre conception, qu'ils ont établie à la suite de cet examen, au débat sur le développement urbain afin d'en redéfinir les modalités. Ils déclarent explicitement qu'ils ne définissent pas la gouvernance locale (Ibidem). Il faut probablement entendre par là que ce ne sont pas les manifestations locales de la gouvernance générale qui les intéressent, mais plutôt les répercussions du paradigme de la gouvernance sur la gestion du développement urbain à tous les niveaux. Cette approche présente toutefois un problème qui réside dans le fait que l'on ne peut supposer qu'en Afrique, les processus de développement urbain sont de nature locale parce que, par exemple, les économies dites rurales sont souvent subventionnées par les salariés urbains, ce qui signifie en pratique que les secteurs ruraux dépendent dans une grande mesure de l'économie urbaine d'envergure nationale. Qui plus est, de nombreux aspects de la politique locale ne sont pas établis au niveau local. La dimension spatiale de la gouvernance urbaine doit donc être conceptualisée d'une manière qui n'existe pas dans le concept de gouvernance urbaine comme tel.

Picard et al. (1999) ont adopté un autre point de vue qui met l'accent sur le rôle changeant des institutions locales dans la politique sud-africaine. Ils ont examiné ces changements au fil des décennies, d'abord en dégageant les principes des politiques de décentralisation et leurs résultats concrets, puis en exposant les idéaux de la notion d'administration du développement et l'échec de cette notion. En d'autres termes, ils abordent la gouvernance urbaine en s'appuyant sur la décentralisation et les débats sur l'administration du développement plutôt que sur les écrits relatifs à la gouvernance.lls concluent en disant que, pour qu'il y ait un bon gouvernement, les processus participatifs doivent évoluer au point où les politiques et les institutions publiques ont une incidence sur la société. Ils ajoutent que l'État local désigne la partie de la structure de l'État qui influe sur les particuliers et les groupes et est influencée par eux (Idem, p. 3). Bien qu'ils soient plus axés sur la notion d'État que Halfani et al., Picard et al. aboutissent à ce que les chercheurs appelaient autrefois l'approche de la gouvernance, mais contrairement à ces chercheurs, Picard et al. ne sont pas allés jusqu' à définir le concept de gouvernance, même s'ils l'utilisent dans toute leur argumentation. Cependant, cette inexactitude conceptuelle est compensée par une solide définition de leur point de référence spatial, le niveau local. Toutefois, ils ne s'intéressent pas spécialement aux questions urbaines et n'abordent donc pas les problèmes propres à la gouvernance dans les centres urbains.

Les réflexions de plus en plus nombreuses sur le thème de la gouvernance cherchent à décrire un virage mondial sur la nature de l'État et des liens entre celui-ci et la société. Le passage de « gouvernement » à « gouvernance », de la structure aux interrelations, de la dépendance à l'interdépendance, de la linéarité à la rétroaction, des processus rationnels au chaos est influencé par le désenchantement universel à l'égard de la nature de l'État combiné à la pensée postmoderne, qui a abandonné le mythe de l'unification de l'humanité et sa vision d'un monde utopique. Cependant, c'est le rapport de la Banque mondiale de 1989 sur l'Afrique subsaharienne qui a introduit le mot gouvernance dans le débat dominant. Malgré leur refus d'aborder les problèmes de gouvernance de l'Afrique pendant de nombreuses années, les institutions de la Banque mondiale ont dû se rendre à l'évidence, en raison de l'influence dominante de l'économique quantitative sur laquelle la Banque mondiale avait fondé sa vision après la guerre froide, que les problèmes de l'Afriqueétaient fondés sur une mauvaise gouvernance, c'est-à-dire sur le culte de la personnalité, la violation des droits de la personne, la corruption, un gouvernement non démocratique, un faible taux de participation, etc. La solution reposait donc sur les programmes visant à promouvoir une bonne gouvernance, particulièrement une gestion publique plus forte, une plus grande responsabilisation des politiciens et des fonctionnaires, l'efficacité et l'indépendance de l'appareil judiciaire, la liberté de la presse, la formation d'une société civile autonome et la transparence financière (Landell-Mills et Serageldin, 1991). Bref, un régime démocratique libéral.

En général, la gouvernance désigne les valeurs fondamentales et métapolitiques (Hyden, 1992) constitutionnelles qui représentent la nature des institutions gouvernantes, orientent leurs activités et forgent les rapports complexes entre elles et la société. Cependant, la gouvernance est définie de différentes façons dans les écrits et dans le discours politique sud-africain. Il existe quatre positions de base. La première procède du point de vue prescriptif brut de nombreux organismes de développement international pour qui la bonne gouvernance est le fait· du modèle démocratique libéral classique (séparation des pouvoirs, charte des droits, dispositions intergouvernementales, appareil judiciaire indépendant, rôle limité de l'État, fonction publique neutre et efficace, pluralisme politique, etc.).

La deuxième approche ne s'intéresse pas à la nature de l'État et du gouvernement, mais est axée sur les relations entre l'État et la société. Dans la foulée d'une documentation de plus en plu~ abondante sur les relations entre l'État et la société (Chazan et al., 1988), cette approche soutient que le paradigme de la gouvernance désigne les relations entre la société civile et l'État (Halfani et al.,1998). Une fois adoptée cette perspective, la question de la gouvernance démocratique s'entend alors de l'habilitation des groupes de la société civile pour leur permettre de participer à la prise de décisions et à la formulation des politiques.

La troisième approche considère la gouvernance comme un mécanisme idéologique que les gouvernements occidentaux ont choisi d'utiliser après la guerre froide pour dissimuler les politiques commerciales capitalistes imposées, par l'entremise de l'ajustement structurel, aux sociétés fortement inégales avec la bénédiction d'États de plus en plus impuissants qui ne représentent plus les véritables intérêts de la majorité pauvre. Comme Leftwich (1993) le soutient, cette formule se traduit par une aggravation des conflits politiques et un retour à l'autoritarisme au lieu de favoriser la gouvernance démocratique. Ce que Leftwich a surtout apporté au débat, c'est de démontrer comment le paradigme de la gouvernance a renversé de bout en bout le débat sur le développement dans le contexte du nouvel ordre mondial. Tandis que, dans les années 60, ilétait acquis, compte tenu de la théorie de la modernisation, que la modernisation socio-économique devait être une condition préalable à la démocratie politique, dans les années 90, la démocratie politiqueétait considérée comme une condition préalable au succès du développement Ce changement de cap estétroitement lié à la fin de la guerre froide, qui a permis aux gouvernements occidentaux d'imposer impunément leurs propres prescriptions constitutionnelles. La montée des mouvements démocratiques a également joué un rôle à cet égard.

La quatrième approche transcende ces perspectives normatives et critiques et tente de théoriser ce que Hyden (1992) appelle la « sphère de la gouvernance ». Hyden s'est surtout intéressé à la dynamique de ce qu'il appelle la « sphère publique », c'est-à-dire le domaine de la vie publique et politique qui ne peut être réduit à la relation État-fonction publique puisque l'État n'est pas le seul intervenant dans la formulation et l'établissement des politiques publiques. Son hypothèse est que la nature, la santé et la qualité de la sphère civilepublique dépend du fond des relations de gouvernance.

Pour Hyden (Idem, p. 7), la gouvernance désigne la gestion consciente des structures du régime dans le but de rendre plus légitime la sphère publique. En d'autres termes, la gouvernance s'entend de la façon dont sont gérées les structures du pouvoir (ce que Hyden appelle le « régime ») et les cadres à l'intérieur desquels la société civile fonctionne. Ensemble, ces éléments interdépendants peuvent constituer une sphère civile-publique solide et saine. Hyden suggère quatre éléments essentiels à la gouvernance. Le premier est le degré de confiance qui existe entre les classes, les clans et les élites politiques dans la nature, l'objet et les règles des interactions et des pratiques sociopolitiques. Sans confiance, les particuliers et les organismes ne verront aucune raison de s'engager dans la vie publique (ou le développement) parce qu'ils refuseront de croire que l'action sociale donne des résultats tangibles. Par contre, lorsque règne la confiance, les intervenants ont tendance à former des alliances stratégiques composées de représentants des secteurs public et privé, des groupes communautaires et bénévoles et des associations multiethniques de la société civile.

Le deuxième élément de la gouvernance concerne l'existence de relations efficaces de réciprocité dans la sphère publique. La réciprocité existe dans la mesure où les associations et les partis peuvent former, défendre et promouvoir les différents intérêts de leurs membres dans la sphère publique par la concurrence politique, les pressions, la négociation et le règlement des différends. Sans confiance, la réciprocité est peu susceptible d'exister, et inversement, sans réciprocité, la confiance se transforme rapidement en cynisme.

Le troisième élément touche le degré de responsabilité, c'est-à-dire la mesure dans laquelle les gouvernés peuvent tenir les gouvernants responsables par l'entremise de procédures et de processus institutionnalisés (par exemple, élections, examen public et référendums). Dans la société civile, la confiance et la réciprocité ne peuvent survivre sans la mise en œuvre de structures de responsabilisation, et les mécanismes officiels de responsabilisation n'ont pas de sens si la confiance et la réciprocité sont absentes de la société.

Le quatrième élément touche la nature du pouvoir, c'est-à-dire la capacité des gouvernants d'élaborer des politiques et de les mettre en œuvre pour résoudre les problèmes des citoyens ordinaires et de sanctionner la sphère publique ; c'est ce que l'on appelle souvent en Afrique du Sud la capacité de gouverner.

Ensemble, ces quatre éléments de l'approche préconisée par Hyden nous permettent de poser des questions concrètes concernant les relations de confiance, de réciprocité, de responsabilité et de pouvoir, ce qui est plus utile que les modèles prescriptifs libéraux démocrates ou la simple critique de ces modèles comme moyen de dissimuler la logique de l'accumulation internationale de capital. L'approche de Hyden nous permet également de transcender la mise en rapport prescriptive de la gouvernance et des relations entre l'État et la société.

Cependant, l'approche de Hyden présente deux failles. Premièrement, elle demeure centrée sur l'État, malgré l'introduction de la notion de « régime » pouréviter le biais structuraliste du concept d'État. La notion de régime place tout de même le système politique formel au cœur de la gouvernance. Comme le souligne Halfani (1995), les conceptions de gouvernance centrées sur l'État négligent souvent l'efficacité et le pouvoir de modes de gouvernance qui ne ressortissent pas à l'État et qui, parfois, ont même plus d'influence sur la répartition des ressources urbaines que l'État lui-même. Cela se produit sûrement plus souvent au niveau des administrations locales qu' à tout autre niveau.

La conception de gouvernance établie par un groupe d'auteurs européens dans un ouvrage publié récemment sous la direction de Kooiman (1993) s'écarte du concept d'État. Pour ces auteurs, comme les relations socio-économiques sont devenues de plus en plus complexes, diversifiées et dynamiques, donc post-modernes, dans le contexte de contraintes financières de plus en plus importantes ; une tension s'est créée entre la capacité de gouverner, autrefois apanage de l'État, et les besoins de gouvernance auxquels les anciennes formes d'État ne peuvent plus répondre, d'où le changement du droit de gouverner, qui est passé de l'État à de nouveaux partenariats entre les organismes d'État, les entreprises du secteur privé, les organisations non gouvernementales (ONG) et les organismes communautaires en réponse aux nouveaux besoins de gouvernance des sociétés post-industrielles.

Cette approche représente ce que les auteurs européens appellent le nouveau mode de gouvernance sensible, qui a remplacé trois modes de gouvernance périmés, à savoir l'État hiérarchique traditionnel Weber-Westminster, l'État corporatiste institutionnalisé et l'État providence où tous les services constituent un droit fondamental dont tous bénéficient (Jorgenson, 1993). Cette forme de gouvernance se situe dans l'espace créé par les besoins auxquels l'État ne peut plus répondre en raison de la complexité, de la diversité et du dynamisme des conditions en évolution rapide.

Ce cadre permet de comprendre ce qui se passe dans les villes d'Afrique du Sud. Il repose sur les mêmes hypothèses que celles qui constituent le fondement de la critique de l'administration publique post-apartheid en Afrique du Sud, élaborée par Cranko et Wooldridge, selon qui les modes traditionnels de gouvernance sont fondés sur des hypothèses rationalistes qui sont en porte-àfaux par rapport à la rapidité des changements que connaissent les sociétés à la fin du XXe siècle, particulièrement la société sud-africaine (Cranko et Wooldridge, 1995). Bien que les problèmes de gouvernance en Afrique du Sud procèdent davantage du rôle joué par l'État dans la quête de la modernité que de la crise du postmodernisme, la recherche de la gouvernance dans l'espace créé par l'incapacité de l'État est commune aux deux contextes. En d'autres termes, il est permis de reconnaître que les tentatives des Africains de créer un État moderniste qui ne serait pas fondé sur la race ont été futiles et qu'elles ont fait place à des conceptions de gouvernance qui conviennent mieux à des sociétés auxquelles les hypothèses rationalistes et réductionnistes de la modernisation capitaliste ne s'appliquent pas.

Hyden (1983, p. 78) soutient que l'entrepreneurialisme par l'entremise de la fonction publique est impossible. Cependant, son plaidoyer pour que cela change relève davantage de l'utopie que de la réalité. Au moins, il se peut .maintenant que le reste du monde commence à percevoir les qualités du discours de l'Afrique : créatif, multinodal et circulaire (avec possibilité de rétroaction), un discours qui pendant des décennies a été supprimé par le réductionnisme rationaliste du développement moderniste imposé à l'Afrique par les théoriciens occidentaux du développement.

La seconde faille que présente le cadre proposé par Hyden est que sa conception de la gouvernance n'est utile que pour analyser les relations entre les organismes, et néglige de demander ce que la gouvernance signifie pour la gestion interne des organismes africains. Cela ne veut pas dire que nous devons revenir aux écrits futiles sur le développement institutionnel ou la gestion urbaine qui ont été si généralement critiqués. Nous devrions plutôt nous tourner vers une documentation nouvelle sur la gestion des organismes africains (Blunt et Jones, 1992 ;Christie et al., 1993 ; McClagan et Nel, 1995, ; McClennan et al., 1995). L'un de ces documents est le livre pionnier de deux spécialistes sud-africains en gestion qui ont utilisé le concept de la gouvernance pour faire une critique fondamentale de ce qu'ils appellent le« mode autoritaire de gouvernance » (McClagan et Nel, 1995) qui caractérise les pratiques de gestion des organismes commerciaux sud-africains. Ils avancent plutôt que les organismes peuvent être gérés conformément aux préceptes de la gouvernance démocratique, dont le plus important selon eux est la participation complète de tous les intéressés à l'établissement et à la mise en œuvre des objectifs, de la stratégie et des politiques de l'organisme. Ce point de vue représente des préoccupations fort différentes des préoccupations d'administration publique conventionnelles de l'école qui préconise le développement institutionnel et de celles exprimées dans les documents sur l'administration du développement.

En résumé, en regroupant les différents arguments, nous pouvons déduire que, pour analyser la gouvernance, nous devons d'abord déterminer où elle se situe dans tout l'éventail d'emplacements possibles allant de l'État central à ses composantes décentralisées, en passant par les formations de la société civile. Parallèlement à ce processus, nous devonsévaluer le degré de confiance et de réciprocité qui existe au sein de la société civile (conformément à ce que préconise Hyden). Il nous fautégalement analyser le degré de responsabilité des organismes de l'État et de la société civile et leur capacité de répondre aux besoins de gouvernance de la société en général. En d'autres termes, tandis que les questions de confiance et de réciprocité concernent les valeurs sous-jacentes aux relations organisationnelles, celles de responsabilité et de capacité de gouverner touchent la façon dont ces relations sont forgées et structurées dans la société. Commune à tous ces aspects on retrouve la question de la gestion interne des établissements, des associations et des organismes dans tous les secteurs.

Il est possible de conclure la présente section en résumant quatre approches fondamentales à la gouvernance en Afrique, c'est-à-dire quatre façs d'utiliser ce concept en regard des dispositions institutionnelles et politiques ainsi que des mesures en matière de développement.

Bonne gouvernance est synonyme de bonne administration. Les organismes multilatéraux d'aide et de développement apolitiques ont tendance à utiliser cette approche. Ils s'emploient généralement à créer des compétences en administration, en réglementation, en planification et en résolution des problèmes dans les administrations publiques d'Afrique.

La bonne gouvernance concerne la démocratisation politique. Cette approche met en rapport la bonne gouvernance avec la création d'institutions démocratiques libérales et limite donc la gouvernance aux modes traditionnels de participation politique (par l'entremise du processusélectoral). Il n'est pasétonnant de constater que les gouvernements occidentaux sont les tenants decette approche qui est souvent soutenue par les mouvements sociaux et les partis d'opposition dans les pays où le gouvernement résiste à la démocratisation.

La gouvernance concerne les relations entre l'État et la société civile. Cette approche considère que la participation ne doit pas se faire seulement au niveau politique et préconise la participation organisée de la société civile à la prise de décisions et à leur mise en œuvre. Les ONG du développement, de plus en plus nombreuses, sont les championnes de cette approche qui reçtégalement un appui généralisé de tous les secteurs, particulièrement celui des professions libérales.

La gouvernance désigne le fait pour la société civile d'assumer la responsabilité du développement. Cette approche est surtout défendue par les mouvements sociaux anti- États et les organismes communautaires qui ont conclu que les structures d'État sont définitivement le fait des marchands de pouvoir corrompus ou du capital international, mais elle reçt un certain soutien de la part de libertaires situés à l'autre extrémité du spectre politique. Ces organismes concluent donc que le seul espoir pour le développement est que l'État s'en occupe le moins possible et que la responsabilité directe du développement incombe au peuple.

Ces quatre approches sont évidentes dans le contexte sud-africain. La troisième approche représente l'idéologie officielle du programme de reconstruction et de développement (Reconstruction and Development Programme —RDP) du gouvernement Mandela, tandis que le travail quotidien de la fonction publique repose sur la première. La quatrième approche sous-tend les déclarations et les programmes d'un nombre sans cesse croissant de mouvements représentant des groupes qui n'ont rien à tirer du RDP. Notre approche, toutefois, est plus globale que ces quatre approches, puisqu'elle repose sur une vision systémique du monde en vertu de laquelle le tout est plus que la somme de ses parties. En examinant les relations de confiance, de réciprocité, de responsabilité et de capacité, nous nous concentrons moins sur les parties du système que sur les relations qui existent entre elles. Si la gouvernance concerne les relations, il faut alors se concentrer sur la façon dont les relations entre ceséléments définissent à la fois la nature essentielle de chaque partie et la dynamique du tout.

Aperçu de la transition des administrations locales à Johannesburg

Le règlement négocié qui est survenu au niveau national en Afrique du Sud, finalisé en 1993, a créé une constitution provisoire qui divisait l'appareil gouvernemental en trois niveaux : national provincial et local. Une constitution définitive sera bientôt négociée par l'Assemblée constitutionnelle (Constitutional Assembly) qui a été créée en vertu de la constitution provisoire. Depuis la premièreélection générale d'avril 1994, les médias et le public s'intéressent surtout à l'établissement et au fonctionnement du gouvernement national et des neuf gouvernements provinciaux, mais très peu à la transition qui a eu cours au niveau local et aux répercussions de cette transition sur le processus de reconstruction et de développement. Entre 1993 et 1996, plus de 800 nouvelles administrations locales ont été établies et, dans la plupart d'entre elles, des élections démocratiques ont déjà eu lieu.

Le chapitre 10 de la constitution prévoit un cadre pour gérer la transition au niveau local. Non seulement ce chapitre intègre la transition des administrations locales, mais il établitégalement certains principes constitutionnels visant à protéger efficacement l'autonomie des administrations locales à l'intérieur du système de gouvernement quasi fédéral à trois niveaux. Tandis que l'Afrique du Sud a joint des dizaines de pays d'Amérique latine, d'Europe du Sud et de l'Est, d'Asie et d'Afrique qui sont passés, sans révolution, à un régime démocratique au cours des 25 dernières années (O'Donnel et al., 1986), nulle part ailleurs la transition constitutionnelle au niveau national n'aura été aussi complexe et localement déterminée.

Les images de l'apartheid ont fait le tour du monde. D'une part, les banlieues blanches opulentes bénéficient de services commerciaux et municipaux d'une qualité équivalente à ce que l'on retrouve dans des sociétés dont le produit intérieur brut (PIS) est plusieurs fois supérieur à celui de l'Afrique du Sud. D'autre part, dans les quartiers noirs (townships) des banlieues, on retrouve des complexes domiciliaires uniformes, de mauvais services et des bandes de plus en plus larges de logements informelsérigés par un nombre sans cesse croissant de sans-abri. La transition des administrations locales aura d'importantes répercussions sur la qualité et la durabilité futures de la nouvelle démocratie sud-africaine ainsi que sur la durabilité écologique du processus de développement prévu. Elle définit également le contexte institutionnel de la présente étude du système de gestion des déchets à Johannesburg.

La population de l'Afrique du Sud, qui était de 38 millions d'habitants en 1990, devrait doubler au cours des trois prochaines décennies. La Urban Foundation a estimé que l'Afrique du Sud aura une population de 46,5 millions d'habitants d'ici l'an 2000 et de 59,7 millions d'habitants d'ici 2010. La population noire devrait s'accroître de 130 % entre 1980 et 2010, passant de 21,1 millions à 48,5 millions de personnes (Coetzee et de Coning, 1992). On a calculé que 65 % de la population était urbanisée en 1989. Le taux de croissance de la population urbaine, qui se situait à 3,4 % entre 1980 et 1985, devrait se stabiliser à 3,09 %. Le principal facteur sera la migration des ruraux vers les villes et l'augmentation naturelle de la population, à l'inverse de la situation actuelle (Coetzee et de Coning, 1992). On prévoit que 69 % de la population noire vivra dans les centres urbains en l'an 2000.

L'Afrique du Sud compte cinq grandes agglomérations urbaines : la région Pretoria- Witwatersrand-Vaal (Gauteng), qui comprend le grand Johannesburg et est maintenant une des neuf provinces, le grand Cape Town, la région fonctionnelle de Durban (Durban Functional Region — DFR), Port Elizabeth-Uitenhage et East London-Mdantsane. En 2010, 75 % de la population devrait vivre dans ces cinq métropoles, qui en retour comptent pour 75 % du PIB. Le Gauteng est la principale métropole et devrait avoir une population de 12 millions d'habitants et compter pour 50 % du pm en 2010. Cependant, les indications donnent à penser que le rendement économique du Gauteng diminue par rapport aux autres centres comme la DFR.

Bien que l'apartheid ait peu contribué au processus d'urbanisation, il a créé un modèle d'établissement que Coetzee et de Coning (1992) résument comme suit :

– la population est concentrée dans cinq agglomérations urbaines, dispersées et tentaculaires, qui se caractérisent par une utilisation extrêmement inefficace du sol, de longues distances à parcourir, un meilleur accès aux services dans les quartiers riches que dans les quartiers pauvres et la répartition des citadins pauvres en périphérie, dans les secteurs formels et, de plus en plus, dans les bidonvilles où sont logées au moins 7 millions de personnes ;

– le reste de la population est répartie dans quelque 300 établissements situés à l'extérieur des home/amis ;

– les populations urbaines augmentent dans 293 villes situées à l'intérieur dans les anciens home/amis, dont la base économique de beaucoup était soutenue par les politiques de décentralisation industrielle du gouvernement ;

– les bidonvilles semi-urbains et périurbains prolifèrent dans les home/amis mais en périphérie des économies métropolitaines dont ils tirent une partie de leurs recettes ;

– la population rurale devrait passer de Il,4 millions à 15,3 millions de personnes entre 1985 et 2010.

Toute la structure de l'apartheid reposait sur la réglementation ségrégationniste de l'espace urbain par la Group Areas Act, adoptée dans les années 50. Cette loi permettait aux administrateurs urbains de diviser les villes en quatre segments raciaux, exclusivement réservés aux Blancs, aux Africains, aux personnes de couleur et aux Indiens. Chaque segment était ensuite gouverné et administré séparément et, au fil des décennies, des lois différentes régissant l'aménagement, la gestion municipale et l'administration ont été adoptées pour chaque segment. Au début de la transition vers la démocratie en 1990, chaque secteur avait sa propre administration locale et ses propres systèmes d'aménagement urbain, de logement, de propriété, etc.

Cependant, sous-jacente à la ségrégation apparente des villes se trouvait une logique urbano-économique et écologique qui profitait aux classes urbaines blanches. En d'autres termes, alors que l'idéologie de la ségrégation était justifiée au regard de la nécessité d'assurer le développement des différents groupes raciaux, dans les faits, les relations économiques entre les Blancs et les Noirs (c'est-à-dire les Africains, les personnes de couleur et les Indiens) étaient semblables aux relations coloniales tributaires de l'exploitation et de l'inégalité des échanges. Cela était particulièrement évident dans la façon dont les finances des administrations locales étaient structurées.

A cause du zonage fondé sur l'apartheid, tous les principaux secteurs commerciaux et industriels se trouvaient dans les secteurs blancs et relevaient des autorités locales blanches. Les activités économiques étaient concentrées dans les districts commerciaux centraux autour desquels la plupart des cités de l'Afrique du Sud se sont développées. Cependant, depuis les années 70, on assiste dans les secteurs métropolitains à la suburbanisation et à la déconcentration de la population. Des calculs ont démontré (Planact, 1990) qu'entre 50 et 70 % de toutes les recettes des autorités locales blanches provenaient des impôts fonciers et des frais de services imputés dans les secteurs commerciaux et industriels. Ce sont ces recettes qui ont servi à subventionner l'instauration de services de haut niveau dans les banlieues blanches. Aucune des recettes que tiraient les autorités locales blanches n'était dépensée dans les secteurs noirs (Swilling et al., 1991).

En ce qui concerne tes quartiers noirs, on n'y retrouvait pratiquement aucune base commerciale ou industrielle. C'était des secteurs résidentiels habités par des gens qui travaillaient dans les secteurs blancs. Les recettes nécessaires à la prestation des services provenaient des frais de services et des loyers imputés pour les logements qui appartenaient en majorité à l'État. Les subventions du gouvernement national contribuaient à payer jusqu' à 30 % des frais d'administration des quartiers noirs. C'est donc dire que la base économique des secteurs blancs a été bâtie par la main-d'œuvre des quartiers noirs qui travaillait dans les secteurs blancs et par l'argent dépensé dans les secteurs blancs (ce qui était nécessaire, puisque les quartiers noirs n'avaient pas de services commerciaux) : En retour, cette base économique générait une assiette fiscale durable pour les autorités locales blanches qui permettait l'interfinancement des banlieues blanches. A cause de l'exode financier net des ressources des quartiers noirs pauvres vers les secteurs blancs riches, les quartiers noirs étaient systématiquement sous-développés. C'est ce système d'exploitation qui a permis de conserver l'interdépendance nécessaire au maintien de l'apartheid urbain.

Dans une grande mesure, la transition vers la démocratie amorcée en 1990 a été le fruit de mouvements sociaux locaux et nationaux dirigés par des travailleurs, des étudiants, des jeunes, des femmes et des citadins organisés. Bien que les grèves générales de 1973 et les soulèvementsétudiants de 1976 aient déclenché une prise de conscience collective, ce n'est pas avant les années 80 que les grands mouvements sociaux organisés ont eu un effet décisif sur les structures, les politiques et les stratégies de l'État et des grandes institutionséconomiques. Au milieu des années 80, cependant, c'était l'impasse. L'État ne disposait pas des pouvoirs coercitifs, stratégiques et légitimes nécessaires pour imposer une réforme à la brésilienne, de haut en bas, pas plus que les mouvements sociaux d'opposition extraparlementaires et les mouvements de libération en exil n'avaient les ressources militaires, organisationnelles et logistiques nécessaires pour organiser une révolution réussie. Comme aucune réforme n'était faite en haut lieu et qu'aucune révolution ne se produisait à la base, les deux parties ont commencé, à partir du milieu des années 80, à chercher une solution négociée au conflit. Ces efforts ont été faits au niveau national alors que les titulaires du pouvoir et les opposants au régime ont commencé à tenir des rencontres exploratoires. Ce processus a abouti aux négociations officielles de 1990, après la libération de Nelson Mandela (Swilling et Van Zyl Slabbert, 1989). Cependant, même avant le début des négociations nationales, des processus semblables avaient eu lieu au niveau local et se sont poursuivis bien après la date du règlement national.

De bien des façs, les gens ont résisté et contesté la forme et la fonction de l'apartheid dans les années 80. Même si les manifestations ponctuelles, les grèves et les soulèvements violents contre des cibles spécifiques étaient monnaie courante, c'est l'action de masse soutenue qui a généralement eu un effet décisif. Dans tout le pays, des communautés ont organisé des boycotts économiques, refusant de dépenser et de payer les loyers. Bien que ces actions aient été fructueuses selon la force de leur organisation de base et des capacités de leurs dirigeants, elles ont créé des impasses locales que ni les cibles de ces actions, c'est-à-dire les commerçts blancs et les autorités locales noires, ni les mouvements sociaux qui étaient derrière elles ne pouvaient tolérer pendant longtemps. Les cibles étaient privées d'argent et les membres des mouvements sociauxétaient privés de services. Ces actions ont souvent abouti aux négociations locales. Au début des années 90, des centaines de négociations locales s'étaient amorcées à la grandeur du pays. Inévitablement, les parties étaient des représentants de différentes administrations locales, d'entreprises, de fournisseurs de services municipaux, d'associations de citoyens, d'organisations de résidents, de partis politiques, de syndicats et de nombreux autres organismes communautaires. Leurs actions ont donné lieu à la formation de tribunes locales de négociation.

Les tribunes locales sont devenues les écoles de la nouvelle démocratie sudafricaine. C'est l à que les réseaux se sont constitués, que les relations se sont établies, que l'apprentissage mutuel a eu lieu et qu'une nouvelle culture de gouvernance et de consensus s'est développée. Imparfaites, tendues et instables, ces tribunes ont néanmoins servi de modèle aux structures régionales et, finalement, nationales. A ce niveau, elles ont pris la forme du conseil de négociation (Negotiating Council) qui a négocié le règlement constitutionnel national en 1993–1994. La première et la plus connue de ces tribunes locales a été la Central Witwatersrand Metropolitan Chamber (chambre métropolitaine centrale du Witwatersrand), qui couvrait le grand Johannesburg.

Bien qu'elles aient commencé à s'organiser en 1989, les tribunes locales ne sont pas parvenues à changer de manière substantielle les aspects fondamentaux des administrations locales ni, de fait, le système urbain dans son ensemble. Elles sont plutôt devenues des organismes décisionnels supérieurs qui établissent des politiques devant être mises en œuvre dans les anciennes structures. Or, en 19921993, les négociateurs nationaux ont constaté qu'un cadre national était requis pour orienter la transition des administrations locales par l'entremise des tribunes locales. C'est alors qu'est née la National Local Government Negotiating Forum (tribune nationale de négociations locales-NLGNF) au début de 1993. Les principaux intervenants de cette tribune étaient le gouvernement national, les associations organisées d'administrations locales, les partis politiques et l'alliance politique dirigée par le Congrès national africain (African National Congress —ANC), comprenant des syndicats et la South African National Civic Organization (organisation civique nationale de l'Afrique du Sud) qui représentaient les associations locales de citoyens.

La NLGNF a rapidement négocié le cadre devant orienter la transition des administrations locales. Ce cadre fut intégré dans ce qui est devenu à la fin de 1993 la Local Government Transition Act (loi sur la transition des administrations locales). Cette loi a transformé les tribunes locales en tribunes obligatoires, qui prescrivaient les structures et les procédures. Les tribunes locales ont alors reçu le mandat de négocier des solutions appropriées au contexte local et conformes aux principes de non-ségrégation, de démocratie, d'assiette fiscale unique, de responsabilité, etc. Leur première tâche a été de créer de nouvelles structures d'administration locale. Dans les petites villes, ces structures étaient des administrations locales intégrées uniques appelées Transitional Local Councils (conseils locaux de transition —TLC). Dans les secteurs métropolitains, un système à deux niveaux a été établi composé d'un conseil métropolitain de transition (Transitional Metropolitan Council —TMC), couvrant tout le secteur métropolitain, étayé par des structures métropolitaines auxiliaires (Metropolitan Sub-Structures ; MSS). Le travail des tribunes locales consistait à établir les limites, les structures et les systèmes financiers des TLC et des TMC puis de nommer des conseillers devant siéger dans un nouveau genre d'organe de direction politique et provenant de l'ancien establishment politique blanc et des partis politiques qui avaient jusque-l à boycotté les administrations locales. Ces nominations devaient être en vigueur jusqu'aux élections municipales qui, aux termes de la loi, devaient avoir lieu en 1995. Les élections visaient à constituer des structures de transition élues qui devaient exister jusqu' à ce que l'Assemblée constitutionnelle élue convienne d'une constitution définitive, intégrant les administrations locales dans un nouveau système à trois niveaux. En d'autres termes, la Local Government Transition Act prévoyait le cadre permettant une transition négociée vers la gouvernance locale parallèlement à la mise au point de la constitution par l'Assemblée constitutionnelle. Les deux processus convergeront vers cette constitution définitive qui doit former le fondement de la prochaine élection générale de 1999.

Enfin, il faut noter que la Local Government Transition Act et ses répercussions ont été intégrées dans le chapitre 10 de la constitution. C'est donc dire que la gouvernance locale négociée localement partout au pays est protégée par la constitution et par d'autres lois. En d'autres termes, ni les gouvernements provinciaux ni le gouvernement national élu le 27 avril 1994 ne peuvent imposer de nouvelles structures d'administration locale.

Bâti autour du centre urbain Johannesburg-Soweto, le grand Johannesburg est un secteur métropolitain intégré. C'est également le pivot de la nouvelle province du Gauteng et le cœur économique de l'Afrique du Sud. La province du Gauteng ne représente que 2 % de la superficie de l'Afrique du Sud mais compte pour 43 % du produit national brut, 50 % de l'industrie minière et manufacturière et le gros des services financiers. En outre, le Gauteng est généralement considéré comme le cœur économique non seulement de l'Afrique du Sud mais également de toute l'Afrique australe.

Le Gauteng contient cinq régions métropolitaines relativement distinctes : le grand Pretoria au nord ; East Rand, qui s'étend de Kempton Park-Germiston vers l'est ; Vaal (Vereeniging-Van Der Byl Park et environs) ; West Rand, de Krugersdorp vers l'ouest ; le grand Johannesburg. La région du grand Johannesburg est de loin la plus diversifiée et comptait pour 35 % du pm du Gauteng en 1988. Elle est une économie urbaine en déclin depuis un certain nombre d'années. Ainsi, bien que l'emploi dans le secteur structuré dans la province du Gauteng ait augmenté de 3,9 % pendant Il ans jusqu'en 1991, il a enregistré une baisse de 3,5 % dans le grand Johannesburg pendant la même période (Brenner, 1992).

Pendant qu'il baissait dans le secteur structuré, l'emploi dans le secteur parallèle connaissait une hausse vertigineuse dans les secteurs des services et de la distribution. Par exemple, selon des enquêtes menées en 1979 et 1980, seulement 200 à 250 marchands ambulants œuvraient dans le district commercial central de Johannesburg. Cependant, en 1993, des enquêtes ont révélé qu'au moins 13 000 marchands ambulants exerçaient leur commerce dans les rues et les terminus du district commercial central. La contribution du secteur parallèle au PIB a été estimée à 18 % à l'échelle nationale. Or, les mêmes estimations donnaient à penser qu'environ la moitié de la population économiquement active gagnait sa vie grâce au secteur parallèle. Selon les estimations concernant le Gauteng, le secteur parallèle comptait pour 25 % du pm de la province (Brenner, 1992).

Le Gauteng comptait environ 24 % de la population totale du pays qui s'élève à quelque 40 millions de personnes et a enregistré le taux de croissance démographique le plus élevé, de 3,1 % par an, pendant une période de 5 ans se terminant en 1990, en regard d'un taux de 2,5 % pour l'ensemble du pays. Bien que des chiffres fiables ne soient pas encore disponibles, le grand Johannesburg semble être le lieu de résidence de près de la moitié de la population de la province du Gauteng, soit environ 4 millions de personnes, dont le quart seulement est blanche. Les chiffres pour Soweto variaient en 1989 de 1,2 million à 2,5 millions de personnes. Cependant, il est encore plus important de noter que 90 % de la population du Gauteng est urbanisée.

Le Housing Task Team (groupe de travail sur le logement) de la Metropolitan Chamber estime que 200 000 nouveaux logements seront nécessaires dans le grand Johannesburg au cours d'une période de 10 ans débutant en 1992 pour répondre aux besoins actuels et à ceux qui résulteront de la croissance future. Cela a d'importantes répercussions sur la gestion des déchets solides, puisque les personnes qui n'ont pas accès aux logements officiels vivent dans des bidonvilles viabilisés ou non, où l'enlèvement des déchets solides est notoirement complexe. En outre, le Water and Sanitation Task Team (groupe de travail sur l'eau et l'assainissement) de la Metropolitan Chamber a estimé que près de 2 millions de personnes, soit près de la moitié de la population totale, n'ont pas accès à des services adéquats d'approvisionnement et d'assainissement. Comme ce chiffre concerne uniquement les personnes qui vivent dans les bidonvilles, le problème que pose la gestion des déchets solides dans ces secteurs doit être exacerbé par les mauvais services d'assainissement. Les risques pour la santé du dépôt illégal de déchets et de l'écoulement des eaux d'égout brutes sont bien connus et il est inutile de les répéter ici.

Pendant l'apartheid, les institutions locales du grand Johannesburg étaientévidemment divisées selon la race. C'est dans le secteur municipal de Johannesburg que vivaient le plus grand nombre de Blancs, soit plus d'un million. Avant la transition, il était gouverné par le conseil municipal de Johannesburg, qui employait environ 20 000 personnes en 1994. Le conseil municipal de Johannesburg a toujours été la plus grande autorité locale du pays. Les autres administrations locales blanches étaient le conseil municipal de Roodepoort et les conseils de ville de Randburg et de Sandton. Toutes ces structures ont été constituées aux termes de la Transvaal Local Government Ordinance (ordonnance sur les administrations locales du Transvaal) de 1939, une loi provinciale.

Les autorités locales noires, constituées aux termes de la Black Local Authorities Act (loi sur les autorités locales noires) de 1982, étaient les conseils municipaux de Soweto et de Diepmeadow ainsi que les conseils de ville de Dobsonville et d'Alexandra. La plupart des secteurs de couleur et indiens étaient gouvernés par des comités de gestion qui étaient subordonnés aux autorités locales blanches et avaient peu de pouvoirs exécutifs et financiers. Les structures de gouvernement national et provincial, produits de la constitution de 1983, gouvernaient directement Ennerdale et Lenasia South. Les bidonvilles situés à l'extérieur des secteurs municipaux proclamés étaient gouvernés directement par l'ancienne administration provinciale du Transvaal (que la constitution de 1993 a par la suite remplacée par le gouvernement provincial du Gauteng).

Dans la foulée des réformes de la période qui a précédé la transition de 1990, l'ancien gouvernement du Parti national (National Party) a instauré des structures métropolitaines appelées conseils de services régionaux (regional services councils). Ces conseils étaient fondés sur les principes « consociationnels » (structure, coordination horizontale entre des entités politiques verticalement autonomes) et imposaient de nouvelles redevances aux entreprises pour le financement des améliorations à l'infrastructure dans les secteurs noirs. Le Central Witwatersrand Regional Services Council (CWRSC) a été établi en 1986 et a regroupé toutes les administrations locales. Ensemble, les autorités locales de la région et le CWRSC géraient un budget annuel de 4 milliards de rands au début des années 90 (en 1998, 4,4 rands = 1 dollar américain).

La structure classique des administrations locales sud-africaines et de celle du grand Johannesburg en particulier (à l'exclusion des comités de gestion gouvernant les secteurs de couleur et indiens) étaient à maints égards des répliques du modèle britannique. En d'autres termes, chaque administration locale avait un conseil directement élu quartier par quartier, un petit conseil exécutif élu par le conseil et un système d'élaboration de politiques par comité. Le maire était le greffier de la ville, et l'administrationétait structurée en fonction des services municipaux, les directeurs généraux étant chefs de service.

La structure organisationnelle comportait la notion britannique de services verticalement intégrés, dirigés par des professionnels et contrôlés du haut par un système de directives sur papier et de rapports hiérarchiques. Les travailleurs de première ligne n'avaient pas de pouvoirs et les services étaient fournis aux marchés de masse avec peu de différentiation et un degré négligeable de rétroaction de la part des consommateurs. A la fin des années 80, on a tenté de remplacer ce modèle très inefficace par des modèles de gestion scientifique inspirés des modèles en place dans le secteur privé aux États-Unis et au Royaume-Uni. Les services sont devenus des centres de coûts, les chefs de service devaient être d'abord des gestionnaires, ensuite des professionnels, les directives, règles et rapports sur papier ont fait place à la déclaration financière, à la budgétisation à base zéro et au rendement. Cette forme de gestion n'a jamais été mise en œuvre de façon appropriée, ce qui a donné lieu à un méli-mélo d'anciens et de nouveaux modèles de gestion. Son succès mitigé s'explique par le fait que les consultants en gestion qui ont dirigé le processus ont utilisé un modèle d'experts imposé de l'extérieur qui donnait à la direction le pouvoir de repenser les procédés sans que les cadres intermédiaires et les travailleurs de première ligne ne comprennent totalement le processus et n'y participent pleinement. La résistance et le coût de la réduction des dépenses ont également contribué à contrecarrer les projets des directeurs des ressources humaines et de leurs consultants.

Après de nombreux mois d'intenses négociations marquées de multiples impasses et déblocages, la Metropolitan Chamber a fini par adopter un modèle constitutionnel-institutionnel-financier qui prévoyait essentiellement un TMC fort et quatre MSS, ainsi qu'une procédure d'arbitrage pour déterminer précisément quelles seraient les limites de ces MSS. Après des audiences publiques, les arbitres ont annoncé les résultats finaux en déclarant qu'il y aurait sept MSS. Cette position a toutefois été renversée en août 1995 lorsque le gouvernement provincial du Gauteng a réussi à obtenir une décision judiciaire qui soutenait l'instauration de quatre MSS seulement.

Les éléments fondamentaux de l'administration métropolitaine du grand Johannesburg, tels que les a négociés la Metropolitan Cham ber, peuvent être résumés comme suit :

– toutes les administrations locales existantes ont été dissoutes et tous les pouvoirs concernant leurs structures administratives, leur personnel, leur actif et leur passif sont passés au TMC ;

– le TMC a été doté d'un conseil de 120 membres, nommés par la Metropolitan Chamber, et d'un comité exécutif, dont le président était élu par le TMC ;

– le TMC a nommé un maire qui à son tour a établi une administration métropolitaine centrale ;

– même s'il a été convenu que les fonctions et les pouvoirs seraient répartis entre les niveaux d'administration métropolitaine et sous-métropolitaine, ceux qui relevaient de l'administration métropolitaine, tels que l'infrastructure, l'aménagement dl! territoire, les politiques financières, le développement économique, la gestion environnementale et le transport, ont été réservés au TMC ;

– des fonctions et des pouvoirs supplémentaires ont été dévolus aux MSS. Cette innovation a été rendue possible grâce à un mécanisme qui exigeait que les MSS élaborent un cadre de gestion stratégique demandant le transfert des fonctions et pouvoirs du TMC aux MSS. Ce cadre devait être motivé en regard de critères prédéterminés, intégrés dans l'entente, et le TMC pouvait refuser la demande uniquement en donnant des raisons adéquates en fonction de ces critères ;

– une formule complexe de gestion du changement a été intégrée dans l'entente définissant le processus et les principes de transformation des anciennes structures et anciens systèmes administratifs afin qu'ils soient adaptés aux nouvelles structures constitutionnelles et davantage orientés vers le développement (ce point sera développé ci-dessous).

Ces éléments se rapportent principalement à la période qui a précédé la transition. On prévoyait qu'au cours de 1995, les représentants politiques nommés par la Metropolitan Chamber aux nouvelles structures seraient remplacés par des représentants élus. Conformément à la Local Government Transition Act, ces élections devaient faire en sorte que 40 % de tous les représentants du TMC soient élus au scrutin proportionnel et le reste par quartier, avec vote pondéré dans les anciens secteurs blancs. Ces élections ont eu lieu en novembre 1995.

Étant donné que la gouvernance du grand Johannesburg a été modifiée par des négociations multilatérales, l'entente témoigne des avantages d'une transformation de la gouvernance par voie de processus où la direction établit de nouvelles connaissances, relations et dispositions institutionnelles pour soutenir le processus officiel de changement. La formule de gestion du changement a probablement été l'aspect le plus novateur de l'entente parce qu'elle a démontré que les intéressés comprenaient les liens essentiels entre les nouvelles structures constitutionnelles et la nécessité de créer des administrations de développement conviviales, axées sur les résultats. La formule de gestion du changement reposait sur l'hypothèse selon laquelle le changement organisationnel devrait être un processus géré conformément aux principes suivants :

– le changement organisationnel doit être fondé sur une stratégie, c'est-à-dire que les structures et les systèmes doivent découler d'une stratégie convenue ;

– les objectifs stratégiques doivent être collectivement établis par des groupes de cadres supérieurs et intermédiaires, avec participation des travailleurs de première ligne, et non déterminés du haut par un~ approche conventionnelle de planification stratégique ;

– la base de connaissances nécessaires au changement organisationnel devraitêtre formée à partir de l'expertise qui se trouve à tous les échelons de l'organisme plutôt qu' à partir de consultants externes en gestion qui procèdent par voie de modèles d'experts prédéterminés ;

– la qualité et la durabilité du changement organisationnel dépendent de la mesure dans laquelle les dirigeants à tous les niveaux sont dotés des outils qui leur permettront de comprendre et d'orienter le processus.

Il a été convenu que le processus de gestion du changement sera conjointement dirigé par la direction (encore composée en majorité de Blancs) et les syndicats municipaux (composés en majorité de Noirs). Cette façon d'aborder la gestion du changement remettra en question les administrations rigides, hiérarchiques, bureaucratiques et peu conviviales qui se sont développées au fil des ans pour servir principalement les intérêts des citoyens blancs. En fait, comme le révèle déjà la mise en œuvre du processus, ce dernier génère une vision de la gouvernance qui est fondée sur les résultats plutôt que sur les règles, dirigée par les citoyens plutôt qu'oppressive, orientée vers l'extérieur plutôt que vers l'intérieur, habilitante plutôt que dominante, flexible plutôt que rigide, axée sur la concurrence plutôt que monopolistique et, surtout, axée sur le développement plutôt que sur l'exploitation. Cette approche de la gestion du changement a de toute évidence été influencée par une formule de gouvernance qui vise à établir confiance, réciprocité, responsabilité et capacité, surtout dans le contexte de la transition d'un régime ségrégationniste à un mode de gouvernance démocratique, non ségrégationniste.

Au moment de rédiger ce document, au début de 1996, il était évident cependant qu'un problème majeur persistait concernant l'administration métropolitaine à deux niveaux dans le grand Johannesburg. En bref, il s'agissait de l'incapacité de parvenir à un consensus sur la répartition des fonctions et des pouvoirs entre le niveau d'administration métropolitaine et les MSS. Intraitable, le Greater Johannesburg Transitional Metropolitan Council (conseil métropolitain de transition du grand Johannesburg —GJTMC) a revendiqué les fonctions et pouvoirs d'une véritable administration métropolitaine dotée de la capacité de gouverner la métropole dans son ensemble (le modèle de Toronto a souvent été cité en exemple). Cependant, les MSS et le gouvernement provincial du Gauteng croyaient préférable de transférer des pouvoirs substantiels aux MSS. Ces deux niveaux de gouvernement partageaient le même point de vue pour des raisons différentes : les MSS savaient que le contrôle excessif exercé par le GJTMC pourrait miner leur autonomie et leur responsabilité tandis que le gouvernement provincial du Gauteng craignait qu'une administration métropolitaine trop puissante ne puisse contester son pouvoir et son leadership politique. Ces intérêts divergents ont donné lieu à d'interminables batailles sur la répartition des fonctions et des pouvoirs, ce qui a eu des répercussions sur la prestation des services puisque la stratégie de gestion du changement reposait sur un accord concernant les fonctions et les pouvoirs. Pour un secteur comme la gestion des déchets solides, cela signifiait qu'aucune planification concrète n'était possible parce que le GJTMC et les MSS étaient incapables de trouver un terrain d'entente quant au partage des responsabilités de chaque niveau d'administration. L'impasse institutionnelle et politique représente un aspect important des problèmes liés à la gestion des déchets à Johannesburg.

La gestion des déchets solides en transition

Les dispositions institutionnelles

Le GJTMC est chargé d'offrir un service de collecte et d'élimination des déchets pour les secteurs qui forment maintenant l'entité métropolitaine. Avant que le GJTMC ne soit établi, chaque autorité locale ségréguée du grand Johannesburg disposait de son propre système de gestion des déchets solides, ce qui correspondait à la politique nationale d'apartheid. Les fonctions métropolitaines, telles que le choix des décharges, étaient gérées par l'ancien conseil municipal de Johannesburg. C'est donc dire qu'il y avait quatre systèmes de gestion des déchets solides :

– un service entièrement sous-traité, la main-d'œuvre et les véhicules étant fournis par l'entrepreneur ;

– un service partiellement sous-traité, les véhicules étant fournis avec chauffeur et adjoint par l'entrepreneur tandis que l'administration fournissait la main-d'œuvre et assurait la supervision ;

– un service complètement fourni par l'administration ;

– un service de collecte communautaire, lorsque aucun autre service n'était offert.

Le personnel et le budget des administrations du GJTMC étaient répartis comme suit :

Ancien conseil municipal de Johannesburg. Nombre d'employés que comptait le service : 1 800 ; budget : 107 millions de rands ; nombre de personnes desservies : 867 000 ; ratio personnel/personnes desservies : 1/482 ; budget par personne desservie : 123,41 rands par personne par an ; fréquence du service : au moins une fois par semaine, avec fourniture d'un bac à déchets et de deux sacs-poubelle par bac par semaine. Un service régulier de nettoiement des rues était également offert, ainsi que tout l'éventail de services connexes de collecte et d'élimination des déchets.

Conseil municipal de Sandton. Nombre d'employés que compte le service : 265 ; budget : 16 millions de rands ; nombre de personnes desservies : 171 000 ; ratio personnel/personnes desservies : 11645 ; budget par personne desservie : 93,57 rands par personne par an ; fréquence du service : au moins une fois par semaine, avec fourniture d'un bac à déchets mais non de sacspoubelle. Un service limité de nettoiement des rues est offert.

Conseil municipal de Roodepoort. Nombre d'employés que compte le service : 152 ; budget : 10,5 millions de rands ; nombre de personnes desservies : 176 000 ; ratio personnel/personnes desservies : 111 158 ; budget par personne desservie : 59,66 rands par personne par an ; fréquence du service : au moins une fois par semaine ; sacs-poubelle non fournis. Un service limité de nettoiement des rues est offert à contrat, le personnel et les coûts ne sont pas inclus.

Conseil de ville de Randburg. Nombre d'employés que compte le service : 125 ; budget : 5,8 millions de rands ; nombre de personnes desservies : 130 000 ; ratio personnel/personnes desservies : 1/1 040 ; budget par personne desservie : 44,62 rands par personne par an ; fréquence du service : au moins une fois par semaine ; sacs-poubelle non fournis. Un service limité de nettoiement des rues est offert.

Conseil municipal de Soweto. Nombre d'employés que compte le service : 468 (y compris les employés contractuels) ; budget : 29,7 millions de rands ; nombre de personnes desservies : 1 129 000 ; ratio personnel/personnes desservies : 1/2 412 ; budget par personne desservie : 26,31 rands par personne par an ; fréquence du service : au moins deux fois par semaine ; bacs à déchets fournis. Un service limité de nettoiement des rues est offert ; cependant, les problèmes que posent les gros tas de déchets au coin des rues sont mal gérés.

Conseil municipal d'Alexandra. Nombre d'employés que compte le service : 142 (y compris les employés contractuels) ; budget : 7,27 millions de rands ; nombre de personnes desservies : 327 000 ; ratio personnel/personnes desservies : 1/2 303 ; budget par personne desservie : 22,23 rands par personne par an ; fréquence du service : deux fois par semaine ; bacs à déchets fournis. Un service irrégulier de nettoiement des rues est offert par un entrepreneur. Le contrat ne prévoit pas de mesures relativement à la densification accrue ni le service dans certains bidonvilles. Les problèmes que posent les gros tas de déchets sont mal gérés.

Conseil de ville d'Ennerdale. Nombre d'employés que compte le service : 29 ; budget : 1,5 million de rands ; nombre de personnes desservies : 43 000 ; ratio personnel/personnes desservies : 1/1 483 ; budget par personne desservie : 34,88 rands par personne par an ; fréquence du service : au moins une fois par semaine. Les rues ne sont presque jamais nettoyées.

Lenasia South. Nombre d'employés que compte le service : 54 ; budget : 2,2 millions de rands ; nombre de personnes desservies : 45 600 ; ratio personnel/personnes desservies : 11 884 ; budget par personne desservie : 51,16 rands par personne par an ; fréquence du service : au moins une fois par semaine. Les rues ne sont presque jamais nettoyées.

Conseil de ville de Dobsonville. Nombre d'employés que compte le service : 67 ; budget : 1,1 million de rands ; nombre de personnes desservies : 170 000 ; ratio personnel/personnes desservies : 1/2 537 ; budget par personne desservie : 6,47 rands par personne par an ; fréquence du service : au moins deux fois par semaine. Les rues ne sont presque jamais nettoyées.

Établissements administrés par l'administration provinciale du Transvaal. Nombre d'employés que compte le service : 3 ; budget : 0,63 million de rands ; nombre de personnes desservies : 85 000 ; ratio personnel/personnes desservies : 1/28 333 ; budget par personne desservie : 0,74 rands par personne par an. Le service n'est presque jamais offert dans les bidonvilles périurbains de Johannesburg.

A Johannesburg, les politiques d'apartheid se sont traduites par une répartition très inégale des ressources nécessaires à la prestation des services de gestion des déchets solides. Cet héritage reflétait l'inégalité générale qui caractérisait la prestation de tous les services sous le régime d'apartheid. Compte tenu du contexte politique global, cette situation se traduisait par des différences marquées dans la qualité des services offerts dans les secteurs blancs et noirs, ce qui, en retour, a causé le boycott soutenu du paiement des loyers et des trais de service que les mouvements sociaux avaient organisé. Au moment où le GJTMC a pris en charge la gestion des déchets solides, les services n'avaient toujours pas été payés, malgré les appels lancés par les responsables des communautés locales et les dirigeants politiques qui exhortaient la population à reprendre les paiements.

Conformément à la Local Government Transition Act et à l'entente négociée à la Central Witwatersrand Metropolitan Chamber, la responsabilité de tous les services de gestion des déchets solides est passée des autorités locales dissoutes au GJTMC. Une structure administrative conjointe a été établie en janvier ] 995, comprenant des responsables, qui étaient chargés d'assurer la prestation des services jusqu' à la transformation complète du secteur. C'est donc dire que les anciens services de gestion des déchets solides étaient politiquement comptables au GJTMC mais demeuraient structurés selon l'ancienne division raciale. Le défi pour le GJTMC consistait à regrouper les Il services de chacune des administrations dans un seul service métropolitain responsable du gros de la gestion des déchets solides et quatre services secondaires devant être ultérieurement comptables aux MSS. Cependant, cela ne pouvait se réaliser que lorsque le gouvernement provincial du Gauteng (légalement responsable du cadre de réglementation des administrations locales dans la province) aurait clairement défini la répartition des fonctions et des pouvoirs entre le GJTMC et ses quatre MSS. Au moment de rédiger ce document, au premier trimestre de 1996, cela n'avait pas encore été fait.

Ce retard s'explique par l'incapacité du gouvernement provincial du Gauteng de s'entendre, au niveau politique, sur une conception de l'administration municipale qu'il veut promouvoir. Une administration métropolitaine faible se serait traduite par la promulgation d'ordonnances qui auraient fait passer aux MSS autant de fonctions et de pouvoirs que possible, notamment tous les aspects de la gestion des déchets solides sauf les décharges régionales. Par contre, une administration municipale forte aurait signifié des MSS faibles et la création d'un service métropolitain centralisé de gestion des déchets, les MSS jouant le rôle d'agence. Une position intermédiaire aurait impliqué la répartition des fonctions relatives à la gestion des déchets solides entre l'administration métropolitaine et les MSS. Cependant, au moment de rédiger ce document, on ignorait où se ferait la division.

Pendant sa première année d'existence, le GJTMC n'a établi qu'une seule politique claire, décrétant que les ressources nécessaires à la prestation efficace de services dans l'ensemble du grand Johannesburg soient redistribuées pour contrer les iniquités du passé. Cependant, cela est plus facile à dire qu'àfaire, à cause des inégalités dans le développement de l'infrastructure, le financement et le personnel des administrations des différentes parties de la ville. Cette difficulté est facile à comprendre lorsqu'on examine la ventilation des Il anciennes structures administratives regroupées dans les nouvelles MSS :

 

MSS Sud
(%)

MSS Nord
(%)

MSS Ouest
(%)

MSS Est
(%)

CMJ

59

19

22

Soweto

 

 

Lenasia South

 

 

 

Ennerdale

 

 

 

 

APT

72

7

21

Sandton

 

 

 

 

Alexandra

100

Randburg

96

4

Diepmeadow

54

46

Roodepoort

100

Rem. : CMJ : conseil municipal de Johannesburg ; MSS : Metropolitan Sub-Structure (structure métropolitaine auxiliaire) ; APT : administration provinciale du Transvaal.

La réorganisation du système métropolitain de gestion des déchets solides devra prendre en compte la nature et la qualité des services existants. A l'heure actuelle, les services de gestion des déchets utilisent une combinaison de méthodes, allant du service de base aux systèmes postindustriels perfectionnés.

Le financement de la gestion des déchets

Les budgets actuels sont calculés en fonction des inexactitudes historiques, ce qui signifie que les prévisions de dépenses pour l'exercice en cours seront dépassées. II s'agit de prévoir des fonds pour compenser les dépenses excédentaires dans les anciens secteurs noirs. Le budget d'exploitation pour l'ensemble de la région métropolitaine est évalué à 348 millions de rands, qui doit couvrir tout le coût d'un service uniforme dans l'ensemble de la région~ Le budget alloué est actuellement suffisant pour enlever les déchets accumulés et offrir un service durable dans tous les secteurs, réduisant ainsi le déficit dans les anciens secteurs défavorisés. Le coût des immobilisations requises a été estimé à 13,5 millions de rands, comprenant le coût d'établissement d'un incinérateur et d'une décharge. Le paiement du service est déterminé par un tarif approuvé par le conseil métropolitain, au moyen du principe d'interfinancement convenu. Les &ais sont affectés selon la taille du logement et sa capacité de payer ; un grand logement paye beaucoup plus qu'un petit logement ou qu'un squat Le nonpaiement des services de collecte des déchets se poursuit dans les secteurs défavorisés, mais le service est offert. Actuellement, la dette active de la région métropolitaine est de 30 millions de rands. Le financement du manque à gagner se fera par l'entremise des créances fiscales et sera porté en déficit au budget des dépenses de 1996–1997. Le budget d'exploitation de la gestion des déchets solides représente 8,7 % du budget total des dépenses d'exploitation pour 1995–1996. Ni le gouvernement provincial, ni le gouvernement central ne versent de subventions au titre de l'enlèvement des déchets solides. Le coût d'enlèvement des déchets représente environ 5 % du coût total pour les contribuables. On envisage de faire un effort spécial pour recouvrer le coût du service de collecte des déchets.

L'importance du service

Le secteur desservi par le GJTMC regroupe neuf zones administratives et compte environ 500 000 points de collecte des déchets. Le gros de ces points de collecte se trouve dans des secteurs urbains relativement bien aménagés, surtout les anciennes banlieues blanches. En moyenne, 6 200 tonnes de déchets sont déposées dans cette région chaque jour, dans sept décharges contrôlées. Conformément aux règlements de la région régissant la gestion des déchets solides, des bacs à déchets ainsi que des sacs-poubelle sont fournis à chaque utilisateur. Les sacs-poubelle et, s'il y a lieu, les bacs à déchets, sont ramassés au moins une fois par semaine, en moyenne. Cependant, cette moyenne dissimule les disparités entre certaines anciennes banlieues blanches, où la collecte se fait régulièrement une fois par semaine, et certains bidonvilles où les déchets sont irrégulièrement ramassés, à des points centraux, une fois toutes les trois semaines.

Les rues sont nettoyées au rythme de la production de déchets et le nettoiement se fait irrégulièrement dans les anciens quartiers noirs et les banlieues de faible densité et intensément dans les districts commerciaux centraux. Le nettoiement des rues revient au personnel des services de gestion des déchets solides. Des méthodes communautaires ont parfois été utilisées en vertu desquelles des responsables de la communauté, de concert avec des fonctionnaires, choisissent des citoyens pour ramasser les déchets des bidonvilles et aller les porter à des points de collecte désignés. Ces personnes sont payées pour faire ce travail, soit par un contrat d'emploi, soit par des dons d'organismes tels que la Keep South Africa Beautiful Association.

Les services offerts dans les sites sont sous-traités selon des nonnes acceptables ; cependant, l'enlèvement des déchets aux points de collecte pose un problème. Les sacs-poubelle remis à la communauté sont souvent déposés aux points de collecte, ce qui aggrave le problème général des ordures. Le coût du service n'est pas recouvré, puisque les collectivités s'attendent à être payées pour garder propres les secteurs situés sur leur territoire. Les secteurs où ce genre de service est offert sont Orange Farm dans le sud et Swetla à Alexandra.

Dans certains secteurs, à cause du mauvais service de collecte des déchets et d'une mauvaise utilisation du service, le dépôt illégal de déchets se poursuit, ce qui dégrade l'environnement Les conséquences du dépôt illégal de déchets sont bien connues, notamment une hausse des coûts d'exploitation qu'aucune collectivité ne peut se permettre. En outre, les déchets déposés dans les espaces libres ou les rues font augmenter les populations de rongeurs, de vermine et de mouches. Les hautes températures d'été putréfient les amoncellements qui sont donc susceptibles de dégager des odeurs nauséabondes. Le dépôt illégal des déchets est une conséquence d'un service inadéquat et du non-paiement des taxes. Les déchets déposés dans des secteurs comme Dobsonville et Soweto se composent surtout d'ordures ménagères et de beaucoup de cendre. Les carcasses d'animaux sont également laissées au coin des rues lorsque aucun service d'enlèvement n'est offert comme c'est le cas dans les anciens quartiers noirs. Le dépôt illégal de déchets commerciaux et industriels complique l'enlèvement et ajoute au risque de dommages environnementaux.

Le coût de l'enlèvement des déchets placés dans des conteneurs est de 110 rands par tonne tandis qu'il en coûte 750 rands par tonne pour enlever les déchets déposés illégalement. Le contrôle du dépôt illégal pose un problème. En effet, comme la plupart des gens considèrent cette pratique socialement inacceptable, ceux qui s'ylivrent le font pendant la nuit, à l'insu des voisins. Les efforts visant à réduire le dépôt illégal des déchets ont été jusqu'à maintenant sporadiques et peu planifiés, et ont donc connu un succès limité. Il existe un problème de taille dans le district commercial central de Johannesburg : le nonpaiement des tarifs par les commerçants qui jettent leurs déchets sur le trottoir. L'augmentation du nombre de marchands ambulants qui congestionnent les trottoirs a aggravé le problème. Le conflit entre les entreprises établies du secteur structuré et les marchands ambulants de plus en plus nombreux a eu pour résultat que de nombreuses plaintes ont été formulées concernant la malpropreté des rues, et les marchands ambulants désignés comme responsables.

C'est surtout le personnel des services de gestion des déchets solides qui effectue la collecte, le transport et l'élimination des déchets, avec des biens d'équipement payés par les autorités locales. Cependant, dans certains anciens secteurs noirs, là où la dotation en personnel est difficile depuis dix ans, certains aspects du système sont sous-traités. A Soweto, le service a été sous-traité en 1987, à la suite de la grève que les travailleurs ont déclenchée pour entraver les activités de l'administration locale. L'entrepreneur passe de porte en porte et impose un taux fixe par tonne. Il provient du groupe minoritaire blanc et emploie des personnes de l'extérieur de Soweto, ce qui soulève la colère des résidents de Soweto. La collaboration entre la collectivité et l'entrepreneur n'est pas très bonne, et c'est l'un des principaux facteurs qui contribuent au mauvais service offert à Soweto.

Dans des secteurs comme Johannesburg, les entrepreneurs engagés doivent fournir des camions compacteurs de 21 m3 ainsi que le chauffeur et le conducteur. Cette situation est surtout attribuable au service de réparation inefficace du parc de véhicules du conseil municipal de Johannesburg. La ratio de véhicules de remplacement pour les véhicules de ce parc était de 1/1, ce qui a doublé les coûts. Le parc de véhicules fournis par l'entrepreneur présente un ratio de remplacement de 1/6. Cette façon de procéder est efficace et a contribué à réduire le coût du service pour les usagers.

Les décharges offrent un service de gestion des déchets solides municipaux. Le grand Johannesburg compte sept décharges qui sont en mesure de répondre aux besoins du secteur. Chaque décharge a sa propre durée de vie ; ainsi celle de Kya Sands fermera en 1999 et Goudkoppies en 2056. Le GJTMC envisage deux nouvelles décharges, et la possibilité d'inclure le recyclage dans les futures dispositions d'élimination des déchets solides. Cependant, jusqu'à maintenant, l'élimination des déchets solides a surtout porté sur l'efficacité plutôt que sur la gestion durable des ressources. C'est pourquoi il y a très peu de recyclage.

Le problème le plus grave que présentent les systèmes existants d'élimination des déchets solides réside dans le fait que les décharges ne conviennent pas à l'élimination des déchets industriels dangereux. Certaines entreprises de gestion des déchets du secteur privé sont de plus en plus engagées dans la recherche de solutions à ce problème, mais leurs pratiques environnementales ont donné lieu à de nombreux conflits avec les résidents des banlieues situées à proximité. On reconnaît généralement à l'échelle du secteur de la gestion des déchets que les décharges disponibles pour l'élimination des déchets dangereux ne parviennent pas à répondre aux besoins de développement industriel de l'Afrique du Sud et, de fait, que la façon de traiter les déchets dangereux en général n'est pas appropriée.

Méthodes actuelles de collecte des déchets

Chaque point de service des secteurs d'habitation formels des anciens quartiers noirs et des banlieues blanches reçoit un bac normalisé et, habituellement chaque semaine, chaque propriété reçoit deux sacs-poubelle par bac lors de la collecte des sacs pleins. Bien que dans certains secteurs la collecte soit moins fréquente à cause de problèmes de capacité, ce système est généralement utilisé dans toute la région métropolitaine et le service est régulièrement offert dans chaque secteur une journée donnée.

Un groupe de travail composé de représentants de chacune des administrations coordonne les calendriers de collecte pour l'ensemble du grand Johannesburg. Il se concentre maintenant sur les secteurs de chacune des MSS, puisque la collecte des déchets relève maintenant des MSS. Les véhicules utilisés à cette fin sont munis d'un compacteur d'une capacité de 21 m3, soit environ 10 tonnes de déchets par charge. Les camions devraient transporter, en moyenne, 30 tonnes de déchets aux décharges chaque jour, cinq jours par semaine. Cependant, cela n'est pas réalisable dans tous les secteurs pour un certain nombre de raisons. La faible productivité est attribuable essentiellement à la mauvaise planification des tournées et à des pratiques douteuses dans certains secteurs, à cause d'une supervision insuffisance et de l'absence quasi totale de gestion du service dans les quartiers noirs. L'autre facteur est la fréquence des pannes des camions appartenant au conseil et le manque de véhicules de remplacement.

Dans chaque tournée de collecte des déchets de la région, neuf travailleurs et un superviseur sont affectés tous les jours à un camion de déchets. Quatre de ces. travailleurs déposent les déchets dans le camion et les cinq autres, précédant le véhicule, distribuent deux sacs-poubelle à chaque utilisateur. Les sacspoubelle remplis sont recueillis par les travailleurs et empilés à un point où le camion s'arrête et les travailleurs ramassent les sacs accumulés. Grâce à cette méthode, les contrôles touchant le processus de collecte des déchets sont simplifiés puisque tout le processus est conçu pour favoriser l'utilisation optimale des travailleurs et des véhicules.

Le service de gestion des déchets solides de l'ancien conseil municipal du grand Johannesburg est chargé de s'occuper de la moitié de tous les déchets produits dans le grand Johannesburg. A cause de l'ampleur de cette entreprise, ce service a pu constituer un savoir-faire et une infrastructure qui constituent une ressource stratégique essentielle pour l'ensemble de la cité. En raison de l'interfinancement de l'ancien conseil municipal par la base de ressources des quartiers noirs, le conseil a pu affecter une quantité considérable de ressources budgétaires au service de gestion des déchets solides, fournissant un service digne des pays industrialisés à un îlot de Blancs privilégiés dans une enclave ségrégationniste située au centre d'une métropole du Tiers monde. Comme ce service n'a jamais été obligé de desservir les quartiers pauvres, où les résidents auraient de la difficulté à en payer les frais, il a été possible de maintenir les normes des pays industrialisés. Cependant, cela va changer car la nécessité de répondre à un plus large éventail de besoins commence à réduire cette capacité et à épuiser ces ressources.

Les services de gestion des déchets solides dans le grand Soweto, à Randburg, à Sandton, à Ennerdale et à Alexandra sont semblables à ceux offerts dans les anciens secteurs blancs de Johannesburg. A Soweto, Diepmeadow, Randburg, Sandton et Ennerdale, il est difficile de fournir les sacs-poubelle aux clients parce que ces secteurs n'ont pas assez de personnel pour en faire la distribution chaque semaine. La collecte des déchets se fait par le chargement des camions aux points de service. Le nombre de travailleurs affectés à chaque tournée varie d'un secteur à l'autre, mais en général, il y a 10 travailleurs par tournée, six chargeant le véhicule et quatre apportant les bacs ou les sacspoubelle au bord de la route pour la collecte. Ce système ne fait pas augmenter le coût par sac, mais il augmente la quantité de déchets renversés pendant le processus de chargement, ajoutant aux coûts de nettoiement des rues.

Les bacs sur roues

A Roodepoort, à Lenasia Southeast et dans le district commercial central de Johannesburg, des bacs mobiles sur roues sont en place. Il s'agit de bacs de 240 litres qui sont vidés dans un camion compacteur au moyen d'un mécanisme de levage. L'affectation du personnel pour ce système est semblable à celle de l'ancien ; les bacs sont transportés du point de collecte à l'arrière du véhicule puis rapportés au point de collecte après avoir été vidés. Ces bacs sont offerts dans les quartiers riches et donnent aux occupants plus d'espace pour le stockage des déchets dans les banlieues. Dans le district commercial central, ce système a été instauré à cause de l'espace limité de stockage dans les immeubles ainsi que pour réduire la quantité de déchets renversés pendant le processus de chargement.

L'inconvénient de ce système, c'est que le mécanisme de levage réduit la charge utile du véhicule, ce qui augmente le coût par tonne kilométrique. En outre, le chargement des sacs-poubelle se fait plus rapidement que la vidange des bacs par le mécanisme de levage. Cependant, les avantages surpassent de beaucoup les inconvénients, puisque le système réduit la malpropreté causée par les déchets renversés. Il donne également à l'utilisateur plus d'espace de stockage et le couvercle à charnière éloigne les mouches et la vermine. Le coût du système est très élevé pour un pays en développement. Le coût d'un bac sur roues est trois fois plus élevé que celui d'un bac ordinaire et la lenteur du chargement signifie qu'il faut 25 % de plus d'heures-véhicules et d'heurespersonnes. Parce qu'il est nécessaire de fournir un service à toute la collectivité, les ressources supplémentaires requises éliminent cette option.

Les bidonvilles

Le service aux bidonvilles est offert en cas d'urgence. Un bac de 5,5 m3 est alloué à chaque groupe de 200 baraques. En théorie, les résidents déposent leurs déchets dans ces bacs qui sont vidés régulièrement, habituellement au moins une fois par semaine. Ce genre de service présente le problème suivant : les déchets sont déposés autour du bac et on met le feu à ceux contenus dans le bac pour s'en débarrasser lorsque trop de déchets s'accumulent ; le feu couve pendant des jours, polluant l'atmosphère. Ces bacs sont installés à des points des bidonvilles après négociations avec les dirigeants des bidonvilles et une liaison communautaire constante est requise pour assurer le succès de ce service. Comme ce ne sont pas tous les services de gestion des déchets solides qui affectent du personnel à cette activité, le système est souvent interrompu, laissant l'impression que le service d'enlèvement des déchets de l'administration locale est inadéquat.

Au lieu de tenter d'améliorer le système de conteneurs dans les bidonvilles, les nouvelles administrations ont ordonné aux services de gestion des déchets solides de le changer et de fournir des sacs-poubelle à la place. Même si ce changement peut se traduire par une augmentation du coût par logement de 2,10 rands dans des secteurs où on a le moins les moyens de se payer ce genre de service, il est vital du point de vue politique de normaliser le service à l'échelle de la région métropolitaine. La région compte une vingtaine de bidonvilles autonomes, avec quelque 50 000 baraques qui logent environ 250 000 personnes. Il en coûterait 13,50 rands par ménage pour étendre le système conventionnel de bacs et de sacspoubelle et 1'offrir à tous ces ménages, et ces coûts seraient récupérés par la politique d'interfinancement. Malheureusement, les formules communautaires de rechange n'ont pas été tout à fait prises en compte, malgré leur succès démontré dans certains secteurs. Les méthodes de collecte des déchets devront répondre aux besoins de toute la collectivité et toutes devront être évaluées pour assurer un service et des coûts appropriés.

Le nettoiement des rues

Dans le cadre du service de collecte des déchets porte à porte, les déchets sont transportés de la maison ou de l'entreprise vers la décharge, mais ce système génère des déchets sauvages, notamment ceux déposés illégalement dans les espaces publics. Pour faire en sorte que la propreté des rues soit à un niveau acceptable, la ville doit offrir un service de nettoiement des rues. Les modèles de production de déchets sont contrôlés et des travailleurs sont affectés dans les rues pour les balayer, ramasser les déchets et les éliminer comme il convient. Environ 780 kilomètres de rues sont quotidiennement balayés dans les zones commerciales et 464 dans les quartiers résidentiels (y compris les portions d'autoroutes), ce qui permet l'enlèvement de ISO tonnes de déchets par jour dans toute la région métropolitaine. Dans certains secteurs, la quantité de déchets sauvages dans les rues et de déchets déposés illégalement équivaut à la quantité de déchets ramassés dans le cadre du service porte à porte. Certaines rues du district commercial central sont régulièrement arrosées et désinfectées là où les piétons défèquent dans les rues faute de toilettes publiques. Bien que l'inefficacité du service de collecte porte à porte dans certains secteurs explique le dépôt illégal des déchets dans les espaces publics, il faut de toute évidence établir des programmes d'éducation pour sensibiliser les gens aux pratiques appropriées. En outre, la ville a une occasion rêvée de faire appel aux travailleurs du secteur parallèle pour nettoyer les rues. Or, une telle façon de procéder irait à l'encontre des pratiques patronales-syndicales et serait inacceptable pour les syndicats.

La participation du secteur privé

Le secteur privé participe à la gestion des déchets de plusieurs manières. Composé des grands utilisateurs du service, qui demandent un service d'envergure supérieure, il influe sur les politiques. Étant donné l'attrait que représente la région métropolitaine pour les investisseurs, les normes de service ne peuvent pas négliger les besoins du secteur privé. Ce dernier a amorcé un certain nombre d'initiatives en matière de services qui sont essentiellement indépendantes de l'administration métropolitaine. Le financement versé aux collectivités locales pour qu'elles gardent propres les secteurs situés sur leur territoire fait partie de ces initiatives. Les ressources privées supplémentaires pour le nettoiement des rues adjacentes aux propriétés sont bien accueillies parce qu'elles permettent aux municipalités de réduire leurs services de nettoiement. La prestation des services par le secteur privé a connu du succès, mais aussi des échecs. A cet égard, l'expérience de Soweto aura un effet direct sur les politiques futures.

La participation communautaire

La communauté peut participer à la prestation des services à plusieurs niveaux. Cependant, quatre formes de participation illustreront notre propos : la représentation politique officielle à l'élaboration des directives, la participation communautaire organisée à l'élaboration des directives, la participation des citoyens à la gestion et à l'entretien quotidiens et la participation économique, c'est-à-dire la participation des entrepreneurs et des travailleurs à la prestation des services.

Jusqu'à la fin de l'apartheid dans les administrations locales, mais avant l'établissement du GJTMC et de ses MSS, la représentation politique officielle et la participation communautaire organisée par des associations de contribuables étaient limitées à la communauté blanche. Ces formes de défense des intérêts communautaires constituent un phénomène récent pour les communautés noires. Il est donc trop tôt pour se prononcer sur l'efficacité de la représentation politique par des conseillers nouvellement élus. Cependant, si dans toutes les communautés, le nouveau système reproduit les modèles qui existaient dans la communauté blanche avant la déségrégation, la représentation politique n'aura absolument aucun effet sur le système de gestion des déchets solides, sauf pour l'approbation des budgets et des modifications mineures aux normes de service. Les niveaux de service, la planification à long terme et la gestion quotidienne sont depuis toujours isolés de l'intervention politique directe des représentants élus. La participation communautaire organisée des contribuables blancs à l'élaboration des directives peut avoir influé sur les normes de service et les lacunes opérationnelles, mais elle a eu peu d'effet sur les niveaux de service, la technologie ou les systèmes de gestion. Les associations de citoyens qui défendaient officiellement les intérêts des communautés noires ont été gravement affaiblies parce que leurs meilleurs membres se sont lancés sur la scène politique locale. Ces associations devront être reconstituées avant que la participation organisée des communautés noires ne soit de nouveau possible.

Il reste donc la participation des citoyens et la participation économique. Pour que la collecte des déchets solides soit efficace, les citoyens doivent être conscients de leurs responsabilités quotidiennes, ce qui va au-delà d'un engagement abstrait à l'égard du système et nécessite une connaissance des habitudes quotidiennes, des horaires de collecte, des procédures standard (par exemple, quel genre de sac est acceptable), de l'emplacement des points de collecte (c'est-à-dire où déposer les sacs), etc. Tandis que ces pratiques sont bien ancrées dans les banlieues blanches, grâce à des décennies de campagnes de sensibilisation et la formation d'habitudes visant à favoriser la participation efficace des utilisateurs, ce n'est pas le cas dans les anciens quartiers noirs. Un service irrégulier et inadéquat, des systèmes de collecte des déchets qui changent continuellement, des relations tendues entre les citoyens et les responsables, la corruption et l'absence d'investissement dans les campagnes de sensibilisation se sont combinés pour assurer un engagement mitigé envers le service et une ignorance, voire une apathie, généralisée quant aux horaires, aux procédures et aux habitudes. L'échec des programmes de paiement des loyers et des trais de service après avril 1994 témoigne de cette attitude. La légitimation politique n'est pas le seul facteur des relations entre les utilisateurs et les fournisseurs de services. L'établissement à long terme d'une culture de collaboration fondée sur la confiance mutuelle entre les utilisateurs et les fournisseurs de services joue également un rôle ..

La forme de participation communautaire qui devrait prendre de l'expansion est sans conteste la participation économique. Cette forme de participation a débuté bien avant la fin de l'apartheid. Dans les années 80, le gouvernement du Parti national a tenté à maintes reprises d'intégrer des membres des communautés noires dans la prestation des services à titre de soustraitants. Avec le début des changements en 1990, ces pratiques ont pris de l'expansion parce que des commerçants noirs ont commencé à exercer des pressions pour exiger une politique d'impartition des services gouvernementaux. Au milieu des années 90, avec la montée de politiciens associés à ces intérêts commerciaux noirs en émergence, la nécessité d'officialiser la participation économique à la prestation des services est devenue généralement acceptée tant au niveau politique qu'à celui des gestionnaires. Bien que les entrepreneurs à but lucratif constituent les principaux acteurs de ce domaine naissant, des organismes sans but lucratif dans les secteurs du logement et de la préservation de l'environnement ont également manifesté leur intérêt à participer à certains aspects de la gestion des déchets, notamment à la collecte communautaire dans les bidonvilles. Des organismes représentant les intérêts des chômeurs ont également réclamé des politiques de gestion des déchets à fort coefficient de main-d'œuvre ..

La participation économique est de toute évidence un encouragement important à d'autres formes de participation. L'établissement de réseaux d'entrepreneurs dont le personnel et les dirigeants sont des personnes provenant des communautés crée un intérêt économique envers la réussite du système de gestion des déchets solides, qui peut servir de catalyseur à la participation communautaire organisée à l'élaboration des directives, en particulier si les entrepreneurs candidats occupent également des postes de direction dans des associations communautaires comme Orange Farm. En raison de leur statut économique, les entrepreneurs sont généralement bien placés pour influencer la perception populaire et les normes culturelles dans leurs communautés, ce qui peut se traduire par une plus grande participation des utilisateurs à la prestation des services.

En conclusion, il faut souligner que, depuis la fin de 1995, les quatre formes de participation communautaire sont présentes, la participation économique étant la plus efficace. Heureusement, pendant les années 90, un espace considérable a été créé pour ce genre de réciprocité, renforcé par l'avènement de la responsabilité démocratique. Cependant, l'établissement de liens de confiance entre les utilisateurs et les fournisseurs de services et entre les services de gestion des déchets solides et les entrepreneurs dépendra davantage de l'amélioration de la capacité de gouverner.

Pistes de solution qui s'offrent aux institutions pour la gouvernance
des déchets solides

La gouvernance des déchets solides à Johannesburg devra se faire en fonction de :

–   la constitution administrative d'un système métropolitain à deux niveaux, avec des responsabilités clairement définies pour chaque niveau et des mécanismes de financement appropriés ;

–   la redistribution des ressources financières, humaines et techniques pour contrer les inégalités historiques dans les niveaux et la qualité des services offerts ;

–   l'établissement de partenariats transsectoriels pour réunir le plus de ressources publiques, privées et communautaires possible.

La direction de la gestion des déchets solides (Solid Waste Directorate) du GJTMC est de toute évidence le principal intervenant lorsqu'il s'agit de trouver des moyens de relever ces défis. Elle a pour mission d'améliorer la qualité de l'environnement par une gestion efficace des déchets de la collectivité (SWD, s. d.).

Les systèmes de gestion et d'élimination des déchets ont été établis sur plusieurs années et les politiques qui les régissent se trouvent dans les lois qui s'y rapportent. Aux termes des lois nationales et provinciales, les autorités locales doivent créer un système de collecte des déchets ; cependant, il n'existe aucune balise concernant la méthode ou la fréquence de la collecte. La direction de la gestion des déchets solides a clairement reconnu, pour l'établissement des directives, que trois facteurs influeront sur le choix futur des systèmes de gestion des déchets :

–   la possibilité sur le plan financier d'étendre le système de haut calibre dont bénéficient les secteurs blancs à toute la région métropolitaine, étant donné que l'assiette fiscale risque d'être insuffisante (l'interfinancement et un changement dans les normes seront donc nécessaires) ;

–   les pressions exercées pour accroître la participation communautaire à la gestion des déchets, en particulier celle des petits entrepreneurs ;

–   la nécessité d'une plus grande sensibilisation aux questions liées à la gestion des déchets.

La direction a commencé au début de 1994 à repenser la gestion des déchets. Jusqu'à maintenant, la gouvernance dans les secteurs blancs s'est faite selon le modèle traditionnel fondé sur la prestation du service par les autorités locales, qui suppose une gestion centralisée en fonction de lignes directrices et de procédures strictes, les dirigeants politiques surveillant les politiques et les budgets. Les relations entre l'administration et les citoyens sont froides et, au mieux, facilitées par les dirigeants politiques. Dans les secteurs noirs, le service était irrégulier et insuffisamment financé et les relations entre l'administration et la communauté étaient tendues. Lorsqu'on a tenté d'innover en intégrant les petits entrepreneurs, le succès a été mitigé, à cause surtout de la mauvaise gestion des contrats.

Pour s'attaquer à ces problèmes, la direction de la gestion des déchets solides, de concert avec d'autres services de gestion des déchets solides, a lancé un processus d'élaboration de politiques. Le groupe de travail sur le nettoiement a ébauché une politique, qui devait être discutée avec la communauté et les conseillers nouvellement élus démocratiquement. Au moment de la rédaction de ce document, ce processus n'était pas terminé. Cependant, le conseil métropolitain avait pris acte de la politique et l'avait approuvée en principe.

Le processus d'élaboration de politiques reposait sur la nécessité de fournir un service durable de collecte et d'élimination des déchets. A cette fin, la direction de la gestion des déchets solides a adopté les objectifs stratégiques suivants :

–   déterminer les secteurs où les besoins sont urgents ;

–   fournir un service efficace à tous ceux qui produisent des déchets, selon des normes de qualité et de productivité prédéterminées ;

–   établir des systèmes visant à intégrer les besoins des communautés dans le processus décisionnel ;

–   établir des structures et des systèmes de gestion et de contrôle pour assurer la mise en œuvre de la politique. Des directives ont été établies afin de servir de fondement à la réorganisation institutionnelle et à la gestion du système pour assurer la prestation des services suivants :

–   collecte des déchets. La direction de la gestion des déchets solides a accepté que tous les déchets produits dans toutes les propriétés résidentielles et autres qui doivent être ramassés régulièrement pour des raisons de santé soient stockés, manipulés et enlevés aussi efficacement que possible dans toute la région métropolitaine. L'acceptation de cette directive représente un changement décisif par rapport à l'approche ségrégationniste sur laquelle reposait la prestation des services pendant l'apartheid ;

–   nettoiement des rues (balayage et ramassage des ordures). Le service de nettoiement des rues a pour objet de prévenir la pollution de l'environnement en assurant la propreté des rues et des places publiques ;

–   enlèvement des résidus de jardins, des débris de construction et des ordures ménagères de gros volume et spéciaux. Ce service a pour objet d'enlever les gros déchets et autres déchets produits irrégulièrement qui ne peuvent être ramassés par le système normal de collecte afin de minimiser les risques d'incendie et les dangers pour la santé et de garder l'environnement propre. Il comprend l'établissement de décharges où les résidents peuvent aller déposer les résidus de jardins, décourageant du coup le dépôt illégal de débris de construction ;

–   élimination des déchets. Tous les déchets produits doivent être éliminés conformément aux lois qui s'y rapportent et aux normes en vigueur. Toutes les décharges doivent être exploitées conformément aux lois qui s'y rapportent ;

–   normes de service. Des normes de service ont été établies pour mesurer la qualité du service et le rendement du fournisseur de services.

Les Solid Waste Bylaws (règlements sur la gestion des déchets solides) de l'Afrique du Sud ont été modifiés pour établir le cadre réglementaire visant un système de gestion des déchets solides à deux niveaux. Essentiellement, l'administration métropolitaine sera responsable des décharges et de l'incinération et les MSS seront chargées de la collecte des déchets, y compris des résidus de jardins, du nettoiement des rues et des sites. Ces règlements administratifs contiennent les principes suivants :

–   tous les utilisateurs ont droit au service de collecte des déchets ;

–   tous les déchets ramassés seront éliminés d'une manière acceptable du point de vue environnemental ;

–   tous les pollueurs seront poursuivis ;

–   toutes les personnes ont le devoir d'éliminer les déchets de leur environnement.

Les Solid Waste Bylaws intègrent ces principes et établissent les politiques de base qui régissent la gestion des déchets solides dans la région métropolitaine.

Ces principes et politiques reflètent dans une grande mesure la volonté de redistribuer les ressources afin d'offrir un service uniformément efficace de gestion des déchets solides à toutes les communautés. Dans ce contexte, le nouveau mode de responsabilité démocratique en général s'est traduit par un changement dans la gestion des déchets solides.

Cependant, du point de vue de la gouvernance, ces principes et politiques prêtent le flanc à la critique à trois égards. Premièrement, aucun ne parle explicitement de la nécessité d'établir des partenariats transsectoriels ni des structures connexes. C'est particulièrement étonnant étant donné les contraintes financières et l'infrastructure limitée avec lesquelles doivent composer les services de gestion des déchets solides. En bref, ces principes et politiques réduisent l'espace nécessaire à la réciprocité ce qui, par ricochet, pourrait rendre difficile l'établissement de liens de confiance. Deuxièmement, aucun des principes et politiques ne mentionne la nécessité de passer d'une culture isolée et technocrate de prestation de services de masse à une culture d'administration du dévelop­pement davantage orientée vers les services et plus sensible à la gouvernance. Troisièmement, ces principes et politiques visent à préserver les normes esthétiques et sanitaires de l'environnement social et prévoient peu de mesures pour la réutilisation des déchets, que favorise l'approche durable de l'utilisation des ressources. Cette troisième critique est directement reliée aux deux premières parce que, comme le démontre l'expérience de la cité de Curitiba au Brésil, la durabilité des ressources dépend du genre de partenariats et de l'interdépendance que suppose une bonne gouvernance.

Compte tenu des contraintes au plan des ressources et du large éventail de conditions socio-économiques qui existent dans le grand Johannesburg, la direction de la gestion des déchets solides a reconnu, pour l'établissement des directives, qu'il faudra un certain nombre de méthodes pour ramasser les déchets dans les différentes communautés et les transporter à une décharge appropriée. Elle a également reconnu que chacune de ces méthodes aura un effet différent sur les niveaux de service offerts. La direction de la gestion des déchets solides a examiné les méthodes suivantes :

Le service de base

Le service de base est surtout offert dans les bidonvilles. Une benne est installée dans un terrain accessible à la communauté. Dans chaque cas, l'emplacement de la benne est déterminé après consultation de la communauté. Il s'agit d'inciter les résidents à déposer leurs déchets et le matériel dont ils ne veulent plus dans la benne et de vider celle-ci périodiquement. Le problème que présente cette méthode est que le vent souffle les déchets hors de la benne. Les environs sont habituellement très malpropres et, souvent, on met le feu au contenu de la benne et ce feu couve, pollue l'air et augmente les risques d'incendie. Pour rectifier cette situation, la communauté doit elle-même s'assurer que les déchets sont placés dans la benne. Or, le GJTMC et les MSS n'ont pas l'intention de faire autre chose que de placer la benne et de l'enlever lorsqu'elle est pleine. A moins d'investir le temps, les ressources et le personnel nécessaires à la sensibilisation de la communauté, les chances de réussite de cette méthode sont très minces.

L'entrepreneur

Les Solid Waste Bylaws disposent que personne ne peut offrir un service de collecte des déchets à un utilisateur sans le consentement écrit du GJTMC. Le GJTMC peut également nommer un agent ou un entrepreneur pour offrir un service de collecte des déchets mais doit rendre compte à l'électorat et aux niveaux d'administration supérieurs relativement au service. La nomination d'un agent ou d'un entrepreneur doit se faire conformément aux règlements financiers.

Cette méthode vise à accroître la participation économique des membres de la communauté. Un entrepreneur est choisi pour ramasser les déchets dans une communauté déterminée moyennant le paiement de droits. Il distribue ensuite des sacs-poubelle dans toute la communauté et a le choix de payer les personnes qui retournent leurs sacs pleins de déchets ou de ramasser les déchets directement. Tous les déchets sont ramassés par l'entrepreneur et placés dans une benne qui appartient au GJTMC et est entretenue par lui. Le coût du transport de la benne vers la décharge et du dépôt des déchets n'est pas recouvré par la communauté et doit donc être assumé par le GJTMC, ses MSS ou les deux.

Cette méthode a pour avantage d'offrir aux commerçants noirs qui le souhaitent la possibilité de se lancer dans ce genre d'entreprise, avec le concours de l'administration locale, mais elle comporte plusieurs problèmes. Premièrement, elle nécessite un niveau élevé d'interfinancement que les nantis n'apprécieront pas et auquel ils s'opposeront. Deuxièmement, comme les déchets sont déposés dans une benne, les mêmes problèmes que ceux soulevés relativement à la méthode du service de base risquent de se présenter, bien qu'à un moindre degré en raison du rôle de l'entrepreneur. Troisièmement, c'est l'entrepreneur et non le GJTMC qui est responsable du service dans la communauté, et certains craignent que cela ne réduise la responsabilité politique quant à l'utilisation des deniers publics pour la prestation d'un service que ni le GJTMC ni ses MSS ne gèrent directement.

La gestion communautaire des déchets

L'approche communautaire vise à utiliser les ressources et la main-d'œuvre provenant de la communauté locale. C'est ce qui distingue l'approche communautaire de la méthode de l'entrepreneur décrite ci-dessus, car l'entrepreneur ne provient pas nécessairement de la communauté qu'il dessert.

Le GJTMC a envisagé l'approche communautaire en vertu de laquelle les résidents de la communauté ramassent les déchets et les transportent de leur communauté à un site de stockage ou à un centre d'élimination. Un mode de paiement est alors négocié au sein de la communauté ainsi qu'entre les représentants de celle-ci et le GJTMC. Les normes et la fréquence du service sont déterminées par la communauté et le service est fourni avec le soutien de celle-ci. Un service comme celui-là est inhabituel en ce que le travail est effectué non pas par des employés du GJTMC, mais par des membres de la communauté qui sont rétribués par un programme de travaux publics.

De toute évidence, cette méthode a pour principal avantage de comprendre un encouragement économique. Cependant, elle comporte plusieurs problèmes. Premièrement, les employés municipaux syndiqués peuvent sentir leur emploi menacé et croire qu'il s'agit d'une tentative visant à réduire leurs salaires. Deuxièmement, comme les déchets sont déposés dans une benne, les mêmes problèmes que ceux soulevés relativement à la méthode du service de base risquent de se présenter, bien qu'à un moindre degré en raison du rôle de la communauté. Troisièmement, comme les résidents doivent ramasser leurs propres déchets, cette méthode peut aller à l'encontre du principe selon lequel chaque logement du grand Johannesburg a droit au service de collecte des déchets. Quatrièmement, parce que ce sont les représentants de la communauté qui sont responsables du service, non le GJTMC, cette méthode peut réduire la responsabilité politique, comme dans le cas de la méthode de l'entrepreneur.

Le service traditionnel

Les décideurs considèrent que le service traditionnel correspond le mieux aux principes et politiques de la direction de la gestion des déchets solides. Cette approche repose sur la notion voulant que l'administration locale fournisse des moyens de stockage à chaque logement et un service de collecte porte à porte, la fréquence et les normes du service étant déterminées par le GJTMC. Ce service est inclusif et peut théoriquement être adapté aux besoins de la communauté. En pratique, les coûts peuvent être très élevés. Le tarif est fixé par le GJTMC, les MSS ou les deux, et tous les utilisateurs doivent payer les trais. Cette méthode devrait permettre l'interfinancement du service pour les communautés défavorisées. Cependant, lorsque la majorité peut difficilement se permettre de payer le tarif et que des réductions budgétaires empêchent l'interfinancement à partir d'autres services, cette approche peut se révéler problématique. Néanmoins, un produit normalisé offert à chaque logement selon des procédures standard est beaucoup plus facile à comprendre et à accepter pour les nouveaux politiciens. Cette méthode a également la faveur des fonctionnaires qui trouvent plus facile de s'occuper de systèmes administrés selon une procédure bien établie que la dynamique communautaire et les processus complexes de développement.

Les tenants du service traditionnel soutiennent que cette approche tient compte des impératifs de développement et des besoins des communautés. A leur avis, certains aspects du service peuvent être sous-traités, notamment les systèmes de collecte communautaire, la location de services de transport non conventionnel auprès d'entrepreneurs locaux, l'affectation de personnel local dans les communautés et la participation de celles-ci à d'autres aspects. Certains soutiennent également qu'en maintenant le service sous le contrôle centralisé des services de gestion des déchets solides, on assure la responsabilité politique, une saine gestion financière ainsi que des normes et des niveaux équitables.

A l'heure actuelle, la majorité des utilisateurs du service du grand Johannesburg bénéficient du service au moins une fois par semaine et obtiennent deux sacs-poubelle par service. Ce service correspond à ceux offerts dans les pays industrialisés et est habituellement implanté dans les autorités locales à la manière des modèles britanniques de prestation des services par ces autorités. On suppose que l'autorité locale jouit d'une assiette fiscale durable et que l'établissement de nouvelles priorités budgétaires ne drainera pas le capital et les fonds de fonctionnement requis pour le système traditionnel de gestion des déchets. Cependant, ces hypothèses sont déjà remises en question, ce qui oblige la direction de la gestion des déchets solides à envisager d'autres solutions.

La participation communautaire

A l'heure actuelle, l'ONG Keep Johannesburg Beautiful Association compte des mécanismes spécifiques pour faire participer le public à la formulation des politiques. Cela se fait par les comités villageois, qui contrôlent la collecte des déchets solides. Il a été suggéré d'établir, partout où c'est possible, des tribunes sur le nettoiement, en s'inspirant du principe des comités villageois, avec le soutien du GJTMC. Les secteurs où la participation continue du public est requise devront être déterminés et les priorités établies avec le concours des organismes existants. Cette méthode fait également participer les communautés au processus décisionnel en permettant aux comités de faire des observations sur les questions qui touchent leur environnement et de communiquer ces observations aux comités pertinents du GJTMC. En d'autres termes, les communautés auraient leur mot à dire sur les politiques et les autorités locales veilleraient à ce que les fournisseurs de services respectent les politiques. En outre, les petites entreprises participeraient peut-être davantage à la gestion des déchets.

A la fin de 1994, les différents services de gestion des déchets solides n'étaient parvenus à aucun consensus concernant l'approche ou la combinaison d'approches qui serait la plus efficace. Par conséquent, le GJTMC n'a toujours pas de stratégie de gestion du changement pour transformer le système de gestion des déchets ségrégué en un système métropolitain à deux niveaux.

Néanmoins, le GJTMC a approuvé en principe l'interfinancement du service dans les secteurs les plus pauvres. Cette décision est très significative parce que, pour la première fois, les autorités ne considèrent plus que les services dans les secteurs pauvres s'autofinancent. Presque tous les logements dans les secteurs formels et les bidonvilles sont maintenant desservis d'une façon ou d'une autre. Le débat ne porte donc plus sur l'expansion quantitative du système mais plutôt sur sa restructuration qualitative dans le but d'assurer une approche uniforme dans toute la région métropolitaine, conformément à la politique globale de déségrégation de la ville.

Il est nécessaire d'évaluer le débat et les pistes de solution examinées dans cette section du point de vue de la gouvernance telle que nous l'avons définie au début du chapitre. Nous y présentons la gouvernance comme Une approche qui doit prendre en compte la responsabilité démocratique, la capacité de gouverner (notamment la structure et la culture organisationnelle), les relations de confiance et la réciprocité. Les sous-sections qui suivent décrivent l'état général du débat et son contexte plus global plutôt que des éléments spécifiques.

La responsabilité

Des administrations locales non ségrégationnistes, démocratiquement élues, aux niveaux métropolitain et local, représentaient une condition nécessaire à l'adoption de l'approche fondée sur la gouvernance locale dans le grand Johannesburg. Cependant, la réalisation de cette condition a été gâchée par deux problèmes. Premièrement, malgré un consensus sur la nécessité d'un système métropolitain.1 à deux niveaux, la mésentente sur la répartition des fonctions et des pouvoirs entre les deux niveaux a rendu impossible l'établissement d'une stratégie détaillée de gestion du changement dans le secteur de la gestion des déchets. Par conséquent, la direction de la gestion des déchets solides de l'ancien conseil municipal de Johannesburg, qui est passée au GJTMC, a dû diriger le processus sans savoir si elle était un service métropolitain en devenir ou si elle serait fusionnée avec les autres services de gestion des déchets solides pour former quatre services relevant des MSS et rattachés à une petite direction de gestion des déchets solides au niveau métropolitain. Ce genre d'incertitude stratégique mine la responsabilité et la gestion. Le second problème réside dans le fait qu'un accord n'a pu être conclu quant à la nécessité d'établir un mécanisme novateur pour inciter les petites entreprises à s'engager dans la gestion des déchets, par la méthode dite des entrepreneurs, ou pour inciter les collectivités à s'engager dans des programmes d'entraide, par la méthode de la participation communautaire. Essentiellement, c'est à cause de la persistance de la conception traditionnelle de la responsabilité gouvernementale que l'on continue de s'en tenir à cette approche limitée de la prestation des services.

La capacité

Sous l'apartheid, les autorités locales noires étaient incapables de produire les ressources dont elles avaient besoin pour créer les capacités administratives, organisationnelles et techniques nécessaires pour planifier et offrir un service de qualité supérieure et exploiter une infrastructure de haut niveau. L'établissement d'un système métropolitain à deux niveaux dans le grand Johannesburg est de toute évidence une condition nécessaire pour résoudre ce problème. En raison de sa situation centrale, la direction de la gestion des déchets solides de l'ancien conseil municipal de Johannesburg pourrait vraisemblablement répondre aux besoins d'une région métropolitaine. Cependant, deux problèmes pourraient l'en empêcher. D'abord, même si la direction et les anciens services de gestion des déchets solides ont les compétences techniques, le personnel et l'infrastructure nécessaires pour répondre aux besoins pendant et après le passage à une administration à deux niveaux, ils pourraient avoir de la difficulté à faire le pont entre un organisme fordiste, régi par des procédures normalisées et offrant des services de masse, et un organisme de développement qui exigerait des relations directes avec les clients par des méthodes d'impartition administrative et de procédures de gestion postmodernes. Il faudra du temps pour implanter la culture du développement. Pour faciliter cette transition, il pourrait être utile de faire appel à des travailleurs en développement qui ont déjà œuvré dans des ONG. Ensuite, à mesure que les réductions budgétaires deviennent une réalité, les futurs services de gestion des déchets solides aux niveaux municipal et sousmunicipal pourraient bien être contraints de concentrer leurs ressources sur l'entretien et l'exploitation de l'infrastructure existante au lieu d'envisager l'expansion de leurs services dans les bidonvilles où le paiement des services est à la fois insuffisant et irrégulier.

La réciprocité

La participation soutenue de la société civile organisée et des intervenants du secteur privé aux négociations qui ont eu lieu au niveau local entre 1989 et 1994 a contribué à créer une culture politique et un contexte opérationnel fondés sur la participation des intéressés à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques. Dans ce contexte, la réciprocité est possible. Les cadres supérieurs des services de gestion des déchets solides ont assisté à de nombreuses réunions communautaires pour discuter des problèmes que pose la prestation des services, et des dizaines de tribunes ont été établies pour examiner d'autres modes de prestation des services avec les petits exploitants qui croient que la nouvelle façon de procéder favorisera immanquablement la sous-traitance et même la privatisation à grande échelle.

Cependant, trois facteurs pourraient entraver les progrès réalisés jusqu'à maintenant. Premièrement, le passage de nombreux dirigeants communautaires à la politique locale et la réduction du financement que subissent actuellement de nombreuses ONG affaiblissent considérablement les organismes communautaires et à but non lucratif. Deuxièmement, la culture bureaucratique des services municipaux issus de l'apartheid tend à décourager la réciprocité. Il est beaucoup plus simple de faire des hypothèses concernant les services requis que de passer du temps à communiquer et à négocier. Cette culture élimine les encouragements à la participation. Troisièmement, un certain nombre de grandes sociétés nationales et multinationales qui ont beaucoup d'expérience dans la prestation de services publics privatisés commencent à intervenir. Elles ont les ressources nécessaires pour engager des lobbyistes et leurs arguments sont pris au sérieux. De grandes entreprises déjà engagées dans la gestion des déchets solides sont intéressées à accroître leur participation. Si le GJTMC et ses MSS favorisent cette approche, les premiers bénéficiaires de la réciprocité seront ces entreprises, plutôt que les résidents des collectivités et les petits entrepreneurs, alors même que le gouvernement se doit d'obtenir la participation, la confiance et la collaboration de ces personnes.

La confiance

Il est probablement juste de dire que le faible taux de confiance représente le plus grave problème que rencontrent tous les gestionnaires de la fonction publique, particulièrement les chefs des services de gestion des déchets solides. Étant donné l'héritage laissé par l'apartheid, il n'est pas surprenant de constater que les relations entre les fonctionnaires et les collectivités locales sont encore tendues. Les fonctionnaires veulent que les collectivités payent les services, mais les citoyens ne croient pas que cela incitera les fonctionnaires à améliorer les services existants ou à en créer de nouveaux et à les étendre aux secteurs qui n'en bénéficient pas actuellement. Les fonctionnaires peuvent vaincre cette méfiance en promettant des mesures à court terme. Cependant, à long terme, les promesses peuvent faire place aux désillusions si elles ne répondent pas aux attentes qu'elles ont soulevées. C'est le cycle qui caractérise l'Afrique d'après l'indépendance et il pourrait se poursuivre en Afrique du Sud si la démagogie soulève des attentes mais que les réductions budgétaires en retardent la réalisation.

En résumé, bien que la transition négociée vers une administration locale démocratique et non ségrégationniste dans le grand Johannesburg représente une réalisation remarquable, les autorités municipales ont encore beaucoup à faire pour implanter un système de gouvernance locale démocratique.

Possibilités d'action et recommandations

Dans cette section, nous recommandons des politiques touchant les changements au système de gestion des déchets solides dans le grand Johannesburg. Le GJTMC doit tenir compte de quatre possibilités d'action avant de déterminer la combinaison de méthodes de gestion des déchets qui sera mise en œuvre :

–   Application de la méthode traditionnelle à l'échelle métropolitaine. Il s'agit d'étendre l'administration actuelle aux niveaux métropolitain et sousmétropolitain dans le contexte institutionnel en place en utilisant la technologie existante, une réserve sans cesse croissante de biens d'équipement et de plus en plus de travailleurs. Les fonctionnaires élaboreraient les politiques et les politiciens les approuveraient. Celles-d seraient mises en œuvre par des procédures, des calendriers et des mécanismes de déclamation normalisés. Cette méthode nécessiterait une structure hiérarchique. En vertu de cette option, la participation communautaire à la prestation des services serait limitée et se résumerait à des tribunes de consultation sur les politiques ou à une impartition administrative limitée relativement à la gouvernance du système de gestion des déchets.

–   Sous-traitance des services par des organismes de la communauté. Cette option envisage la sous-traitante par des organismes communautaires à but lucratif et sans but lucratif de la gestion de certains aspects de la gestion des déchets, tels que la collecte des déchets aux résidences et le transport aux décharges, le ramassage de certains déchets, tels que les débris organiques, ou même le traitement des déchets à certaines fins. La réussite de cette option est tributaire de la mise en place d'un programme intensif visant à créer des capacités de gestion au niveau local pour traiter les procédures d'impartition. Elle nécessiterait également des systèmes informatiques très perfectionnés pour la gestion des contrats et un contrôle des projets très développé pour assurer la durabilité. Les décideurs trouveraient inacceptable que la qualité du service dépende d'une organisation et d'une gestion instables.

–   Collecte des déchets à fort coefficient de main-d'œuvre. Cette option serait semblable à l'application de la méthode traditionnelle à l'échelle métropolitaine, sauf qu'elle nécessiterait une hausse massive des effectifs de prestation des services. Il serait peut-être possible d'utiliser des fonds provenant des programmes nationaux de travaux publics pour offrir des emplois non permanents ou semi-officiels (par exemple, payer les travailleurs selon le nombre de sacs-poubelle ramassés ou en fonction de tarifs quotidiens). Si cette option était privilégiée, pour des motifs de création d'emplois, c'est-à-dire des motifs autres que la gestion des déchets en soi, elle pourrait contribuer à réduire le coût de l'augmentation des biens d'équipement. En d'autres termes, cette option renforcerait la participation communautaire à la prestation des services mais la subordonnerait aux procédés administratifs des services de gestion des déchets solides. Elle servirait donc les intérêts des chômeurs plutôt que ceux des entrepreneurs, à but lucratif ou non.

–   Privatisation-commercialisation. Cette option supposerait la vente complète des services de gestion des déchets à une entreprise du secteur privé ou l'établissement d'un service public sans but lucratif qui appartiendrait à l'autorité locale. Il s'agirait d'obtenir la participation communautaire par la combinaison de l'actionnariat et de la sous-traitance. S'il était inévitable d'emprunter de grosses sommes auprès des établissements financiers privés pour élargir le service, il pourrait bien être nécessaire d'envisager cette option, puisque ces établissements exigent que leurs prêts soient liés à des biens saisissables.

Pour l'heure, les décideurs ont tendance à considérer qu'il est plus simple d'étendre le système et le niveau de service traditionnels aux secteurs défavorisés. Ils soutiennent que les méthodes utilisées pour offrir les services doivent exiger beaucoup de main-d'œuvre pour favoriser la création d'emplois. Eu égard à l'assiette fiscale stagnante et aux autres priorités en matière d'affectations budgétaires, la durabilité de cette option est discutable. Il faudra faire des choix difficiles uniquement lorsque l'expansion du service se traduira en coûts de biens d'équipement, de main-d'œuvre et de gestion de la décharge. Il est possible d'étendre les services à de nouveaux secteurs ; les véritables tensions se feront sentir uniquement en aval.

Les politiques recommandées devraient comprendre les éléments suivants :

–   Système intégré de gestion des déchets à l'échelle métropolitaine. Le service de gestion des déchets solides du GJTMC serait responsable de la gestion stratégique globale, du gros des services (décharges, recyclage, etc.), du développement et de l'innovation des services dans les secteurs non desservis, tandis que les services de gestion des déchets des MSS seraient directement responsables des services locaux.

–   Combinaison du service traditionnel et du service de collecte à fort coefficient de main-d'œuvre. Il s'agirait d'offrir le service traditionnel doublé d'un service de collecte des déchets à fort coefficient de main-d'œuvre dans les secteurs pauvres et de sous-traiter autant d'éléments que possible.

–   Mise en œuvre d'une stratégie de gestion du changement. Cette option viserait notamment à transformer les cultures organisationnelles et les méthodes de gestion existantes dans le but de créer une culture du développement et d'instaurer des pratiques de gestion postmodernes, telles que le travail d'équipe et les primes au rendement, plutôt que le respect des règles ; la responsabilité en regard des tâches à accomplir ; la gestion informatique de projets ; des liens étroits entre le contrôle et la gestion stratégique.

–   Examen des approches, méthodes et technologies existantes. Cet examen s'inspirerait d'une approche fondée sur la durabilité des ressources qui vise à transformer la conception linéaire existante de la gestion des déchets, qui considère que les déchets sont improductifs, en une conception circulaire, qui considère les déchets comme un intrant productif des nouvelles industries fondées sur les déchets, notamment les entreprises de recyclage ou de fabrication de compost.

Cette dernière politique repose sur l'hypothèse selon laquelle le service de gestion des déchets solides serait amélioré par la participation des citoyens, des organismes communautaires, des ONG et des entreprises locales à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques. Cependant, la participation représente souvent un vœu pieux. Ce qui est difficile, c'est de déterminer ce qu'elle signifie en pratique. Comme nous l'avons déjà indiqué, les dirigeants politiques, les groupes communautaires et les fonctionnaires voient la participation d'une manière différente. Tandis que les gouvernants nouvellement élus se considèrent comme les seuls dirigeants véritables de la communauté (soutenus en cela dans une certaine mesure par le taux de participation élevé aux élections de fondation), le soutien envers les processus officialisés de participation est moins enthousiaste. Malgré tout, nous faisons les recommandations suivantes pour l'établissement d'un cadre de participation structurée à différents niveaux :

–   établir une tribune métropolitaine sur la gestion des déchets solides pour l'élaboration et l'examen des politiques, qui sera constituée de représentants de la société civile organisée et du secteur privé, des services métropolitains et locaux de gestion des déchets solides et de politiciens élus ;

–   concevoir un système de gestion des contrats qui améliore l'impartition sans affaiblir la responsabilité ;

–   concevoir et lancer une campagne d'éducation et de sensibilisation fondée sur une approche communautaire peu coûteuse plutôt que sur une formule coûteuse de marketing du secteur privé, afin de mieux faire comprendre l'importance de la gestion des déchets dans les communautés ;

–   favoriser la création d'un réseau d'organismes de création des capacités pour offrir des programmes de formation aux fonctionnaires locaux, aux ONG, aux organismes communautaires et aux entreprises locales qui participent à des programmes d'impartition ou de gestion des déchets à fort coefficient de main-d'œuvre.

Enfin, toute la question de la gestion des déchets devrait être examinée du point de vue de l'utilisation durable des ressources. Maintenant que l'Afrique du Sud signe des ententes internationales à titre de membre responsable de l'Organisation des Nations unies, il ne faudra pas beaucoup de temps avant que le gouvernement national n'incite les administrations locales à mener leurs activités en respectant les lignes directrices d'Action 21. Cela pourrait fort bien débuter dans le grand Johannesburg par l'adoption des mesures suivantes :

–   commander une étude sur l'expérience internationale et en tirer les éléments qui pourraient s'appliquer au grand Johannesburg ;

–   par l'entremise de la tribune métropolitaine sur la gestion des déchets solides dont il a été question précédemment, formuler collectivement une politique et la faire adopter par le GJTMC et les MSS afin d'orienter la réorganisation institutionnelle à moyen et à long terme et l'établissement d'un programme de réaffectation des ressources pour l'utilisation durable des ressources ;

–   établir une unité inter-services au sein du GJTMC pour relier une approche durable à l'utilisation des ressources dans le secteur de la gestion des déchets et des initiatives semblables dans d'autres services, par exemple, utiliser les boues provenant des installations de traitement des eaux usées pour le compostage ou exiger que les nouvelles propositions de développement contiennent des études des incidences environnementales.

Conclusions

Ce chapitre a présenté le cadre devant régir les questions soulevées par la gestion future des services municipaux. L'analyse de la gouvernance donne à penser que les importantes réductions de ressources se sont traduites par le passage de notions de prestation des services axées sur l'état providence à une vision fondée sur le partage des responsabilités touchant la gouvernance des services entre les organismes d'état, le secteur privé et la société civile. Cette analyse comporte quatre façons d'interpréter ce que la gouvernance signifie en pratique :

1. réduire la participation de l'État à la prestation des services en privatisant les services et en transformant les administrations en gestionnaires efficaces et compétents d'un contexte réglementaire axé sur les services ;

2. accroître la démocratisation politique pour que l'État ait à en rendre compte et réponde davantage aux besoins de la majorité plutôt qu'à ceux de l'élite ;

3. prendre des dispositions institutionnelles en vertu desquelles les organismes d'État, le secteur privé et les entreprises communautaires, à but lucratif ou non, assument ensemble la responsabilité du service ;

4. retirer l'État de la prestation des services en privatisant davantage.

A l'heure actuelle, la transition des administrations locales en Afrique du Sud est essentiellement fondée sur la deuxième conception de la gouvernance, c'est-à-dire que la démocratisation et la déségrégation de la gouvernance locale ont pour but d'établir le cadre qui permettra d'offrir les services à tout le monde. Cette. hypothèse a été vérifiée par une analyse du système de gestion des déchets. Bien que la politique actuelle confirme cette assertion, les pressions économiques et financières peuvent obliger les administrations locales à repenser les méthodes traditionnelles de prestation des services et à envisager des solutions qui correspondent davantage à la première et à la troisième conceptions de la gouvernance, ce qui viendrait certainement étayer la notion de participation des intéressés à la transition des administrations locales qui a déjà donné lieu à de nouvelles administrations locales.

En bref, nous avons présenté dans ce chapitre un cadre permettant de voir la gouvernance sous un nouveau jour. La transition des administrations locales en Afrique du Sud a permis de vérifier certaines méthodes de gouvernance. La gestion des déchets, en particulier, représente un domaine où ~ manifestent le plus clairement les tensions entre l'approche traditionnelle, qui préconise d'étendre les services par une expansion de l'administration, et les approches fondées sur les partenariats qui font intervenir d'autres acteurs dans la gestion des déchets. On ignore encore comment ces tensions doivent être résolues et quelles pressions et tendances les influencent. Il est trop tôt pour juger avec précision de leur dynamique future, mais il est toujours temps de repenser ces questions à la lumière du virage mondial au plan de la conception de la gouvernance.

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Synthèse et recommandations

ADEPOJU G. ONIBOKUN

Synthèse

L'examen des systèmes de gestion des déchets de quatre villes africaines, dans cet ouvrage, met en lumière de nombreux points communs, de même que certaines caractéristiques inusitées. Ce chapitre résume ces constatations afin d'en dégager la leçon pour l'Afrique.

Gouvernance en matière de gestion des déchets et évolution des administrations locales

La gouvernance en matière de gestion des déchets en Afrique est étroitement associée à l'évolution des administrations locales, dont chaque étape a influé sur les systèmes de gestion des déchets. Le désordre qui semble régner à cet égard dans nombre de villes africaines tire son origine de la période coloniale. Au Nigeria et en Tanzanie, par exemple, c'était une époque de ségrégation raciale, les colons et les indigènes vivant dans des quartiers différents des villes. Les quartiers réservés aux colons étaient bien aménagés et dotés d'infrastructures de base dont l'utilisation était gratuite ou fortement subventionnée, alors que les zones indigènes étaient laissées plus ou moins à elles-mêmes. Surtout, les colons, malgré les nombreuses ordonnances qu'ils ont prises en vue de renforcer l'administration urbaine, considéraient les villes comme des accidents de l'expansion géogra phique, et n'ont donc rien fait de sérieux pour résoudre les problèmes qui commençaient à surgir, notamment en matière d'hygiène.

Malgré la politique d'assimilation que la France appliquait dans ses colonies, on pouvait constater quand même dans celles-ci une ségrégation entre les colons et les indigènes ainsi que des différences au plan de la qualité des infrastructures. En Afrique du Sud, l'apartheid régissait l'ensemble de la structure des villes, qui étaient divisées en quatre zones distinctes : Blancs, Africains, personnes de couleur et Indiens. Ces zones étaient gouvernées et administrées séparément, et chacune était dotée de son propre système de gestion des déchets solides.

La répartition inégale des ressources affectées à la prestation des services persiste, malgré les changements politiques qui se sont produits récemment dans ces pays. A Johannesburg, il existe toujours des différences considérables entre les secteurs noirs et blancs quant à la qualité des services. A Ibadan, Abidjan et Dar es-Salaam, malgré la redéfinition des rôles des différents niveaux d'administration et le fait que les indigènes se sont installés dans les secteurs habités autrefois par les colons, on observe toujours une discrimination entre différents secteurs urbains au plan de la prestation des services. L'Ibadan Urban Sanitation Committee (IUSC), la principale institution de gestion des déchets solides à Ibadan depuis 1991, n'est active que dans cinq des 11 secteurs de la métropole gouvernés par une administration locale, qui représentent les deux tiers de la population. Pourtant, les décharges proposées se trouvent dans les six autres administrations locales, où l'IUSC est absente. De même, à Dar es-Salaam, la privatisation de la gestion des déchets solides entreprise en 1994 dans le cadre du Sustainable Dar es-Salaam Project (SDP) n'a touché que 10 quartiers de la ville (le centre et les banlieues riches), à l'exclusion des quartiers les plus pauvres, où est localisée la décharge. Une telle discrimination a également été relevée à Abidjan.

Voici d'autres faits historiques pertinents en matière de gestion des déchets :

– On observe un transfert constant de responsabilités entre les organismes et les divers niveaux d'administration, de même qu'entre ceux-ci et le secteur privé. La gestion des déchets compte maintenant de nombreux acteurs. Bien qu'elle soit considérée généralement comme une question locale, les gouvernements centraux et les institutions nationales y jouent un rôle important et assument des responsabilités considérables. A Dar es-Salaam, outre le National Environmental Management Council et le cabinet du Premier ministre, qui supervise les administrations locales par le biais du ministère des Affaires municipales, quatre grands ministères centraux interviennent dans la gestion des déchets. Il en va de même dans les autres villes. A Abidjan, le ministère de l'Environnement établit les politiques en matière de santé publique ; le ministère de l'Intérieur supervise les administrations locales ; le ministère de l'Économie et des Finances veille au paiement des entrepreneurs qui ramassent les déchets dans la ville ; la Direction et contrôle de grands travaux (DCGTx) office un soutien technique au ministère de l'Environnement. En outre, ces institutions et équipes gouvernementales présentent une instabilité notoire, de même que les organismes d'exécution. La réduction ou l'expansion de l'équipe gouvernementale entraîne chaque fois une redéfinition des responsabilités et des hiérarchies, ainsi que la nomination de nouveaux dirigeants.

– Quelle que soit la nature des rapports entre les différents niveaux d'administration, les niveaux supérieurs dominent immanquablement les niveaux inférieurs. Ainsi, les administrations locales dépendent beaucoup des administrations centrales, qui exercent habituellement un certain contrôle sur elles. C'est particulièrement le cas en ce qui concerne l'accès aux ressources et le pouvoir politique. A Abidjan, le pouvoir est concentré au sein d'une unité du bureau du Premier ministre (autrefois le bureau du président), la DCGTx. Pendant la décentralisation menée de 1971 à 1982 en Tanzanie, les régions et districts ont accaparé la plupart des pouvoirs des administrations locales (sur les questions administratives et financières), et le gouvernement central a commencé à nommer les. cadres supérieurs et à approuver les règlements adoptés par les autorités urbaines locales. Au Nigeria, les administrations locales obtiennent la plupart de leurs recettes du gouvernement fédéral, et les ministères des administrations locales des États ont été abolis, bien qu'un organe de supervision relevant du bureau du gouverneur continue de contrôler les activités des administrations locales. En Afrique du Sud, en vertu de la Group Areas Act du début des années 50, l'aménagement urbain relève du gouvernement central.

– Les gouvernements centraux interviennent souvent dans la gestion des déchets (et particulièrement des déchets solides) en période de crise. Par exemple, en 1991, alors qu'à Abidjan la présence de dépotoirs non autorisés suscitait les protestations de citoyens indignés, l'État a réuni des ressources supplémentaires en approuvant une subvention spéciale gérée par le ministère de l'Environnement et en réquisitionnant de l'équipement et des machines du ministère des Travaux publics pour mener des campagnes périodiques de collecte des ordures. De même, le gouvernement central de Tanzanie est intervenu pour éliminer les déchets qui s'étaient accumulés à Dar es-Salaam en 1994, époque où la crise de gestion a atteint des proportions alarmantes. A Ibadan, après la prise du pouvoir du régime militaire le 31 décembre 1983, une journée de l'environnement a été tenue toutes les deux semaines, le samedi, afin d'améliorer l'hygiène dans la ville.

– En règle générale, les institutions responsables de la gestion des déchets sont en conflit avec les administrations locales (surtout si la gestion a été privatisée). Cette situation donne lieu souvent à la politisation de la gestion des déchets qui fait en sorte que l'administration locale est moins en mesure de contrôler et d'évaluer les activités de gestion. A Ibadan, certaines administrations locales associées à l'IUSC ont tenté discrètement de mettre fin à cette association et de gérer leurs déchets à leur gré. A cause de la politisation de la gestion des déchets à Abidjan, la Société industrielle des transports automobiles africains (SITAF), employée pendant la période de privatisation qui s'est échelonnée de 1953 à 1990, a mis à pied environ le tiers de son personnel immédiatement après que son contrat a été révisé en 1990. La politisation a nui également au rendement de la société privée Multinet dont les services ont été retenus en 1994 pour gérer les déchets solides dans les 10 districts de Dar es-Salaam. En outre, dans le quartier noir de Soweto, contigu à Johannesburg, l'entrepreneur chargé de la collecte des déchets depuis 1987 s'est révélé incapable de remplir correctement sa tâche à cause de l'hostilité des autorités locales, fondées sur le fait que l'entrepreneur est de race blanche et que la plupart de ses employés proviennent de l'extérieur de la localité. Comme les services de collecte des déchets solides offerts par le Greater Johannesburg Transitional Municipal Council (GJTMC) sont toujours fondés sur les anciennes divisions raciales de l'apartheid, la discrimination exercée à l'endroit de certains groupes de personnes persiste.

– Tant les gouvernements centraux que les administrations locales présentent des lacunes au plan de la démocratie, de la transparence, de l'obligation de rendre compte et de la coopération à l'endroit du public dans leurs activités et dans leurs rapports avec la société civile. Cette situation est en bonne partie attribuable à l'incompétence de la classe politique. En Tanzanie, les conseillers élus se sont révélés incapables de prendre en charge les responsabilités qui leur ont été confiées : ils sont peu scolarisés, connaissent mal la raison d'être et le rôle des administrations locales et ne saisissent pas quel est leur rôle en tant que conseillers. Jusqu'à maintenant, au Nigeria, les politiques ne sont pas élus mais nommés ; ils se soucient peu de l'opinion publique et ne cherchent qu' à satisfaire les caprices des personnes des niveaux supérieurs d'administration qui ont contribué à leur nomination. En Côte d'Ivoire, les dirigeants, distraits par leurs manœuvres politiques, n'accordent pas assez d'attention aux problèmes d'Abidjan. Le système de gestion des déchets d'Afrique du Sud est demeuré non représentatif, non démocratique, exclusif et discriminatoire. Ses dirigeants se révèlent toujours incapables de promouvoir les intérêts d'autres intervenants. En outre, le roulement élevé au sein des dirigeants politiques et administratifs prive les conseils des administrations locales de la continuité nécessaire pour bâtir une solide tradition de gestion.

– De nombreux systèmes et institutions ont été mis à l'essai puis rejetés. Les systèmes actuels demeurent très instables et, dans une grande mesure, inefficaces. Nombre d'institutions ont un rôle indéfini, et leurs interactions sont entachées de conflits et d'antagonisme. A Dar es-Salaam, le service du nettoiement de la section de prévention du comité de la santé et du bien-être social gère les déchets solides mais est dépourvu de toute autonomie, même concernant les questions cruciales comme l'achat de carburant et de pièces de rechange. Il n'a pas de budget distinct, et l'argent qu'il perçoit est versé dans les recettes générales du conseil municipal de Dar es-Salaam (Dar es-Salaam City Council –DCC). A Johannesburg, bien que le programme de transition des administrations locales ait permis le transfert de toutes les fonctions des services de gestion des déchets solides des anciennes autorités locales au GJTMC, cette gestion varie toujours en fonction de la race, et la division des tâches entre le GJTMC et les quatre structures métropolitaines auxiliaires (Metropolitan Sub-Structures –MSS) n'a pas encore été réglée.

– Au Nigeria comme en Tanzanie, il est évident que l'élimination des déchets ne compte pas parmi les priorités des administrations locales.

Systèmes de gestion des déchets

Le tableau 1 présente certains faits saillants sur les systèmes de gestion des déchets des quatre villes. Ils varient du système fortement privatisé d'Abidjan au système essentiellement public de Johannesburg, ceux d'Ibadan et de Dar es-Salaam se situant entre ces deux extrêmes. Dans l'ensemble, cependant, la participation du secteur privé demeure très faible. Même à Abidjan, où le système a été privatisé entre 1953 et 1990, il y avait essentiellement une société appartenant au gouvernement, car la ville a aidé la SITAF à s'établir, lui versant des frais de service et, en cas de déficit, l'aidant à équilibrer son budget. En outre, l'entreprise en place depuis septembre 1992, ASH International, a dû recevoir de l'aide technique et financière de la DCGTx.

A Johannesburg, la collecte, le transport et l'élimination des déchets sont effectués surtout par le personnel de la Solid Waste Directorate, au moyen d'équipement payé par les autorités locales. Cependant, au cours des dix dernières années, certaines tâches ont été confiées à des sous-traitants du secteur privé dans des secteurs noirs où il était très difficile de recruter du personnel (par exemple, à Soweto depuis 1987). Cependant, l'entrepreneur de Soweto a été incapable d'exécuter le projet en raison de l'hostilité de la population locale à l'égard de son entreprise. Le système employé à Johannesburg comporte également une approche communautaire ; ainsi, les dirigeants communautaires collaborent avec les responsables pour recruter des résidents de la localité (composée de bidonvilles) pour ramasser les ordures et les apporter à des points de collecte désignés. Ces personnes sont rémunérées soit en vertu d'un contrat d'emploi soit par des dons.

Ce n'est qu'à Johannesburg et à Dar es-Salaam qu'il existe un système de collecte à domicile. Les problèmes associés aux points de collecte ont contraint Multinet à Dar es-Salaam à adopter la collecte de porte à porte. Les entrepreneurs d'Abidjan ainsi que l'organisme public d'Ibadan ne font que transporter les ordures des dépotoirs (ou points de collecte) aux décharges. Dans ces deux villes, la collecte de porte à porte incombe surtout aux ménages, aux petits précollecteurs et aux trieurs, qui sont pour la plupart employés par les résidents. A Abidjan et Dar es-Salaam, les résidents sont satisfaits de leurs services mais sont très hostiles à l'endroit des gros entrepreneurs, les accusant de déversements sauvages. Cet antagonisme entrave les activités des entrepreneurs. Il est arrivé que l'entrepreneur d'Abidjan décide de fermer le poste de transfert en raison de difficultés relatives aux précollecteurs, et de déverser les ordures au dépotoir d'Akouedo. Le tableau 1 résume les modes de gestion des déchets dans les quatre villes.

Aux dépotoirs, les ordures sont déposées dans des bennes. Cependant, c'est uniquement à Johannesburg que ce système se révèle adéquat, et malgré tout, beaucoup de déchets sont jetés n'importe où à proximité, dans une moins grande mesure toutefois que dans les trois autres villes. Sauf à Dar es-Salaam, où les camions sont chargés manuellement, le chargement se fait mécaniquement, les bennes étant vidées dans des compacteurs au moyen d'un dispositif de levage. Le chargement mécanique réduit les débordements, mais c'est une méthode coûteuse. Idéalement, les dépotoirs sont vidés au moins une fois par semaine, mais à Johannesburg, cela se fait uniquement dans les secteurs blancs. Dans les quartiers noirs de Johannesburg ce service est effectué toutes les deux ou trois semaines, et les autres villes en bénéficient bien moins souvent.

Les déchets sont généralement acheminés aux décharges désignées. Johannesburg compte sept décharges, et les autres villes en ont une chacune (bien que trois autres soient prévues à Ibadan). Les décharges d'Abidjan et Dar es-Salaam s'apparentent à des dépotoirs plutôt qu'à des décharges, car aucun traitement sanitaire n'y est effectué et les déchets biomédicaux y sont déversés tels quels. Dans ces deux villes, les risques environnementaux ont augmenté à proximité des décharges, et les résidents ressentent de l'hostilité à l'égard des entrepreneurs. A Johannesburg, les sept décharges actuelles permettent de répondre aux besoins de la ville dans l'immédiat. Le problème le plus pressant réside dans le fait que la ville ne dispose pas de méthode adéquate d'élimination des déchets industriels dangereux. Des compagnies ont tenté de déverser des déchets industriels dans les décharges, ce qui a suscité de nombreux conflits entre elles et les résidents des banlieues adjacentes.

Jusqu'à maintenant, les techniques d'élimination des déchets solides dans les quatre villes étudiées sont axées sur l'efficacité plutôt que sur une gestion durable des ressources, comme en témoigne le recours très limité au recyclage. Le réseau de récupérateurs et de recycleurs n'est ni organisé ni reconnu, et il n'existe encore aucun texte de loi pour régir leurs activités.

En outre, les activités de gestion visent surtout les déchets solides. A Abidjan, ce n'est qu'après l'épidémie de choléra de 1962 que la ville a élaboré un plan-cadre en vue de gérer les déchets liquides. Même de nos jours, seulement 40 % des ménages sont reliés au réseau central d'égout. Par contre, cette proportion est inférieure à 5 % à Dar es-Salaam et est presque nulle à Ibadan. Pour ce qui est de la gestion des déchets industriels, toutes les villes ont mis l'accent sur l'adoption de lois, à l'application desquelles on ne veille pas sérieusement, comme on le constate à Ibadan. Malgré l'importance accordée aux déchets solides, une petite partie de ces déchets était ramassée en 1997 : 10 % à Dar es-Salaam et à Ibadan et environ 55 % à Abidjan.

Facteurs financiers et techniques

En règle générale, la gestion urbaine dans les quatre villes étudiées ne repose pas sur des facteurs économiques. Depuis la période coloniale, les gouvernements ont établi des installations et des services dans les secteurs à faible densité (et à revenu élevé), sans se soucier des coûts. Ces services étaient fournis gratuitement ou à tarif réduit, alors que les recettes étaient délibérément réduites. Même à Abidjan, qui dispose d'un régime complexe de taxes et de cotisations, telles que la taxe de drainage sur les propriétés foncières, la plupart des programmes sont financés par l'État. Pas plus de 30 % du coût de la gestion des déchets est récupéré à Abidjan, par rapport à 5 % à Johannesburg et à beaucoup moins à Ibadan et à Dar es-Salaam. Pour cette raison, les systèmes de gestion des déchets ne sont pas durables. Par conséquent, sauf en Afrique du Sud, les niveaux inférieurs d'administration qui sont responsables de la gestion des déchets dépendent des niveaux supérieurs, et particulièrement du gouvernement central, pour financer leurs programmes. Lorsque les subventions ne suffisent pas à leurs besoins, ce qui ne manque pas de se produire, de graves problèmes surgissent.

La gestion des déchets dans toutes les villes, sauf dans les secteurs blancs de Johannesburg, où une capacité de gestion raisonnable s'est développée au fil des ans, est aux prises avec une pénurie généralisée de personnel qualifié, attribuable notamment au fait que ces emplois sont mal considérés et mal rémunérés. En outre, la plupart des véhicules ne sont pas en bon état parce qu'ils sont mal entretenus, du fait qu'il est difficile d'obtenir des pièces de rechange. Au moment où les études ont été menées (1995–1996), 68 % des véhicules fonctionnaient à Abidjan et 33 % à Ibadan. A Dar es-Salaam, plus de 20 % de l'équipement était en état de marche, mais la ville avait les moyens d'en alimenter seulement 20 % en carburant. 11 n'est donc pas étonnant que dans la plupart des cas, une faible proportion des déchets soit éliminée. Dans de nombreux pays africains, la gouvernance est axée sur la gestion des urgences ; ainsi, en cas de crise, les niveaux supérieurs se portent au secours des organismes de gestion des déchets.

Participation des citoyens

La gouvernance en matière de gestion des déchets dans les quatre villes étudiées se caractérise également par la participation limitée de la société civile à la formulation des politiques et au sein des organismes d'exécution, des citoyens au fonctionnement et à l'entretien du système et des petits entrepreneurs à l'exécution des projets. Les ménages n'ont aucune influence sur les systèmes de gestion des déchets solides, car les pouvoirs centraux les consultent rarement à ce sujet. Cette situation est attribuable en partie au fait que peu de citoyens s'intéressent aux affaires municipales en participant à des réunions, en communiquant avec les dirigeants, en demandant à ceux-ci de rendre compte de leurs actes ou même en participant aux élections.

Ce n'est que dans les secteurs blancs de Johannesburg que la population semble consciente de ses responsabilités et présente un taux élevé de participation. Dans les quartiers noirs ainsi que dans les autres villes étudiées, les services irréguliers et inadéquats, les systèmes de collecte qui changent constamment, les relations tendues entre citoyens et conseillers municipaux, la corruption de nombreux dirigeants et le peu d'importance accordée à l'éducation en vue de mobiliser les citoyens ont mené ceux-ci à se désintéresser des activités des conseils et à faire preuve d'une ignorance et d'une apathie généralisées. Par ailleurs, la population n'a pas confiance dans les institutions publiques et leurs activités, et refuse de payer les taxes et cotisations imposées, quand il y en a.

Les organismes communautaires et les organisations non gouvernementales (ONG) jouent un rôle marquant dans d'autres aspects de la vie urbaine, mais interviennent peu dans la gestion des déchets. Récemment, par contre, à cause des graves problèmes des systèmes actuels, ils ont commencé à s'yintéresser, et reçoivent souvent pour cela du financement d'organismes donataires.

Réglementation de la gestion des déchets

Les quatre rapports montrent clairement que les gouvernements des pays en question ont pris des mesures législatives adéquates en ce qui concerne les problèmes environnementaux, y compris la gestion des déchets. Abidjan a adopté un plan-cadre pour la collecte et l'élimination des déchets solides. A Dar es-Salaam, 58 textes de loi traitent de près ou de loin de l'environnement. Il en va de même au Nigeria. Les lacunes des systèmes sont donc attribuables essentiellement à la faiblesse des lois habilitantes et des organismes responsables, et à l'incapacité ou au refus des responsables d'appliquer les lois. Ainsi, la plupart des lois ne sont pas appliquées et certaines sont tout à fait périmées, notamment pour ce qui est des dispositions et sanctions prévues en cas d'infraction. Cette situation est particulièrement troublante car, dans la plupart des villes, la population néglige généralement de se conformer aux lois.

Aide et intervention étrangères en matière de gestion des déchets

Les gouvernements étrangers et les organismes donataires interviennent dans la gestion des déchets dans les quatre villes étudiées. Cette intervention prend diverses formes , qu'il s'agisse de la tenue d'études de faisabilité, de la préparation de plans-cadres, de dons (en espèces ou en nature), du nettoyage d'urgence en cas de crise des déchets solides ou du parrainage d'organismes communautaires et d'ONG. A Abidjan, par exemple, le Programme des Nations unies pour le développement et l'Organisation mondiale de la santé ont contribué à l'élaboration d'un plan-cadre de drainage, et une firme canadienne de consultants (Roche International), avec l'appui de l'Agence canadienne de développement international, a préparé un plan-cadre complet pour la gestion des déchets. Les Japonais sont intervenus à Dar es-Salaam en 1987, où ils ont financé des études sur la production et la gestion des déchets et donné du matériel.· Les Italiens ont donné des camions en 1991. Le nettoyage d'urgence de Dar es-Salaam en 19931994 a été effectué grâce à de l'aide étrangère, et le SDP, qui est parrainé par l'étranger, formule des politiques de gestion des déchets et encourage la société civile à participer à cette gestion. Il y a eu des interventions semblables à Ibadan et à Johannesburg.

Bien que ces interventions soient parvenues à atténuer les problèmes liés aux déchets dans les villes étudiées, elles en ont suscité d'autres :

– elles ont donné lieu à un état de dépendance ;

– comme l'équipement et les machines proviennent de pays différents, il y a des problèmes d'entretien ;

– les autorités municipales proposent et adoptent parfois des stratégies inadéquates ;

– on ne cherche pas à adopter des technologies durables à petite échelle.

Conclusions

Quelles sont les leçons et les conclusions que l'on peut tirer des cas étudiés dans cet ouvrage? Comme nous l'expliquons au chapitre 1, ces études avaient notamment pour objectif d'établir des pratiques exemplaires à l'usage d'autres pays. Voici donc nos conclusions.

Bonne gouvernance

Les rapports sur les quatre villes étudiées démontrent clairement que la plupart des problèmes urbains, particulièrement en ce qui concerne la gestion des déchets, découlent d'une mauvaise gouvernance. Il est donc urgent d'implanter des structures appropriées pour assurer une bonne gouvernance.

L'expérience mondiale a montré que l'institutionnalisation de la bonne gouvernance repose sur la démocratisation et la participation. Pour y parvenir, il faut combler le fossé entre les gouvernants et les gouvernés et favoriser la confiance, l'interdépendance, la réciprocité, la sensibilité et la responsabilité en matière de gouvernance. Il y a donc lieu d'encourager les mesures prises en Afrique du Sud et au Nigeria pour rétablir la démocratie participative. Le renforcement des régimes démocratiques en Tanzanie et en Côte d'Ivoire est également souhaité. L'engagement de la population à l'égard de la démocratie doit être renforcé par les mesures suivantes :

– créer une nouvelle culture politique axée sur l'engagement, l'honnêteté, le dévouement et le service à la population pour les conseillers et responsables municipaux ;

– informer la population pour lui faire comprendre la nécessité de participer pleinement au processus électoral et de s'intéresser à la façon dont gouvernent leurs représentants élus ;

– mettre en place des mécanismes appropriés pour assurer l'élection de personnes compétentes.

Participation des citoyens

Une bonne gouvernance nécessite la collaboration de la population. Bon nombre d'améliorations pourraient être apportées si les dirigeants et les citoyens collaboraient pour déterminer comment régler les problèmes urbains. La population devrait également être encouragée à établir des organismes communautaires locaux pour améliorer la gouvernance urbaine. Les gouvernements centraux devraient encourager les administrations locales, en montrant l'exemple et en adoptant des règlements, à faire preuve de transparence et de responsabilité envers eux-mêmes et envers les citoyens.

Pour que les systèmes de collecte des déchets solides soient efficaces, les citoyens doivent connaître leurs responsabilités quotidiennes, les gestes à adopter, les horaires de collecte, les procédures standard et l'emplacement des sites adéquats. Il y a donc lieu de mettre en place un système étendu d'information du public en ce qui concerne les questions importantes telles que les méthodes de collecte, l'entreposage des déchets et l'acheminement de ceux-ci aux décharges, ainsi que les risques que pose l'indifférence à l'égard des déchets.

Pour assurer un meilleur engagement des citoyens, les installations urbaines de gestion des déchets solides devraient être partagées équitablement. Comme cela se fait actuellement à Johannesburg, il faut veiller à ce que tous les secteurs des villes soient desservis, sans égard au revenu, à la race, à l'emplacement géographique, etc. L'objectif devrait être d'éliminer au moins 90 % des déchets, et il devrait être poursuivi dans toute la ville. La gestion des déchets devrait êtreconsidérée à la fois comme une responsabilité et comme un service d'intérêt public. Tous les résidents devraient pouvoir en profiter.

Revenu des administrations locales

L'expérience des quatre villes révèle qu'aucun système de gestion des déchets ne peut être efficace sans revenus suffisants. Ceux de la plupart des administrations municipales d'Afrique sont très faibles. Les villes doivent produire plus de recettes et gérer leurs ressources plus judicieusement. En outre, les administrations locales devraient jouir de pouvoirs élargis, et disposer des ressources nécessaires pour les exercer.

En effet, il est insensé de confier des responsabilités aux administrations locales sans que celles-ci ne disposent de sources suffisantes de recettes. Comme nous l'avons vu dans le cas du Nigeria, la constitution confie 45 fonctions municipales aux administrations locales. Cependant, l'administration locale d'Ibadan peut remplir moins du quart de ces fonctions car ses revenus sont insuffisants. Ainsi, même si la gestion des déchets incombe à l'administration locale, le gouvernement de l'État doit en assumer la responsabilité car l'administration locale n'a pas les moyens de l'assurer. Cette situation découle du fait que le gouvernement fédéral et les gouvernements des États disposent d'environ 80 % des ressources fiscales produites dans le pays, et de presque toutes les sources possibles de recettes. Par conséquent, les administrations locales du Nigeria dépendent trop des subventions fédérales. La gestion des déchets de même que les autres fonctions des administrations locales demeureront difficiles tant que la formule d'affectation des recettes ne reflétera pas l'importance des administrations locales dans la gouvernance. Il s'agit de confier assez de pouvoirs aux administrations locales et de décentraliser en même temps les ressources.

Rationalisation des responsabilités

A l'heure actuelle, l'un des principaux obstacles à une bonne gouvernance réside dans la fragmentation de la gouvernance, c'est-à-dire la tendance des divers niveaux et organismes gouvernementaux de mettre en œuvre des programmes et des projets en vase clos. Cette situation se traduit par de la confusion, des conflits et des incohérences. Pour la rectifier, il faut envisager l'urbanisme, et notamment la gestion des déchets, de façon globale. Tous les types d'utilisation du territoire (logement, transport, commercialisation, approvisionnement en eau, production et élimination de déchets, etc.) devraient être considérés comme des sous-ensembles d'un grand système de planification, chacun ayant une influence sur les autres. En outre, le cadre institutionnel, particulièrement en ce qui concerne la gestion des déchets solides, devrait être examiné en vue de réduire le nombre d'acteurs institutionnels et d'éclaircir leurs responsabilités. Ceux qui restent devraient se réunir pour rationaliser leurs pouvoirs et leurs rôles afin d'améliorer le rendement.

Cela ne sera possible que si les gouvernements africains croient en la démocratie, en la décentralisation et en la délégation de pouvoirs. Le régime institutionnel d'Abidjan représente un modèle dont les autres villes pourraient s'inspirer pour améliorer la gouvernance locale. L'expérience de Johannesburg illustre également ce qui peut arriver lorsque les administrations locales constituent un niveau de gouvernement à part entière.

Participation du secteur privé à la gestion des déchets

Compte tenu des contraintes financières et de l'infrastructure limitée avec lesquelles doit composer le secteur public par rapport à ses besoins, le secteur privé devrait participer à la gestion des déchets selon une démarche participative réciproque.

L'expérience d'Abidjan, d'Ibadan et de Dar es-Salaam a également montré que le secteur privé, malgré ses divers problèmes, gère les déchets plus effica-cement que le secteur public. Même à Johannesburg, où le secteur public s'est révélé efficace dans les secteurs blancs, tout indique que l'élargissement des services à d'autres secteurs de la ville comporte des difficultés. Ainsi, il faudrait assurer une participation accrue du secteur privé. Dans les villes où ce dernier intervient déjà, les gouvernements devraient rationaliser leur réglementation afin de l'adapter aux problèmes locaux et d'améliorer son application et sa durabilité. En outre, il est souhaitable d'obtenir la participation de petits exploitants, notamment pour la collecte à domicile et l'acheminement des déchets aux décharges. A l'heure actuelle, on insiste sur l'intensification de la collecte plutôt que sur la résolution des problèmes de production et d'élimination. Les petits exploitants auront besoin de formation et devront être encouragés à partager leur savoir-faire, leur expérience et leurs installations afin d'améliorer leurs capacités.

Application de la loi et harmonisation des institutions

Dans les quatre villes étudiées, les gouvernements et administrations ont adopté un ensemble de lois, politiques et programmes pour surveiller et protéger l'environnement. Cependant, on sait que les gouvernements africains présentent des lacunes en matière d'application. Pour renverser cette tendance, ces gouvernements devraient revoir leurs textes de loi pour déterminer leur pertinence, leur opportunité et leur applicabilité, et assurer l'application stricte de ceux qui sont effectivement pertinents.

Les aspects suivants méritent une attention particulière :

– Les règlements des administrations locales sur l'élimination des déchets, quand ils existent, sont plutôt mal coordonnés entre eux et avec les lois nationales. Il est donc souhaitable d'harmoniser les règlements locaux et nationaux de gestion des déchets solides ainsi que les activités connexes.

– Des stratégies devraient être élaborées en vue d'assurer une application plus efficace de toutes les lois. Ces stratégies pourraient comprendre des mesures d'encouragement, comme des allégements fiscaux pour les exploitants, des installations sociales pour les collectivités et des campagnes de sensibilisation menées par les médias.

Recouvrement des coûts

Dans les villes étudiées, les systèmes de gestion des déchets ne sont pas durables, notamment en raison de la capacité limitée des organismes publics et des institutions responsables de recouvrer leurs fiais de fonctionnement. A Abidjan, où le degré d'efficacité est le plus élevé parmi les villes étudiées, 30 % seulement du coût de la gestion des déchets est recouvré. Dans les autres villes, ce taux ne dépasse pas 5 %. Comme il sera de plus en plus difficile pour ces institutions et organismes africains de trouver d'autres sources de financement, les villes devront étudier la situation en profondeur et prendre des mesures en vue d'augmenter considérablement le recouvrement des coûts par des fonds et des taxes, comme le Fonds national de l'eau d'Abidjan et les taxes de gestion des déchets des pays industrialisés.

L'expérience d'autres pays du monde (notamment de l'Égypte et du Zimbabwe, deux pays d'Afrique) a démontré que les gens sont disposés à payer pour des services de collecte des déchets s'ils sont efficaces et si un mécanisme adéquat de perception des fiais et de sanction en cas de défaut de paiement est établi. Les cas étudiés permettent de conclure que le gouvernement devrait encourager la privatisation de la gestion des déchets, notamment la collecte, le transport, l'élimination et le recyclage. L'expérience a montré que chaque entreprise de collecte du secteur privé devrait être affectée à un mélange de quartiers riches et pauvres, afin que toute la ville soit desservie. Il y aurait alors une certaine forme d'interfinancement, les secteurs les plus riches payant des tarifs plus élevés que les secteurs pauvres.

Technologies abordables et durables

La non-durabilité des systèmes de gestion des déchets de ces villes africaines découle également du fait qu'ils nécessitent beaucoup d'investissements car ils recourent à des technologies importées, qu'il est difficile d'entretenir au niveau local. Il faut renverser cette tendance et mettre l'accent sur l'utilisation de technologies à petite échelle accessibles localement, comme les voitures à bras, les appareils manuels et les brouettes. La forte dépendance envers le matériel importé dans les villes étudiées porte à conclure que les manuels et la formation fournis à l'occasion de la décennie internationale de l'environnement des Nations .unies (1970–1980), qui proposaient des technologies de collecte peu exigeantes et à petite échelle, sont restés lettre morte.

Bien que les véhicules lourds conventionnels soient toujours nécessaires pour recueillir les déchets aux points de collecte et les acheminer aux décharges, cette méthode nécessite trop d'investissements et de fiais d'entretien. Le problème réside surtout dans la collecte des déchets dans les localités très difficiles d'accès (des ménages aux dépotoirs, et des dépotoirs aux points de collecte) et dans le recyclage, notamment le tri, le déchiquetage, le séchage, la digestion, la pulvérisation, le bouletage et la gazéification. Il faut absolument construire sur place du matériel pratique, efficace et abordable fondé sur des technologies appropriées : appareils manuels, bennes, chariots, camions sur mesure, tamis oscillants, séchoirs, cuves de digestion, chambres de gazéification, etc.

Une étude menée récemment au Nigeria (CASSAD, 1998) a révélé que des organismes compétents de conception et de génie de la production du secteur public sont en mesure de fabriquer du matériel abordable, notamment les suivants : Nigerian Institute for Oil Palm Research, Benin ; Project Development Institute, Enugu ; Federal Institute of Industrial Research, Oshodi, Lagos ; National Centre for Agricultural Mechanisation, Ilorin ; Centre for Automotive Design and Development, Zaria4. L'étude menée au Nigeria (CASSAD, 1998) a également permis de relever des entreprises compétentes du secteur privé dans les domaines du génie, de la conception et de la fabrication : Systemax Foundries and Engineering Works, Benin ; Aminex Industrial Machines Limited, Enugu ; Engineering Express Enterprises Limited, Enugu ; Nigeria Machine Tools Limited, Osogbo ; Addis Engineering Limited, Isolo, Lagos ; FOBA Engineers Limited, Ibadan ; Mesba Engineering Company, Ilorin ; Arewa Metal Containers Limited, Kaduna. Dans le domaine très spécialisé des services d'ingénierie, qui comprend l'exploitation de fonderies, le finissage et les essais, l'étude a relevé l'Africain Regional Centre for Design and Engineering Manufacture, Ibadan.

4. Ces organismes et les entreprises qui suivent sont donnés à titre d'exemples, et ne sont pas nécessairement recommandés ni par l'auteur ni par le CRDI.

Des études approfondies semblables menées dans d'autres pays africains permettraient sans doute de révéler d'autres possibilités encore inexploitées en Afrique en vue de réduire la dépendance des pays africains à l'égard du matériel importé. Il faut identifier ces possibilités dans chaque pays, et prendre des mesures concertées pour en profiter.

Pratiques de recyclage et options

L'expérience des quatre pays étudiés a révélé que le problème de la gestion des déchets réside en bonne partie dans le fait que les déchets ne sont pas considérés comme une ressource. C'est pourquoi le recyclage est très rudimentaire. Les organismes gouvernementaux ne s'y sont même pas encore intéressés. Certaines entreprises privées font déjà du recyclage à différents degrés, grâce aux activités parallèles des récupérateurs. Dans tous les principaux secteurs des quatre villes, les récupérateurs jouent un rôle très important Ils vont d'un dépotoir à l'autre pour y recueillir les objets utiles, qu'ils revendant au public et aux quelques industries de recyclage des déchets.

Au Nigeria, la National Directorate of Employment (direction nationale de l'emploi –NOE) encourage les activités de ces récupérateurs. Elle leur a conseillé de former une coopérative pour obtenir un prêt ; une telle structure faciliterait le recouvrement. Les récupérateurs ont formé un syndicat, la Raw Material Waste Collection Association. Il est urgent d'encourager le recyclage industriel des déchets en Afrique. Il gagne progressivement en popularité et touche deux grandes catégories de matériaux : les produits manufacturés (plastiques, textiles, verre, métaux) et les matières organiques (biomasse, restes d'aliments, déjections animales, os, sang, etc.).

Les déchets solides (débris de fer, aluminium, alliages, verre, plastiques, polyéthylène) de même que les déchets d'élevage (sang, cornes, sabots) font l'objet d'un important commerce parallèle et légèrement structuré. L'exploitation de la biomasse (et notamment de la jacinthe d'eau et de la laitue d'eau), qui peut se révéler une source utile d'énergie et de fibres de remplacement pour l'industrie du papier, pourrait donner naissance à des entreprises. Le compostage (pour la production d'engrais organiques) et la production de biogaz (à partir de matières végétales et de déjections animales) sont presque totalement négligés. Ils peuvent réduire le déboisement causé par la récolte de bois de chauffage, et ils produisent des engrais organiques et du méthane de façon respectueuse pour l'environnement.

Selon des indications recueillies au Caire, à Manille et à Ibadan (CNUEH, 1986, 1989 ; Administration locale-Mahdi et Mashhur, 1989 ; Assaad, 1991 ; CASSAD, 1998), le recyclage industriel des déchets peut se révéler rentable. Tous les niveaux d'administration de même que les organismes de développement présents en Afrique appuient activement cette activité. En plus de contribuer à assainir l'environnement, le recyclage contribue à créer des emplois, à produire des recettes et à réduire la pauvreté. Le gouvernement, par ses programmes de développement économique, devrait favoriser les initiatives et propositions du secteur privé en vue de recycler des déchets industriels.

Le recyclage des déchets industriels devrait également recevoir l'appui des organismes de développement, tels que le Programme des Nations unies pour le développement, l'Organisation des Nations unies pour le développement industriel, le Fonds des Nations unies pour l'enfance, le Fonds des Nations unies pour les femmes, le Fonds des Nations unies pour la population, l'Organisation internationale du travail et la Fondation Ford. Les ONG et le secteur privé devraient être encouragés, par des programmes de microfinancement, à créer de petites entreprises de recyclage des déchets industriels. Une étude menée récemment par le Centre for African Settlement Studies and Development sur la faisabilité du recyclage au Nigeria (CASSAD, 1998) a révélé que le volume de déchets produits dans ce pays permettrait la création de plus de 5 000 entreprises de recyclage. Il suffit de prévoir des mesures d'encouragement, du microfinancement pour le démarrage et l'adoption d'une politique favorable, et d'obtenir la collaboration du secteur public et des organismes de la société civile.

Un recyclage efficace des déchets dans les villes africaines requiert la participation concertée de la collectivité. Les principaux enjeux sont la politique de gestion des déchets, la réduction de la production de déchets, l'intensification des activités de tri à la source, la promotion des petites entreprises de recyclage et l'intégration de la récupération des ressources dans le système structuré de gestion des déchets. Pour assurer l'efficacité du recyclage et de la réutilisation des déchets, il faut avant tout réduire la production de déchets. Il faut identifier les principaux acteurs concernant ces enjeux et établir les niveaux de mise enœuvre. La stratégie de recyclage nécessite essentiellement des campagnes de sensibilisation du public, la mobilisation de la collectivité, des mesures d'encouragement, de la formation et de la promotion. Un document d'Habitat (CNUEH, 1986), publié à la suite d'un atelier régional, propose des lignes directrices pour favoriser la participation communautaire.

On ne peut faire une évaluation économique précise du recyclage et de la réutilisation, car certains de leurs avantages économiques sont difficiles à quantifier, de même que les avantages indirects comme la réduction des &ais de santé et des coûts occasionnés par la pollution. Les industries, par contre, en tirent des avantages directs et quantifiables. Le recyclage des déchets solides nécessite beaucoup de main-d'œuvre ; or, les centres urbains des pays en développement comptent de nombreux travailleurs migrants et une main-d'œuvre peu qualifiée, qui peuvent être mis à contribution pour créer des emplois et réduire la pauvreté.

Les produits recyclés ont peu d'incidence sur l'environnement. La qualité de l'environnement urbain repose directement sur l'état de santé général desrésidents. Les personnes qui font du recyclage et de la réutilisation forment un groupe à risque élevé ; elles souffrent d'une variété de problèmes de santé, comme une irritation des yeux, des maladies respiratoires et d'autres affections causées par la fumée, la poussière, des éléments pathogènes aéroportés et des parasites, de même que des maladies de la peau.

Nombre de petites entreprises font appel aux recycleurs et aux récupérateurs pour obtenir des matières premières à bon marché. Pour comprendre les dimensions sociales de cette forme de récupération des déchets, il faut reconnaître que le recyclage joue un rôle central dans la vie des pauvres. Les personnes qui s'occupent de recyclage sont des chefs de ménage, des collecteurs à domicile, des éboueurs, des récupérateurs de rue ainsi que des négociants en déchets. Les récupérateurs sont les plus pauvres, et ce sont ceux qui dépendent le plus des intermédiaires, qui les exploitent. Ils sont victimes de discrimination, et on les considère souvent comme des voleurs et des délinquants. Une étude menée par Habitat a permis d'établir le revenu annuel des différents groupes de recycleurs (en dollars américains) : récupérateurs, 44 ; vendeurs de rue, 60 ; travailleurs des petites entreprises de recyclage à domicile, 100 ; négociants, 385. Cette distribution n'est pas équitable. On estime qu'environ l % des citadins vivent du recyclage (CNUEH, 1989). Une mise en valeur de ce secteur permettrait de doubler l'emploi et d'améliorer les conditions de travail.

Les initiatives visant à mobiliser la collectivité et à obtenir sa participation doivent donc porter sur certains des aspects suivants :

réduction des déchets : on peut parvenir à cet objectif en modifiant les habitudes de consommation et le mode de vie des citoyens, en utilisant plus de matériaux recyclables et en interdisant l'importation de déchets ;

intensification du tri à la source : cette intensification est possible si l'on mobilise, sensibilise et appuie les ménages et le secteur parallèle pour les inciter à entreprendre des projets simples de recyclage. Cette démarche permettra de créer des emplois et d'assainir l'environnement ;

promotion des petites entreprises de recyclage : l'amélioration du rendement, l'acquisition de connaissances et l'amélioration de la qualité marchande des déchets faciliteraient cette promotion ;

intégration du recyclage dans le système structuré de gestion des déchets : on pourrait parvenir à cette intégration en améliorant la communication et les capacités de gestion et en élaborant des instruments de surveillance.

Les principaux acteurs sont les suivants:

consommateurs et industrie : ils influent sur la quantité et la nature des déchets produits ;

gouvernement : il établit des priorités en adoptant des lois et règlements qui visent les consommateurs et l'industrie.

Tableau 1
Modes de gestion des déchets à Abidjan, Ibadan, Dar es-Salaam et Johannesburg

 

Abidjan

Ibadan

Dar es-Salaam

Johannesburg

Méthodes d'entreposage

Non normalisées ; surtout au moyen de barils et de sacs de plastique (les sacs-poubelle proposés en 1995 ont été impopulaires).

Non normalisées ; seaux, sacs de plastique, barils.

Nombreuses : sacs de papier et de plastique, seaux de plastique, paniers de bambou, etc.

Normalisées dans les secteurs blancs : sacspoubelle (deux par poubelle) ; non normalisées dans les quartiers noirs.

Acheminement des domiciles aux dépotoirs puis aux décharges

Par un entrepreneur dont le conseil municipal a retenu les services ; les résidents recourent également à de petits entrepreneurs.

Par les résidents et des entreprises auxquelles ils font appel.

Par les résidents ; également par la ville ou les entrepreneurs, selon l'emplacement

Ramassage et acheminement aux points de collecte par la ville ou les entreprises privées.

Gestion des décharges

Postes de transfert situés un peu partout dans la ville. Il est arrivé que l'entrepreneur, ASH International, les ferme et achemine les ordures ménagères directement aux décharges.

50 bennes déposées à des intersections fréquentées (fournies par l'IUSC).

Utilisation de bennes à quelques endroits ; elles sont peu nombreuses, ce qui favorise l'apparition de dépotoirs non autorisés.

500 000 points de collecte, la plupart dans les anciennes banlieues blanches. Utilisation de conteneurs à roues de 240 litres. Gestion relevant de la ville. Dans les bidonvilles, la ville fournit un conteneur de 5,5 m3 par groupe de 200 baraques.

Acheminement des déchets

Camions compacteurs ; bennes et chariots élévateurs

Chargés mécaniquement dans des camions à ordures. Les déchets renversés sont enlevés manuellement.

Chargement manuel des camions à benne basculante (beaucoup de déchets renversés). Quelques camions pour le ramassage des bennes.

Chargement mécanique. Les conteneurs sont vidés dans les compacteurs au moyen d'un dispositif de levage (peu de déchets renversés).

Fréquence de collecte

Censée être hebdomadaire ; parfois toutes les deux ou trois semaines

Censée être hebdomadaire ; parfois mensuelle.

Très irrégulière. Une très faible partie des déchets sont ramassés.

Hebdomadaire dans les secteurs blancs ; toutes les deux ou trois semaines dans les quartiers noirs.

Élimination des déchets

l décharge (plutôt un dépotoir car les déchets ne sont pas traités et des déchets biomédicaux y sont acheminés).

1 décharge (3 autres prévues)

1 décharge (un dépotoir plutôt qu'une décharge contrôlée).

7 décharges contrôlées.

Recyclage

Négligeable ; ni organisé ni reconnu

Négligeable.

Négligeable.

Négligeable.

Degré de privatisation

Généralement privatisé

Certaines activités sont privatisées ; la gestion relève surtout de l'État.

Privatisation dans quelques secteurs depuis 1994 ; certaines activités relèvent de l'État.

La gestion relève surtout de l'État ; certains services privatisés dans les quartiers noirs ; approche communautaire.

Source : Enquêtes sur le terrain menées dans les quatre villes, 1995–1996.
Rem. : IUSC : Ibadan Urban Sanitation Committee.

Les interventions devraient comporter les éléments suivants :

sensibilisation : une meilleure sensibilisation aux problèmes environnementaux et de santé publique contribuerait à promouvoir des améliorations structurelles et un comportement respectueux de l'environnement. Les principaux acteurs devraient ainsi changer leur comportement et leur attitude afin de favoriser la participation de la collectivité aux activités de recyclage et de réutilisation ;

mesures d'encouragement : elles devraient inciter la population et la collectivité à adopter des pratiques exemplaires de gestion des déchets. Il pourrait s'agir de prix et de certificats décernés aux collectivités, aux ONG et aux organismes communautaires qui font preuve d'excellence dans leurs méthodes et innovations touchant la gestion des déchets ;

mesures législatives restrictives : si la sensibilisation et les mesures d'encouragement échouent, il est toujours possibles de légiférer. Cette possibilité exige également de la surveillance et des sanctions, qui occasionnent des coûts élevés pour le gouvernement ;

campagnes de sensibilisation du public : elles permettent de réduire la production de déchets et de promouvoir le recyclage et la réutilisation. Les campagnes efficaces recourent à des moyens traditionnels et modernes de communication communautaire visant les jeunes, qui peuvent être encouragés à modifier leur mode de vie, les grands médias et les réunions de quartier. Ces campagnes devraient avoir lieu tout au long d'un projet et comprendre de l'éducation et de l'information. La classe politique et les décideurs locaux devraient y participer. Le gouvernement, les ONG et les établissements d'enseignement pourraient également y contribuer ;

mobilisation de la collectivité : elle vise à promouvoir le tri des déchets et une collecte efficace, qui peuvent donner des résultats immédiats et à moyen terme. Des réunions de quartier et des encouragements financiers suscitent la participation. Avant de déterminer la méthode de mobilisation, il faut se demander qui devraient être les participants, ce qu'on attend d'eux et le degré de participation désiré. L'appui de l'organisme responsable de la gestion des déchets devrait être obtenu, et la population devrait participer au projet dès le départ. La mobilisation aurait notamment pour résultat l'établissement d'associations de quartier. Par ailleurs, le niveau de scolarité de la collectivité devrait être assez élevé pour encourager le tri des déchets. La participation communautaire repose sur la compréhension des services ; elle doit commencer dans les quartiers, mais doit toujours être coordonnée par les autorités locales. Dans les secteurs à faible revenu, le tri des déchets dans les ménages est très rentable. La ville peut organiser la collecte à domicile de matériaux réutilisables, ou encore les résidents peuvent apporter le papier, le verre et les bouteilles de plastique recueillies aux dépôts de transfert, où des négociants auront un stand ou un étal ;

formation et promotion : le transfert du savoir-faire local devrait constituer une importante composante de ces programmes, qui devraient comprendre de la formation concernant les techniques de recyclage, le marketing, la communication et la santé. Les personnes qui exploitent de petites entreprises de recyclage sont généralement mal informées ; il y a donc lieu de rectifier cette situation. La réussite du recyclage repose sur la qualité marchande du produit, car les gens préfèrent les produits faits à base de matériaux neufs. Cette attitude ne changera que si l'on assure des services adéquats ; à cet égard, l'autorité locale devrait jouer un rôle important. La formation et la promotion devraient aboutir à des plans d'action, qui nécessitent des installations pour des projets pilotes, de l'aide à court et à long terme et du soutien fmancier.

Mesures de santé de sécurité et de prévention

Comme nous l'avons déjà vu, la récupération représente un aspect important du recyclage au Nigeria. Elle comporte plusieurs avantages :

– elle permet aux récupérateurs de gagner leur vie en vendant des articles récupérés ;

– elle réduit le volume de déchets solides ;

– elle réduit le coût de la collecte et de l'élimination des déchets solides ; – elle alimente certaines industries en matières premières ;

– elle procure de l'emploi à de jeunes chômeurs ; .

– elle ouvre la voie à la construction d'usines de recyclage perfectionnées.

Cependant, la récupération a des effets néfastes sur la santé des récupérateurs, qui souflTent d'irritation des yeux, de maladies respiratoires causant de la toux et des éternuements, de maladies de la peau comme la gale, de blessures légères causées par des éclats de bouteilles ou des objets pointus présents dans les décharges, de maux de tête causés par la chaleur du soleil et de maux de dos, car ils sont le plus souvent penchés pour travailler.

Comme les récupérateurs contribuent à la gestion des déchets :

– –le gouvernement devrait leur procurer une aide financière ;

– ils devraient former une coopérative par laquelle ils pourraient obtenir des prêts ;

– le gouvernement devrait reconnaître leur syndicat et lui donner des assises

– légales ;

– ils devraient recevoir une formation afin de devenir plus rentables ;

– ils devraient porter un uniforme comportant par exemple une salopette, des bottes de brousse, des gants, un casque et un masque, afin de maintenir leur dignité ;

– ils devraient recevoir une formation de base en santé (premiers soins) pour savoir quoi faire en cas de blessure légère.

Les personnes peuvent entrer en contact direct ou indirect avec les déchets solides à différentes étapes de leur manutention et de leur traitement. Parmi les groupes à risque, on relève les populations des secteurs non desservis (surtout les enfants d'âge scolaire), les travailleurs du secteur de la gestion des déchets, les travailleurs des établissements qui produisent des substances infectieuses ou toxiques, les personnes qui vivent à proximité d'installations d'élimination ou de recyclage et les personnes qui vivent près de décharges. Les problèmes de santé les plus courants sont les suivants :

infections : il peut s'agir d'infections de la peau et du sang résultant du contact direct avec des déchets et avec des blessures infectées, d'infections des yeux et de l'appareil respiratoire découlant de l'exposition à des poussières infectées, de zoonoses causées par des morsures d'animaux sauvages ou errants qui se nourrissent de déchets et d'infections entériques transmises par des insectes qui se trouvent dans les déchets ;

maladies chroniques : relevons les maladies respiratoires et les cancers résultant de l'exposition à la poussière et à des composés dangereux ;

blessures accidentelles : ces blessures et lésions peuvent comprendre des problèmes squelettiques causés par la manutention d'objets lourds, des blessures causées par des objets pointus et qui s'infectent, des empoisonnements et brûlures résultant du contact avec de petites quantités de déchets chimiques dangereux mélangés avec les autres déchets, et des brûlures et autres blessures causées par des accidents ou des explosions de méthane dans les décharges.

Pour prévenir ces problèmes, il est souhaitable de porter des gants, des bottes hautes, un masque, un casque et des lunettes. Dans certains cas, il pourrait être utile d'éviter les appareils qui produisent beaucoup de chaleur ou d'utiliser des dispositifs de protection contre la chaleur. L'inhalation de substances toxiques peut être réduite grâce à l'usage de bouteilles d'oxygène ou d'un masque protecteur. Une modification des heures de travail pourrait également être souhaitable, selon l'exposition à éviter.

Les auteurs

Koffi Attahi, urbaniste ivoirien, a obtenu un doctorat en urbanisme à l'Université de Montréal. Il a été directeur du Centre de recherches architecturales et urbaines du département de géographie de l'Université d'Abidjan. Il est actuellement conseiller régional au Bureau régional de l'Afrique du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD, auprès du Programme de gestion urbaine du PNUD et de la Banque mondiale à Abidjan). Il a mené des recherches sur l'urbanisation et la gestion urbaine dans les pays francophones subsahariens et a travaillé comme expert-conseil pour le Centre des Nations unies pour les établissements humains (Habitat), la Banque mondiale et les organismes de développement international du Canada, de l'Allemagne et des États-Unis. Il a contribué à deux monographies d'Habitat sur la gestion urbaine: Metropolitan Planning and Management in the Developing World, Abidjan and Quito (1992) et The Management of Secondary Cities in Sub-Saharan Africa (1991), de même qu' à Villes africaines en crise (1986), publié sous la direction de Richard Stren et Rodney White.

David Hutt est directeur intérimaire du service des déchets solides du Greater Johannesburg Transitional Metropolitan Council, Johannesburg (Afrique du Sud).

J.M. Lusugga Kironde est titulaire d'un doctorat en économie, avec spécialisation en économie foncière. Il est actuellement maître de conférences en économie foncière à l'Ardhi Institute, Dar es-Salaam (Tanzanie). M. Kironde conseille le gouvernement de Tanzanie en matière de développement urbain et d'utilisation du sol.

J.A. Kumuyi, expert du développement régional, est directeur de programme au Centre for African Settlement Studies and Development (CASSAD), une organisation non gouvernementale (ONG). M. Kumuyi est titulaire d'un baccalauréat ès arts et d'un doctorat en géographie de l'Université d'Ibadan. Après avoir travaillé pendant de nombreuses années comme consultant dans le secteur privé, il s'est joint au Nigerian Institute of Social and Economic Research (NISER) comme chercheur, où il est devenu professeur chercheur en 1989. Il a été chef du Business and Industrial Consultancy Department du NISER pendant plusieurs années et consultant auprès du gouvernement fédéral et des États du Nigeria concernant le développement économique et la gestion urbaine.

Adepoju G. Onibokun est titulaire d'un doctorat en urbanisme et en aménagement régional de l'Université de Waterloo (Canada). Il a siégé dans de nombreux comités consultatifs fédéraux et régionaux sur les questions urbaines au Nigeria. Il est le premier professeur nigérian d'urbanisme et d'aménagement régional et a enseigné dans plusieurs universités au Nigeria et l'Université d'Illinois à Urbana.1I a également été consultant pour l'Organisation mondiale de la santé, la Banque mondiale et l'Organisation des Nations unies sur les questions liées à l'urbanisme, à l'aménagement régional, au développement de l'infrastructure et à la création d'institutions. M. Onibokun est fondateur du CASSAD, dont il est le directeur général. Il a écrit plus de 200 ouvrages et articles.

Mark Swilling est directeur de la School of Public and Development Management, Faculty of Management, Université de Witwatersrand, Johannesburg (Afrique du Sud). Il a été chargé de projets de développement pour Planact, après avoir été maître de conférences au département des études politiques de l'Université de Witwatersrand et chargé de recherche de son Centre for Policy Studies. Il a participé à la conception et à l'établissement de Planact, de la School of Public and Development Management, de la Community Bank, de la Metropolitan Chamber et de nombreuses ONG de développement qui contribuent à la construction de logements sociaux. Il a publié plusieurs ouvrages et plus de 50 articles sur la nature de l'État de l'Afrique du Sud, les mouvements communautaires, les caractéristiques politiques des syndicats indépendants, le système d'administration locale de l'Afrique du Sud et les solutions alternatives, la gestion de la transition dans les villes, les politiques de transport, les relations internationales de l'Afrique du Sud et la dynamique des transitions non révolutionnaires vers la démocratie. Sa thèse de sociologie (Université de Warwick au Royaume-Uni) est intitulée Urban Control and Changing Forms of Political Conflict in the Western Cape with Special Reference to Uitenhage, 1979–1986. Il s'intéresse actuellement à la gestion du changement dans les administrations publiques et à la création de nouvelles formes de gouvernance démocratique dans les secteurs public et communautaire.

Sigles utilisés

ARNUM

African Research Network for Urban Management

CASSAD

Centre for African Settlement Studies and Development

CIAPOL

Centre ivoirien anti-pollution

CRDI

Centre de recherches pour le développement international [Canada]

CWRSC

Central Witwatersrand Regional Services Council [Afrique du Sud]

DAI

Département d'assainissement et d'infrastructure [Côte d'Ivoire]

DCC

Dar es-Salaam City Council (conseil municipal de Dar es-Salaam) [Tanzanie]

DCGTx

Direction et contrôle des grands travaux [Côte d'Ivoire]

DFR

Durban Functional Region (région fonctionnelle de Durban) [Afrique du Sud]

DSSD

Dar es Salaam Sewage and Sanitation Department (service des égouts et de l'assainissement de Dar es-Salaam) [Tanzanie]

EPC

Environmental Protection Commission (commission de protection de l'environnement) [Nigeria]

FEPA

Federal Environmental Protection Agency (agence fédérale de protection environnementale) [Nigeria]

FNA

Fonds national pour l'assainissement [Côte d'Ivoire]

FNE

Fonds national de l'eau [Côte d'Ivoire]

GJTMC

Greater Johannesburg Transitional Metropolitan Council (conseil métropolitain de transition du grand Johannesburg) [Afrique du Sud]

GRA

Government-reserved area (zones réservées par le gouvernement) [Nigeria]

GURI

Global Urban Research Initiative

IUSB

Ibadan Urban Sanitation Board (conseil d'hygiène urbaine d'Ibadan) [Nigeria]

IUSC

Ibadan Urban Sanitation Committee (comité d'hygiène urbaine d'Ibadan) [Nigeria]

MLHUD

Ministry of Lands, Housing and Urban Development (ministère des Terres, du Logement et du Développement urbain) [Tanzanie]

MSS

Metropolitan Sub-Structure (structures métropolitaine auxiliaires) [Afrique du Sud]

MTI

Ministry of Trade and Industries (ministère du Commerce et des Industries) [Tanzanie]

MWEM

Ministry of Water, Energy and Minerals (ministère de l'Eau, de l'Énergie et des Minéraux) [Tanzanie]

NDE

National Directorate of Employment (direction nationale de l'emploi) [Nigeria]

NEMC

National Environmental Management Council (conseil national de la gestion environnementale) [Tanzanie]

NISER

Nigerian Institute of Social and Economic Research

NLGNF

National Local Government Negotiating Forum (tribune nationale de négociations locales) [Afrique du Sud]

NUWA

National Urban Water Authority [Tanzanie]

ONG

Organisation non gouvernementale

PIB

Produit intérieur brut

RDP

Reconstruction and Development Programme (programme de reconstruction et de développement) [Afrique du Sud]

SDP

Sustainable Dar es Saalam Project (projet durable de Dar es-Salaam) [Tanzanie]

SETU

Société d'équipement des terrains urbains [Côte d'Ivoire]

SIIC

Service d'inspection des installations classées [Côte d'Ivoire]

SITA

Société industrielle des transports automobiles [France]

SITAF

Société industrielle des transports automobiles africains [Côte d'Ivoire]

SODECI

Société des eaux de Côte d'Ivoire

TEOM

Taxe d'enlèvement des ordures ménagères [Côte d'Ivoire]

TLC

Transitional Local Council (conseil local de transition) [Afrique du Sud]

TMC

Transitional Metropolitan Council (conseil métropolitain de transition) [Afrique du Sud]

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Table des matières

Avant-propos, par Luc J.A. Mougeot

5

Préface, par Adepoju G. Onibokun

7

1. La gouvernance et la gestion des déchets en Afrique, par Adepoju G. Onibokun et A.J Kumuyi

9

2. Abidjan, Côte d'Ivoire, par Koffi Attahi

17

3. Ibadan, Nigeria, par Adepoju G. Onibokun et A.J Kumuyi

53

4. Dar es-Salaam, Tanzanie, par J.M Lusugga Kironde

101

5. Johannesburg, Afrique du Sud, par Mark Swilling et David Hutt

171

6. Synthèse et recommandations, par Adepoju G. Onibokun

217

Les auteurs

239

Sigles utilisés

241

Bibliographie

243

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Éditions du CRDI

Le Débat des semences

Volume 1 : Solutions politiques pour les ressources génétiques (Un ·brevet pour la vie revisité)

Groupe Crucible II

Le Débat des semences informe des changements survenus, sur le plan scientifique, politique et environnemental, depuis la publication en 1994 de Un Brevet pour la vie, un ouvrage qui a fait date. Le volume 1 offre aux décideurs une description claire des faits, des luttes et des débats sur la propriété, la conservation et l'échange des ressources génétiques.

CRDI, 2001, ISBN : 0-88936-934-8
120 p., broché

Cultiver la paix

Conflits et collaboration dans la gestion des ressources naturelles

sous la direction de Daniel Buckles

Depuis bien longtemps, les ressources naturelles, comme les terres, l'eau et les forêts, sont à l'origine de nombreux conflits à travers le monde. Le livre présente des essais sur les dimensions culturelles des conflits, sur des interventions pour rétablir la paix et propose des solutions politiques pour demeurer à l'écoute des intervenants.

CRDI, 2001, ISBN : 0-88936-945-3
300 p., broché

Cités horticoles en sursis?

L'agriculture urbaine dans les grandes Mayes au Sénégal
sous la direction de Safiétou Touré et Abdou Salam Fall

Face à la crise des systèmes ruraux de production agricole, l'agriculture urbaine, notamment l'horticulture et l'élevage, est devenue une activité en pleine expansion. Cet ouvrage étudie la zone des Niayes du Sénégal, cette frange littorale étroite et fertile qui s'étend entre Dakar et Saint-Louis et qui constitue, depuis plusieurs décennies, la principale source d'approvisionnement en produits horticoles du Sénégal.

CRDI, 2001, ISBN : 0-88936-936-4
120 p., broché

Ârmer les villes contre la faim

Systèmes alimentaires urbains durables
sous la direction de Mustafa Koc, Rad MacRae, Luc J.A. Mougeot et Jennifer Welsh

Cet ouvrage traite des systèmes alimentaires locaux et des moyens d'améliorer la disponibilité et l'accessibilité des denrées alimentaires pour les populations urbaines. Il présente des méthodes permettant d'améliorer l'agriculture communautaire et d'accroître la collaboration entre les populations urbaines et rurales. Il explore le rôle que les structures existantes de marketing et de distribution peuvent jouer pour améliorer l'accessibilité, les systèmes de distribution alimentaire en émergence et leur apport éventuel à l'élimination de la faim dans les villes. Enfin, il examine les structures sous-jacentes à la pauvreté et aux inégalités et traite des systèmes alimentaires d'urgence, tels que les banques alimentaires.

CRDI, 2000, ISBN : 0-88936-913-5
260 p., broché

La mondialisation au banc des accusés

La condition humaine et la civilisation de l'information
Farhang Rajaee

Ce livre récuse le point de vue conventionnel qui établit un rapport d'égalité entre la mondialisation et l'expansion du système économique capitaliste. En brossant un large portrait historique et holiste, l'auteur offre un point de vue sur la mondialisation qui est à la fois multidisciplinaire et multiculturel.

CRDI, 2001, ISBN : 0-88936-938-0
180 p., broché

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ÉDITIONS KARTHALA

Collection Méridiens

L'Afrique du Sud, Georges Lory

L'Algérie, Catherine Belvaude

Le Bénin, Philippe David

La Bolivie, Christian Rudel

Le Botswana, Marie Lory

Le Burkina Faso, Frédéric Lejéal

La Côte d'Ivoire, Philippe David

Le Cambodge, Soizick Croche

La Colombie, Catherine Fougère

Les Comores, Pierre Vérin

Cuba, Maryse Roux

Djibouti, André Laudouze

Les Émirats arabes unis, Frauke Heard-Bey

L'Équateur, Christian Rudel

L'Estonie, S. Champonnois et F. de Labriolle

Le Ghana, Patrick Puy-Denis

La Guinée, Muriel Devey

Les îles Canaries, Attilio Gaudio

L'Inde, Kamala Marius-Gnanou

L'Indonésie, Robert Aarssé

La Jordanie, Marc Lavergne

Le Laos, Carine Hann

La Lettonie, S. Champonnois et F. de Labriolle

La Lituanie, Leonas Teiberis

Madagascar, Pierre Vérin

Le Malawi, Philippe L'Hoiry

Le Maroc, J.-P. Lozato-Giotard

Mayotte, Guy Fontaine

Le Mexique, Christian Rudel

La Mongolie, Jacqueline Thevenet

Le Mozambique, Daniel Jouanneau

Le Nigeria, Marc-Antoine de Montclos

La Nouvelle-Calédonie, Antonio Ralluy

Le Paraguay, Christian Rudel

Les Philippines, Marc Mangin

Le Portugal, Christian Rudel

La Roumanie, Mihaï E. Serban

Silo Tomé et Principe, Dominique Gallet

Le Sénégal, Muriel Devey

Le Sultanat d'Oman, Bruno Le Cour Grandmaison

La Syrie, Jean Chaudouet

Le Togo, Yvonne François

La Tunisie, Ezzedine Mestiri

La Turquie, Jane Hervé

Le Vietnam, Joël Luguern